Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association biterroise contre les pollutions, pour la santé et l'environnement (ABCPSE) et Mme B... C... ont principalement demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 décembre 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a autorisé la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée à construire et exploiter une unité d'incinération de boues et graisses de la station d'épuration urbaine, ensemble l'arrêté portant prescriptions techniques complémentaire du 16 mars 2018.
Par une ordonnance n° 425073 du 24 décembre 2018, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement cette demande au tribunal administratif de Marseille.
Par un jugement n° 1810845 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a sursis à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2015 jusqu'à ce que le préfet de l'Hérault ait transmis un arrêté de régularisation et a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté du 16 mars 2018.
Par un jugement n° 1810845 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 décembre 2023 et 14 septembre 2024, ainsi qu'un mémoire enregistré le 18 octobre 2024 mais non communiqué, l'ABCPSE et Mme C..., représentées par Me Dhérot, demandent à la Cour, après avoir saisi la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle :
1°) d'annuler les jugements des 23 juin 2022 et 5 octobre 2023 ;
2°) d'annuler les arrêtés des 30 décembre 2015 et 16 mars 2018, ainsi que l'arrêté du préfet de l'Hérault du 19 avril 2023, portant régularisation des précédents ;
3°) d'enjoindre au ministre chargé de la transition écologique de prendre toutes mesures utiles de publicité ainsi que toutes mesures pour faire cesser l'exploitation de l'incinérateur, dans les délais respectifs de quinze jours et un mois à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) d'enjoindre au même ministre, à titre subsidiaire, de faire compléter les études d'impact et de danger, et à titre infiniment subsidiaire, de faire compléter l'arrêté du 30 décembre 2015 des prescriptions nécessaires ;
5°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
Sur la recevabilité des écritures adverses :
- la qualité à agir du représentant de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée dans l'instance n'est pas justifiée ;
Sur la régularité des jugements de première instance :
- ils ne sont pas signés de telle sorte que les dispositions des articles R. 741-7 et R. 741-8 du code de justice administrative ont été méconnues ;
- celui du 23 juin 2022 manque d'intelligibilité et ne fixe aucun délai de régularisation au sens strict, confondant délai de régularisation et durée du sursis à statuer ;
- il omet de répondre aux moyens tirés de l'absence de valorisation énergétique de l'installation au sens de la loi, de l'existence d'un risque pour le fonctionnement de l'installation en cas de submersion de la plaine, de l'absence de prise en compte des particules fines PM2,5 et PM10 dans l'étude d'impact et l'arrêté ainsi que de l'illégalité de l'arrêté ministériel du 20 septembre 2002 en ce qui concerne les particules fines PM10 ;
- il est entaché d'une contradiction de motifs au sujet de la date de la décision du conseil communautaire de recourir à l'incinération des boues ;
- il est intervenu au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'elles n'ont pas eu accès à l'intégralité des pièces produites par la communauté d'agglomération ;
- les premiers juges ne pouvaient rejeter les conclusions dirigées contre l'arrêté du 16 mars 2018 alors qu'il prononçait un sursis à statuer sur la légalité de l'arrêté du 30 décembre 2015 qui en est le support nécessaire ;
- le jugement du 5 octobre 2023 est également irrégulier dès lors qu'il a été rendu en méconnaissance du jugement du 23 juin 2022 quant aux délais fixés par ce dernier ; toute autre interprétation violerait le principe de confiance légitime ;
- il fait référence à la " communauté d'agglomération Béziers métropole " qui n'existe pas et, en ses points 6 à 9, aux moyens de la requérante, et non des requérantes ;
- il ne vise pas le code de la sécurité intérieure, alors que la méconnaissance de ses articles L. 732-1 et L. 732-2-1 était invoquée ;
- il est entaché d'une contradiction de motifs quant à l'inopérance des moyens dirigés contre l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale ;
- la réponse apportée au moyen tiré de l'exception d'illégalité des articles R. 122-7 et R. 122-24 du code de l'environnement est insuffisamment motivée et inintelligible ;
- il a omis de répondre au moyen tiré de la violation de l'obligation de respecter la hiérarchie des modes de traitement des déchets et de la méconnaissance du nouveau plan régional de prévention et de gestion des déchets qui ne prévoit pas de possibilité de déroger à cette obligation ;
- il a à tort écarté comme irrecevable le moyen tiré de l'insuffisance de l'autorisation quant au fonctionnement de l'incinérateur en cas d'inondation, alors qu'elles faisaient état d'éléments nouveaux ;
Sur le bien-fondé des jugements de première instance :
En ce qui concerne le jugement du 23 juin 2022 :
- la demande d'autorisation a été déposée par le président avant même que le conseil communautaire en ait délibéré, si bien que le préfet était tenu, en application de l'article R. 181-34 du code de l'environnement, de la rejeter.
- les obligations issues des directives 2010/75 et 2011/92/UE en matière de participation du public au processus décisionnel, insuffisamment transposées en droit français, ont été méconnues ; il en est de même des stipulations de l'article 6 de la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 qui peuvent être utilement invoquées en application du point 20 de l'annexe 1 à ladite convention et des dispositions de la Charte de l'environnement ; le public aurait dû être consulté au stade du choix de recourir à l'incinération, en amont de toute enquête publique ; cette décision remonte à l'année 2011 ;
- les dispositions de l'article R. 123-11 du code de l'environnement n'ont pas été respectées, dès lors que la diffusion de l'avis d'ouverture de l'enquête publique dans " la Gazette de Montpellier " était inadéquate ;
- la composition du dossier de demande d'autorisation était incomplète s'agissant de la capacité à gérer et exploiter les installations par la communauté d'agglomération et son délégataire ; or, des manquements sont aujourd'hui constatés dans la gestion de l'ouvrage ;
- l'étude d'impact ne prend pas en compte les impacts cumulés de la station d'épuration et de l'incinérateur de boues malgré leur unité fonctionnelle, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 122-5 du code de l'environnement et des obligations de la directive 2011/92/UE ; les dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement sont également méconnues à cet égard ;
- l'impact de l'installation durant les phases de construction et de démontage n'est pas décrit ; il en est de même de la prise en compte du trafic induit par l'exploitation ;
- le fonctionnement de l'installation en cas d'inondation n'est pas davantage explicité ;
- les raisons du choix du projet, qui intervient en méconnaissance de la hiérarchie des modes de traitement des déchets, sont insuffisamment explicitées, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 122-5 du code de l'environnement ; aucune des études prétendument effectuées n'est produite, ni étude du bilan carbone ou de faisabilité des solutions par compostage et épandage par exemple ;
- les boues à traiter ne sont pas caractérisées, en violation des dispositions de l'article L. 541-7-1 du code de l'environnement ;
- toutes les pollutions de l'air induites par l'incinérateur ne sont pas prises en compte, la liste n'étant pas complète ; l'impact cumulé avec les pollutions existantes n'est pas étudié ;
- le risque de retrait et gonflement d'argile est insuffisamment étudié ; de même que le développement futur de l'urbanisation dans la zone et l'impact paysager de l'installation ;
- étaient manquants, dans le dossier soumis à enquête, l'avis de l'INAO et celui de l'autorité environnementale ;
- l'avis émis le 23 avril 2015 par l'autorité environnementale a été rendu dans des conditions méconnaissant les obligations issues de la directive 2011/92/UE, l'article R. 122-6 du code de l'environnement étant lui-même illégal ;
- il a été signé par une personne incompétente ;
- la décision d'autorisation du 30 décembre 2015 a fait l'objet d'une publicité irrégulière au regard des obligations issues de la directive 2011/92/UE ;
- la station de traitement et les installations d'incinération auraient dû faire l'objet d'une seule autorisation, en application des dispositions des articles L. 512-3 et R. 512-21 à R. 512-32 du code de l'environnement ;
- les objectifs fixés par les lois n° 2009-967 et 2010-788 et les articles L. 541-1 et L. 541-2-1 du code de l'environnement relatifs à la hiérarchie des modes de traitement des déchets s'imposent à l'autorisation litigieuse et ne sont pas respectés ; il en est a fortiori ainsi de ceux issus de la directive 2008/98/CE, dont les obligations sont mal transposées en droit français, dès lors que la valorisation par incinération des déchets liquides n'est pas prévue ; le plan départemental de prévention et de gestion des déchets non dangereux de l'Hérault du 13 octobre 2014 était illégal à cet égard ; l'autorisation litigieuse est sur ce point incompatible avec le plan régional de prévention et de gestion des déchets d'Occitanie du 14 novembre 2019 qui précise que l'incinération n'est pas un mode privilégié de gestion ;
- la solution par épandage était envisageable, ainsi que l'illustre l'autorisation délivrée par arrêté du 7 mai 2024 pour l'utilisation des eaux traitées pour l'arrosage ;
- les pollutions induites ne permettent pas de respecter les objectifs de qualité de l'air comme l'illustrent les constats effectués sur place ; c'est particulièrement le cas s'agissant du dioxyde d'azote et des particules fines PM2,5 et PM10, au regard des objectifs fixés par la directive 2008/50/CE et par les articles L. 221-1 et R. 221-1 du code de l'environnement ; le droit de vivre dans un environnement équilibré garanti par la Constitution n'est pas respecté ; l'arrêté ministériel du 20 septembre 2002 est illégal au regard de ces obligations et de la directive 2010/75/UE ; il ne saurait être soutenu qu'aucune dioxine n'est produite ;
- une telle installation ne pouvait être autorisée sur un site soumis à un aléa fort d'inondation ; les conditions d'exploitation de l'incinérateur en cas d'inondation devaient être précisées, en application des dispositions de l'article L. 732-1 et L. 732-2-1 du code de la sécurité intérieure ;
- Outre les manquements relevés s'agissant des conditions de valorisation énergétique, de la protection de la qualité de l'air et des conditions de fonctionnement en cas d'inondation, les prescriptions des arrêtés sont également insuffisantes sur les procédés d'épuration des effluents gazeux, la détermination des points d'échantillonnage et de mesures, la caractérisation des eaux industrielles, les risques liés au retrait et gonflement d'argiles, la distinction entre les boues et les graisses, la caractérisation des déchets, la protection des sites et paysage du canal du Midi qui ne fait l'objet d'aucune indication au dossier, les rejets aqueux et l'alerte des populations en cas d'accident qui doit être prévue en application de la directive 2003/4/CE ;
En ce qui concerne le jugement du 5 octobre 2023 :
- des agents du service régional chargé de l'environnement, qui dépendent de l'autorité décisionnaire, ont concouru à l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale rendu le 29 septembre 2022 ; l'absence de moyens propres à la mission, le lien hiérarchique existant entre ces agents et le préfet de l'Hérault, la possibilité pour l'autorité décisionnaire d'intervenir dans le traitement d'un dossier au regard de la convention prévue et les fonctions passées de Mme A..., membre de la mission, au sein de ce service, ayant eu à ce titre à connaître du dossier, caractérisent un manquement au principe d'impartialité ; les principes issus de la directive 2011/92/UE ont à cet égard été méconnus ; l'article R. 122-4 du code de l'environnement est illégal dès lors qu'il prévoit l'appui technique de ces agents, de même que le modèle de convention annexé à l'arrêté du 11 août 2020 ; une question préjudicielle devrait à cet égard être posée à la Cour de justice de l'Union européenne ;
- les obligations précédemment exposées en matière de participation du public ont été méconnues dès lors que le public n'a pas été consulté en amont de l'avis émis par la mission régionale d'autorité environnementale le 29 septembre 2022 ; le public a enfin été empêché de produire des observations sur cet avis et de prendre connaissance des observations des autorités consultées, en méconnaissance en outre du dispositif du jugement du 23 juin 2022 ;
- l'avis ne tient pas compte de la hiérarchie obligatoire du mode de traitement des déchets, du plan régional de prévention et de gestion des déchets d'Occitanie, du facteur d'aggravation de la pollution de l'air, et du risque d'inondation ;
- l'autorisation est incompatible avec le plan régional de prévention et de gestion des déchets d'Occitanie du 14 novembre 2019 ; elle prend insuffisamment en compte le risque d'inondation ; les prescriptions sont insuffisantes s'agissant des rejets aqueux et de la protection des captages ;
- l'arrêté du 19 avril 2023 est tardif eu égard aux délais fixés par le jugement du 23 juin 2022 ; l'irrégularité du jugement du 23 juin 2022 entache en tout état de cause la procédure de régularisation d'irrégularité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Par des mémoires, enregistrés les 11 juillet et 27 septembre 2024, la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée, représentée par Me Peru, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions dirigées contre le jugement avant dire-droit du 23 juin 2022, en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sont dépourvues d'objet.
Un mémoire a été enregistré pour l'ABCPSE et Mme C..., le 16 décembre 2024, en réponse à ce moyen et communiqué le même jour.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte de l'environnement ;
- la convention signée à Aarhus le 25 juin 1998 sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement ;
- la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;
- la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 ;
- la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008,
- la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 ;
- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'environnement ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement ;
- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ;
- l'arrêté du 20 septembre 2002, relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets non dangereux et installations incinérant des déchets d'activités de soins à risques infectieux ;
- l'arrêté du 11 août 2020 relatif au modèle de convention entre la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable (MRAe) et le service régional chargé de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poullain,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de M. D..., représentant l'ABCPSE, et de Me Pasquio, représentant la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée.
Une note en délibéré, présentée pour l'ABCPSE et Mme C..., a été enregistrée le 23 décembre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 30 décembre 2015, le préfet de l'Hérault a autorisé la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée à exploiter, à proximité de sa station intercommunale d'épuration des effluents urbains implantée plaine Saint-Pierre à Béziers, une unité d'incinération de boues et graisses d'épuration. Par un arrêté du 16 mars 2018, il a fixé des prescriptions complémentaires liées à certaines modifications apportées aux installations et conditions d'exploitation. Par un jugement du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille, saisi par l'association biterroise contre les pollutions, pour la santé et l'environnement (ABCPSE) et Mme C..., a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de ce dernier arrêté mais a sursis à statuer sur celles tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2015 jusqu'à ce que le préfet de l'Hérault ait procédé à sa régularisation, après la consultation de la mission régionale d'autorité environnementale. Par un second jugement du 5 octobre 2023, le tribunal, constatant qu'une régularisation était intervenue par arrêté préfectoral du 19 avril 2023, a rejeté ces dernières conclusions. L'ABCPSE et Mme C... relèvent appel de ces deux jugements du tribunal administratif de Marseille.
Sur la régularité des écritures présentées pour la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée :
2. Par délibération du 15 novembre 2021, le conseil de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée a dûment donné délégation à son président, sur le fondement de l'article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales, afin notamment de défendre la communauté d'agglomération dans les actions intentées contre elle. L'établissement a produit dans l'instance une décision relevant la nécessité de défendre ses intérêts devant la Cour et confiant sa défense à son avocat, dûment signée par le premier vice-président, ayant lui-même reçu délégation du président à effet de signer de telles décisions par arrêté du 23 novembre 2021, en application de l'article L. 5211-9 du même code. Il n'y a dès lors pas lieu d'écarter les écritures présentées pour la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée.
Sur la régularité des jugements attaqués :
3. Il ressort des pièces du dossier que les jugements attaqués ont été dûment signés conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation de ces jugements qui a été notifiée aux requérantes ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur leur régularité.
4. Si les requérantes évoquent également plusieurs " irrégularités de fond ", " dénaturation de pièces " ou " erreurs d'appréciation ", qui entacheraient les jugements en cause, les moyens ainsi évoqués sont susceptibles d'affecter le bien-fondé de ces décisions, mais non leur régularité.
En ce qui concerne le jugement du 23 juin 2022 :
5. En premier lieu, lorsque les premiers juges, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, ont cependant retenu l'existence d'un ou de plusieurs vices entachant la légalité d'une autorisation environnementale dont l'annulation leur était demandée et ont alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour inviter l'administration à régulariser ce ou ces vices, l'auteur du recours formé contre le jugement ou l'arrêt avant dire droit peut contester ce jugement ou cet arrêt en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation environnementale initiale et également en tant qu'il a fait application des dispositions de l'article L. 181-18. Toutefois, à compter de la délivrance de l'autorisation modificative en vue de régulariser le ou les vices relevés, les conclusions dirigées contre le jugement ou l'arrêt avant dire droit, en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sont privées d'objet.
6. Dès lors qu'un arrêté a été pris le 19 avril 2023 pour la régularisation des vices relevés dans le jugement avant dire droit attaqué, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les conclusions de la requête dirigées contre le jugement avant dire droit en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement sont irrecevables. Il s'en suit que les moyens des requérantes critiquant le manque d'intelligibilité du jugement quant à la mesure et au délai de régularisation doivent être écartés.
7. En deuxième lieu, si les requérantes ont écrit au greffe du tribunal, par courrier du 20 février 2022, afin de se plaindre de ce qu'elles n'avaient pas accès aux pièces numérotées 21 et 32 à 41 produites par la communauté d'agglomération à l'appui de son mémoire du 20 décembre 2017, il est constant qu'elles étaient, lors de la communication de ce mémoire et des pièces attachées le 22 décembre 2017, représentées dans l'instance par un conseil, auprès duquel il leur incombait de récupérer l'entier dossier de la procédure lorsqu'elles ont décidé de s'en défaire, à la fin de l'année 2020. Au demeurant, ce mémoire, et ses pièces jointes, ont été réadressés aux requérantes par le greffe du tribunal, le 22 février 2021. Dans ces conditions, il n'est pas établi que les intéressées, qui ne se sont plaintes d'une difficulté à cet égard que plus d'un an plus tard, auraient été, du fait de la juridiction, privées de l'accès auxdites pièces de telle sorte que le caractère contradictoire de la procédure aurait été méconnu.
8. En troisième lieu, le tribunal n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties. D'une part, au point 54 de leur jugement, les premiers juges ont longuement décrit le contenu de l'étude d'impact permettant de conclure à l'absence de risque d'inondation de la parcelle d'assiette du projet, même en cas de crue exceptionnelle de l'Orb ou de rupture de digue lors d'une crue centennale. Ils ont ainsi écarté, audit point ainsi qu'au point 85, les moyens tirés de l'insuffisance de l'étude d'impact et des prescriptions de l'autorisation quant aux risques liés à l'inondation, en motivant suffisamment leur décision à cet égard, alors même que les conséquences liées aux difficultés d'accès au site en cas d'une montée des eaux n'ont pas été évoquées. D'autre part, au point 58, le tribunal a relevé que l'étude d'impact n'avait constaté, pour les poussières, assimilées à des PM2,5, aucun dépassement des objectifs de qualité de l'air et conclu, au point 60 et au terme de son analyse plus globale, que l'étude d'impact apparaissait suffisante quant à la prise en compte de la pollution de l'air générée par l'incinérateur. Les premiers juges ont examiné, aux points 75 à 78, le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions de l'autorisation permettant la limitation, notamment, des rejets atmosphériques induits par l'exploitation de l'installation, en écartant précisément, au point 77, la critique des requérantes sur l'absence de prise en compte des particules fines PM10. Ils ont relevé que les poussières étaient en l'espèce assimilables à des PM2,5, dont les requérantes indiquaient elles-mêmes qu'elles étaient les plus dangereuses. Les requérantes n'avaient, s'agissant de la réglementation des émissions de PM10, pas évoqué l'illégalité de l'arrêté ministériel du 20 septembre 2002. Enfin, au point 71, le jugement a analysé les modifications apportées à l'installation, permises par l'arrêté complémentaire du 16 mars 2018, et conclu que celles-ci permettaient de valoriser la chaleur récupérée sous forme d'électricité par la mise en place d'une turbine, de telle sorte que l'autorisation en litige n'était pas incompatible avec l'objectif de hiérarchie des modes de traitement des déchets énoncé au point 3 du II de l'article L. 541-1 du code de l'environnement. Il ne saurait dès lors être soutenu que le tribunal a omis des répondre à ces moyens.
9. En quatrième lieu, si les requérantes soutiennent que le jugement serait entaché d'une contradiction de motifs quant à la date à laquelle le choix d'implanter une unité d'incinération de boues et graisses d'épuration a été fait par la communauté d'agglomération, une telle contradiction n'est en tout état de cause pas de nature à affecter la régularité du jugement. Il en est de même de la circonstance que tribunal aurait à tort rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté du 16 mars 2018 par ce jugement avant dire droit alors que, dans le même temps, il sursoyait à statuer sur la légalité de l'arrêté du 30 décembre 2015 qui en était le support nécessaire.
En ce qui concerne le jugement du 5 octobre 2023 :
10. En premier lieu, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, si, à l'issue du délai qu'il a fixé dans sa décision avant dire droit pour que lui soient adressées la ou les mesures de régularisation, le juge peut à tout moment statuer sur la demande d'annulation de cette autorisation, il ne saurait se fonder sur la circonstance que ces mesures lui ont été adressées alors que ce délai était échu pour ne pas en tenir compte dans son appréciation de la légalité de l'autorisation attaquée. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, la prise en compte, dans ces circonstances, de la production d'une mesure de régularisation ne méconnait nullement, en tout état de cause, le principe de confiance légitime.
11. Il résulte de qui précède que le moyen, tiré de ce que le jugement du 5 octobre 2023 n'est pas intervenu dès l'expiration du délai de neuf mois imparti par le jugement du 23 juin 2022 pour la production de l'arrêté de régularisation, mais après que l'instruction ait, sans jugement, été prolongée afin de permettre au préfet de produire l'acte de régularisation attendu, doit être écarté comme inopérant.
12. En deuxième lieu, si le jugement attaqué ne mentionne pas, dans ses visas de texte, le code de la sécurité intérieure, il ne saurait en résulter une irrégularité alors qu'il répond, en son point 14, en se référant aux dispositions des articles L. 732-1 et L. 732-2-1 du code de la sécurité intérieure, au moyen tiré de ce que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale aurait méconnu ces dispositions.
13. En troisième lieu, les références, aux points 6 à 9 du jugement, aux moyens de " l'association requérante " plutôt qu'à ceux des requérantes, et, dans l'ensemble de la décision, à la " communauté d'agglomération Béziers métropole " en lieu et place de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée ne constituent que des erreurs de plume sans incidence.
14. En quatrième lieu, il ressort sans ambigüité de la rédaction retenue par les premiers juges aux points 6 à 8 de leur décision qu'ils ont écarté le moyen tiré de l'illégalité des dispositions des articles R. 122-7 et R. 122-24 du code de l'environnement au regard du principe d'impartialité. Ils ont à cet égard adopté des considérations suffisamment développées, tenant notamment au rattachement fonctionnel des agents du service régional de l'environnement appelés à travailler en soutien de la mission régionale d'autorité environnementale au président de ladite mission.
15. En cinquième lieu, si, dans leur mémoire du 12 juillet 2023, les requérantes invoquaient le moyen tiré de la méconnaissance, par l'autorisation litigieuse, de l'obligation de respecter la hiérarchie des modes de traitement des déchets, il est constant que ce moyen avait déjà été écarté au point 71 du jugement avant dire droit, ainsi que rappelé au point 15 du jugement du 5 octobre 2023, et que les requérantes n'étaient pas recevables à soulever de nouveau ce moyen, ainsi que rappelé au point 3 de ce même jugement. Par ailleurs, le tribunal s'est dûment prononcé, en son point 15, sur le moyen tiré de la méconnaissance du plan régional de prévention et de gestion des déchets, en estimant que celui-ci permettait le recours à l'incinération.
16. Enfin, en sixième et dernier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment s'agissant du jugement avant dire droit, la circonstance que la décision serait entachée d'une contradiction de motifs quant à l'opérance des moyens critiquant l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale n'est en tout état de cause pas de nature à en affecter la régularité. Il en est de même de celle que le tribunal aurait à tort écarté comme irrecevable le moyen tiré de l'insuffisance de l'arrêté quant aux conditions d'exploitation de l'incinérateur en cas d'inondation.
17. Il résulte de tout ce qui précède, des points 3 à 16, que les moyens tirés de l'irrégularité des jugements attaqués doivent être écartés.
Sur le bien-fondé des jugements attaqués :
En ce qui concerne le jugement du 23 juin 2022 :
18. Il appartient au juge des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation, et d'appliquer les règles de fond applicables au projet en cause en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme, qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.
S'agissant de la procédure :
Quant à la participation du public en début de procédure :
19. Aux termes de l'article 6 de la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement : " 1. Chaque Partie : / a) Applique les dispositions du présent article lorsqu'il s'agit de décider d'autoriser ou non des activités proposées du type de celles énumérées à l'annexe I / (...) ; 2. Lorsqu'un processus décisionnel touchant l'environnement est engagé, le public concerné est informé comme il convient, de manière efficace et en temps voulu, par un avis au public ou individuellement, selon le cas, au début du processus (...) / 4. Chaque Partie prend des dispositions pour que la participation du public commence au début de la procédure, c'est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles et que le public peut exercer une réelle influence ". Ces stipulations doivent être regardées comme produisant des effets directs dans l'ordre juridique interne. Elles sont applicables aux autorisations concernant les activités visées à l'annexe I de la convention, dont le point 20 renvoie à " Toute activité non visée (...) pour laquelle la participation du public est prévue dans le cadre d'une procédure d'évaluation de l'impact sur l'environnement conformément à la législation nationale ", telle celle en litige.
20. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée a fait effectuer des études au cours des années 2009 et 2010 afin de définir la solution de gestion des boues d'épuration à mettre en œuvre, avant que son organe délibérant ne s'oriente, le 29 janvier 2011, en faveur de l'implantation d'un incinérateur. La procédure d'appel d'offres engagée durant la même année pour la passation du marché de travaux d'extension des capacités de traitement des eaux usées de la station comportait ainsi une tranche conditionnelle relative à la construction d'un incinérateur. Toutefois, ainsi que le relève l'établissement, il attendait, avant d'arrêter ses choix en la matière, l'adoption du plan départemental de prévention et de gestion des déchets non dangereux qui, prévoyant la création de quatre unités d'incinération dans le département, dont une à Béziers, est intervenue au terme d'une importante concertation, comportant la réunion de commissions consultatives dès le mois de janvier 2012 et une enquête publique conduite entre les mois de mars et d'avril 2014. Parallèlement, le projet d'extension de la capacité de traitement de la station d'épuration en elle-même, qui a donné lieu à une enquête publique du 3 juin au 5 juillet 2013, a également été l'occasion pour le public intéressé de formuler des observations sur l'incinérateur envisagé, quand bien même il ne s'agissait pas de l'objet de l'enquête. Ce n'est que lors de sa séance du 20 novembre 2014 que le conseil communautaire a approuvé le dossier d'étude d'impact et le dépôt de la demande d'autorisation. Enfin, une consultation a été organisée dans le cadre de l'enquête publique conduite sur le projet en litige, entre le 18 mai et le 19 juin 2015, à un stade où, fût-ce au prix de la réalisation d'une nouvelle enquête ultérieure et de l'abandon du permis de construire obtenu le 12 février 2015, le principe même du recours à l'incinération était encore réversible. Dans ces circonstances, le moyen tiré de ce que l'association du public aurait été trop tardive au regard des stipulations de la convention d'Aahrus doit être écarté.
21. Si les requérantes soutiennent également que les objectifs issus des directives du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles et du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, transposés aux articles L. 122-1 et L. 123-1 et suivants du code de l'environnement, l'auraient été de façon insuffisantes de telle sorte qu'ils seraient directement applicables au litige, elles n'assortissent ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.
22. Enfin, aux termes de l'article 7 de la Charte de l'environnement : " Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ". Le respect du principe de participation du public ainsi défini s'apprécie au regard des dispositions législatives prises afin de préciser, pour ce type de décisions, les conditions et les limites d'applicabilité de ce principe. Dès lors, les requérantes, qui n'invoquent la méconnaissance d'aucune disposition législative, ne sauraient utilement soutenir que l'autorisation en litige méconnaît les dispositions de l'article 7 de la Charte de l'environnement.
Quant à la demande d'autorisation :
23. Si les requérantes relèvent que la demande d'autorisation d'exploiter l'unité d'incinération a été, au vu des mentions portées sur l'arrêté du 30 décembre 2015, présentée au préfet par le président de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée le 21 octobre 2014, à une date à laquelle il ne disposait pas d'habilitation du conseil communautaire pour ce faire, il est constant, que, par la délibération du 20 novembre 2014 à laquelle il a été fait précédemment référence, ledit conseil a approuvé le dossier d'étude d'impact, décidé de demander une autorisation préfectorale, et autorisé le président à signer tout document nécessaire à cette fin. L'organe délibérant a ainsi régularisé la demande d'autorisation, au demeurant complétée le 2 février 2015 seulement.
Quant à la publicité de l'avis d'enquête publique :
24. Le moyen tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article R. 123-11 du code de l'environnement doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 25 et 26 de leur décision du 23 juin 2022.
Quant à la justification des capacités techniques et financières :
25. L'article R. 512-3 du code de l'environnement alors applicable prévoyait, en son point 5, que le dossier de demande d'autorisation devait mentionner les capacités techniques et financières de l'exploitant. Le pétitionnaire était, en application de ces dispositions, tenu de fournir à l'appui de sa demande, en vue de permettre l'information complète du public, des indications précises et étayées sur ses capacités techniques et financières.
26. N'ayant pas, lors du dépôt de sa demande, décidé si elle recourrait, pour l'exploitation de l'incinérateur, à une gestion en régie ou à une gestion déléguée, la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée a présenté ses propres capacités dans ce dossier et doit être regardée comme s'étant, à ce stade, désignée comme future exploitante. Les circonstances que la société Suez aurait alors été gestionnaire de la station d'épuration et qu'il ait, par la suite, été décidé de recourir à une délégation pour la gestion de l'incinérateur sont à cet égard sans incidence.
27. D'une part, en faisant état, dans ce dossier, de ce que son organigramme comportait une direction eau et assainissement et de ce qu'elle disposait de nombreuses compétences techniques, dès lors notamment qu'elle assurait déjà en régie la gestion des ouvrages d'assainissement de deux communes membres, la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée a fourni des informations suffisantes quant à ses compétences techniques. D'autre part, en relevant que la somme de plus de 5 millions d'euros nécessaire à la construction de l'installation avait été inscrite à son budget d'investissement et qu'elle consacrait, à la date de sa demande, un budget de fonctionnement d'environ 850 000 euros par an à l'externalisation du traitement des boues produites par la station d'épuration de Béziers, tandis que le bilan prévisionnel d'exploitation établi par le constructeur estimait à environ 515 000 euros par an le coût induit par le fonctionnement de l'incinérateur, la communauté d'agglomération a également mentionné de façon suffisamment précise et étayée sa capacité financière. La circonstance que des visites d'inspection auraient récemment conduit à constater des manquements de l'exploitant ou des non-conformités de l'installation est sans incidence sur la régularité de la procédure.
Quant à l'étude d'impact :
28. L'article R. 122-5 du code de l'environnement définit le contenu de l'étude d'impact, qui est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine.
29. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa version applicable : " Lorsque ces projets concourent à la réalisation d'un même programme de travaux, d'aménagements ou d'ouvrages (...), l'étude d'impact doit porter sur l'ensemble du programme. Lorsque la réalisation est échelonnée dans le temps, l'étude d'impact de chacun des projets doit comporter une appréciation des impacts de l'ensemble du programme. (...) / Un programme de travaux, d'aménagements ou d'ouvrages est constitué par des projets de travaux, d'ouvrages et d'aménagements réalisés par un ou plusieurs maîtres d'ouvrage et constituant une unité fonctionnelle ". Le 12° de l'article R. 122-1 reprend ainsi cette obligation. Parallèlement, l'article R. 512-6 du même code précise que les documents joints à la demande d'autorisation, dont l'étude d'impact, portent " sur l'ensemble des installations ou équipements exploités ou projetés par le demandeur qui, par leur proximité ou leur connexité avec l'installation soumise à autorisation, sont de nature à en modifier les dangers ou inconvénients ". Le 4° de l'article R. 122-5 prévoit également que l'étude d'impact comporte " une analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus. Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact : / (...) / -ont fait l'objet d'une étude d'impact au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement a été rendu public. / (...) ". Si les requérantes invoquent également les obligations figurant aux articles 2 et 4 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, celles-ci ont fait l'objet d'une transposition en droit interne empêchant qu'elles ne soient invoquées directement.
30. Ainsi qu'il a été mentionné précédemment, antérieurement à la demande d'autorisation en cause, et conformément à son schéma directeur d'assainissement, la communauté d'agglomération a obtenu, le 21 novembre 2013, l'autorisation de réaliser des travaux d'extension de la capacité de traitement de la station d'épuration de Béziers, lesquels ont été engagés à la fin de l'année 2013. Si l'unité d'incinération en litige a pour vocation de traiter les boues issues de ce traitement, d'une part, les travaux d'extension ont pu être conduits et la station d'épuration peut fonctionner en l'absence d'incinérateur, les boues produites étant alors externalisées, d'autre part, l'incinérateur peut fonctionner à partir de boues provenant d'une autre station. La décision de le construire n'a d'ailleurs, ainsi que cela a été évoqué au point 20 ci-dessus, été finalisée que postérieurement à l'engagement des travaux portant sur la station d'épuration en elle-même. Ces deux ouvrages ont donc été construits de façon indépendante, disposent chacun de leur finalité propre et sont matériellement séparés même s'ils se trouvent à proximité immédiate l'un de l'autre. Ils ne constituent ainsi pas une unité fonctionnelle au sens de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, de telle sorte que le programme qu'ils formeraient aurait dû faire l'objet d'une appréciation de ses impacts d'ensemble.
31. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que la proximité de l'installation en litige avec la station d'épuration serait de nature à en modifier les dangers ou inconvénients au sens de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, tandis que, lorsque l'étude d'impact a été déposée, l'extension de la capacité de traitement de la station n'en était plus au stade de projet évoqué au 4° de l'article R. 122-5 du même code.
32. En deuxième lieu, si les requérantes invoquent une méconnaissance des dispositions de l'article L. 541-7-1 du code de l'environnement, en vertu duquel tout producteur ou détenteur de déchets est tenu de les caractériser, et en particulier de déterminer s'il s'agit de déchets dangereux ou de déchets qui contiennent des substances polluantes, il ressort en tout état de cause du dossier de demande d'autorisation que les boues biologiques et graisses incinérées par l'unité litigieuse sont caractérisées de non-dangereuses. Le flux des matières traitées est évoqué à plusieurs reprises, et notamment en point D.2.2.3., tandis que leurs teneurs en polluants sont par ailleurs estimées, en page 41 dudit dossier, et que l'étude d'impact précise, en point C.4.5.1, l'absence de chlore dans les boues d'épuration.
33. En troisième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérantes sans apporter de précisions, il ne résulte pas de l'instruction que l'étude d'impact n'analyserait pas l'ensemble des molécules émises par la combustion, et qu'elle ne fournirait que des informations incomplètes sur les refus d'épuration des fumées d'incinération et leur traitement. La production, la gestion et les risques liés à ces émissions et déchets sont étudiés en particulier aux points C.4.4.5., C.5.1.2, et C.5.3 à 5.7, ainsi que cela est détaillé longuement aux points 57 et 58 du jugement du 23 juin 2022 qui ne sont pas utilement critiqués et dont il y a lieu d'adopter les motifs. Pareillement, et comme l'a également relevé le tribunal, cette étude prend suffisamment en compte, particulièrement aux points C.2.1.6 et C.3.6.1 où sont notamment relevés les rejets atmosphériques des " pollueurs locaux ", les autres sources de pollution locales et la situation existante.
34. En quatrième lieu, si les dispositions du 5° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans leur version applicable, exigent que l'étude d'impact comporte une esquisse des principales solutions de substitution qui ont été examinées et expose, eu égard aux effets sur l'environnement et la santé humaine, les raisons pour lesquelles le projet a été retenu, elles ne requièrent pas que les études utilisées pour arrêter ce choix soient produites. La circonstance alléguée que le choix effectué méconnaîtrait la hiérarchie des modes de traitement des déchets relève pour sa part de la seule appréciation du bien-fondé du projet. Dès lors, et dans la mesure où l'étude d'impact expose, de façon suffisamment détaillée et circonstanciée, en ses points C.2.5 et surtout C.7, les raisons pour lesquelles les solutions tenant au compostage sur plateformes extérieures, à l'épandage des boues après conditionnement ou à l'incinération en cimenterie après séchage thermique ne sont pas substituables ou satisfaisantes eu égard à leurs effets et ont été écartées au profit de l'incinération sur site, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
35. En cinquième lieu, comme l'ont relevé les premiers juges, l'étude d'impact expose, particulièrement en son point C.4.6.1, les mesures prises pour que le risque d'inondation de la parcelle d'assiette du projet, située en zonage réglementaire rouge de précaution, puisse être écarté. Si les requérantes soutiennent que l'étude omet de préciser l'incidence qu'est susceptible d'avoir sur le fonctionnement de l'installation une inondation de la plaine en bord d'Orb dans laquelle elle se situe, il ressort des éléments exposés aux points C.3.7.1 et D.3.1.3 que la construction n'a pu être autorisée, compte-tenu des règles d'urbanisme applicables, qu'au regard d'un plan d'évacuation prévoyant la fermeture de l'équipement dès que le niveau d'alerte laisse présager un risque d'inondation sur le secteur.
36. En sixième lieu, les requérantes ne prétendent pas que la présence de cette installation, à proximité immédiate de la station d'épuration et en zone inondable, aurait, même très éventuellement, pour effet de compromettre l'urbanisation future d'une zone ayant une telle vocation, de telle sorte qu'il aurait été pertinent que l'étude apporte des précisions à cet égard.
37. En dernier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que l'étude d'impact n'analyserait pas l'incidence des phases de construction et de démontage par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, aux points 48 à 51 de leur jugement du 23 juin 2022. Il y a lieu de procéder de même s'agissant du moyen tiré de l'insuffisante étude du trafic induit par l'exploitation, par référence aux motifs figurant aux points 52 et 53 de ce jugement, ainsi que s'agissant des moyens portant sur l'absence de prise en compte du risque de retrait et gonflement d'argile d'une part, et sur l'incomplétude de l'examen de l'impact paysager de l'installation d'autre part, par renvoi aux motifs respectifs des points 61 et 62, et des points 65 et 66.
38. Il résulte de tout ce qui vient d'être exposé des points 28 à 37 que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'étude d'impact est insuffisante.
Quant à l'avis de l'autorité environnementale du 23 avril 2015 :
39. Dès lors que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale du 29 septembre 2022 s'est substitué à l'avis précédent de l'autorité environnementale du 23 avril 2015, l'ensemble des moyens critiquant la légalité et la publicité de ce premier avis doivent être écartés comme inopérants.
Quant aux autres éléments composant le dossier soumis à enquête publique :
40. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet (...). / Le dossier comprend au moins : / (...) / 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet (...) ".
41. S'il appartient à l'autorité administrative de mettre à la disposition du public, pendant toute la durée de l'enquête, un dossier d'enquête publique comportant l'ensemble des avis mentionnés ci-dessus, la méconnaissance de ces dispositions n'est toutefois de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.
42. En l'espèce, l'avis rendu par le directeur de l'institut national de l'origine et de la qualité le 5 mai 2015 indiquait que l'établissement n'avait pas de remarque à formuler sur le projet dès lors que celui-ci n'avait pas d'incidence directe sur les appellations d'origine contrôlée et indications d'origine protégée dans l'aire géographique desquelles se trouve la commune de Béziers. Ainsi, les circonstances que cet avis n'a été transmis que tardivement au commissaire-enquêteur et qu'il n'aurait pas été mis à disposition du public ne sont pas susceptibles d'avoir nui à l'information des personnes intéressées ou d'avoir exercé une influence sur les résultats de l'enquête.
Quant à la publicité de l'arrêté du 30 décembre 2015 :
43. Les modalités de publicité de la décision d'autorisation du 30 décembre 2015 sont en tout état de cause sans incidence sur sa légalité.
S'agissant de la légalité interne :
Quant à la portée de l'autorisation :
44. Il résulte de ce qui a été exposé au point 30 ci-dessus que la station d'épuration elle-même et l'unité d'incinération en litige ne présentent pas d'unité fonctionnelle. Les requérantes ne sont dès lors, en tout état de cause, pas fondées à soutenir que l'autorisation litigieuse aurait également dû porter sur la station d'épuration en application des articles L. 512-3 et R. 512-21 à R. 512-32 du code de l'environnement aujourd'hui abrogés.
Quant au respect de la hiérarchie des modes de traitement :
45. Si les lois du 3 août 2009, de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, et du 12 juillet 2010, portant engagement national pour l'environnement, ont entendu prévoir la déclinaison, au niveau national et local, notamment du principe de hiérarchie du traitement des déchets, issu des articles 3 et 4 de la directive du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives, ce dernier principe figure à l'article L. 541-1 du code de l'environnement, qui prévoit en son point II que : " Les dispositions du présent chapitre (...) ont pour objet : / (...) / 2° De mettre en œuvre une hiérarchie des modes de traitement des déchets consistant à privilégier, dans l'ordre : / a) La préparation en vue de la réutilisation ; / b) Le recyclage ; / c) Toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique ; / d) L'élimination ; / (...) / 4° D'organiser le transport des déchets et de le limiter en distance et en volume selon un principe de proximité ; / (...) ". Ainsi, aux termes du premier alinéa de l'article L. 541-2 du même code : " Tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d'en assurer ou d'en faire assurer la gestion, conformément aux dispositions du présent chapitre " et aux termes du I de son article L. 541-2-1 : " Les producteurs de déchets, outre les mesures de prévention des déchets qu'ils prennent, et les détenteurs de déchets en organisent la gestion en respectant le principe de proximité et la hiérarchie des modes de traitement définis au II de l'article L. 541-1. / L'ordre de priorité du mode de traitement peut notamment être modifié pour certains types de déchets si cela est prévu par un plan institué en application des articles L. 541-11-1, L. 541-13, L. 541-14 ou L. 541-14-1 couvrant le territoire où le déchet est produit. / Cet ordre de priorité peut également être modifié si cela se justifie compte tenu des effets sur l'environnement et la santé humaine, et des conditions techniques et économiques. La personne qui produit ou détient les déchets tient alors à la disposition de l'autorité compétente les justifications nécessaires ". Les dispositions de l'article L. 541-1-1 de ce code définissent la valorisation comme étant " toute opération dont le résultat principal est que des déchets servent à des fins utiles en substitution à d'autres substances, matières ou produits qui auraient été utilisés à une fin particulière, ou que des déchets soient préparés pour être utilisés à cette fin, y compris par le producteur de déchets " et l'élimination comme correspondant à " toute opération qui n'est pas de la valorisation même lorsque ladite opération a comme conséquence secondaire la récupération de substances, matières ou produits ou d'énergie ". Le 3ème alinéa de l'article 4 de l'arrêté du 20 septembre 2002 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets non dangereux et aux installations incinérant des déchets d'activités de soins à risques infectieux précise : " La chaleur produite par les installations d'incinération est valorisée lorsque cela est faisable, notamment par la production de chaleur et/ou d'électricité, la production de vapeur à usage industriel ou l'alimentation d'un réseau de chaleur. Le taux de valorisation annuel de l'énergie récupérée est défini comme le rapport de l'énergie valorisée annuellement sur l'énergie sortie chaudière produite annuellement. Est considérée valorisée l'énergie produite par l'installation sous forme thermique ou électrique et effectivement consommée, y compris par autoconsommation, ou cédée à un tiers ". L'article précise par ailleurs que l'évaluation de la performance énergétique, réalisée selon une formule définie en annexe, est portée dans la demande d'autorisation.
46. En l'espèce, le département de l'Hérault a adopté son plan de prévention et de gestion des déchets non dangereux au cours du mois d'octobre 2014 en application de l'article L. 541-14 du code de l'environnement dans sa version alors applicable. Il ressort de ce plan que, si la valorisation organique des boues issues des petites et moyennes stations d'épuration a été retenue de façon exclusive pour le département, par épandage et compostage, eu égard aux volumes en cause, trois modes de traitement ont été identifiés pour les quatre plus grandes stations, dont celle de Béziers, à savoir le séchage/granulation, l'oxydation par voie humide et l'incinération. L'incinération dédiée y est considérée, avec la co-incinération, comme la solution la plus sûre, fiable et à coût maîtrisée, permettant en outre une valorisation énergétique. Ce plan, qui prend en compte la problématique de gestion des boues à l'échelle départementale, permettait ainsi de modifier, notamment pour les boues d'épuration de la communauté d'agglomération de Béziers Méditerranée, l'ordre de priorité du mode de traitement et le justifiait, au regard des effets sur l'environnement et la santé humaine ainsi que des conditions techniques et économiques, conformément aux dispositions du 3ème alinéa du I de l'article L. 541-2-1 et du II bis de l'article L. 541-14 dans sa version applicable.
47. Il résulte de ce qui précède que l'autorisation en litige, permettant une élimination des boues par incinération, a été délivrée, le 30 décembre 2015 et modifiée le 16 mars 2018, en respectant l'ordre de priorité des modes de traitement défini par le plan de prévention et de gestion des déchets non dangereux applicable et par suite, sans méconnaitre les dispositions des articles L. 541-1 et suivants du code de l'environnement. Au demeurant, comme l'expose l'étude d'impact, d'une part, le compostage extérieur, abandonné à proximité de la station du fait des nuisances olfactives engendrées, ne permettait pas de respecter le principe de proximité et engageait des coûts, particulièrement de transport, importants, appelés à augmenter avec l'accroissement de la capacité de traitement de la station d'épuration. D'autre part, l'épandage agricole après conditionnement se heurtait à une insuffisance des surfaces disponibles et à des problèmes de qualité des boues. Les effets sur l'environnement et la santé humaine ainsi que les conditions techniques et économiques justifiaient ainsi, pour cette installation particulière, que les solutions de traitement s'apparentant à un recyclage soient écartées. La circonstance que la qualité actuelle des boues permettrait l'usage des eaux usées traitées pour l'arrosage des espaces verts est à cet égard sans incidence.
48. Par ailleurs, l'incinérateur comporte, aux termes de l'arrêté 16 mars 2018 portant prescriptions complémentaires, des échangeurs de récupération d'énergie thermique ainsi qu'une turbine permettant de produire de l'électricité à partir de cette récupération, d'une capacité nominale de 800 kW. L'électricité produite est auto-consommée par le four d'incinération. Si, ainsi que le relèvent les requérantes, le taux de valorisation annuel de l'énergie récupérée est inconnu et les éléments produits à l'instance ne permettent pas de considérer que l'opération d'incinération relève d'une valorisation au sens de l'article L. 541-1-1 du code de l'environnement, la solution par élimination respecte, ainsi qu'il vient d'être exposé au point précédent, les principes fixés par les articles L. 541-1 et suivants et particulièrement les obligations qui s'imposent au détenteur de déchets au regard de la hiérarchie des modes de traitement. Le préfet n'avait dès lors pas à assortir son autorisation de prescriptions supplémentaires relatives à la valorisation énergétique. La circonstance que les objectifs de la directive du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives auraient fait l'objet d'une transposition insuffisante en droit français quant aux exigences à satisfaire en vue de voir une opération qualifiée de valorisation, à la supposer exacte, est dès lors sans incidence sur l'issue du litige.
49. Si les requérantes se prévalent de ce que le plan de prévention et de gestion des déchets non dangereux adopté au cours du mois de novembre 2019 par la région Occitanie ne précise pas, comme le faisait le plan départemental, que l'ordre de priorité du mode de traitement des boues d'épuration est modifié et entend pérenniser la valorisation organique au niveau actuel principalement par compostage ou méthanisation, il ne ressort pas de ces dispositions que l'organe délibérant aurait entendu remettre en cause les choix de traitement déjà effectués sur le territoire. Les dispositions des articles L. 541-1 et L. 541-2-1 du code de l'environnement n'imposent pas que ledit plan valide expressément les choix ainsi arrêtés et ayant fait l'objet d'une autorisation avant son adoption.
Quant à la pollution atmosphérique :
50. D'une part, aux termes de l'article 1er de la Charte de l'environnement : " Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ". Aux termes de l'article L. 221-1 du code de l'environnement : " I.- L'Etat assure, avec le concours des collectivités territoriales dans le respect de leur libre administration et des principes de décentralisation, la surveillance de la qualité de l'air et de ses effets sur la santé et sur l'environnement. (...) / (...) / III.- Les substances dont le rejet dans l'atmosphère peut contribuer à une dégradation de la qualité de l'air au regard des normes mentionnées au premier alinéa sont surveillées, notamment par l'observation de l'évolution des paramètres propres à révéler l'existence d'une telle dégradation. Les paramètres de santé publique susceptibles d'être affectés par l'évolution de la qualité de l'air sont également surveillés ". L'article R. 221-1 du même code définit des normes de qualité de l'air établies par polluant, notamment pour le dioxyde d'azote ou les particules PM10 et PM2,5, en fixant les objectifs de qualité en moyenne annuelle civile à respectivement 40, 30 et 10 µg/m ³ pour ces substances. Si les requérantes entendent également se prévaloir des objectifs de la directive du 21 mai 2008 concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe, elles ne précisent pas en quoi sa transposition par ces dispositions du code de l'environnement serait insuffisante. Elles n'apportent pas davantage de précisions quant aux objectifs auxquels la France doit satisfaire en matière d'émission de gaz à effet de serre auxquels elles font référence.
51. D'autre part, l'arrêté du 20 septembre 2002 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets non dangereux et aux installations incinérant des déchets d'activités de soins à risques infectieux précise, en son article 17, que les installations d'incinération sont conçues, équipées, construites et exploitées de manière à ce que les valeurs limites fixées à l'annexe 1 ne soient pas dépassées dans les rejets gazeux de l'installation. Ladite annexe fixe ainsi des valeurs limites d'émission de monoxyde de carbone, poussières totales, carbone organique total, chlorure d'hydrogène, fluorure d'hydrogène, dioxyde de soufre, monoxyde et dioxyde d'azote, métaux, dioxines et furanes et ammoniac. Si les requérantes soutiennent que les dispositions de cet arrêté ne respecteraient ni les obligations issues des textes cités au point précédent ni les objectifs fixés par la directive du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles, elles n'assortissent cette branche de leur moyen d'aucune précision.
52. En l'espèce, l'arrêté du 30 décembre 2015 définit, en son article 3.2.4, conformément à l'arrêté ministériel du 20 septembre 2002, les valeurs limites d'émission dans l'air, les conditions dans lesquelles il peut être considéré qu'elles sont respectées ainsi, qu'en son chapitre 9, un programme de surveillance des émissions, particulièrement atmosphériques, et de leurs effets dans l'environnement.
53. Tout comme dans l'arrêté ministériel du 20 septembre 2002, les particules fines PM10 et PM2,5 sont intégrées au sein de la catégorie " poussières totales " et leur limitation est fixée selon le seuil applicable aux particules PM2,5, qui sont les plus nocives et les plus encadrées. Il n'en résulte pas que les normes de qualité de l'air fixées par l'article R. 221-1 du code de l'environnement ne seraient pas respectées. L'étude d'impact, conduite selon le même principe d'assimilation de toutes les poussières à des particules PM2,5, a au contraire conclu que les concentrations maximales atteintes dans l'environnement des futures installations, de l'ordre de 4,7. 10-2 µg/ m³ étaient très inférieures aux objectifs de qualité de l'air définis. Si les requérantes critiquent également l'installation au regard des émissions de dioxyde d'azote, il ressort de l'étude d'impact que la concentration maximale susceptible d'être atteinte dans la zone d'étude s'élève 18,9 µg/ m³. Enfin, les données prises en compte s'agissant des dioxines, correspondant aux valeurs limites d'émission alors que l'étude d'impact indique qu'elles devraient, au vu de la technologie utilisée, être 5 000 fois moindres, ce que les requérantes ne critiquent pas sérieusement, conduisent à considérer le risque d'un effet sur la santé comme très peu probable ou très faible. Si les requérantes évoquent, dans leurs dernières écritures, un rapport établi par l'association Atmo Occitanie, portant sur l'évaluation de la qualité de l'air dans l'environnement de l'incinérateur de la station d'épuration de Béziers au cours de l'année 2023, il ressort de ce dernier que seule la mesure du cadmium excède, sur un des sites de la zone d'étude les moins impactés par l'incinérateur, la valeur de référence par jour et que, de façon générale, l'incinérateur n'a aucune influence significative sur la qualité de l'air de la zone dont les caractéristiques sont similaires au " bruit de fond " local.
54. Il résulte de ce qui vient d'être exposé que le moyen tiré de ce qu'il serait porté atteinte aux objectifs de qualité de l'air fixés par les dispositions citées au point 50 ainsi qu'au droit de vivre dans un environnement équilibré garanti par la Constitution doit être écarté.
Quant à l'aléa inondation :
55. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 35 ci-dessus, le risque d'inondation de l'unité d'incinération peut, en lui-même, être écarté, ce qui n'est pas sérieusement contesté, tandis que la construction n'a pu être autorisée, selon les règles d'urbanisme applicables, qu'au regard d'un plan d'évacuation prévoyant la fermeture de l'équipement dès que le niveau d'alerte laisse présager un risque d'inondation sur le secteur.
56. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 732-1 du code de la sécurité intérieure : " Les exploitants d'un service, destiné au public, d'assainissement (...) prévoient les mesures nécessaires au maintien de la satisfaction des besoins prioritaires de la population lors des situations de crise. / Ces besoins prioritaires, définis par un décret en Conseil d'Etat, sont pris en compte (...) dans les dispositions réglementaires encadrant les activités précitées, qui peuvent comporter des mesures transitoires. Ce décret précise le niveau d'exigence et les délais d'application requis pour leur mise en œuvre ". Aux termes de l'article L. 732-2-1 du même code : " Afin d'identifier les vulnérabilités des services et réseaux, d'anticiper leur gestion en période de crise et de favoriser un retour rapide à un fonctionnement normal, le représentant de l'Etat dans le département peut demander à tout exploitant de service ou réseau mentionné à l'article L. 732-1 du présent code, dans les territoires où l'exposition importante à un ou plusieurs risques naturels peut conduire à un arrêt de tout ou partie du service ne permettant plus de répondre aux besoins prioritaires de la population : / 1° Un diagnostic de vulnérabilité de ses ouvrages existants en fonction de l'exposition aux risques naturels et de la configuration des réseaux au regard de ces risques ; / 2° Les mesures prises en cas de crise pour prévenir les dégâts causés aux ouvrages et pour assurer un service minimal qui permette d'assurer la continuité de la satisfaction des besoins prioritaires de la population ; / 3° Les procédures de remise en état du réseau après la survenance de l'aléa ; / 4° Un programme des investissements prioritaires pour améliorer la résilience des services prioritaires pour la population en cas de survenance de l'aléa. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret ". Les dispositions de l'article R. 732-1 du ce code précisent que : " Le caractère prioritaire des besoins de la population mentionnés aux articles L. 732-1 et L. 732-2-1 se détermine en considération, d'une part, des objectifs de préservation de la vie humaine, de la santé publique, de la sécurité des personnes et des biens et, d'autre part, de la continuité des services publics. / Le niveau de satisfaction de ces besoins requis dans chaque cas est fixé en fonction de la vulnérabilité de certains groupes de populations, des caractéristiques du service ou du réseau concerné et du degré constaté de défaillance des installations destinées à répondre à ces besoins ". Aux termes de l'article R. 732-2 : " Les critères de définition des populations vulnérables et le niveau spécifique de satisfaction de leurs besoins sont précisés, en tant que de besoin, par arrêté conjoint des ministres en charge de la santé, de la sécurité civile et du service concerné ".
57. En l'espèce, l'autorisation en litige ne porte pas directement sur une installation d'assainissement mais sur une unité d'incinération des boues issues d'une telle installation. Il ne ressort pas des dispositions citées ci-dessus que le maintien d'un traitement des boues sur site relèverait de la satisfaction d'un besoin prioritaire de la population qui devrait être pris en compte en application de l'article L. 732-1, alors qu'aucun arrêté ministériel, prévu par l'article R. 732-2 du code de la sécurité intérieure, n'a été pris pour définir le niveau spécifique de satisfaction des besoins. Au demeurant, une défaillance dans l'application des dispositions de l'article L. 732-2-1 du même code, qui ouvre une possibilité au préfet de demander des informations ou de prescrire la mise en place de mesures, procédures et investissements, n'est pas susceptible d'avoir une incidence sur l'autorisation d'exploiter elle-même.
58. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont l'autorisation serait entachée au regard du choix du site d'implantation compte-tenu du risque d'inondation et de l'insuffisante prise en compte de cet aléa doit dès lors être écarté.
Quant à l'insuffisance des autres prescriptions des arrêtés :
59. En premier lieu, aux termes du point 4 de l'article 7 de la directive du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement : " 4. Sans préjudice d'aucune obligation particulière prévue par la législation communautaire, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que soient diffusées immédiatement et sans retard, en cas de menace imminente pour la santé humaine ou pour l'environnement résultant d'activités humaines ou de causes naturelles, toutes les informations détenues par les autorités publiques ou pour leur compte et qui pourraient permettre à la population susceptible d'être affectée de prendre des mesures pour prévenir ou atténuer le dommage lié à la menace en question ".
60. Si les requérantes soutiennent que ces dispositions n'auraient pas fait l'objet d'une transposition en droit français, il est en tout état de cause constant qu'elles ne concernent que la diffusion des informations détenues par les autorités publiques ou pour leur compte et qu'il n'appartient pas à l'exploitant d'une installation classée d'assurer lui-même une telle information. Il ne saurait dès lors être soutenu que l'arrêté du 30 décembre 2015, qui prévoit en son chapitre 2.5 et ses articles 7.5.5.1 et 7.5.6 une alerte des services d'incendie et de secours et une information de l'inspection des installations classées en cas de situation accidentelle, aurait dû, en application de ces dispositions, prévoir un dispositif d'alerte directe des populations en cas d'incendie ou d'explosion de l'incinérateur ayant un impact au-delà des limites du site.
61. En deuxième lieu, si l'avis favorable du " pôle Canal du Midi " produit au dossier par la communauté d'agglomération concerne l'impact paysager de l'extension de la capacité de traitement de la station d'épuration elle-même, il ne résulte pas de l'instruction que des prescriptions supplémentaires auraient dû être prévues à cet égard, alors que cet avis mentionne que l'ouvrage, à proximité immédiate duquel se trouve l'incinérateur, est " peu visible " des sites et paysage du canal du Midi en zone d'influence desquels il se trouve, que le projet prévoit la conservation des haies de peupliers en périphérie du site, et que l'arrêté du 30 décembre 2015 prescrit, en son point 2.3, que l'exploitant prend les dispositions appropriées qui permettent d'intégrer l'installation dans le paysage. Au demeurant, les requérantes ne formulent aucune critique précise quant à l'intégration paysagère de l'ouvrage.
62. En troisième lieu, il résulte du complément d'information fourni par la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée au mois d'octobre 2022 à la suite de l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale que, les sols n'étant jamais en contact avec les boues, il n'est en réalité pas pratiqué de lavage de ceux-ci au sein de l'installation et que le nettoyage effectué à seul fin de contrôle des eaux de lavage a permis de vérifier que celles-ci avaient une qualité domestique. Par ailleurs, le bassin étanche de rétention des eaux d'extinction d'incendie est aménagé afin de recueillir toutes les eaux de ruissellement en cas de pollution, lequel a vocation à être pompé dans une telle hypothèse. Dans ces conditions, alors que les requérantes ne critiquent pas ces éléments et se bornent à invoquer une méconnaissance de l'arrêté ministériel du 20 septembre 2002 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets non dangereux et aux installations incinérant des déchets d'activités de soins à risques infectieux et de la directive du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles, sans autre précision, le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions relatives aux eaux de rejet ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
63. En quatrième lieu, si les requérantes soutiennent également que les prescription des arrêtés sont insuffisantes s'agissant des procédés d'épuration des effluents gazeux, de la détermination des points d'échantillonnage et de mesures, de la caractérisation des eaux industrielles, des risques liés au retrait et gonflement d'argiles, de la distinction entre les boues et les graisses, et de la caractérisation des déchets, ces assertions ne sont pas assorties des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé.
En ce qui concerne le jugement du 5 octobre 2023 :
64. Ainsi qu'il a été dit précédemment, par son jugement du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a relevé l'illégalité de l'avis rendu par l'autorité environnementale le 23 avril 2015 et a sursis à statuer en vue de la régularisation du vice entachant à cet égard la procédure d'autorisation. Par son arrêté du 19 avril 2023, le préfet de l'Hérault, au vu de l'avis émis le 29 septembre 2022 par la mission régionale d'autorité environnementale et notamment de la consultation du public organisée par voie électronique à l'issue de cet avis entre le 29 décembre 2022 et le 29 janvier 2023, a décidé de maintenir inchangé l'arrêté d'autorisation du 30 décembre 2015 et l'arrêté complémentaire du 16 mars 2018 associé.
65. À compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 181-18 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. À ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant-dire droit. Les parties ne peuvent en revanche soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse de moyens déjà écartés par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.
S'agissant de l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale du 29 septembre 2022 :
66. En premier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". Le V de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, prévoit, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que le dossier présentant le projet comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale. En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code, cette autorité, lorsqu'elle n'est ni le ministre chargé de l'environnement, dans les cas prévus au I de cet article, ni la formation compétente du Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans les cas prévus au II de ce même article, est la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé.
67. L'article R. 122-24 précise : " Dans chaque région, la mission régionale d'autorité environnementale de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement pour l'exercice des missions prévues au présent chapitre et au chapitre IV du titre préliminaire du livre Ier du code de l'urbanisme. / Pour cet appui, les agents du service régional chargé de l'environnement sont placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale par dérogation à l'article 2 du décret n° 2009-235 du 27 février 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (...) ".
68. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Si ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.
69. Lorsque le préfet de région est l'autorité compétente pour autoriser le projet, ou lorsque cette autorité est le préfet du département disposant à cette fin des services de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, la mission régionale d'autorité environnementale de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable, dont l'organisation et les modalités d'intervention sont définies par les articles R. 122-21 et R. 122-24 à R. 122-24-2 du code de l'environnement, peut être regardée comme disposant, à son égard, d'une autonomie réelle lui permettant de rendre un avis environnemental dans des conditions répondant aux exigences résultant de la directive. Ainsi, dès lors qu'elle rend un avis dans les conditions prévues par ces dispositions, la mission régionale d'autorité environnementale doit être regardée comme intervenant de manière autonome à l'égard du préfet compétent pour autoriser le projet, sans que la circonstance qu'elle ait bénéficié, pour rendre son avis, ainsi que le prévoit l'article R. 122-24 du code de l'environnement cité au point 67, de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement, placés sous l'autorité fonctionnelle de son président, soit, par elle-même, de nature à affecter cette autonomie.
70. Si les requérantes soutiennent que le modèle de convention entre la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable (MRAe) et le service régional chargé de l'environnement annexé à l'arrêté ministériel du 11 août 2020 serait illégal, elles n'assortissent pas cette branche de leur moyen des précisions nécessaires à l'appréciation de son bien-fondé.
71. Elles critiquent également, au cas particulier, la convention du 27 octobre 2020 conclue entre le service régional chargé de l'environnement et la mission régionale d'autorité environnementale Occitanie. Celle-ci prévoit notamment, en ses articles 5 et 6, la possibilité, pour les agents placés sous l'autorité fonctionnelle de la présidente de la mission, de consulter leurs collègues ou l'existence d'échanges portant entre autres sur l'allocation des moyens et les actions à conduire, y compris sur des dossiers sensibles, afin d'appropriation, par les acteurs concernés, de la démarche d'évaluation environnementale le plus en amont possible. Elle permet également au directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement et à son adjoint référent, par exemple d'accéder à tout moment au plan de traitement des demandes d'avis arrêté par la mission et d'apporter des éléments de contexte utile sur un dossier. Il ne ressort pour autant pas de ces éléments, qui ne sont pas contradictoires avec le modèle d'avis annexé à l'arrêté ministériel du 11 août 2020, que l'autonomie de la mission régionale d'autorité environnementale et l'objectivité de ses avis pourraient être affectés.
72. Si l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale a en l'espèce été adopté par sa présidente, Annie A..., conformément aux règles de délégation internes à la mission, il ne résulte ni de la circonstance que l'intéressée était antérieurement directrice régionale adjointe de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Languedoc-Roussillon, notamment lorsque le premier avis de l'autorité environnementale a été rendu le 23 avril 2015, ni de celle qu'elle a signé, dans l'exercice de ces dernières fonctions, le 13 mai 2013, le courrier informant le préfet de l'Hérault de l'absence d'observation de l'autorité environnementale sur le projet d'extension de la capacité de traitement de la station d'épuration de Béziers, lequel constitue, ainsi qu'il a été vu précédemment au point 30, un ouvrage indépendant de l'unité d'incinération en litige, qu'elle se serait trouvée dans une situation de conflit d'intérêts, proscrite par les articles R. 122-24-1 et R. 122-24-2 du code de l'environnement.
73. Il résulte de ce qui vient d'être exposé des points 66 à 72, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation de l'autorité environnementale doit être écarté.
74. En deuxième lieu, d'une part, aux termes du II de l'article R. 122-7 du code de l'environnement : " (...) L'avis de l'autorité environnementale, dès son adoption, ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai, est mis en ligne sur internet. / (...) ". Le jugement du 23 juin 2022 prévoyait que le nouvel avis de l'autorité environnementale devrait être mise en ligne sur un site ayant une notoriété suffisante et une page facilement accessible, permettant au public d'en prendre connaissance et de présenter ses observations et propositions. Il réservait la nécessité d'effectuer une nouvelle enquête publique complémentaire à l'hypothèse dans laquelle le nouvel avis différerait substantiellement du précédent.
75. Si les requérantes soutiennent que les dispositions de l'article R. 122-7 du code de l'environnement, notamment en ce qu'elles ne prévoient pas la participation du public à l'élaboration de l'avis de l'autorité environnementale, et les modalités de régularisation du vice entachant l'avis de l'autorité environnementale du 23 avril 2015 retenues par le juge de première instance, en ce qu'elles permettent une simple consultation du public par voie électronique, méconnaîtraient le droit à l'information du public tel que garanti par la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 et les directives du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles et du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, aucun de ces textes ne prévoit que le public soit associé à tous les stades de la procédure. Dans ces circonstances, et dans la mesure où cette branche du moyen n'est pas assortie de précisions, celle-ci doit être écartée.
76. D'autre part, alors que l'avis du 23 avril 2015 avait été intégré en temps utile au dossier d'enquête publique ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges au point 30 de leur jugement du 23 juin 2022 par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, le préfet a prescrit, eu égard au nouvel avis de l'autorité environnementale, une consultation du public par voie électronique par arrêté du 12 décembre 2022, laquelle a eu lieu sur le site internet des services de l'Etat dans l'Hérault ainsi que sur celui accueillant le registre dématérialisé de consultation. Cinquante-trois observations ont ainsi été déposées et ont fait l'objet d'un bilan de synthèse le 18 avril 2023. Il ne saurait dès lors être sérieusement soutenu que le public aurait été empêché de prendre connaissance de l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale du 29 septembre 2022 et de produire ses observations. Dès lors qu'il n'est pas allégué que cet avis révélait des inexactitudes, insuffisances et omissions de l'étude d'impact ayant pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou ayant été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative, justifiant l'organisation d'une enquête publique complémentaire, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'information et l'association du public aurait été insuffisante.
77. En troisième et dernier lieu, si les requérantes soutiennent que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale ne tient pas compte de la hiérarchie obligatoire du mode de traitement des déchets, du plan régional de prévention et de gestion des déchets d'Occitanie, du facteur d'aggravation de la pollution de l'air, et du risque d'inondation, ces moyens, qui critiquent au fond la légalité dudit avis alors que celui-ci ne lie pas le préfet, sont inopérants.
S'agissant des autres moyens :
78. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé au point 62 ci-dessus que le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions relatives aux eaux de rejet et de ce que celles-ci auraient dû être complétées par l'arrêté de régularisation doit être écarté.
79. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de l'autorisation litigieuse s'agissant de la protection des captages d'eau peut être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit au point 18 du jugement du 5 octobre 2023.
80. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance du plan régional de prévention et de gestion des déchets d'Occitanie du 14 novembre 2019 et de ce qu'une telle installation ne pouvait être autorisée sur ce site sans que les conditions d'exploitation n'en soient définies en cas d'inondation ne portent pas sur des vices qui seraient propres à l'acte de régularisation et ne sont pas fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation. Ils sont dès lors inopérants à l'encontre de l'acte de régularisation et ont au demeurant été examinés ci-dessus aux points 45 à 49 et 55 à 58, au titre du bien-fondé du jugement du 23 juin 2022.
81. En quatrième et dernier lieu, eu égard à ce qui a été exposé aux points 10 et 11 ci-dessus, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 19 avril 2023 serait tardif eu égard aux délais fixés par le jugement du 23 juin 2022 pour sa production doit être écarté.
82. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande. Leurs conclusions à fin d'annulation et d'injonction doivent dès lors être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
83. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat et de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ABCPSE et de Mme C... une somme globale de 3 000 euros à verser à la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'ABCPSE et de Mme C... est rejetée.
Article 2 : L'ABCPSE et Mme C... verseront une somme globale de 3 000 euros à la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association biterroise contre les pollutions, pour la santé et l'environnement, à Mme B... C..., à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche et à la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Marchessaux, première conseillère,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 janvier 2025.
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N° 23MA02905
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