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24/01/2025 | FRANCE | N°24MA00910

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 24 janvier 2025, 24MA00910


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 12 février 2024 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.



Par un jugement n° 2401426 du 29 mars 2024, le magistrat désigné près le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demand

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Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 16 avril 2024, M. A...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 12 février 2024 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2401426 du 29 mars 2024, le magistrat désigné près le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 avril 2024, M. A..., représenté par Me Btihadi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mars 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 février 2024 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ; il révèle qu'il n'a pas été procédé à l'examen particulier de sa situation ;

- son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public ; une condamnation pénale, pour des faits isolés, ne caractérise pas une telle menace ; la mère de son enfant a même demandé que l'interdiction qui lui est faite d'entrer en contact avec elle soit levée ; les autres mises en cause le concernant ont fait l'objet de classements ;

- il est père d'un enfant français sur lequel il dispose de l'autorité parentale et aux besoins duquel il pourvoit ; il a droit à un titre de séjour sur le fondement de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- il est inséré dès lors qu'il dispose de liens sur le territoire, est hébergé, maîtrise la langue et dispose d'une promesse d'embauche ; la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences ;

- il présente des garanties de représentation, de telle sorte que la décision refusant le délai de départ volontaire est à cet égard entachée d'erreur de fait.

La procédure a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Poullain a été entendu en audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né en 1990, relève appel du jugement du 29 mars 2024 par lequel le magistrat désigné près le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2024 du préfet des Bouches-du-Rhône l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, d'autre part à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux vise les dispositions dont il fait application et examine la situation personnelle du requérant sur laquelle il se fonde, en relevant notamment que M. A... est père d'un enfant français, mais qu'il n'a pas sollicité de titre de séjour et a fait l'objet d'une condamnation pénale le 1er juillet 2022. Il est dès lors suffisamment motivé, quand bien même il ne fait pas référence à l'ensemble des circonstances dont le requérant se prévaut, et notamment pas à l'annulation, par le magistrat désigné près le tribunal administratif de Nîmes, d'une précédente obligation de quitter le territoire français émise à son encontre le 10 mai 2023. Au vu de cette motivation, M. A... ne saurait soutenir qu'il n'a pas été procédé à un examen sérieux de sa situation.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale est délivré de plein droit : / (...) / 4. Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. (...) ". Ces stipulations ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.

4. M. A... est le père d'un enfant de nationalité française, né le 8 décembre 2022, issu de sa relation avec une ressortissante française à laquelle il était lié par un pacte civil de solidarité. S'il exerce l'autorité parentale à l'égard de cet enfant, il est constant qu'il a fait l'objet, le 1er juillet 2022, d'une condamnation à une peine de 4 mois de prison ferme à raison de faits de violence suivis d'incapacité n'excédant pas 8 jours commis sur la mère de son enfant le 29 juin 2022, alors qu'elle était enceinte. Ces faits font suite à un précédent signalement pour des faits similaires commis le 8 octobre 2020 et s'ajoutent à d'autres signalements, auxquels le préfet a fait référence de façon globale dans sa décision, pour détention illégale de stupéfiants, conduite d'un véhicule en ayant fait usage de stupéfiants et sans permis, ainsi que vente illégale à la sauvette. Certes, la mère de son enfant est intervenue à l'appui de la demande qu'il a formulée le 13 février 2024, postérieurement à la décision attaquée, afin d'être relevé de l'interdiction d'entrer en relation avec elle. Le procureur de la République a classé sans suite les faits de violation de la décision judiciaire, résultant de ce que M. A... a été trouvé par les forces de police en compagnie de cette dernière, le 11 février 2023. Toutefois, eu égard à la gravité des faits de violence en cause, le préfet n'a pour autant pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que la présence de cet étranger en France constituait une menace pour l'ordre public, justifiant qu'il n'ait pas droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, dont M. A... n'avait au demeurant pas sollicité la délivrance. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait ces stipulations doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. / (...) ".

6. Si M. A... produit un certain nombre d'attestations en sa faveur, établies pour la plupart par ses voisins, aucune ne fait apparaitre de liens particulièrement intenses sur le territoire. Il indique être hébergé chez une cousine et produit tout à la fois une promesse d'embauche datant du mois d'octobre 2022 et des factures qu'il aurait établies en 2024 via la constitution d'une entreprise dans le bâtiment. S'il produit quelques copies de tickets de caisse faisant apparaître des achats de puéricultures et des photos de lui et son enfant, il ne donne aucune indication précise quant aux modalités selon lesquelles il contribue à l'entretien et l'éducation de ce dernier. Il n'établit pas être isolé dans son pays d'origine qu'il soutient n'avoir quitté qu'en 2019. Dès lors, eu égard aux éléments exposés par ailleurs au point 4 ci-dessus, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ni ne méconnait illégalement l'intérêt supérieur de son enfant. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés. Le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation du requérant.

7. En quatrième lieu, en application de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut refuser d'accorder à l'étranger un délai de départ volontaire, notamment quand il existe un risque que ce dernier se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. L'article L. 612-3 du même code précise que ce risque est constitué, sauf circonstances particulières, notamment si l'étranger ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour.

8. Si M. A... produit la copie de son passeport comportant un visa délivré par les autorités espagnoles valable du 15 avril au 14 mai 2019, il ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Dans ces circonstances, le préfet était fondé à considérer, au vu de cette situation exposée dans l'arrêté litigieux, qu'il existait un risque de soustraction à l'obligation de quitter le territoire français. Il aurait pris la même décision s'il ne s'était pas également fondé sur le motif surabondant tiré de l'absence de garanties de représentation. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de fait dont serait à cet égard entaché l'arrêté en litige doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné près le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Dès lors, il y a lieu de rejeter les conclusions d'appel présentées par M. A..., en ce comprises les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2025, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 janvier 2025.

2

N° 24MA00910

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00910
Date de la décision : 24/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : BTIHADI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-24;24ma00910 ?
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