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03/10/2024 | FRANCE | N°22NC01852

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 03 octobre 2024, 22NC01852


Vu, sous le n°22NC01852, la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SCCV Magenta a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 11 mars 2020 par lequel le maire de Strasbourg a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire portant sur la réalisation d'un immeuble de 18 logements et d'enjoindre au maire de Strasbourg de lui délivrer le permis de construire.



Par un jugement n° 2003195 du 19 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2022 ...

Vu, sous le n°22NC01852, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Magenta a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 11 mars 2020 par lequel le maire de Strasbourg a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire portant sur la réalisation d'un immeuble de 18 logements et d'enjoindre au maire de Strasbourg de lui délivrer le permis de construire.

Par un jugement n° 2003195 du 19 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2022 sous le n° 22NC01852, la SCCV Magenta, représentée par Me Gillig, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 mars 2020 par lequel le maire de Strasbourg a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire ;

3°) d'enjoindre à la commune de Strasbourg de lui délivrer le permis de construire sollicité ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Strasbourg la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il méconnaît les dispositions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme et le principe de sécurité juridique dès lors que le tribunal, saisi d'un recours contre un refus de permis de construire, a fait droit à une demande de substitution de motif ;

- le motif de la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article 10.3.1 du règlement UB du PLUi de l'Eurométropole de Strasbourg.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2022, la commune de Strasbourg conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCCV Magenta en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour la SCCV Magenta, enregistré le 26 juillet 2024, tendant aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens, n'a pas été communiqué.

II. Vu, sous le n° 23NC01896, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Magenta a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la commune de Strasbourg à lui verser la somme de 736 267,64 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison de l'arrêté du 11 mars 2020 par lequel le maire de Strasbourg a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire portant sur la réalisation d'un immeuble de 18 logements, somme majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 février 2021 et de mettre à la charge de la commune de Strasbourg une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2102511du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juin 2023 sous le n° 23NC01896, la SCCV Magenta, représentée par Me Gillig, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 avril 2023 ;

2°) de condamner la commune de Strasbourg à lui verser la somme de 736 267,64 euros HT en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison de l'arrêté du 11 mars 2020 par lequel le maire de Strasbourg a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire portant sur la réalisation d'un immeuble de 18 logements, somme majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 février 2021 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Strasbourg la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le motif de la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article 10.3.1 du règlement UB du PLUi de l'Eurométropole de Strasbourg ;

- elle a subi des préjudices tenant aux frais et dépenses engagés en pure perte et à la perte de bénéfices escomptés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2023, la commune de Strasbourg conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCCV Magenta en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour la SCCV Magenta, enregistré le 26 juillet 2024, tendant aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthou,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Erkel, représentant la SCCV Magenta et de Me Picoche, représentant la commune de Strasbourg.

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande déposée le 20 décembre 2019 et complétée le 3 mars 2020, la SCCV Magenta a sollicité la délivrance d'un permis de construire en vue de réaliser un bâtiment sis 179, route de Mittelhausbergen à Strasbourg comportant 18 logements représentant une surface de plancher totale de 1.186 m². Par un arrêté du 11 mars 2020, le maire de Strasbourg a refusé le permis de construire sollicité. Par un jugement du 19 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. La SCCV Magenta a par ailleurs adressé à la commune une demande, notifiée le 8 février 2021, tendant tendant à la réparation des préjudices subis en raison du refus qui lui aurait été illégalement opposé. Par un jugement du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de condamnation de la commune à l'indemniser des préjudices subis.

2. Les requêtes n° 22NC01852 et 23NC01896 de la SCCV Magenta présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement n° 2003195 :

3. En premier lieu, devant le tribunal, la commune de Strasbourg a sollicité cinq substitutions de motifs tirés de la méconnaissance des dispositions des articles 6, 7, 10.3.1, 11 et 15 UB du règlement du plan local d'urbanisme.

4. D'une part, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition (...) ".

5. D'autre part, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. Les dispositions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, qui posent une règle de forme des décisions administratives, pas plus que le principe de sécurité juridique, ne font, par eux-mêmes, obstacle à ce que l'administration qui a refusé un permis de construire invoque devant le juge un motif autre que ceux qu'elle a opposés dans la décision de refus. Par suite, le moyen tiré de ce que la commune ne pouvait, sans méconnaître l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, solliciter une substitution de motif à l'encontre du refus de permis de construire en litige doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 10.3.1 UB du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de l'Eurométropole de Strasbourg (PLUi) : " La hauteur maximale à l'égout principal de toiture peut être dépassée dans la limite d'un quart de la longueur de chaque façade, sans qu'elle puisse excéder la hauteur maximale hors tout ". Le rapport de présentation précise que " L'article 10 comprend également des dispositions particulières de dépassement de la hauteur maximale à l'égout principal de toiture, afin de permettre les motifs architecturaux qui peuvent ponctuer une façade ".

8. D'une part, il résulte des dispositions de l'article 10.3.1 UB du règlement du plan local d'urbanisme, éclairées par la mention citée ci-dessus du rapport de présentation de ce plan, que la possibilité offerte par ces dispositions de déroger à la hauteur maximale à l'égout principal de toiture, fixée à 15 mètres dans la zone du projet, ne peut porter sur plus du quart de la longueur de chaque façade, dans la limite de la hauteur maximale hors tout.

9. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les balcons situés en

façade Sud-Ouest de la construction projetée ne font pas partie de la façade Sud-Est, par rapport à laquelle ils forment un décrochement très marqué. Dans ces conditions, la longueur de la façade Sud-Est doit être mesurée sans prendre en compte ces balcons.

10. Il résulte des deux points précédents que la construction projetée, qui dépasse la hauteur maximale autorisée à l'égout principal de 15 mètres sur une partie de la façade Sud-Est de 7,01 mètres alors que la longueur de cette façade n'excède pas 26 mètres, n'est pas conforme aux dispositions précitées du règlement du PLUi.

11. Il résulte de l'instruction qu'à supposer même que les quatre autres motifs dont la commune demande qu'ils soient substitués aux motifs initiaux de refus soient entachés d'illégalité, le maire de Strasbourg aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le seul motif tiré de la méconnaissance de la règle de l'article 10.3.1 UB du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de l'Eurométropole de Strasbourg.

12. Il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement n° 2102511 :

13. Le refus de permis de construire du 11 mars 2020 étant, ainsi qu'il a été dit, légalement fondé, le maire de Strasbourg n'a, par ce refus, pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune.

14. Il résulte de ce qui précède que la SCCV Magenta n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Strasbourg, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la SCCV Magenta au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SCCV Magenta la somme globale de 3 000 euros à verser au même titre à la commune de Strasbourg.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de la SCCV Magenta sont rejetées.

Article 2 : La SCCV Magenta versera à la commune de Strasbourg la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCCV Magenta et à la commune de Strasbourg.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOULe président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 22NC01852 et 23NC01896 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01852
Date de la décision : 03/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-03;22nc01852 ?
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