Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 1er juillet 2024 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a désigné son pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 2405329 du 4 octobre 2024, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, a annulé la décision portant interdiction de retour et rejeté le surplus des conclusions.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 octobre 2024, M. A... B..., représenté par Me Huard, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2405329 du 4 octobre 2024 du tribunal administratif de Grenoble et les décisions préfectorales du 1er juillet 2024 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et interdiction de retour ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que le préfet a méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien car son traitement n'est pas disponible en Algérie, a commis une erreur manifeste d'appréciation car il justifie de motifs humanitaires pour la délivrance d'un certificat de résidence à titre exceptionnel et a porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Gros, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2025.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant algérien né en 1993, est entré en France en novembre 2017, muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Il y a ensuite séjourné sous couvert d'une autorisation provisoire de deux mois suivie d'un certificat de résidence d'un an délivré à compter du 27 novembre 2018, renouvelé une fois. Il n'a pas obtenu l'annulation du refus opposé par le préfet de l'Isère à sa deuxième demande de renouvellement de ce certificat de résidence. En mars 2023, il a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour en invoquant son état de santé, puis, en décembre 2023, à titre exceptionnel. Par des décisions du 1er juillet 2024, le préfet de l'Isère lui a opposé un refus, l'a obligé à quitter le territoire français, lui impartissant pour ce faire un délai de trente jours, a désigné son pays de renvoi et lui a interdit tout retour pendant une période d'un an. M. B... a contesté ces décisions devant le tribunal administratif de Grenoble qui, par un jugement du 4 octobre 2024, a seulement annulé l'interdiction de retour. M. B... doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre les autres décisions prises le 1er juillet 2024 par le préfet de l'Isère.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Pour refuser de délivrer le certificat de résidence sollicité par M. B..., le préfet de l'Isère s'est appuyé sur un avis, qu'il a versé au dossier de première instance, émis le 16 août 2023 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort des pièces du dossier que M. B... présente une pathologie oculaire, un glaucome de l'œil droit, faisant l'objet d'un suivi semestriel au centre hospitalier universitaire Grenoble-Alpes et nécessitant l'instillation quotidienne du médicament Ganfor, qui est un collyre hypotonisant. M. B... souffre également de crises épileptiques, faisant l'objet d'un suivi neurologique annuel au même centre hospitalier, qui sont traitées par, notamment, le médicament antiépileptique Trileptal. Il est vrai que les praticiens du centre hospitalier ont indiqué " CIF ", pour contre-indication formelle, en regard du médicament Ganfor, qui n'est ainsi pas substituable, et " MTE ", pour marge thérapeutique étroite, " non substituable " en regard du médicament Trileptal. Toutefois, les seules énonciations des 11 et 12 juillet 2024 de ces praticiens, selon lesquelles le collyre Ganfor ne serait pas disponible en Algérie et le Trileptal n'y serait pas commercialisé, information qui aurait été donnée par le laboratoire producteur, jointes à un ensemble d'attestations peu circonstanciées, datant d'octobre 2024 ou non datées, émanant de cinq pharmaciens de la commune algérienne de Oued-Rhiou, d'un neurochirurgien, de deux médecins ophtalmologues et d'un médecin généraliste de cette même commune, ne suffisent pas à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'OFII et à établir qu'un traitement adapté aux pathologies du requérant ne serait pas disponible en Algérie. Par suite, en refusant de délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade à M. B..., le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
5. En deuxième lieu, l'état de santé de M. B..., qui serait imputable à une intervention chirurgicale subie en décembre 2017, ne constitue pas, à lui seul, une circonstance humanitaire susceptible de lui valoir la délivrance d'un certificat de résidence à titre exceptionnel, alors qu'il peut être soigné en Algérie. Le refus de séjour n'est donc pas à cet égard entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. En dernier lieu, pour les motifs précédemment exposés, et en l'absence d'argumentation particulière, les décisions attaquées n'ont pas été prises en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui stipule que " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 2 juin 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président-assesseur,
M. Gros, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juin 2025.
Le rapporteur,
B. Gros
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY03076