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29/09/2020 | FRANCE | N°18NC03205

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 29 septembre 2020, 18NC03205


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... G... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler, d'une part, l'arrêté du 13 janvier 2017 par lequel le maire de la commune de Morvillars l'a placée en congé de maladie ordinaire à demi traitement à compter du 23 mai 2016 en tant qu'il refuse implicitement de reconnaitre que son accident de travail est imputable au service et, d'autre part, l'avis de la commission de réforme du 5 octobre 2016.

Par un jugement no 1700508 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Besan

on a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... G... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler, d'une part, l'arrêté du 13 janvier 2017 par lequel le maire de la commune de Morvillars l'a placée en congé de maladie ordinaire à demi traitement à compter du 23 mai 2016 en tant qu'il refuse implicitement de reconnaitre que son accident de travail est imputable au service et, d'autre part, l'avis de la commission de réforme du 5 octobre 2016.

Par un jugement no 1700508 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire rectificatif, enregistrés le 26 novembre 2018 et le 29 novembre 2018, Mme C... G..., représentée par Me A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 25 septembre 2018 ;

2°) avant dire droit d'ordonner une expertise réalisée par un médecin psychiatre ;

3°) d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2017 par lequel le maire de la commune de Morvillars l'a placée en congé de maladie ordinaire à demi traitement à compter du 23 mai 2016 en tant qu'il refuse implicitement de reconnaitre que son accident de travail est imputable au service ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Morvillars la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur la demande d'expertise ;

- si elle n'a pas été victime d'un accident de travail le 22 février 2016, la dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail a pu être constatée à compter de cette date ;

- elle a été victime d'un harcèlement moral à l'origine de l'arrêt de travail du 22 février 2016 ;

- la commune de Morvillars n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail, faute qui permet d'imputer son arrêt de travail au service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2019, la commune de Morvillars, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme G... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour la commune de Morvillars.

1. Mme G..., adjoint administratif territorial, affectée à la médiathèque de la commune de Morvillars, a été placée en congé de longue maladie à compter de juin 2012 en raison d'un état dépressif puis en congé de longue durée à compter de juillet 2013. Elle a repris le service dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique à compter de juillet 2015. Le 22 février 2016, le médecin traitant de l'intéressée lui a prescrit un arrêt de travail motivé par " un accident de service ". Mme G... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de cet accident. A la suite de l'avis de la commission de réforme du 5 octobre 2016 défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité de sa pathologie au service, le maire de Morvillars a, par un arrêté du 13 janvier 2017, placé Mme G... en congé de maladie ordinaire à demi-traitement à compter du 23 mai 2016. Mme G... a demandé l'annulation, d'une part, de l'avis émis par la commission de réforme le 5 octobre 2016 et, d'autre part, de l'arrêté du 13 janvier 2017 en tant qu'il ne reconnait pas l'imputabilité au service de l'accident dont elle a déclaré avoir été victime le 22 février 2016. Par un jugement du 25 septembre 2018, dont Mme G... fait appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Si l'arrêt de travail prescrit à Mme G... le 22 février 2016 mentionne comme motif un " accident de travail ", il est constant que l'intéressée, qui au demeurant ne travaillait pas ce jour-là, n'a fait état d'aucun fait précis et daté à l'origine de son état dépressif. Par ailleurs, la dégradation de son état de santé s'est réalisée progressivement. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que sa pathologie n'était pas imputable à un accident de service.

5. Mme G... soutient que son état dépressif, constaté par son médecin traitant le 22 février 2016, est imputable au service dès lors que les préconisations du médecin du travail n'ont pas été suivies par la commune, qu'elle a été affectée à la médiathèque pour effectuer des tâches sans rapport avec celles qu'un adjoint administratif a vocation à exécuter et sans disposer d'un bureau et du matériel nécessaire à son travail. Enfin, elle ajoute qu'elle a été victime d'un harcèlement moral.

6. Toutefois, d'une part, si Mme G... a fait l'objet en 2011 et en 2012 respectivement d'une radiation des cadres et d'un blâme, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces sanctions, nonobstant la circonstance que la première a été retirée par le maire et que la seconde a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Besançon, ont excédé l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'affectation de Mme G... à la médiathèque, avec son accord, selon les termes de l'arrêté du 7 février 2012, n'aurait pas été pris dans l'intérêt du service. En outre, il ressort de la fiche de poste de l'intéressée que les tâches qui lui ont été confiées n'étaient pas étrangères à celles qui pouvaient être confiées à un adjoint administratif territorial. La circonstance que la commune de Morvillars n'a pas respecté les prescriptions du médecin du travail concernant l'aménagement des horaires de travail n'est pas de nature à établir que l'intéressée aurait été victime d'agissement répétés de harcèlement moral, en particulier depuis sa reprise du service le 30 juillet 2015. Il ressort enfin des pièces du dossier que, par son comportement, notamment son manque de discrétion concernant sa vie privée et ses relations conflictuelles avec le maire, Mme G... a favorisé l'apparition des tensions relationnelles dans le service. Par suite, les faits invoqués par Mme G... ne sont pas de nature à faire présumer qu'elle a été victime d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, ni a fortiori que sa pathologie serait imputable à de tels agissements.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme G..., après avoir été placée en congé de longue maladie à compter de juin 2012 puis en congé de longue durée à compter de juillet 2013 en raison d'un état anxio-dépressif, a repris son service, de manière effective, à son poste d'agent de médiathèque le 30 juillet 2015 en mi-temps thérapeutique. Si l'intéressée soutient que sa dépression est liée à ses conditions de travail, notamment à son affectation à un poste à la médiathèque ne correspondant pas à son cadre d'emploi, selon des horaires qui ne satisfaisaient pas aux préconisations du médecin du travail et qu'elle ne disposait pas d'un bureau personnel, ni du matériel nécessaire à l'accomplissement de son travail, il ressort de sa fiche de poste et de la fiche d'agent de médiathèque, ainsi qu'il a été indiqué au point 6, que les tâches qui lui ont été confiées relevaient de celles qui peuvent être exercées par un agent de son cadre d'emploi. Par ailleurs, même si Mme G... ne disposait pas d'un siège et d'un bureau adaptés à ses tâches et que les préconisations du médecin du travail relatives à l'aménagement de ses horaires n'ont pas été respectées, ces circonstances ne sont pas de nature à établir que sa pathologie serait directement liée à ses conditions de travail. Il ressort des pièces du dossier que Mme G... a perdu prématurément sa fille à l'âge de dix ans et demi, en 2010, et qu'elle a présenté, selon le psychiatre auteur d'un certificat médical du 26 septembre 2012, " une nouvelle décompensation anxio-dépressive sévère au décours du décès de sa fille ". Selon un autre rapport établi par le médecin psychiatre désigné par le comité médical en 2015 en vue d'une prolongation du mi-temps thérapeutique, Mme G... présentait un " état psychique non stabilisé, caractérisé par des troubles anxio-dépressifs encore très marqués, un travail de deuil encore non résolu et une difficulté à se projeter dans une reprise de son activité professionnelle de façon apaisée ". Dans un autre rapport médical du 15 septembre 2016, le psychiatre, chargé d'examiner la requérante à la demande de la commission de réforme, a confirmé que le syndrome anxio-dépressif de Mme G... était mal stabilisé et a précisé qu'elle présentait des troubles psychiatriques à type de dépression depuis au moins 2011, vraisemblablement et naturellement en rapport avec le décès de sa fille cadette. Ce médecin agréé a ajouté que s'il ressortait des pièces du dossier que les préconisations du médecin du travail concernant en particulier l'aménagement des horaires de travail de l'intéressée n'ont pas été respectés, cette circonstance ne constituait pas la cause directe de sa pathologie, même si l'ambiance de travail n'avait pas été favorable au rétablissement de Mme G.... Les autres certificats médicaux produits par la requérante, établis antérieurement à la reprise du service en 2015, qui se bornent, pour l'essentiel, à mentionner un syndrome dépressif avec anxiété réactionnelle à des problèmes professionnels, sur la seule base des déclarations de l'intéressée, ne sont pas suffisantes pour établir que sa pathologie serait directement liée à une dégradation de ses conditions de travail. Si le médecin du travail a préconisé, dans un avis du 29 juin 2015, une reprise du travail à mi-temps thérapeutique dans une autre collectivité que la commune de Morvillars sous peine d'une détérioration de l'état de santé de Mme G..., cette circonstance n'est pas davantage, par elle-même, de nature à établir un lien direct entre sa pathologie et ses conditions de travail. Il ressort en outre des pièces du dossier, ainsi qu'il a été indiqué au point 6, que par son comportement, Mme G... a favorisé l'apparition des tensions relationnelles dont elle se plaignait. Dans ces conditions, même si les conditions de travail ont pu contribuer à la persistance de la dépression de la requérante, elles ne peuvent être regardées comme la cause directe de sa maladie. Par suite, Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que sa maladie n'était pas imputable au service.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur les dépens et les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Morvillars, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme G... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme G... la somme que la commune de Morvillars demande au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Morvillars sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... et à la commune de Morvillars.

N° 18NC03205 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC03205
Date de la décision : 29/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : HILD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-29;18nc03205 ?
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