Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 16 août 2021 par laquelle la maire du Lauzet-Ubaye lui a infligé la sanction disciplinaire d'avertissement et de mettre à la charge de la commune du Lauzet-Ubaye une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2110953 du 8 février 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ainsi que les conclusions présentées par la commune du Lauzet-Ubaye au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 mars 2024, Mme A..., représentée par Me Heulin, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Marseille du 8 février 2024 ;
2°) d'annuler cette décision de la maire du Lauzet-Ubaye du 16 août 2021 ;
3°) de mettre à la charge de la commune du Lauzet-Ubaye la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif de Marseille a fait une inexacte appréciation des éléments du dossier ;
- aucun manquement au devoir d'obéissance hiérarchique n'est établi et la maire du Lauzet-Ubaye a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- la règle Non bis in idem a été méconnue ;
- cette sanction traduit l'intention de la précédente maire du Lauzet-Ubaye de lui nuire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2025, la commune du Lauzet-Ubaye, représentée par Me Singer, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 10 mars 2025, la clôture de l'instruction, initialement fixée au
10 mars 2025, a été reportée au 10 avril 2025, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lombart,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- et les observations de Me Heulin, représentant Mme A..., et celles de Me Singer, représentant la commune du Lauzet-Ubaye.
Considérant ce qui suit :
1. Adjointe administrative, Mme A... a intégré les services de la commune du Lauzet-Ubaye le 2 avril 2013. Par une décision du 16 août 2021, la maire lui a infligé la sanction disciplinaire d'avertissement. Mme A... relève appel du jugement du 8 février 2024 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité de la sanction d'avertissement infligée à Mme A... :
2. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
3. D'une part, aux termes de l'article 28 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. (...) ". Selon l'article 29 de la même loi, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 89 de la loi susvisée du 26 janvier 1984
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa
rédaction applicable au présent litige : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; / le blâme ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / Deuxième groupe : / la radiation du tableau d'avancement ; / l'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu
par l'agent ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ;
/ Troisième groupe : / la rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à un échelon correspondant à un indice égal ou immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent ;
/ l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; / Quatrième groupe : / la mise à la retraite d'office ; / la révocation. Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. (...) "
5. En l'espèce, pour infliger à Mme A..., par sa décision contestée du 16 août 2021, la sanction disciplinaire d'avertissement, la maire du Lauzet-Ubaye lui a reproché ne pas lui avoir transmis, comme elle le lui avait pourtant expressément demandé par un courriel daté du 20 juillet 2021, des demandes d'autorisations d'absence pour le lundi 19 juillet 2021 et le jeudi 22 juillet 2021, journées au cours desquelles elle s'était absentée afin de passer des examens médicaux, et d'avoir ainsi manqué à son obligation d'obéissance hiérarchique résultant des dispositions précitées de l'article 28 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Il ressort effectivement des pièces du dossier que l'appelante a répondu à ce courriel de la maire en écrivant qu'elle n'avait pas à faire signer des demandes d'autorisation d'absence. Nonobstant la circonstance qu'elle a transmis des justificatifs pour ses deux journées d'absence, le refus d'obéissance de Mme A... est ainsi matériellement établi. Alors que les autorisations d'absence, y compris pour se rendre à une consultation médicale, ne constituent pas un droit pour les agents publics, Mme A..., qui, au demeurant, ne pouvait pas s'exonérer de l'ordre direct qui lui avait ainsi été donné par la maire en se bornant à se prévaloir d'un avis du centre de gestion n'établit, ni même n'allègue que cet ordre était manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. Par suite, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la maire du Lauzet-Ubaye aurait commis une erreur dans la qualification juridique des faits en retenant à son encontre la faute disciplinaire résultant de la méconnaissance des dispositions rappelées ci-dessus au point 4 du présent arrêt, de nature à justifier une sanction disciplinaire, en l'occurrence, un avertissement, lequel est la plus faible des sanctions prévues par les dispositions de l'article 89 de la loi susvisé du 26 janvier 1984 et dont l'infliction n'est au demeurant pas entachée de disproportion. Par conséquent, ce moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance du principe Non bis in idem :
6. Si Mme A... reproche à la maire du Lauzet-Ubaye le ton comminatoire avec lequel elle lui a recommandé, dans un courriel du 16 juillet 2021, de ne plus oublier de l'avertir au préalable de ses absences, un tel rappel à l'ordre ne constitue pas une sanction disciplinaire au sens des dispositions citées au point 4 de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984. Par suite, l'appelante ne saurait soutenir qu'elle aurait été sanctionnée plusieurs fois à raison des mêmes faits, en méconnaissance du principe Non bis in idem. Il s'ensuit que ce moyen doit également être écarté.
En ce qui concerne le détournement de pouvoir :
7. Si Mme A... soutient que la décision contestée a été prise dans le but de lui nuire, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi par la seule circonstance, pour regrettable qu'elle soit, que l'avertissement litigieux a été illégalement inscrit à son dossier, en méconnaissance des dispositions alors applicables de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984.
Ce moyen doit, dès lors, être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la maire du Lauzet-Ubaye du 16 août 2021.
Sur les dépens :
9. La présente instance n'a pas donné lieu à dépens au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions de Mme A... présentées sur ce fondement ne peuvent donc qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "
11. D'une part, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Lauzet-Ubaye, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... sollicite au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
12. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions par la commune intimée.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune du Lauzet-Ubaye tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune du Lauzet-Ubaye.
Délibéré après l'audience du 27 mai 2025, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Lombart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juin 2025.
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No 24MA00550