Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association syndicale libre (ASL) du domaine de Pierrelongue a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 28 juillet 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération a adopté le budget de la régie des eaux au titre de l'année 2020 et de mettre à la charge de cette communauté d'agglomération une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2007460 du 2 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et mis à sa charge une somme de 1 300 euros à verser à la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 28 avril, 13 août, 9 octobre, 15 novembre et 7 décembre 2023, l'ASL du domaine de Pierrelongue, représentée en dernier lieu par Me Bonnet, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) avant dire droit, de désigner un expert de justice avec pour mission de fournir à la Cour tous les éléments lui permettant, d'une part, de se prononcer sur le caractère équilibré et compatible avec la bonne gestion des deniers publics de " l'accord " de 2017 transférant la charge du réseau d'eau du domaine des Plèches à la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération pour un euro symbolique, ainsi que de la prise en charge totale du réseau de Lourmant et, d'autre part, de déterminer dans quelles conditions financières la commune d'Esparron-de-Verdon a bénéficié de la réalisation, par le lotisseur du domaine de Pierrelongue, de la totalité du réseau situé sous le chemin de Bians jusqu'à la limite de ce domaine et au-delà, et, notamment, si cette opération a pris ou non la forme d'une offre de concours au sens de l'ordonnance de 1959 régissant les finances publiques alors en vigueur ;
2°) à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 2 mars 2023 et cette délibération du conseil communautaire de la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération du 28 juillet 2020 en leur entier ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement en son entier et cette délibération en tant que le budget de l'eau n'incorpore pas les dépenses correspondant au périmètre de la compétence " eau " transférée en 2013 par la commune d'Esparron-de-Verdon, cette dernière incluant l'engagement de cette commune de compenser le financement et la réalisation par le lotisseur de la voirie et de la canalisation publiques entre le domaine de Pierrelongue et le village par la prise en charge de l'entretien de cette canalisation, y compris sur les parties communes de ce domaine jusqu'aux branchements particuliers ;
4°) à titre infiniment subsidiaire :
. de désigner, si nécessaire, un expert de justice avec pour mission de déterminer, d'une part, si le réseau interne au lotissement Lourmant est mobilisé pour d'autres habitations que celles incluses dans celui-ci, et à quelles fins, d'autre part, si les habitations alimentées par la conduite du chemin de Bians bénéficient d'un branchement public entre leur limite de propriété et leur branchement particulier et, enfin, de préciser s'il existe une contrepartie, au bénéfice de la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération, à l'achat en 2017, pour un euro symbolique, du réseau interne et privé du domaine des Plèches, et, dans l'affirmative, de préciser le montant et la nature de cette contrepartie ;
. d'annuler ce même jugement du 2 mars 2023 en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation de cette délibération du 28 juillet 2020 en ce que le budget adopté finance à tort l'entretien des réseaux privés des domaines de Lourmant et des Plèches, ainsi que des habitations alimentées par la conduite publique " chemin du Bians ", ensemble, et dans cette même mesure, cette délibération ;
5°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant qu'il rejette sa demande de première instance :
. c'est au terme d'un raisonnement erroné que les premiers juges ont considéré que le réseau interne au groupe d'habitations de Pierrelongue constituait un équipement propre à la charge des habitants du lotissement ;
. le tribunal administratif de Marseille ne pouvait, sans dénaturation des faits, écarter le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ; le jugement attaqué est, à ce titre, erroné en droit comme en fait ;
- en tant que contribuable communautaire, elle dispose d'un intérêt à agir, y compris pour des conclusions tendant à l'annulation du budget en tant qu'on lui fait supporter des dépenses qui n'ont pas lieu d'être ;
- la délibération contestée du 28 juillet 2020 a été adoptée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; la fin de non-recevoir opposée à ce moyen par la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération doit être écartée ;
- elle abandonne son moyen tiré de l'inégalité de traitement entre usagers du service public de l'eau ;
- la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération accepte à tort de prendre en charge l'entretien des canalisations situées sur les domaines des Plèches et de Lourmant, et celles desservant, à partir du chemin de Bians jusqu'à leurs branchements particuliers, des maisons privées, dès lors qu'il appartenait à leurs seuls propriétaires de financer les ouvrages situés sur leur propriété ; le budget de l'eau est ainsi illégal en tant qu'il admet des dépenses qui ne relèvent que de ces propriétaires :
. s'agissant du domaine de Lourmant, son commencement de preuve s'appuie à la fois sur la circonstance de sa fermeture au public et sur l'extrait du règlement communautaire de l'eau qui relève le caractère privé des propriétés et terrains situés à l'intérieur de ce domaine ; c'est à la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération qu'il appartient de démontrer la prétendue desserte d'habitations extérieures au lotissement ; elle demande que soit ordonnée une expertise sur cette question de fait ;
. la délibération du 28 novembre 2017 par laquelle la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération a approuvé une convention de transfert prenant acte de la rétrocession du réseau de l'ASL des Plèches à son profit pour un euro symbolique est entachée d'un détournement " assez manifeste de l'intérêt général, mis au service de quelques intérêts particuliers " et, pour ce motif, elle excipe de son illégalité ; cette exception d'illégalité est recevable et fondée ; il appartient à la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération d'apporter la preuve d'un échange équilibré et elle sollicite une expertise sur ce point ;
. les habitations privées construites chemin de Bians sont alimentées en eau à partir de la canalisation qu'elle a construite : sur ce point, le tribunal administratif de Marseille a d'abord commis une erreur de fait, le chemin de Bians n'étant pas un chemin privé, qui a entraîné une erreur de droit, le tribunal ayant jugé qu'il n'était pas prouvé que le " réseau de ce chemin privé serait entretenu par l'établissement de coopération intercommunale " alors qu'il est constant que toute la canalisation suivant ce chemin, depuis le réservoir communal jusqu'à l'entrée du domaine de Pierrelongue, est publique et entretenue par la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération ;
- depuis la réalisation du lotissement de Pierrelongue, l'ensemble du réseau, y compris dans sa partie publique, desservant ce domaine a été réalisé par le lotisseur, pour le compte de la commune d'Esparron-de-Verdon, et financé par lui seul, tout comme la voirie ; il existe ainsi un contrat verbal entre le domaine et cette commune, cette dernière s'étant engagée, au regard de l'importance des travaux financés à son profit par le premier, à entretenir la conduite y compris en aval de la limite du domaine public ; la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération avait l'obligation, dès le transfert à son profit de la compétence eau, de mettre son budget en accord avec les engagements pris par la commune d'Esparron-de-Verdon aux droits et devoirs de laquelle elle venait ; cette communauté d'agglomération a, de ce fait, unilatéralement et fautivement le périmètre de la compétence transférée ;
- une expertise pourrait être également ordonnée, d'une part, sur la différence technique et juridique entre un compteur sectoriel et un compteur étalonné permettant une facturation et, d'autre part, sur l'existence et le contenu des actes administratifs et budgétaires communaux établis par la commune d'Esparron-de-Verdon à l'occasion et pour la réalisation en 1973-1976 à la fois de la voirie du chemin de Bians et de la canalisation alimentant le domaine de Pierrelongue.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 juillet, 28 septembre et 7 novembre 2023, la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération, représentée par Me Berguet, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'ASL du domaine de Pierrelongue au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- si l'ASL du domaine de Pierrelongue prétend critiquer l'irrégularité du jugement, aux motifs, d'une part, qu'il retient le caractère privatif du réseau interne d'eau potable du domaine de Pierrelongue aux termes d'un " raisonnement erroné ", et, d'autre part qu'il se fonde, à tort, pour écarter toute méconnaissance du principe d'égalité, sur une différence entre sa situation et celle d'autres lotissements présents sur le territoire communal, de telles critiques ne concernent pas la régularité du jugement mais son bien-fondé ;
- dans sa requête, et avant expiration du délai d'appel, l'ASL du domaine de Pierrelongue n'a pas repris son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, la Cour n'en a donc pas été utilement saisie, et ne pourrait, sans méconnaître son office, procéder à son examen ;
- le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre les usagers du service public n'est ni opérant, ni fondé ;
- le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de la délibération du 28 novembre 2017 est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par l'ASL du domaine de Pierrelongue ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 26 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 mai 2024, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement de la 4ème chambre, en application des dispositions de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lombart,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- et les observations de Me Bonnet, représentant l'ASL du domaine de Pierrelongue.
Une note en délibéré, présentée pour l'ASL du domaine de Pierrelongue, par Me Bonnet, a été enregistrée le 25 mars 2025.
Considérant ce qui suit :
1. L'association syndicale libre (ASL) du domaine de Pierrelongue a pour objet la gestion et l'entretien de la quarantaine d'habitations composant le lotissement du même nom qui a été construit dans les années 1970 et qui borde les rives du lac de retenue d'Esparron-de-Verdon, sur le territoire de cette commune, et, en particulier, la gestion et l'entretien des voies créées, des installations, des ouvrages, des réseaux et des espaces communs. L'ASL du domaine de Pierrelongue relève appel du jugement du 2 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 28 juillet 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération a adopté le budget de la régie des eaux, au titre de l'année 2020.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, l'appelante ne critique pas utilement la régularité du jugement attaqué par le moyen pris de la dénaturation des pièces du dossier, s'agissant d'un moyen de cassation et non d'appel quand il vise une décision juridictionnelle, et par les moyens pris d'erreurs de droit et de fait qui se rapportent au bien-fondé du jugement et non à sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe de la délibération contestée :
3. Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, dont les dispositions sont applicables au fonctionnement de l'organe délibérant d'une communauté d'agglomération, en vertu de l'article L. 5211-1 du même code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) ".
4. En vertu de ces dispositions, complétant le principe général énoncé à l'article L. 2121-13 du même code, en vertu duquel tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération, la note explicative de synthèse doit apporter aux élus une information suffisamment claire, précise et complète pour les mettre à même de se prononcer en connaissance de cause sur la nature du projet inscrit à l'ordre du jour et les conséquences qu'il emporte pour la commune.
5. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.
6. L'information adéquate de l'ensemble des membres d'une assemblée délibérante, afin qu'ils puissent exercer utilement leur mandat, constitue, en principe, une garantie pour les intéressés.
7. En l'espèce, il est constant que les conseillers communautaires de la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération ont été convoqués par des courriers du 22 juillet 2020 auxquels étaient joints l'ordre du jour de la séance du 28 juillet 2020 ainsi que des tableaux budgétaires de nature à leur permettre de se prononcer en toute connaissance de cause, sur les recettes et les dépenses inscrites tant à la section d'investissement qu'à la section de fonctionnement, lesquelles distinguent les recettes et dépenses communes aux membres de l'établissement, et celles qui sont propres aux communes membres, dont la commune d'Esparron-de-Verdon. Dans ces conditions, les conseillers communautaires, bien que n'ayant pas été destinataires d'un document intitulé " note explicative de synthèse ", ont bénéficié d'une information préalable suffisante pour appréhender le contexte et les motifs du projet de délibération qui était soumis à leur vote, sans que, contrairement à ce que soutient l'ASL du domaine de Pierrelongue, il ait été nécessaire de les avoir spécifiquement avisés de l'action contentieuse menée par cette dernière devant la juridiction administrative afin que la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération reconnaisse que la gestion et l'entretien du réseau situé dans le périmètre du domaine de Pierrelongue lui incombent. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 2121-12 du
code général des collectivités territoriales doit être écarté, sans qu'il soit besoin d'examiner la
fin de non-recevoir qu'y oppose en défense la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération.
En ce qui concerne la légalité interne de la délibération contestée :
S'agissant du moyen tiré de l'inégalité de traitement entre usagers du service public de l'eau :
8. Le moyen tiré de l'inégalité de traitement entre usagers du service public de l'eau a été expressément abandonné devant la Cour par l'ASL du domaine de Pierrelongue dans son mémoire complémentaire susvisé, enregistré sur l'application informatique Télérecours le 13 août 2023.
Il n'y a donc plus lieu d'examiner ce moyen.
S'agissant du moyen tiré de l'existence d'un " droit propre " de l'ASL du domaine de Pierrelongue à ce que le budget litigieux incorpore les dépenses d'entretien de son réseau d'eau potable :
9. L'ASL du domaine de Pierrelongue expose que l'ensemble du réseau d'eau potable,
y compris dans sa partie publique, desservant le domaine de Pierrelongue a été réalisé par le lotisseur, pour le compte de la commune d'Esparron-de-Verdon, et financé par lui seul, tout comme la voirie. Pour la première fois devant la Cour, elle soutient qu'un " contrat verbal " la lierait donc à cette commune, cette dernière s'étant engagée, au regard de l'ampleur des travaux ainsi financés à son profit, à entretenir la conduite y compris en aval de la limite du domaine public. L'appelante en conclut que, suite au transfert intervenu de plein droit, en application des dispositions de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales, à compter du 1er janvier 2013, de la compétence " Eau " à la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération, celle-ci avait l'obligation de tirer les conséquences de ce contrat verbal dans son budget, en y incorporant ses dépenses d'entretien. Cependant, la seule absence de facturation jusqu'en 2013 ne permet pas d'établir l'existence d'un tel contrat verbal.
Il ressort en outre des pièces du dossier que, dans le " devis descriptif général " joint au dossier de demande de permis de construire déposé le 8 mars 1974, il est indiqué que : " L'alimentation en eau du Domaine sera assurée par le réseau communal. / A cet effet, une canalisation partant du réservoir communal situé sur la colline dominant le village à 1'Ouest, rejoindra et suivra la route des Bians en construction, et pénétrera dans le terrain en même temps qu'elle. / (Cette canalisation sera communale depuis le réservoir jusqu'à l'entrée du terrain et desservira en même temps toute la zone du secteur des Bians). " Le cahier des charges du domaine de Pierrelongue adopté le 13 mai 1976 énumère, en son article 15, au titre des équipements communs à l'usage des propriétaires du groupe d'habitations, les réseaux, canalisations et ouvrages servant à la distribution de l'eau " qui ne sont pas la propriété des services de distribution et qui ne se trouvent pas compris entre le branchement ou les compteurs particuliers de chaque propriétaire et sa maison ". Au demeurant, l'objet même de l'ASL du domaine de Pierrelongue est précisément
" la gestion et l'entretien (...) des réseaux ". Par ailleurs, il ne ressort d'aucune des pièces versées aux débats, et notamment pas de la motion adoptée par ses conseillers municipaux le 14 décembre 2016, que la commune d'Esparron-de-Verdon aurait accepté ou décidé la rétrocession du réseau de distribution d'eau interne du domaine dans son domaine public. Les travaux qu'a pu effectuer la commune d'Esparron-de-Verdon avant le transfert de la compétence " Eau " à la communauté d'agglomération, en particulier, la pose d'un compteur et la réparation de fuites, n'ont pas été, à eux seuls, de nature à transférer à la personne publique la propriété des canalisations en cause, ni à conférer à celles-ci une utilité autre que la seule satisfaction des besoins des propriétaires du domaine. Si la présence d'un compteur collectif peut, le cas échéant, faciliter l'identification de la limite entre le réseau public et le branchement du lotissement, les conditions d'installation et les caractéristiques de ce compteur sont par elles-mêmes sans incidence sur cette question. Par suite, et alors que, par un arrêt n° 21MA02581 du 5 juin 2023, devenu irrévocable suite à la non-admission, par une décision n° 478014 du Conseil d'Etat du 16 février 2024, du pourvoi introduit par l'ASL du domaine de Pierrelongue, la Cour a jugé que les canalisations d'eau potable dont l'ASL du domaine de Pierrelongue demande l'entretien par la communauté d'agglomération, qui sont destinées à répondre aux besoins propres des seuls résidents du lotissement éponyme, n'appartiennent pas au réseau public de distribution d'eau potable que la communauté d'agglomération a la charge d'entretenir, l'ASL du domaine de Pierrelongue n'est pas fondée à se prévaloir d'un engagement verbal de la commune d'Esparron-de-Verdon. Son moyen tiré du non-respect par le budget litigieux d'un tel engagement doit donc être écarté.
S'agissant du moyen tiré de ce que le budget litigieux incorpore à tort les dépenses d'entretien des réseaux d'eau potable des domaines de Lourmant et des Plèches, et des propriétés riveraines du chemin de Bians :
10. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des relevés cadastraux produits en défense par la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération ainsi que de la carte figurant à la page 6 de son mémoire enregistré sur l'application informatique Télérecours le 5 juillet 2023, que des propriétés ont été construites aux alentours du domaine de Lourmant, à l'instar de celles bâties sur les parcelles cadastrées section F nos 215, 252 et 278, et qu'alors même qu'elles sont extérieures à ce domaine, elles sont également desservies par la canalisation d'eau potable qui le traverse. Si, à cet égard, l'ASL du domaine de Pierrelongue se prévaut d'un tableau du rapport final dressé, à une date indéterminée, pour le schéma directeur d'alimentation en eau potable (SDAEP) Esparron-de-Verdon dans lequel le réseau du " hameau " de Lourmant est classé en " privé ",
il est précisé, dans les développements de ce même rapport, que la liste figurant dans ce tableau a trait aux " secteurs dont la gestion du réseau reste à clarifier ".
11. En deuxième lieu, s'agissant du domaine des Plèches, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération adoptée le 28 novembre 2017, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Durance-Luberon-Verdon-Agglomération a approuvé une convention de transfert prévoyant la rétrocession, pour un euro symbolique, à son profit, du réseau d'eau potable géré depuis 1967 par l'ASL des Plèches, laquelle a, au demeurant, été dissoute le 1er août 2018. Cette délibération ne constitue pas la base légale de la délibération contestée du conseil communautaire de la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération portant adoption du budget de la régie des eaux au titre de l'année 2020, laquelle n'a pas davantage été prise pour son application. Par suite, non seulement l'ASL du domaine de Pierrelongue ne saurait utilement se prévaloir, par la voie d'exception, de l'illégalité de cette délibération du 28 novembre 2017, mais encore, elle n'est pas fondée à prétendre que le budget en litige ne pouvait considérer comme une dépense de l'établissement public les frais d'entretien du réseau public du domaine des Plèches.
12. En troisième et dernier lieu, si l'ASL du domaine de Pierrelongue soutient que son lotisseur a entièrement financé le réseau en eau potable se trouvant sous le chemin de Bians et alimentant les habitations qu'il dessert, sans au demeurant justifier que celles-ci seraient alimentées en eau potable à partir de la canalisation construite pour son domaine, il ressort des pièces du dossier que, ce chemin constituant une voie publique, le réseau d'eau potable en tréfonds, qui dessert une pluralité de propriétés et n'est pas un équipement propre à certaines d'entre elles, a la nature d'un équipement public.
13. Il s'ensuit que l'ASL du domaine de Pierrelongue n'est pas fondée à soutenir que le budget adopté par la délibération contestée serait entaché d'illégalité en tant qu'il prévoit les dépenses d'entretien de ces parties du réseau public. Par conséquent, ce moyen doit être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise avant dire droit, l'ASL du domaine de Pierrelongue n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
15. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
16. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération, laquelle n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme quelconque à l'ASL du domaine de Pierrelongue au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
17. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'appelante le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'ASL du domaine de Pierrelongue est rejetée.
Article 2 : L'ASL du domaine de Pierrelongue versera à la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale libre (ASL) du domaine de Pierrelongue et à la communauté d'agglomération Durance-Lubéron-Verdon-Agglomération.
Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, où siégeaient :
- M. Revert, président,
- M. Martin, premier conseiller,
- M. Lombart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2025.
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No 23MA01068
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