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04/06/2024 | FRANCE | N°23NC01331

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 04 juin 2024, 23NC01331


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a retiré son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2203413 du 24 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

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Par une requête, enregistrée le 28 avril 2023, M. B..., représenté par Me Rommelaere, demande à la cour :


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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a retiré son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2203413 du 24 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2023, M. B..., représenté par Me Rommelaere, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 juin 2022 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 en tant que la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi n°91-647 du juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ; il s'est manifesté par l'intermédiaire de son travailleur social à plusieurs reprises auprès des services de la préfecture pour le dépôt d'une demande de titre de séjour pour raisons médicales dans le délai imparti par les dispositions des articles L. 431-2 et D.431-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; sa demande a d'ailleurs finalement été enregistrée le 26 juillet 2022 et est en cours d'instruction ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il y a lieu d'attendre l'issue de l'instruction de sa demande sur le fondement de l'article L. 425-9 du même code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en cours d'instruction ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est entachée d'irrégularité en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La préfète du Bas-Rhin n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bauer a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant géorgien né le 4 janvier 1972, a déclaré être entré en France le 24 novembre 2021 et y a sollicité la reconnaissance de la qualité de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 mars 2022 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 7 juillet 2022. Parallèlement à l'instruction de sa demande d'asile, il a sollicité, le 14 février 2022, via la plateforme internet " démarches-simplifiées.gouv.fr ", un rendez-vous à la préfecture du Bas-Rhin pour déposer une demande de titre de séjour au titre de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A défaut de réponse, il a relancé par courriel les services préfectoraux le 3 mai 2022 et il lui a été répondu que sa demande était tardive. Par un arrêté du 3 mai 2022, la préfète du Bas-Rhin a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 24 juin 2022, dont l'intéressé relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de ces décisions.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, la décision comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article l. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 611-3, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour ". Aux termes de l'article D. 431-7 du même code : " Pour l'application de l'article L. 431-2, les demandes de titres de séjour sont déposées par le demandeur d'asile dans un délai de deux mois. Toutefois, lorsqu'est sollicitée la délivrance du titre de séjour mentionné à l'article L. 425-9, ce délai est porté à trois mois ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'une note d'information expliquant les modalités et délais de présentation d'une demande de titre de séjour sur un autre fondement, notamment pour raisons de santé, a été remise à l'intéressé le 17 décembre 2021 lors de l'enregistrement de sa demande d'asile. Si M. B... justifie avoir, par l'intermédiaire d'un travailleur social, effectué une demande d'information quant au dépôt d'une demande de titre de séjour pour raisons de santé dans le délai de 3 mois imparti, il est constant qu'il lui a alors été répondu qu'il devait solliciter un rendez-vous à cette fin sur le site de la préfecture du Bas-Rhin. Ni la production d'un courrier de relance de l'administration le 3 mai 2022, au-delà de ce délai, ni la circonstance qu'un rendez-vous lui ait finalement été accordé le 26 juillet 2022 ne suffisent à justifier de ce que l'intéressé n'aurait pas été à même de prendre toutes dispositions utiles pour transmettre sa demande sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai requis. Le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait, pour ce motif, entachée d'un défaut d'examen de sa demande ne peut ainsi qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le requérant, qui a levé le secret médical, a subi une amputation au tiers supérieur de la jambe droite à la suite d'une explosion de mines, présente de nombreux corps étrangers métalliques dans son membre inférieur et est, par ailleurs, porteur du virus de l'hépatite C. Toutefois, en produisant les résultats d'un examen sanguin, un scanner du 7 mars 2022 de sa jambe droite décrivant son état constaté et un courrier de son médecin traitant du 17 mai 2022 se bornant à questionner un confrère sur l'opportunité d'une intervention chirurgicale, qui n'apparaît pas avoir été programmée à la date d'édiction de la décision contestée, M. B... n'établit pas que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que le requérant n'est entré en France qu'en novembre 2021, à l'âge de 49 ans, après avoir vécu toute sa vie dans son pays d'origine, où il ne démontre pas être dépourvu de liens. Il est célibataire et sans enfant et ne justifie pas de l'existence ni de l'intensité d'attaches privées et familiales en France. Alors que les dispositions précitées ne garantissent pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel ladite décision a été prise. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 24 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en litige. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2024.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

F. LORRAIN

N° 23NC01331 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01331
Date de la décision : 04/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : ROMMELAERE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-04;23nc01331 ?
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