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09/05/2025 | FRANCE | N°24LY03012

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 09 mai 2025, 24LY03012


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. et Mme B... et D... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, chacun en ce qui les concerne, d'annuler les arrêtés des 13 et 14 décembre 2023 par lesquels la préfète de l'Ain a refusé de renouveler les autorisations provisoires de séjour qui leur avaient été délivrées sur le fondement de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a désigné

le pays de destination et leur a interdit de retourner sur le territoire français pour une dur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... et D... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, chacun en ce qui les concerne, d'annuler les arrêtés des 13 et 14 décembre 2023 par lesquels la préfète de l'Ain a refusé de renouveler les autorisations provisoires de séjour qui leur avaient été délivrées sur le fondement de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a désigné le pays de destination et leur a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de six mois.

Par un jugement n°s 2403376-2403377 du 23 juillet 2024, le tribunal administratif de Lyon a joint leurs demandes et les a rejetées.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 octobre 2024 et 19 février 2025, M. et Mme A..., représentés par Me Couderc, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces arrêtés ;

2) d'enjoindre à la préfète de l'Ain de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou une autorisation provisoire de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer leur situation, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de les munir, dans l'attente et dans le délai de huit jours, de récépissés les autorisant à travailler ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à leur conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- la préfète a méconnu les articles L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en refusant de renouveler leurs autorisations provisoires de séjour ;

- elle a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en les obligeant à quitter le territoire français et commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur leur situation personnelle ;

- elle a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant qu'ils seraient éloignés d'office vers le Kosovo ;

- elle a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant en leur interdisant de retourner sur le territoire français pendant une durée de six mois et commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur leur situation personnelle ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire, fixation du délai de départ volontaire et du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois sont illégales en conséquence des illégalités successives invoquées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2025, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

M. et Mme A... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 septembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Soubié, première conseillère,

- et les observations de Me Le Roy, pour M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A..., ressortissants kosovars, sont entrés en France le 29 novembre 2021, accompagnés de leur fils aîné né en 2017. Ils ont été munis d'autorisations provisoires de séjour en raison de l'état de santé de leur enfant, valables du 26 octobre 2022 au 25 avril 2023. Par les arrêtés des 13 et 14 décembre 2023, la préfète de l'Ain a refusé de renouveler leurs autorisations provisoires de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés d'office et leur a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de six mois. Par un jugement dont ils relèvent appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, (...) se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues à l'article L. 425-9. ". Aux termes de l'article L. 425-9 du même code : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...). ".

3. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), dans son avis du 8 novembre 2023, a estimé que l'état de santé du fils des requérants, qui présente une malformation de l'aorte, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.

4. Il ressort des observations de l'OFII en première instance que le médicament Enalapril, qui était prescrit au fils C... et Mme A... à la date de l'avis émis par le collège des médecins, est disponible dans une pharmacie située à Pristina et que le suivi cardiologique pédiatrique et la chirurgie cardiaque peuvent être effectués dans un centre clinique universitaire dans cette même ville. En se bornant à soutenir que les médicaments disponibles au Kosovo, notamment l'Enalapril, ne le seraient pas au dosage et sous la forme prescrits en France et à produire des ordonnances postérieures à l'avis du 8 novembre 2023 du collège de médecins de l'OFII dont il ressort que l'enfant est désormais soigné avec le médicament Atenolol en remplacement de l'Enalapril, M. et Mme A... n'établissent pas que leur fils ne peut pas bénéficier effectivement au Kosovo d'un traitement approprié, quand bien même il ne serait pas équivalent à celui qui lui est prescrit en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. En second lieu, compte tenu de ce qui vient d'être jugé, de la durée et des conditions du séjour en France C... et Mme A... et de ce qu'il n'est pas établi qu'il existerait un obstacle à ce que la cellule familiale et la scolarité de leur fils aîné se poursuivent au Kosovo, la préfète de l'Ain, en refusant de renouveler leurs autorisations provisoires de séjour, en les obligeant à quitter le territoire français et en leur interdisant le retour pendant une durée de six mois, n'a pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a pris ces décisions. Elle n'a pas davantage méconnu l'intérêt supérieur de leurs enfants, protégé par le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant. Elle n'a pas non plus méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en décidant qu'ils seraient éloignés d'office au Kosovo, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur leur situation personnelle.

6. Il résulte de ce qui précède que les décisions portant obligation de quitter le territoire, fixation du délai de départ volontaire et du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois ne sont pas illégales en conséquence des illégalités successives invoquées.

7. Il suit de là que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par suite, leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête C... et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et D... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Michel, présidente de chambre,

M. Moya, premier conseiller,

Mme Soubié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 mai 2025.

La rapporteure,

A.-S. SoubiéLa présidente,

C. Michel

La greffière,

F. Bossoutrot

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 24LY03012

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY03012
Date de la décision : 09/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MICHEL
Rapporteur ?: Mme Anne-Sylvie SOUBIE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-09;24ly03012 ?
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