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09/05/2025 | FRANCE | N°24MA01927

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 09 mai 2025, 24MA01927


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... E..., Mme D... C... épouse E... et A... l'arbre au soleil ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la saisie à tiers détenteur émise le 5 octobre 2021 pour un montant de 16 000 euros, ensemble la décision en date du 25 novembre 2021 par laquelle le maire de la commune du Lavandou a rejeté leur recours daté du 18 octobre 2021 ainsi que la décision implicite de rejet du directeur départemental des finances publiques et de les décharger du paiement de

la redevance d'occupation du domaine public due au titre de l'année 2020.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E..., Mme D... C... épouse E... et A... l'arbre au soleil ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la saisie à tiers détenteur émise le 5 octobre 2021 pour un montant de 16 000 euros, ensemble la décision en date du 25 novembre 2021 par laquelle le maire de la commune du Lavandou a rejeté leur recours daté du 18 octobre 2021 ainsi que la décision implicite de rejet du directeur départemental des finances publiques et de les décharger du paiement de la redevance d'occupation du domaine public due au titre de l'année 2020.

Par un jugement n° 2200231 du 20 juin 2024, le tribunal administratif de Toulon a, par son article 1er, déchargé M. et Mme E... de l'obligation de payer la somme de 16 000 euros, par son article 2, dit que M. et Mme E... ont l'obligation de payer la somme de 7 000 euros, par son article 3, ordonné à la commune du Lavandou de restituer à M. et Mme E... la somme de 9 000 euros et par son article 6, rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par une ordonnance en rectification d'erreur matérielle du 2 juillet 2024, la présidente du tribunal administratif de Toulon a rectifié le dispositif du jugement précité et, par son article 1er, déchargé M. et Mme E... de l'obligation de payer, au titre des redevances d'occupation du domaine public pour l'année 2020, toute somme supérieure à 7 000 euros et, par son article 4, rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 23 juillet 2024 et 10 février 2025, la commune du Lavandou, représentée par Me Roi, doit être regardée comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 20 juin 2024, tel que rectifié par ordonnance en rectification d'erreur matérielle du 2 juillet 2024, en tant qu'il a déchargé M. et Mme E... de l'obligation de payer, au titre des redevances d'occupation du domaine public pour l'année 2020, toute somme supérieure à 7 000 euros ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. et Mme E... ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme E... le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de première instance était irrecevable car tardive ;

- le jugement, bien que rectifié par ordonnance, est entaché d'une contradiction entre les motifs et le dispositif ;

- les intéressés ne remplissent pas les conditions posées par l'article 1er de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 pour pouvoir prétendre au bénéfice d'une exonération à hauteur d'un quart du montant de la redevance annuelle d'occupation du domaine public due au titre de l'année 2020.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 octobre 2024, M. B... E..., Mme D... C... épouse E... et A... l'arbre au soleil, représentés par Me Hoffmann, demandent à la Cour :

1°) de rejeter la requête de la commune du Lavandou ;

2°) de les décharger de la somme de 9 000 euros au titre de la redevance d'occupation domaniale de l'année 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Lavandou le paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens de la requête sont infondés.

Par un courrier du 13 mars 2025, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour statuer sur les conclusions aux fins de décharge présentées par M. et Mme E... qui, en application des dispositions combinées des articles L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et L. 281 du livre des procédures fiscales (3ème alinéa 2° c), relèvent de la compétence du juge de l'exécution.

Des observations en réponse au moyen d'ordre public ont été produites les 17 mars 2025 et 24 avril 2025 pour la commune du Lavandou et le 16 avril 2025 pour M. et Mme E... et A... l'arbre au soleil et communiquées les 17 mars, 16 avril et 25 avril 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Hoffmann pour M. et Mme E... et A... l'arbre au soleil.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... sont bénéficiaires, depuis le 2 octobre 2018, d'une autorisation pour l'occupation de la cellule n° H 26, bâtiment 7, sur le port de plaisance de la commune du Lavandou. Le local est occupé à usage d'exploitation d'un restaurant gastronomique. La redevance annuelle fixée par l'autorisation d'occupation du domaine public précitée s'élève à la somme de 36 000 euros TTC. Un titre exécutoire d'un montant de 36 000 euros a été émis, pour le recouvrement de la redevance due au titre de l'année 2020, le 8 août 2020. Par une lettre en date du 16 octobre 2020, M. et Mme E... ont joint un paiement de 18 000 euros et, en raison du confinement dû à la pandémie de Covid 19, demandé un échelonnement de paiement du solde. Par une décision du 20 octobre 2020, le directeur départemental des finances publiques du Var leur a accordé un échéancier de paiement à raison de 6 000 euros mensuels au titre des mois de novembre 2020, décembre 2020 et janvier 2021. M. et Mme E... ont réglé une somme supplémentaire de 2 000 euros mais ne se sont pas acquittés du solde, soit la somme de 16 000 euros et ont, par une lettre du 27 novembre 2020, présenté une nouvelle demande d'échelonnement. Un nouvel échéancier leur a été octroyé par décision du 3 décembre 2020, échéancier qui n'a pas, non plus, été respecté. En conséquence, une saisie à tiers détenteur a été émise le 5 octobre 2021 entre les mains du Crédit du Nord pour recouvrement de la somme de 16 000 euros. Par une lettre du 18 octobre 2021 adressée à la commune du Lavandou, M. et Mme E... ont contesté cette saisie à tiers détenteur. Un refus leur a été opposé par décision du 25 novembre 2021. Ils ont, en parallèle, saisi le directeur départemental des finances publiques qui n'a pas répondu à leur demande. M. et Mme E... ainsi que A... l'arbre au soleil ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la saisie à tiers détenteur émise le 5 octobre 2021, ensemble la décision précitée en date du 25 novembre 2021 ainsi que la décision implicite de rejet du directeur départemental des finances publiques et de les décharger du paiement de la redevance d'occupation du domaine public due au titre de l'année 2020. Par un jugement du 20 juin 2024 tel que rectifié par une ordonnance en rectification d'erreur matérielle du 2 juillet 2024, le tribunal, après avoir estimé que le juge administratif était incompétent pour statuer sur les conclusions aux fins d'annulation a, d'une part, déchargé M. et Mme E... de l'obligation de payer, au titre des redevances d'occupation du domaine public pour l'année 2020, toute somme supérieure à 7 000 euros et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la requête. La commune du Lavandou interjette appel de ce jugement en tant qu'il a déchargé M. et Mme E... de l'obligation de payer, au titre des redevances d'occupation du domaine public pour l'année 2020, toute somme supérieure à 7 000 euros.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) / 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. / (...) / L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. / 2° La contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / (...) / Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés : / (...) / c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution ".

4. Il ressort des articles L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et L. 281 du livre des procédures fiscales précités que l'ensemble du contentieux du recouvrement des créances non fiscales des collectivités territoriales est de la compétence du juge de l'exécution, tandis que le contentieux du bien-fondé de ces créances est de celle du juge compétent pour en connaître sur le fond.

5. M. et Mme E... et A... l'arbre au soleil ont saisi le tribunal administratif de Toulon de conclusions tendant à l'annulation de la saisie à tiers détenteur du 5 octobre 2021 émise pour le recouvrement des sommes dues au titre de la redevance d'occupation domaniale de l'année 2020, et des décisions prises subséquemment tant par le maire de la commune du Lavandou que par le directeur départemental des finances publiques ainsi qu'à la décharge de l'obligation de payer. Ces conclusions, tant aux fins d'annulation qu'aux fins de décharge, constituent, dans leur ensemble, une contestation relative au recouvrement d'une créance non fiscale d'une collectivité territoriale et relèvent, par suite, en application des dispositions précitées, de la compétence du juge de l'exécution.

6. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement du 20 juin 2024 tel que rectifié par ordonnance du 2 juillet 2024 par lequel M. et Mme E... ont été déchargés de l'obligation de payer, au titre des redevances d'occupation du domaine public pour l'année 2020, toute somme supérieure à 7 000 euros en tant que celui-ci s'est estimé compétent pour statuer sur les conclusions aux fins de décharge et, statuant par voie d'évocation, de rejeter la demande de M. et Mme E... tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 9 000 euros comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur les frais d'instance :

7. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme E... et A... l'arbre au soleil doivent, dès lors, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune du Lavandou en application des dispositions précitées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2200231 du 20 juin 2024 tel que rectifié par ordonnance du 2 juillet 2024 par lequel M. et Mme E... ont été déchargés de l'obligation de payer, au titre des redevances d'occupation du domaine public pour l'année 2020, toute somme supérieure à 7 000 euros, est annulé en tant qu'il s'est estimé compétent pour statuer sur les conclusions aux fins de décharge.

Article 2 : Les conclusions aux fins de décharge présentées par M. et Mme E... et A... l'arbre au soleil sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme D... C... épouse E..., à A... l'arbre au soleil et à la commune du Lavandou.

Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques du Var.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2025, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- M. Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 mai 2025.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01927
Date de la décision : 09/05/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-03-02-03 Comptabilité publique et budget. - Créances des collectivités publiques. - Recouvrement. - Compétence.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : HOFFMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-09;24ma01927 ?
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