La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/2024 | FRANCE | N°23MA00236

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 05 novembre 2024, 23MA00236


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... et Mme D... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016, et des pénalités correspondantes ou, à titre subsidiaire, de procéder à leur réduction et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 200 euros hors taxes au titre de l'articl

e L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 2008318 du 24 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et Mme D... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016, et des pénalités correspondantes ou, à titre subsidiaire, de procéder à leur réduction et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 200 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2008318 du 24 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a, par son article 1er, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée au titre des années 2014 et 2015 à concurrence du dégrèvement accordé en cours d'instance et, par son article 2, rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 24 janvier 2023 et 4 août 2023, M. et Mme C..., représentés par Me Foudil, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016, et des pénalités correspondantes ou, à titre subsidiaire, de procéder à leur réduction ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la comptabilité de la SARL Marco Paulo dont est gérante Mme C... a été rejetée à tort par l'absence de détail des produits vendus, d'inventaire des stocks, de précisions quant au mode de paiement et de pièces justificatives des ventes ;

- la société ne peut être soumise à l'impôt sur les sociétés dès lors qu'elle n'a pas adressé au service gestionnaire la lettre d'option à l'impôt sur les sociétés et que ses statuts ne le prévoient pas ;

- le coefficient de bénéfice brut retenu par l'administration est infondé ; il convient d'y substituer celui résultant de la moyenne des années 2017 et 2018 ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas fondées.

Par mémoires enregistrés les 4 juillet 2023 et 26 septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Marco Paulo, exerçant l'activité de cuisson de produits de boulangerie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2014, 2015 et 2016. À l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale, par une proposition de rectification du 30 novembre 2017, a considéré que la comptabilité de l'entreprise était non probante, procédé à une reconstitution de ses recettes et notifié, selon la procédure de rectification contradictoire, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2014 à 2016 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, outre des intérêts de retard et pénalités pour manquement délibéré. En parallèle, Mme C..., associée unique et gérante de cette société, s'est également vue notifier, selon la procédure contradictoire, par une proposition de rectification du 30 novembre 2017, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2014, 2015 et 2016, à raison des revenus réputés distribués par cette société entre ses mains, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Par un jugement du 24 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée qui ont été réclamées à M. et Mme C... au titre des années 2014 et 2015 à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la requête. M. et Mme C... doivent être regardés comme interjetant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de leur requête tendant , à titre principal, à la décharge et, à titre subsidiaire, à la réduction, des impositions auxquelles ils ont été assujettis.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés :

2. L'article 8 du code général des impôts prévoit que, à moins d'une option en faveur de l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, est assujetti à l'impôt sur le revenu, pour les bénéfices qu'il en retire, l'associé unique d'une société à responsabilité limitée lorsque cet associé est une personne physique. Aux termes du 3 de l'article 206 du même code : " Sont soumis à l'impôt sur les sociétés s'ils optent pour leur assujettissement à cet impôt dans les conditions prévues à l'article 239 : (...) e. Les sociétés à responsabilité limitée dont l'associé unique est une personne physique ; (...) ". Aux termes de l'article 239 du même code : " 1. Les sociétés et groupements mentionnés au 3 de l'article 206 peuvent opter, dans des conditions qui sont fixées par arrêté ministériel, pour le régime applicable aux sociétés de capitaux. (...) / L'option doit être notifiée avant la fin du troisième mois de l'exercice au titre duquel l'entreprise souhaite être soumise pour la première fois à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, en cas de transformation d'une société de capitaux en une des formes de société mentionnées au 3 de l'article 206 ou en cas de réunion de toutes les parts d'une société à responsabilité limitée entre les mains d'une personne physique, l'option peut être notifiée avant la fin du troisième mois qui suit cette transformation ou cette réunion pour prendre effet à la même date que celle-ci. Dans tous les cas, l'option exercée est irrévocable. " Aux termes de l'article 22 de l'annexe IV au code général des impôts, applicable aux exercices en litige : " La notification de l'option prévue à l'article 239 du code général des impôts est adressée au service des impôts du lieu du principal établissement de la société ou du groupement qui souhaite exercer cette option. / La notification indique la désignation de la société ou du groupement et l'adresse du siège social, les nom, prénoms et adresse de chacun des associés, membres ou participants, ainsi que la répartition du capital social ou des droits entre ces derniers. Elle est signée dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, par tous les associés, membres ou participants. Il en est délivré récépissé (...) ".

3. Aux termes de l'article R. 123-1 du code de commerce, dans sa version alors applicable : " I.- L'organisme unique mentionné à l'article L. 123-33 permet aux entreprises de réaliser l'ensemble des formalités et procédures nécessaires à l'accès et à l'exercice de leur activité. / Il reçoit à cet effet le dossier unique prévu à l'article L. 123-33. Ce dossier comporte : 1° Les déclarations relatives à leur création, aux modifications de leur situation ou à la cessation de leur activité, y compris les informations relatives au bénéficiaire effectif en application de l'article L. 561-46 du code monétaire et financier, que les entreprises sont tenues de remettre aux administrations, personnes ou organismes destinataires mentionnés à l'article L. 123-32 et dont la liste est établie par l'arrêté prévu à l'article R. 123-16 ; 2° Les demandes d'autorisation nécessaires à leur activité que les entreprises sont tenues de remettre aux autorités compétentes pour la délivrance de ces autorisations sauf si le déclarant souhaite déposer ces demandes directement auprès des autorités compétentes (...) ". Aux termes de son article R. 123-3 : " 1° Sous réserve des dispositions des 2° et 3°, les chambres de commerce et d'industrie créent et gèrent les centres de formalités des entreprises compétents pour : (...) b) Les sociétés commerciales. (...) ". Aux termes de son article R. 123-5 : " (...) Toutefois, lorsque la déclaration comporte une demande d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, d'inscription modificative ou de radiation, le déclarant a la faculté de déposer le dossier de déclaration directement auprès du greffe du tribunal compétent pour y procéder, soit sur support papier, soit par voie électronique. Il peut, lorsqu'il utilise le support papier, joindre également à sa déclaration le dossier des demandes d'autorisation. Le greffe, qui conserve la demande d'inscription, transmet sans délai le dossier au centre de formalités des entreprises compétent. (...) ". Aux termes de l'article R. 123-17 du même code : " La déclaration présentée ou transmise au centre de formalités des entreprises compétent vaut déclaration auprès de l'organisme destinataire, dès lors qu'elle est régulière et complète à l'égard de ce dernier. (...) ".

4. En application des dispositions citées aux points 2 et 3 ci-dessus, pour exercer valablement leur option pour l'imposition selon le régime propre aux sociétés de capitaux, les sociétés de personnes doivent soit notifier cette option au service des impôts du lieu de leur principal établissement, conformément aux prescriptions de l'article 239 du code général des impôts et de l'article 22 de l'annexe IV à ce code, soit cocher la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce dont elles dépendent à l'occasion de la déclaration de leur création ou de leur modification, manifestant ainsi sans ambiguïté l'exercice de leur option. Si les dispositions de ces articles n'ont ni pour objet, ni pour effet de dispenser de ces formalités les sociétés ou groupements mentionnés au 3 de l'article 206 du code général des impôts qui opteraient pour leur assujettissement à cet impôt alors qu'ils n'y étaient pas précédemment soumis, il en va autrement dans l'hypothèse où une société à responsabilité limitée décide, au moment de la réunion de toutes ses parts entre les mains d'un associé unique, de demeurer assujettie à l'impôt sur les sociétés. Une telle entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée est réputée avoir régulièrement exercé l'option offerte au 3 de l'article 206 si elle a opté dans ses statuts, dans le délai prévu à la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 239, pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, et si elle a, au titre du premier exercice clos après la réunion des parts dans une même main, déclaré ses résultats sous le régime de l'impôt sur les sociétés.

5. S'il est constant, ainsi que le font valoir les requérants, que l'administration fiscale n'a pas été en mesure de produire le justificatif de ce que ses services ont bien réceptionné une lettre datée du 15 juillet 2015 portant option à l'impôt sur les sociétés après la réunion, le 10 juin 2015, entre les mains de Mme C..., de toutes les parts de la SARL Marco Paulo, il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que les statuts de cette société et, notamment, son article 22 faisant référence aux dividendes, n'ont pas été modifiés et, d'autre part, qu'elle a, au titre du premier exercice clos après la réunion des parts dans une même main, déclaré ses résultats sous le régime de l'impôt sur les sociétés. Par suite, elle est réputée avoir régulièrement exercé l'option offerte au 3 de l'article 206. Il suit de là que le moyen tiré de ce que la société Marco Paulo ne pouvait être assujettie à l'impôt sur les sociétés doit être écarté.

S'agissant du rejet de la comptabilité :

6. Aux termes de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration (...) ".

7. Il résulte de l'instruction que la SARL Marco Paulo enregistrait globalement en comptabilité ses recettes mensuelles sans que soient conservés des documents accessoires de nature à justifier le détail journalier desdites recettes. Si celle-ci a produit des carnets à souches comportant des factures, celles-ci, qui ne concernaient au demeurant que ses clients institutionnels, étaient entachées de nombreuses incohérences ne permettant pas de vérifier la concordance des ventes avec les achats comptabilisés. Par ailleurs, il résulte également de l'instruction que la société Marco Paulo ne distinguait pas, alors que dans une telle entreprise les ventes réglées en espèces ont une part importante, les ventes réglées par chèques et carte bancaire de celles réglées en espèces, ce qui empêchait de vérifier la régularité et l'exactitude du compte de caisse, et n'a procédé à aucun inventaire de ses stocks. Ces graves irrégularités ont privé sa comptabilité de toute valeur probante. Par suite, l'administration a pu, à juste titre, regarder la comptabilité qui lui était présentée comme étant non probante et procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires de la société.

S'agissant de la reconstitution du chiffre d'affaires :

8. Si les requérants, qui ne contestent pas en cause d'appel la méthodologie retenue par l'administration fiscale, font valoir qu'un coefficient de bénéfice brut de 2,03 correspondant à la moyenne de ceux des années 2017 dans son intégralité et 2018 serait plus approprié que celui calculé par l'administration fiscale au regard des constatations faites au titre de la période de mai à septembre 2017, il est en tout état de cause constant que ces données sont postérieures à la vérification de comptabilité à laquelle il a été procédé et ne sont ainsi pas vérifiables. Par suite, les requérants n'apportent, à l'appui de leur requête, aucun élément leur permettant de contester utilement le coefficient retenu par le service vérificateur pour reconstituer les recettes de la SARL Marco Paulo.

En ce qui concerne les pénalités :

9. Les requérants reprennent en appel le moyen tiré de ce que la majoration de 40 % pour manquement délibéré ne pouvait être mise en œuvre. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen, qui ne comporte aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges au point 14 du jugement attaqué.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs conclusions aux fins de décharge et, à titre subsidiaire, de réduction, des impositions litigieuses.

Sur les frais d'instance :

11. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme C... doivent, dès lors, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme D... B... épouse C... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 novembre 2024.

N° 23MA00236 2

fa


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00236
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : FOUDIL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;23ma00236 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award