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10/01/2025 | FRANCE | N°24MA01407

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 10 janvier 2025, 24MA01407


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2023 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2305445 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.





Procédure devant

la cour :



I. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2024 sous le n° 24MA01407, M. A..., représenté par Me Cohen, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2023 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2305445 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2024 sous le n° 24MA01407, M. A..., représenté par Me Cohen, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er février 2024 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2023 du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien, de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, de l'article L. 435-1 de ce même code, et ce, dans un délai de dix jours et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle ;

- le préfet a omis de saisir la commission du titre de séjour préalablement à l'édiction de son arrêté ;

- le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il ne séjournait pas en France depuis plus de 10 ans et l'a ainsi privé du bénéfice d'une carte de séjour à laquelle il a le droit sur le fondement de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire.

II. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2024 sous le n° 24MA01408, M. A..., représenté par Me Cohen, demande à la cour :

1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 17 octobre 2023 du préfet des Alpes-Maritimes ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'il y a urgence à suspendre l'exécution de l'arrêté contesté et qu'il existe un doute sérieux sur la légalité de celui-ci.

La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire.

Dans ces deux affaires, M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 26 avril 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti ;

- les observations de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant tunisien, sollicite, par la requête enregistrée sous le n° 24MA01407, l'annulation du jugement du 1er février 2024 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 17 octobre 2023 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de renvoi et, par celle enregistrée sous le n° 24MA01408, la suspension de l'exécution de ce même arrêté, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative. Ces deux requêtes présentant des questions communes à juger, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur la requête n° 24MA01407 tendant à l'annulation du jugement attaqué :

2. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté par adoption du motif retenu à juste titre par le tribunal au point 5 du jugement attaqué.

3. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 (...) ". Il ressort des pièces du dossier que M. A... expose lui-même être retourné en Tunisie le 9 septembre 2016 et être revenu en France le 9 mars 2017. En outre, les pièces qu'il verse aux débats pour démontrer qu'il résidait de manière habituelle en France en 2014 sont insuffisantes, les bulletins hospitaliers et certificats médicaux dont il se prévaut ne démontrant sa présence qu'aux mois d'octobre et novembre de cette année, tandis que le certificat médical qu'il produit pour la première fois en appel se borne à attester, de manière imprécise, qu'il s'est présenté au cabinet d'un médecin " durant les années 2014 et 2015 ". Il suit de là que, comme l'a jugé le tribunal, M. A... ne justifie pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté et qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le préfet a entaché son arrêté d'irrégularité en ne procédant pas à la saisine de la commission du titre de séjour préalablement à sa décision.

4. Au regard notamment des termes de l'arrêté contesté, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen complet et sérieux de l'ensemble de la situation personnelle de M. A..., ce dernier n'ayant en particulier pas informé le préfet de la naissance de son second enfant, le 13 août 2023 et ne pouvant donc pas utilement lui reprocher de ne pas avoir pris en compte cette circonstance pour soutenir que l'examen de sa situation serait incomplet.

5. Aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ". Aux termes de l'article L.435-1 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".

6. Si M. A... est père de deux enfants nés en France le 13 janvier 2022 et le 13 août 2023, il ne vit ni avec eux ni avec leur mère, ressortissante marocaine, avec laquelle il n'est pas non plus marié. En outre, si cette dernière est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 7 décembre 2024, le requérant ne démontre pas être dans l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale dans son pays d'origine ou dans celui de la mère de ses enfants et qu'il existerait, par conséquent, un risque de séparation des parents. Par suite, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet a pu refuser de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Compte tenu de ce qui a été dit au point précèdent et eu égard au fait que M. A... s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 16 octobre 2020 et qu'il ne justifie en outre d'aucune insertion socioprofessionnelle particulière, l'arrêté contesté n'a pas, comme l'a jugé à juste titre le tribunal, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

9. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il a présentées par la requête n° 24MA01407 aux fins d'injonction et au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

Sur la requête n° 24MA01408 tendant à ce que l'exécution de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 17 octobre 2023 soit suspendue :

10. Par le présent arrêt, il est statué au fond sur la légalité de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 17 octobre 2023. Les conclusions aux fins de suspension de cet arrêté sont devenues, par conséquent, sans objet. Dès lors, il n'y a, pas lieu de statuer sur ces conclusions à fin de suspension et il n'y a, par suite, pas non plus lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. A... demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... aux fins de suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 17 octobre 2023.

Article 2 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A..., à Me Cohen et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente-assesseure,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 janvier 2025.

2

N°' 24MA01407, 24MA01408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01407
Date de la décision : 10/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : COHEN;COHEN;COHEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-10;24ma01407 ?
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