Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de de Châlons-en-Champagne d'annuler d'une part, les arrêtés des 17 juillet 2019 et du 3 janvier 2020 par lesquels le maire de la commune de Bourbonne-les-Bains a réglementé la circulation et le stationnement dans la rue de la Vierge et, d'autre part, la décision de la commune de Bourbonne-les-Bains de modifier l'accès à l'école maternelle.
Par un jugement n° 1902919 du 16 février 2021, le tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 avril 2021 et 7 juin 2022, Mme A..., représentée par Me Welzer, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures:
1°) d'annuler ce jugement n° 1902919 du 16 février 2021 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler les arrêtés municipaux des 17 juillet 2019 et 3 janvier 2020 ainsi que la décision du maire de la commune de Bourbonne-les-Bains modifiant l'entrée de l'école maternelle ;
3°) d'enjoindre à la commune de Bourbonne-les-Bains de rétablir l'entrée de l'école maternelle à partir de la cour de l'école ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bourbonne-les-Bains une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- contrairement à ce que soutient la commune, en demandant l'annulation du jugement du 16 février 2021 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, elle doit être regardée comme demandant dans sa requête d'appel également l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2019, lequel a au demeurant été abrogé par l'arrêté du 3 janvier 2020 ;
- il n'y a également eu aucun recours anticipé en première instance : sa demande d'annulation de l'arrêté du 3 janvier 2020 formulée dans un mémoire additionnel présentait un lien suffisant avec la requête initiale pour être jugée recevable ;
- les arrêtés des 17 septembre 2019 et 3 janvier 2020 portant restriction du droit de circuler dans la rue de la vierge sont insuffisamment motivés ;
- l'arrêté du 3 janvier 2020 portant création d'une rampe d'accès handicapés par un arrêté du 3 janvier 2020 modifie l'aspect extérieur de l'école maternelle alors que l'église Notre Dame de l'Assomption est classée monument historique et se situe à moins de 500 mètre de l'école maternelle ; l'autorisation de l'architecte des bâtiments de France (ABF) aurait donc dû être demandée conformément aux articles L. 621-30, L. 621-32 et L. 632-2 du code du patrimoine ;
- les arrêtés municipaux des 17 juillet 2019 et 3 janvier 2020 et la décision rétablissant l'entrée de l'école maternelle rue de la vierge sont entachés d'erreur d'appréciation :
. la vue est bloquée désormais par la rampe d'accès empêchant une surveillance de la voie publique ;
. la sécurisation des enfants est moins bien assurée ;
. la commune se contredit dans ses écritures : elle précise simultanément que la circulation des voitures a été modifiée dans la rue de la Vierge car elle générait un danger pour les enfants et qu'elle n'a jamais eu connaissance d'accident à la sortie de l'école ;
. ces décisions entraînent des gaspillages des ressources publiques ;
- toutes ces décisions litigieuses sont entachées d'un détournement de pouvoir :
. l'installation de la rampe a un impact négatif sur son domicile alors qu'elle est une opposante politique au maire ;
. son habitation ne bénéficie plus de place de stationnement alors que la rue de la Vierge ne comporte que cinq maisons et qu'elle a la plus imposante ;
- les arrêtés des 17 juillet 2019 et 3 janvier 2020 portent atteinte aux aisances de voirie ; les riverains d'une voie publique ont le droit d'accéder librement à leur propriété, ce qui n'est plus le cas pour les habitants de la rue de la Vierge :
. l'accès à sa propriété a été rendu plus difficile ;
. elle ne dispose plus d'une place de stationnement devant chez elle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2021, la commune de
Bourbonne-les-Bains, représentée par Me Choffrut, conclut au rejet de la requête et à ce que Mme A... soit condamnée à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
s'agissant de l'arrêté du 17 juillet 2019 :
- elle prend acte que Mme A... ne demande pas dans sa requête introductive d'appel du 16 avril 2021 l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2019 ; en tout état de cause, cet arrêté, qui est proportionné et motivé, ne lui cause pas grief puisqu'il autorise la circulation des riverains dont elle fait partie ;
s'agissant de l'arrêté du 3 janvier 2020 portant création d'une rampe d'accès :
- à titre principal, la requête est irrecevable : la demande d'annulation de la décision du 3 janvier 2020 a été enregistrée au greffe du tribunal administratif le 25 novembre 2019 alors que la décision n'était pas encore prise ; un recours anticipé n'est pas recevable ;
- à titre subsidiaire, les motifs d'annulation avancés par Mme A... ne sont pas fondés :
- l'avis de l'architecte de bâtiments de France n'était pas requis au regard des articles L. 621-30 II a2 et L. 621-32 du code du patrimoine ; il n'y a aucune co-visibilité entre la rampe et un monument historique ; la rampe est réalisée sur le domaine public et n'affecte pas l'aspect extérieur du bâtiment ;
- la rampe d'accès n'empêche pas le stationnement dans la rue, ni les sorties de garage ; elle participe à la sécurité de l'accès pour les élèves en élargissant le trottoir devant la porte de l'école.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales
- le code du patrimoine ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,
- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,
- et les observations de Me Degryse, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté en date 17 juillet 2019, le maire de la commune de Bourbonne-les-Bains, consécutivement à la décision de modifier l'accès à l'école en la rétablissant rue de la Vierge, a décidé qu'à compter du 1er septembre 2019 la circulation dans cette rue sera interdite dans les deux sens. La circulation et le stationnement restaient cependant autorisés pour les riverains de cette voie et les véhicules de secours. Par un arrêté modifié du 3 janvier 2020, le même maire a autorisé l'installation d'une rampe fixe et permanente sur le domaine public permettant l'accès aux personnes à mobilité réduite à l'entrée de l'école maternelle, rue de la Vierge. Pour tenir compte de cet aménagement, le 3 janvier 2020, le maire de la commune de Bourbonne-les-Bains a abrogé l'arrêté du 17 juillet 2019, a interdit la circulation rue de la Vierge dans la montée pour tous les usagers, a autorisé la circulation dans le sens de la descente pour les seuls usagers et véhicules de secours, a interdit le stationnement tout le long du côté gauche dans le sens de la descente et a autorisé trois places de stationnement face aux immeubles n°6, 8 et 10 pour les riverains et véhicules de secours. Mme A..., qui réside dans la rue de la Vierge, en face du nouvel accès à l'école maternelle, a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'annulation des arrêtés précités ainsi que de la décision de modifier l'accès à l'école maternelle. Mme A... relève appel du jugement du 16 février 2021 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés municipaux des 17 juillet 2019 et 3 janvier 2020 et de la décision modifiant l'entrée de l'école maternelle :
En ce qui concerne les arrêtés municipaux des 17 juillet 2019 et 3 janvier 2020 réglementant la circulation et le stationnement rue de la vierge :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. Ces arrêtés en litige réglementant la circulation et le stationnement visent le code général des collectivités territoriales, le code de la route, le code de la voirie routière et notamment, pour celui du 3 janvier 2020, les articles L. 2213-1 et L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales. Ils précisent qu'ils sont motivés par la sécurité des enfants se rendant à l'école maternelle. Ainsi, ils comportent les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit ainsi être écarté.
En ce qui concerne l'arrêté municipal du 3 janvier 2020 portant création d'une rampe d'accès :
4. L'arrêté en litige valant autorisation d'occupation du domaine public ne constitue pas une autorisation d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 621-30, L. 621-32 et L. 632-2 du code du patrimoine doit être écarté comme étant inopérant.
En ce qui concerne les moyens communs à l'ensemble des décisions litigieuses :
5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des nombreux comptes rendus du conseil d'école, que le rétablissement de l'entrée de l'école rue de la Vierge puis la réglementation consécutive de la circulation et du stationnement dans la rue ainsi que la création de la rampe d'accès ont reçu un avis favorable unanime du conseil d'école. Ces documents révèlent que l'accès de l'école par la rue de la Vierge est préféré à celui qui avait été récemment instauré par les rues Terrail Lemoine et des Ecoles qui présentaient de nombreux inconvénients : difficulté d'accès par le couloir, manipulation de barrières amovibles, proximité d'une voie passante et de l'entrée d'un hôpital, circulation de camions, carrefour dangereux. Pour faciliter l'accès à cette entrée, une rampe d'accès empiétant sur la voie a été aménagée. Pour le sécuriser, la circulation et le stationnement ont été réglementés.
6. Si Mme A... soutient que le précédent accès à l'école qu'elle avait instauré en qualité de mairesse assurait une meilleure sécurisation des enfants au regard des risques d'attentats, elle ne l'établit pas alors que le conseil d'école, est, comme il vient d'être dit d'avis contraire. Si la requérante fait valoir également que ces décisions entrainent un gaspillage des ressources publiques, elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations. Enfin, la seule circonstance qu'aucun accident n'a eu lieu rue de la Vierge, ne permet pas de contester sérieusement le motif de sécurité publique aux abords d'une entrée d'école ayant justifié la restriction de la circulation et du stationnement dans les conditions rappelées au point n°1.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de la route : " Les règles relatives aux pouvoirs de police de la circulation routière dévolus au maire dans la commune, à l'exception pour les communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin de celles visées à l'article L. 2213-6, sont fixées par les articles L. 2213-1 à L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales ". Aux termes de l'article L.2213-1 du code général des collectivités territoriales: " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et l'ensemble des voies publiques ou privées ouvertes à la circulation publique à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation. A l'extérieur des agglomérations, le maire exerce également la police de la circulation sur les voies du domaine public routier communal et du domaine public routier intercommunal, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation (...)". Aux termes de l'article L. 2213-2 du même code : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : / 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures ou de manière permanente, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules ; / 2° Réglementer l'arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d'entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains(...)".
8. Sauf dispositions législatives contraires, les riverains d'une voie publique ont le droit d'accéder librement à leur propriété et, notamment, d'entrer et de sortir des immeubles à pied ou avec un véhicule. Dans le cas d'une voie communale, le maire ne peut refuser d'accorder un tel accès, qui constitue un accessoire du droit de propriété, que pour des motifs tirés de la conservation et de la protection du domaine public ou de la sécurité de la circulation sur la voie publique.
9. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions de police litigieuses ont supprimé ou rendu plus difficile l'accès de Mme A... à sa propriété. La réalisation de la rampe d'accès qui diminue la largeur de la voie n'a eu ni pour objet, ni eu pour effet de supprimer l'accès dont dispose Mme A... à son immeuble, ou ne l'a pas rendu plus difficile.
10. D'autre part, la circonstance que Mme A... soit riveraine de la voie publique ne lui donne pas un droit à disposer d'une place de stationnement sur le domaine public au droit de son habitation. De plus, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que des places de stationnement ont été maintenues rue de la Vierge au bénéfice des riverains et des véhicules de secours, seuls autorisés à circuler et qu'un parking gratuit de soixante-dix places ouvert en permanence se trouve en bas de de la rue.
11. Le moyen tiré de ce que les décisions litigieuses portent atteinte au libre accès à la propriété des riverains rue de la vierge doit ainsi être écarté.
12. En dernier lieu, s'il ressort des pièces du dossier que les rapports entre Mme A... et le maire en fonction sont conflictuels, notamment en raison de l'élection de cette dernière en tant que mairesse de la commune en 2014, les décisions litigieuses ont été motivées, comme il vient d'être dit, par l'intérêt et la sécurité des enfants. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le conflit malheureux existant entre les deux élus soit à l'origine des décisions en litige. Le détournement de pouvoir n'est par suite pas établi.
13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de
non-recevoir soulevées par la commune de Bourbonne-les-Bains, que ce soit en première instance ou en appel, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contestées.
Sur les frais liés à l'instance :
14.Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bourbonne-les-Bains, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune de Bourbonne-les-Bains au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Bourbonne-les-Bains présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de
Bourbonne-les-Bains.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre,
Mme Roussaux, première conseillère,
M. Denizot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 novembre 2022.
La rapporteure,
Signé : S. RoussauxLa présidente,
Signé : V. Ghisu-Deparis
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Marne en qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
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N° 21NC01122