Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le centre hospitalier de Sarreguemines à lui verser, d'une part, la somme de 53 779,59 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat prévue par les dispositions de l'article L. 1243-8 du code du travail et, d'autre part, la somme de 6 522,68 euros correspondant aux indemnités pour le travail additionnel qu'il soutient avoir accompli au cours de l'année 2017.
Par un jugement n° 1901074 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le centre hospitalier de Sarreguemines à verser à M. B... la somme totale de 48 651,73 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 août 2021, le centre hospitalier de Sarreguemines, représenté par Me. Coulon, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 juin 2021 ;
2°) de limiter la somme à payer à M. B..., au titre de l'indemnité de fin de contrat à 25 984.98 euros.
Il soutient que :
- le tribunal a calculé à tort la prime de précarité en intégrant dans la rémunération totale brute les astreintes en méconnaissance de l'article R.6152-23 du code de la santé publique ;
- M. B... ne démontre pas qu'il aurait effectué les heures de garde dont il se prévaut.
Par une ordonnance du 10 février 2022, l'instruction a été close au 17 mars 2022.
Un mémoire a été enregistré le 21 août 2024 pour M. B..., représenté par Me Paveau, et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bauer,
- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,
- et les observations de Me Paveau pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté par le centre hospitalier de Sarreguemines, à compter du 1er mars 2013, en qualité de praticien contractuel à temps plein exerçant au service des urgences de l'hôpital Robert-Pax, par un contrat à durée déterminée régulièrement renouvelé. L'intéressé a informé le centre hospitalier de sa volonté de ne pas renouveler son dernier contrat, expirant le 31 mai 2018. Par un courrier du 24 avril 2018, l'établissement l'a informé qu'il serait rayé des effectifs au 1er juin 2018. Par des courriers du 20 avril et du 13 mai 2018, M. B... a sollicité le versement d'une somme correspondant aux journées de garde complémentaires effectuées en 2017. Par une première décision du 19 avril 2018, le centre hospitalier de Sarreguemines a rejeté cette demande. Par une lettre du 29 mai 2018, M. B... a également demandé au centre hospitalier le versement d'une indemnité de fin de contrat, qui lui a été refusée par une décision du 19 juin 2018. Par un jugement du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le centre hospitalier à verser à M. B... une somme de 48 651,73 euros. Par la présente requête, le centre hospitalier de Sarreguemines relève appel de ce jugement et demande que sa condamnation soit limitée au versement de la somme de 25 984.98 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat.
En ce qui concerne l'indemnité de fin de contrat :
2. Aux termes de l'article L. 1243-8 du code du travail, applicable aux praticiens hospitaliers en vertu de l'article R. 6152-418 du code de la santé publique : " Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. / Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié. / Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant ". Aux termes de l'article L. 1243-10 du même code : " L'indemnité de fin de contrat n'est pas due : / (...)4° En cas de rupture anticipée du contrat due à l'initiative du salarié, à sa faute grave ou à un cas de force majeure ".
3. Aux termes de l'article R. 6152-416 du code de la santé publique : " La rémunération des praticiens contractuels est fixée selon les règles suivantes :1° Les émoluments des praticiens contractuels recrutés en application des 1°, 2°, 4° et 5° de l'article R. 6152-402 sont fixés conformément à un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et du budget, proportionnellement à la durée de travail définie au contrat (...) " Aux termes de l'article D. 6152-417 du même code : "A la rémunération mentionnée à l'article R. 6152-416, s'ajoutent, le cas échéant, les indemnités suivantes : 1° Des indemnités de sujétion correspondant au temps de travail accompli, dans le cadre des obligations de service hebdomadaires, la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés (...) ".
4. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat (...) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public ".
5. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées de l'article L. 1243-8 du code du travail et des articles R. 6152-418 et L. 1243-10 du code de la santé publique que, lorsqu'au terme d'un contrat de travail à durée déterminée la relation de travail n'est pas poursuivie par un contrat à durée indéterminée, le praticien contractuel a droit, à titre de complément de rémunération, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. La circonstance qu'un contrat à durée déterminée soit suivi par un autre contrat de même nature est sans incidence sur l'exigibilité de cette indemnité. Cette dernière est alors assise, pour chaque contrat, sur la rémunération totale brute versée du début jusqu'à la fin de ce contrat..
6. Toutefois, lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit, le fait générateur de la créance se trouve en principe dans les services accomplis par l'intéressé. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à ces services court, sous réserve des cas prévus à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée, à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au titre de laquelle ils auraient dû être rémunérés.
7. M. B... a conclu, le 1er mars 2013, avec le centre hospitalier de Sarreguemines, un contrat à durée déterminée qui a été renouvelé à dix reprises les 1er juin 2013, 1er décembre 2013, 1er juin 2014, 1er décembre 2014, 1er juin 2015, 1er décembre 2015, 1er juin 2016, 1er décembre 2016, 1er juin 2017 et 1er décembre 2017. Si, par un courrier du 20 avril 2018, l'intéressé a informé l'établissement de santé de son souhait de ne pas renouveler son dernier contrat, qui arrivait à son terme le 31 mai 2018, il a toutefois veillé à l'exécuter jusqu'à son échéance. Dans ces conditions et eu égard à l'application de la prescription quadriennale, M.B..., qui a demandé l'indemnité de fin de contrat par une lettre du 29 mai 2018, a droit, comme l'ont retenu les premiers juges, au versement de l'indemnité prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail pour chacun des neufs contrats survenus à compter du 1er décembre 2013, qu'il a exécutés en qualité de praticien hospitalier et qui n'ont pas été suivis d'une proposition de contrat à durée indéterminée.
8. Il résulte des bulletins de paie de la période du 1er décembre 2013 au 31 mai 2018 que M. B... a perçu mensuellement, outre son traitement de base, l'indemnité de sujétion prévue par l'article D. 6152-417 du code de la santé publique. Ainsi que l'a retenu le tribunal, cette indemnité doit être regardée comme une composante de la rémunération totale brute de l'intéressé, au sens des dispositions de l'article L. 1243-8 du code du travail, dès lors qu'elle correspond au temps de travail accompli dans le cadre des obligations de service hebdomadaires des praticiens et constitue ainsi un élément normal de rémunération et non une indemnité accessoire. Il résulte de l'instruction que le montant total de rémunération brute perçue par l'intéressé sur la période considérée s'élève ainsi à 468 735,61 euros, de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont alloué à M. B..., conformément aux dispositions précitées, une indemnité de fin de contrat de 46 873,56 euros.
En ce qui concerne le paiement des heures de garde :
9. Aux termes de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique, " Les praticiens perçoivent, après service fait, attesté par le tableau mensuel de service réalisé, validé par le chef de service, ou, à défaut, par le responsable d'une autre structure interne :1° Des émoluments mensuels variant selon l'échelon des intéressés, (..) ;2° Des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret ". Il résulte de ces dispositions que, si le temps de travail additionnel accompli par un praticien attaché associé, avec l'accord de son établissement d'emploi, ouvre à celui-ci droit à indemnisation, c'est à la double condition que l'intéressé établisse par tout moyen de preuve, d'une part, avoir effectivement accompli des services ouvrant droit à rémunération, d'autre part, que le temps de travail additionnel n'ait pas fait l'objet d'une récupération de la part de l'intéressé.
10 . Il résulte des pièces du dossier que, pour justifier les 10 journées de garde qu'il soutient avoir effectuées pendant l'année 2017 au-delà de ses demi-journées d'obligations de service hebdomadaires, M. B... se borne à produire des tableaux réalisés par ses soins récapitulant les gardes qu'il aurait effectuées et dépourvus du visa du chef de service ou du directeur de l'établissement tandis qu'en défense, le centre hospitalier de Sarreguemines produit une extraction du logiciel SESAME de gestion du temps de travail, aux termes l'intéressé serait au contraire redevable de 50 demi-journées de travail pour l'année 2017. Dans ces circonstances, les pièces produites par M. B... qui n'établit ni la quotité, ni même l'existence des heures additionnelles dont il demande la rémunération, sont dépourvues de valeur probante. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg lui a accordé une indemnité de temps de travail additionnel.
11. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Sarreguemines est seulement fondé à soutenir que le montant de la condamnation mise à sa charge ne peut excéder la somme de 46 873,56 euros. Il s'ensuit que le jugement attaqué doit être réformé en ce sens.
D E C I D E:
Article 1er : Le montant de la condamnation mise à la charge du centre hospitalier de Sarreguemines au profit de M. B... est ramené à la somme de 46 873,56 euros.
Article 2 : Le jugement du 22 juin 2021 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Sarreguemines et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- Mme Bauer, présidente-assesseure,
- M. Berthou, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.
La rapporteure,
Signé : S. BAUER Le président,
Signé : Ch. WURTZ
Le greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de l'accès aux soins en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
F. LORRAIN
N° 21NC02255 2