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11/04/2025 | FRANCE | N°24MA03072

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 11 avril 2025, 24MA03072


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Vitrolles a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une expertise portant sur les désordres affectant la cuisine centrale réalisée dans le cadre d'un marché passé en 2013, au contradictoire de la société par actions simplifiée Eiffage Construction Sud Est, de la société par actions simplifiée Gentilletti et de la société à res

ponsabilité limitée MAP-Marseille Architecture partenaires.



Par une ordonnance n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vitrolles a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une expertise portant sur les désordres affectant la cuisine centrale réalisée dans le cadre d'un marché passé en 2013, au contradictoire de la société par actions simplifiée Eiffage Construction Sud Est, de la société par actions simplifiée Gentilletti et de la société à responsabilité limitée MAP-Marseille Architecture partenaires.

Par une ordonnance n° 2406766 du 29 novembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2024, et un mémoire enregistré le 4 février 2025, la commune de Vitrolles, représentée par Me Ladouari, demande à la Cour d'annuler cette ordonnance, de faire droit à sa demande de première instance et de réserver la question des dépens.

Elle soutient que :

- la Cour est compétente pour statuer sur son appel ;

- l'ordonnance est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- son action n'était pas prescrite ;

- la mesure d'expertise sollicitée était utile.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 23 janvier 2025 et le 13 février 2025, la société Eiffage Construction Sud Est, représentée par la SELARL Blum, Engelhard, de Cazalet, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Vitrolles en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens présentés à l'appui de la requête d'appel sont infondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2025, la société Marseille Architecture Partenaire (" MAP "), représentée par Me Capinero, demande à la Cour de rejeter la requête d'appel et de confirmer l'ordonnance attaquée ou, subsidiairement, de lui donner acte de ses protestations et réserves et d'étendre les opérations d'expertise, et, en tout état de cause, de mettre à la charge de la commune la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens présentés à l'appui de la requête d'appel sont infondés.

Par une lettre en date du 24 février 2025, la Cour a informé les parties qu'il était envisagé d'inscrire l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu d'ici au 1er mai 2025, et que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance à compter du 1er mars 2025.

Un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 7 mars 2025.

Vu :

- la décision du 6 février 2025 par laquelle le président de la Cour a désigné Mme Anne-Laure Chenal-Peter présidente par intérim de la 6ème chambre ;

- les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

.

Le juge des référés ayant décidé de porter cette affaire devant la formation collégiale.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Bezol pour la commune de Vitrolles et celles de Me Bouillon pour la SAS Eiffage Construction Sud Est.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ".

2. En premier lieu, il n'appartient pas au juge d'appel de censurer une décision juridictionnelle au motif que celle-ci est entachée d'erreur de droit ou d'appréciation.

3. En second lieu, il résulte des principes régissant la responsabilité décennale des constructeurs que l'action du détenteur de l'action décennale se prescrit par dix ans. Dans le cas des désordres affectant des parties de l'ouvrage qui n'ont pas fait l'objet de réserves au moment de la réception, ce délai d'action court à compter de la date d'effet de cette réception, même dans l'hypothèse où cette dernière est prononcée sous réserve de l'exécution de prestations manquantes. Dans le cas des désordres affectant des parties de l'ouvrage ayant fait l'objet de réserves au moment de la réception, le délai de prescription court à compter de la date d'effet de la levée des réserves.

4. Il résulte de l'instruction que les travaux de réalisation de la cuisine centrale de Vitrolles ont été réceptionnés avec effet à la date du 26 juin 2014. Si cette réception a été prononcée sous réserve de l'exécution de certaines prestations manquantes, ces réserves ne concernaient pas les désordres pour lesquels la commune sollicite la mesure d'expertise, et qui tiennent à une dégradation prématurée et avancée de la conduite principale de distribution de gaz, à la présence de corrosion et de rouille sur la conduite galvanisée, à la présence de micro-fuites de gaz au niveau des pénétrations du plancher du vide sanitaire, et à la présence de fuites sur la conduite de distribution d'eau. Dès lors, en l'état de l'instruction, il doit être considéré que le délai de l'action décennale a expiré le 26 juin 2024. Dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce délai aurait été interrompu, la demande de référé-expertise présentée par la commune de Vitrolles le 10 juillet 2024 est intervenue à une date où la créance dont se prévaut cette dernière était prescrite. Dès lors, la mesure d'expertise sollicitée ne présente pas d'utilité.

5. Il résulte de ce qui précède que la commune de Vitrolles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées au même titre par les autres parties.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Vitrolles est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des autres parties est rejeté.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Vitrolles, à la société Eiffage Construction Sud Est, à la société Gentilletti et à la société Marseille Architecture partenaires.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2025, où siégeaient :

- Mme Anne-Laure Chenal-Peter, présidente,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Caroline Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2025.

N° 24MA03072 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA03072
Date de la décision : 11/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

39-06-01-04-02-01 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAÎTRE DE L'OUVRAGE. - RESPONSABILITÉ DES CONSTRUCTEURS À L'ÉGARD DU MAÎTRE DE L'OUVRAGE. - RESPONSABILITÉ DÉCENNALE. - DÉLAI DE MISE EN JEU. - POINT DE DÉPART DU DÉLAI. - RESPONSABILITÉ DES CONSTRUCTEURS À L'ÉGARD DU MAÎTRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITÉ DÉCENNALE - POINT DE DÉPART - CAS DES TRAVAUX N'AYANT PAS FAIT L'OBJET DE RÉSERVES - DATE D'EFFET DE LA RÉCEPTION, MÊME SI LA RÉCEPTION A ÉTÉ PRONONCÉE SOUS RÉSERVE DE LA RÉALISATION DES PRESTATIONS MANQUANTES (1) - CAS DES TRAVAUX AYANT FAIT L'OBJET DE RÉSERVES AU MOMENT DE LA RÉCEPTION - DATE D'EFFET DE LA LEVÉE DES RÉSERVES (2).

39-06-01-04-02-01 Dans le cas des désordres affectant des parties de l'ouvrage qui n'ont pas fait l'objet de réserves au moment de la réception, le délai de prescription de l'action décennale court à compter de la date d'effet de cette réception, même dans l'hypothèse où cette dernière est prononcée sous réserve de l'exécution de prestations manquantes (1). Dans le cas des désordres affectant des parties de l'ouvrage ayant fait l'objet de réserves au moment de la réception, le délai de prescription court à compter de la date d'effet de la date de levée des réserves (2). ...1. Cpr., s'agissant de la prescription de l'action contractuelle prévue par l'article 1792-4-3 du code civil, CE, 20 décembre 2024, Société JSA Technology, n° 475416, T....2. Cf. CE, 16 janv. 2012, Commune du Château d'Oléron, n° 352122, T. pp. 850-854-855-907. Cpr. pour le juge judiciaire : Cass. Civ. 3ème, 19 novembre 1980, n° 79-14.620 ; Cass. Civ. 3ème, 1er février 1989, n° 87-18.555.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : SELARL IN SITU AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-11;24ma03072 ?
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