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02/04/2024 | FRANCE | N°23NC01486

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 02 avril 2024, 23NC01486


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 février 2023 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2301498 du 25 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :
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Par une requête, enregistrée le 12 mai 2023, M. B... A..., représenté par Me Dollé, demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 février 2023 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2301498 du 25 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mai 2023, M. B... A..., représenté par Me Dollé, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 25 avril 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 février 2023 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour et subsidiairement de réexaminer sa situation dans un délai déterminé et au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision de rejet de la demande de titre de séjour :

- le préfet n'a pas procédé à un examen actualisé de sa situation ;

- il ne constitue pas une menace à l'ordre public ;

- la décision en litige méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New- York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- et les observations de Me Noirot, substituant Me Dollé, pour M. A....

Une note en délibéré présentée pour M. A..., par Me Dollé, a été enregistrée le 22 février 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant kosovar, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 13 mars 2016. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. L'Office français de l'immigration et de l'intégration a rejeté sa demande par une décision du 28 février 2017, qui a été confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile. Une obligation de quitter le territoire français a été prise à son encontre le 27 avril 2017, qu'il n'a pas exécutée. Le 6 avril 2021, l'intéressé a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 3 février 2023, le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. M. A... fait appel du jugement du 25 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des motifs mêmes de l'arrêté contesté que, pour statuer sur la demande de titre de séjour présenté par M. A..., le préfet de la Moselle a procédé à un examen de sa situation en tenant compte de l'ensemble des éléments qu'il lui avait communiqués et en particulier, au regard de sa situation familiale et des liens qu'il a entretenus avec son fils postérieurement à l'ordonnance du tribunal judiciaire de Metz du 12 février 2019. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de sa demande de titre de séjour doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. M. A... se prévaut de la durée de sa présence en France, de son intégration professionnelle et de la présence de son fils, qui réside avec sa mère, sur le territoire français. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est présent en France depuis 2016, il ne justifie pas d'une insertion particulière. En outre, si pour justifier de son intégration professionnelle, il se prévaut d'un contrat à durée indéterminée, il ressort des pièces du dossier qu'il l'a conclu irrégulièrement sans bénéficier d'une autorisation de travailler. Si son fils réside en France, il ressort des pièces du dossier, notamment du jugement du juge aux affaires familiales du 15 novembre 2019, que M. A... ne dispose pas de l'autorité parentale et ne peut exercer son droit de visite que dans un lieu neutre. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, en particulier du tableau d'exercice du droit de visite au sein de l'association désignée par le juge aux affaires familiales, que pendant les années 2019 et 2020, M. A... a manqué à de nombreuses reprises les visites planifiées avec son fils. S'il justifie, notamment par une attestation de son ancienne compagne, qu'elle a accepté amiablement qu'il exerce un droit de visite et d'hébergement, sans médiation, il n'établit pas la fréquence et la régularité des liens qu'il entretient avec son fils. La production d'une autorisation de sortie du territoire en 2021 et en 2022 permet tout au plus d'établir qu'il s'est rendu avec son fils dans son pays d'origine au cours de l'été 2022. En outre, l'intéressé n'établit pas contribuer à l'entretien de son fils en se bornant à produire un ordre de virement permanent au profit de ce dernier émis en janvier 2022, un mois avant la décision en litige, alors même qu'il travaille de façon continue depuis mai 2018. De plus, si le juge aux affaires familiales l'a dispensé de verser une pension pour l'entretien de son fils au motif qu'il avait déclaré n'avoir aucune activité professionnelle, cette affirmation est en contradiction avec les pièces produites. Dans ces conditions, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A..., le préfet de la Moselle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. A... au regard de son pouvoir de régularisation.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire (...) ".

6. M. A... est père d'un enfant né le 31 juillet 2016 au Kosovo qu'il a eu avec une compatriote qui réside régulièrement en France. Il ressort des pièces du dossier, en particulier d'une ordonnance rendue en la forme des référés le 12 février 2019, que le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Metz a interdit à l'intéressé de rencontrer son ancienne compagne en raison des violences qu'elle a allégué avoir régulièrement subies de sa part. Si M. A... conteste ces violences, il résulte des motifs de cette ordonnance qu'un médecin a constaté la présence d'ecchymoses dans la région sous orbitaire gauche, sur la joue gauche et sur le bras gauche de son ancienne compagne, ce qui rend vraisemblable les violences qu'elle a déclaré avoir subies le 24 octobre 2018 lorsqu'elle quitté le domicile familial. Le caractère habituel de ces violences n'est en revanche pas établi. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. A... a respecté l'interdiction prononcée par le juge aux affaires familiales et que, désormais, il entretient avec son ancienne compagne des relations plus apaisées. Enfin, l'extrait de casier judiciaire produit pas l'intéressé est vierge de toute condamnation pénale. Ainsi, eu égard au caractère ponctuel de ces faits et à leur ancienneté, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Moselle a refusé, pour ce motif, de lui délivrer un titre de séjour.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 435-1, l'autorité administrative doit d'abord vérifier si des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifient la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale", ensuite, en cas de motifs exceptionnels, si la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" est envisageable. Un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat ne saurait être regardé, par principe, comme attestant des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels - de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France - peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

8. D'une part, eu égard à sa situation personnelle et familiale, exposée au point 4, M. A... ne justifie ni de considérations humanitaires, ni de motifs exceptionnels de nature à lui ouvrir droit au bénéfice d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". D'autre part, s'il ressort des pièces du dossier que le requérant exerce depuis le 16 mai 2018, en vertu d'un contrat à durée indéterminée, le métier de façadier, peintre et plâtrier pour une rémunération brute de 1 555 euros par mois, cette activité n'appartient pas à la catégorie de celles qui connaissent des difficultés de recrutement en Lorraine selon l'annexe à l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse . L'exercice depuis 2018 de ce métier, dans un secteur où il n'est en outre pas établi que l'employeur de M. A... aurait connu des difficultés de recrutement, est insuffisant pour justifier d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans ces conditions, le préfet de la Moselle a pu refuser, sans commettre d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation, de délivrer au requérant un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il résulte des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ce motif, sans tenir compte de la menace à l'ordre public.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, ne peut qu'être écarté.

10. En second lieu, dès lors que le requérant invoque les mêmes arguments que ceux exposés au point 4, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les mêmes motifs.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Il s'ensuit que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie de l'arrêt sera adressé au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 20 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Barteaux, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. BARTEAUX

Le président,

Signé : C. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 23NC01486 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01486
Date de la décision : 02/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-02;23nc01486 ?
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