Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par trois requêtes distinctes, la société par actions simplifiée (ci-après SAS) EGM Wind a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, et, à titre subsidiaire, la réduction, d'une part, des cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2017 et 2018 à raison du parc éolien de " Rampont I ", d'autre part, des cotisations de même nature auxquelles elle a été assujettie au titre de ces mêmes années à raison du parc éolien de " Rampont II ", enfin, des suppléments de cotisation foncière des entreprises et de taxe spéciale d'équipement mis à sa charge au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017 à raison de ces deux parcs éoliens.
Par un jugement no 1902372, 1902376, 1902377 du 26 août 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2021, la SAS EGM Wind, représentée par Me Chatel et Me Pronier du cabinet C'M'S' - Francis Lefebvre Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le montant des immobilisations inscrites au bilan inclut nécessairement des coûts non fonciers ;
- les prix de revient de ses immobilisations passibles de taxe foncière, tels que mentionnés dans les déclarations modèle U déposées respectivement le 27 octobre 2008 et le 4 janvier 2010, sont cohérents avec le nombre de m3 de béton des socles de ses éoliennes et du prix moyen, et doivent être retenus comme base d'imposition à la taxe foncière et à la cotisation foncière des entreprises.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société EGM Wind ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 1er décembre 2021, la présidente de cette cour a transmis au Conseil d'Etat les conclusions de la requête relatives aux suppléments de taxe foncière sur les propriétés bâties mis à la charge de la société au titre des années 2017 et 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brodier,
- les conclusions de Mme Mosser, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS EGM Wind, dont le siège social se situe à Paris, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité par la direction des vérifications nationales et internationales, à l'issue de laquelle ont été mis à sa charge, à raison de deux parcs éoliens dont elle est propriétaire à Nixeville-Blercourt et à Vadelaincourt dans la Meuse, des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises et de taxe spéciale d'équipement au titre des années 2014 à 2017 ainsi que des suppléments de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2017 et 2018. La société EGM Wind relève appel du jugement du 26 août 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes tendant à la décharge de ces impositions.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une ordonnance du 1er décembre 2021, la présidente de cette cour a renvoyé au Conseil d'Etat les conclusions de la requête de la société EGM Wind relatives aux cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties mises à sa charge au titre des années 2017 et 2018 à raison des parcs éoliens de " Rampont I " et de " Rampont II ". Par une décision du 12 décembre 2022, le Conseil d'Etat a rejeté ces conclusions. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions dans le cadre du présent litige, qui ne présente à juger que les conclusions de la société relatives aux suppléments de cotisation foncière des entreprises et de taxe spéciale d'équipement mis à sa charge au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017.
Sur le bien-fondé des impositions :
3. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 % ".
4. Aux termes de l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; (...) ". Aux termes de l'article 1382 : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 (...) ". Enfin le II de l'article 324 B de l'annexe III dispose que : " Pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ". Pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.
5. Aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ". Pour l'application de ces dispositions, le prix de revient des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière, évalué selon la méthode comptable, est celui qui est inscrit à l'actif du bilan et l'administration peut se fonder sur les énonciations comptables opposables à la société pour inclure dans la valeur locative des immobilisations le montant des travaux inscrits en tant qu'immobilisations, sauf pour la société à démontrer que ces travaux constitueraient en réalité des charges déductibles.
6. Il résulte de l'instruction que, pour rehausser les bases imposables de la société EGM Wind à la cotisation foncière des entreprises, l'administration fiscale a retenu comme prix de revient des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties le montant inscrit à l'actif du bilan de la société, au compte 214116 " génie civil éolien ". D'une part, si la société requérante, à qui il incombe de démontrer que ces travaux constitueraient en partie des charges déductibles, soutient que ce montant inclut celui d'installations techniques non passibles de la taxe foncière, elle ne produit aucune des factures de construction des deux parcs éoliens. La circonstance que le fournisseur avait conclu des contrat de prestations " clés en main " ne saurait à cet égard suffire à établir que les montants des immobilisations comptabilisées incluraient des éléments n'entrant pas dans le champ d'application de la cotisation foncière des entreprises ou constituant des charges déductibles.
7. D'autre part, la société EGM Wind soutient que le prix de revient de ses immobilisations industrielles doit être déterminé sur la base d'un volume de 445 m3 par socle d'éolienne et d'un coût moyen par m3 de béton résultant de la pratique du groupe EDF Renouvelables. Toutefois, en l'absence notamment de tout élément comptable ou de pièces justificatives concernant ses installations, la fourchette de prix de revient auquel elle parvient, qui est significativement supérieure aux montants figurant dans les déclarations " modèle U " par lesquelles les précédents propriétaires avaient déclaré la valeur locative foncière des deux établissements industriels en 2008 et en 2010, n'est pas de nature à déterminer le prix de revient de ses immobilisations passibles de la cotisation foncière des entreprises.
8. Dans ces conditions, la société EGM Wind n'est pas fondée à remettre en cause la prise en compte, par l'administration fiscale, du montant inscrit à l'actif de son bilan comme prix de revient de ses immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a rehaussé ses bases imposables à la cotisation foncière des entreprises.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS EGM Wind n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises et de taxe spéciale d'équipement mises à sa charge. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête susvisée de la société EGM Wind relative à la cotisation foncière des entreprises et à la taxe spéciale d'équipement est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS EGM Wind et au ministre du budget et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président,
M. Agnel, président-assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
La rapporteure,
Signé : H. Brodier Le président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre du budget et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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No 21NC02793