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05/11/2024 | FRANCE | N°23MA00334

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 05 novembre 2024, 23MA00334


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... et Mme E... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de les décharger de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2015 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 2101732 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. et

Mme C....



Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 9 févrie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et Mme E... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de les décharger de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2015 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2101732 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. et Mme C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 février 2023, M. et Mme C..., représentés par la SARL cabinet Briard, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de les décharger de la cotisation d'imposition supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est entaché d'irrégularités dès lors, d'une part, qu'il ne comporte pas les visas et l'analyse des conclusions et moyens des parties et, d'autre part, que certains mémoires échangés entre les parties n'ont pas été communiqués ;

- la vente du Mas de la Sainte à un prix de 800 000 euros ne constitue pas un acte anormal de gestion dès lors que la valeur vénale du bien a été surestimée par l'administration, que l'écart de prix n'est pas significatif et que le contexte d'urgence imposait de vendre rapidement le bien.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société en nom collectif (SNC) Les Quatre Ruisseaux détenue à hauteur de 50 % par M. D... et à hauteur de 25 % respectivement par M. A... C..., et Mme E... B... épouse C..., a cédé, le 27 octobre 2015, un bien immobilier dénommé " Mas de la Sainte " à la SAS Les Quatre Ruisseaux, dont M. D... est actionnaire et président, pour une valeur de 800 000 euros. À l'issue d'une vérification de comptabilité de la société, l'administration fiscale, constatant que la SNC avait réalisé une marge brute négative sur cette vente, a considéré que cette vente à perte caractérisait un acte anormal de gestion, et a procédé en conséquence à un rehaussement en base du résultat imposable de la SNC. Les associés des SNC étant personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société, M. et Mme C... se sont vus notifier en conséquence, par une proposition de rectification datée du 31 juillet 2017, une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015, à raison de leurs parts dans la SNC. M. et Mme C... interjettent appel du jugement en date du 30 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge de cette imposition.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. " Si les requérants font valoir que le jugement attaqué ne comporterait ni les visas ni l'analyse des conclusions et moyens des parties, le moyen manque en fait.

3. En second lieu, il résulte de l'instruction que le seul mémoire en défense produit par l'administration fiscale en première instance, enregistré le 17 février 2022 a été communiqué à l'avocat des requérants qui en a accusé réception par l'application Télérecours le 18 février 2022 à 12 h 12. Par suite, le moyen, au demeurant très flou, tiré de ce que certains mémoires n'auraient pas été communiqués doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.

5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le Mas de la Sainte, cédé le 27 octobre 2015, avait fait l'objet, le 24 mars 2015, à la demande de la SNC Les Quatre Ruisseaux, d'une expertise immobilière fondée sur la méthode par comparaison directe. Cette expertise, après prise en compte d'une localisation très attractive à proximité du centre-ville d'Aix-en-Provence, de la qualité des prestations qualifiées d'haut de gamme avec garage, piscine, terrasse dallée et terrain de 594 m² et de l'environnement naturel avec vue panoramique sur la montagne de la Sainte-Victoire, a conclu à une valeur vénale de 950 000 euros, valeur minimale qui a d'ailleurs été retenue par le juge de l'exécution dans son jugement du 6 juillet 2015 autorisant la vente amiable du bien. Si les requérants font valoir que la valeur vénale de ce bien serait en réalité moindre au regard du prix de vente moyen par mètre carré pratiqué pour la vente, le 31 juillet 2015, de deux autres biens immobiliers du domaine de l'Harmas, soit la Bastide de la Sainte et le Mas du Clocher, il est constant que la valeur vénale desdits biens n'était pas comparable dès lors que ceux-ci présentaient de nombreux désordres tenant à d'importantes remontées d'humidité, qui ont finalement été pris en charge par l'assureur dommage ouvrage à hauteur de 98 216, 86 euros pour la Bastide de la Sainte et de 57 668, 52 euros pour le Mas du Clocher tandis que les seuls désordres affectant le Mas de la Sainte concernaient la piscine et ont été indemnisés à hauteur de 500 euros. Par ailleurs, les requérants ne sont pas non plus fondés à se prévaloir des prix convenus pour la revente du bien, par la SAS Les Quatre Ruisseaux, en juillet 2017 et février 2018, soit à des périodes non contemporaines de celle de la cession litigieuse. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a, au regard de l'expertise immobilière, fixé la valeur vénale du Mas de la Sainte à la somme de 950 000 euros, ce qui représente un écart de 15,8 % par rapport au prix de cession.

6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le Mas de la Sainte a été acquis le 15 mars 2011 dans le cadre d'une activité de marchand de biens au prix, calculé au prorata de sa superficie, de 275 000 euros TTC et constitue ainsi un élément du stock de la société. A cette somme se sont ajoutés 650 136 euros TTC de travaux, soit un coût total de 925 136 euros, ce qui représente, pour la SNC Les Quatre Ruisseaux, une vente à perte de 125 136 euros au profit de la SAS Les Quatre Ruisseaux avec laquelle il est constant qu'elle a un lien d'affaire dès lors que M. D..., associé à hauteur de 50 % de la SNC, est également président et associé de la SAS, cet élément étant de nature à faire présumer l'existence d'un acte anormal de gestion.

7. En troisième lieu, les requérants font valoir, afin de renverser cette présomption, que la SNC Les Quatre Ruisseaux, qui était débitrice à l'égard de la société marseillaise de crédit de la somme en capital de 2 110 458, 88 euros était tenue, en application des dispositions de l'article R. 322-21 du code des procédures civiles d'exécution, de vendre le Mas de la Sainte dans un délai impératif de 4 mois à compter du jugement du 6 juillet 2015 autorisant la vente amiable des biens afin de solder sa dette, d'éviter une vente forcée et, par suite, le risque d'une cession à un prix moindre que celui convenu amiablement. Il résulte toutefois de l'instruction que, dès le 31 juillet 2015, date à laquelle la Bastide de la Sainte et le Mas du Clocher ont été cédés pour un prix global de 2 300 000 euros, la somme de 2 130 000 euros, soit le solde de la dette précitée augmenté des intérêts et des frais de poursuite, a été consignée sur le compte CARPA du notaire et versée à l'organisme bancaire qui s'est, au demeurant, ensuite désisté de la procédure de saisie immobilière qu'il avait initiée. Par suite, bien que cette somme n'ait, contrairement à ce qui était exigé par les dispositions de l'article R. 322-23 du code des procédures civiles d'exécution, pas été consignée à la caisse des dépôts et consignations, et que le juge de l'exécution ait en conséquence refusé, par un jugement du 15 février 2016, de constater la vente amiable, il n'est pas établi que la SNC aurait agi conformément à ses intérêts en vendant, le 27 octobre 2015 et alors qu'à cette date son créancier était totalement désintéressé, le Mas de la Sainte à perte. Au vu de ces éléments, la SNC Les Quatre Ruisseaux doit être regardée comme s'étant délibérément appauvrie à des fins étrangères à son intérêt en procédant, le 27 octobre 2015, à la vente du bien à la somme de 800 000 euros prix qui, d'une part, présentait un écart de 15,8 % avec la valeur vénale du bien de 950 000 euros et, d'autre part et surtout, caractérisait une importante marge brute négative de 125 136 euros.

8. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations d'impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.

Sur les frais d'instance :

9. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme C... doivent, dès lors, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme E... B... épouse C... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

N° 23MA00334 2

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00334
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : SARL CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;23ma00334 ?
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