Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté en date du 3 juillet 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'enjoindre audit préfet de procéder à l'effacement du signalement du fichier SIS et de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 000 euros à verser à son avocat en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle.
Par un jugement n° 2103622 du 6 juillet 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de M. B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 août 2021, M. A... B..., représenté par Me Mimouna, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 6 juillet 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 3 juillet 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 000 euros à verser à son avocat en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- rien ne permet de justifier l'édiction de cette interdiction de retour sur le territoire français dès lors qu'une décision identique avait déjà été prise le 22 octobre 2020 ;
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- la présomption d'innocence a été méconnue ;
- les stipulations des articles 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ont été méconnues dès lors qu'il sera empêché d'honorer une convocation devant le tribunal correctionnel le 19 avril 2021 ;
- il entend exciper, à l'appui des conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît les dispositions des articles L. 612-6 et L. 62-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit d'observations.
Par une décision du 23 mai 2022, le président du bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande présentée par M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 10 octobre 2002, de nationalité tunisienne, est entré en France le 2 août 2018 sous couvert d'un visa de court séjour. Interpellé le 20 octobre 2020, il a été placé en garde à vue pour acquisition et détention de produits stupéfiants et offre et cession de produits stupéfiants. Par un arrêté du 22 octobre 2020, le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... s'est, en dépit de cet arrêté, maintenu sur le territoire français et a été de nouveau interpellé le 2 juillet 2021. Par un arrêté en date du 3 juillet 2021, le préfet des Alpes-Maritimes a, de nouveau, après avoir placé l'intéressé en rétention, prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... demande à la Cour d'annuler le jugement n° 2103622 du 6 juillet 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté précité du 3 juillet 2021.
2. En premier lieu, s'il est constant qu'une première interdiction de retour sur le territoire français a été prononcée à l'égard de l'intéressé le 22 octobre 2020, rien ne faisait obstacle, en l'absence d'exécution par M. B... de la précédente obligation de quitter le territoire français, à ce que le préfet puisse prendre une nouvelle décision portant interdiction de retour sur le territoire français.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-6 dudit code : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".
4. Il ressort des termes mêmes des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'énumèrent ces dispositions, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
5. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
6. Pour fixer le principe et la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à l'encontre de M. B... le 3 juillet 2021, le préfet des Alpes-Maritimes a tenu compte de l'entrée et des conditions de séjour de l'intéressé sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de circonstances tenant à sa vie privée et familiale et du fait qu'il n'a pas exécuté spontanément la précédente obligation de quitter le territoire français en date du 22 octobre 2020. Il a ainsi suffisamment motivé la décision attaquée.
7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... n'est entré que récemment en France, en août 2018 à l'âge de 16 ans après avoir passé le reste de sa vie dans son pays d'origine. Par ailleurs, il est célibataire et sans enfant et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents. Il est, par ailleurs, ainsi que cela a été relevé par le jugement attaqué sans que la présomption d'innocence puisse être regardée comme ayant été méconnue, connu défavorablement des services de police, l'intéressé ayant reconnu, dans le cadre de son audition le 2 juillet 2021, faire le guetteur dans le cadre d'un trafic de stupéfiants. Ainsi, en dépit de la scolarité suivie en France dans un lycée professionnel, le préfet des Alpes-Maritimes n'a, en édictant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
8. En dernier lieu, aucun moyen n'étant, dans le cadre de la présente instance, soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français en date du 22 octobre 2020, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
9. Il résulte de tout de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. L'ensemble des conclusions de la requête, y compris et en tout état de cause celles aux fins d'injonction et celles présentées par l'avocat de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doit être rejeté par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Mimouna et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- Mme Vincent, présidente-assesseure,
- M. Mérenne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2022.
N° 21MA03538 2