Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 16 juillet 2019 par laquelle le maire de la commune de Hayange lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois mois dont deux mois avec sursis.
Par un jugement n° 1907144 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de Mme A....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 mai 2021, Mme A..., représentée par Me Ponseele, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 mars 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Hayange une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie et ces faits sont anciens ;
- la sanction qui lui a été infligée est disproportionnée ;
- cette décision est entachée d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 janvier 2023, la commune de Hayange, représentée par Me Yon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme A... le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Peton,
- les conclusions de Mme Bourguet-Chassagnon, rapporteure publique,
- et les observations de Me Ambrosi substituant Me Ponseele pour Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... est assistante socio-éducative de seconde classe au sein de la commune d'Hayange. Elle est mise à disposition du centre communal d'action sociale (CCAS) et y exerce les fonctions d'assistante sociale. Par un arrêté du 16 juillet 2019, le maire de la commune a infligé à Mme A... la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois dont deux mois avec sursis. Mme A... relève appel du jugement du 11 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'ancienneté des faits :
2. Aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / Aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits passibles de sanction. (...) Passé ce délai (...), les faits en cause ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d'une procédure disciplinaire ". Lorsqu'une loi nouvelle institue, sans comporter de disposition spécifique relative à son entrée en vigueur, un délai de prescription d'une action disciplinaire dont l'exercice n'était précédemment enfermé dans aucun délai, le nouveau délai de prescription est immédiatement applicable aux procédures en cours mais ne peut, sauf à revêtir un caractère rétroactif, courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle.
3. En l'espèce, le maire a informé Mme A... de l'engagement de la procédure disciplinaire par un courrier du 8 mars 2019 dont son conseil a fait état dans un courrier du 3 avril 2019. Or, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les faits reprochés à Mme A... dans le cadre de la procédure disciplinaire engagée par la saisine du conseil de discipline le 18 avril 2019 pouvaient encore être régulièrement invoqués dans un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de l'article 29 de la loi du 20 avril 2016, soit à compter du 22 avril 2016, lendemain de la date de publication de cette loi au Journal officiel, alors même que certains d'entre eux se seraient déroulés antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi. Il suit de là que le moyen tiré de la prescription des faits reprochés à la requérante doit être écarté.
En ce qui concerne la matérialité des faits :
4. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version alors en vigueur : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...). Troisième groupe : (...) ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ".
5. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
6. Il est reproché à Mme A... d'avoir vendu des vêtements sans autorisation pendant les heures de service et sur son lieu de travail, d'avoir produit des documents non signés par les usagers du centre communal d'action sociale lors de commissions des secours, de présenter des signes d'agressivité et de manque de respect envers sa hiérarchie, envers les élus du CCAS et envers ses collègues et enfin de perturber le fonctionnement du service en refusant d'exécuter certaines tâches. Le tribunal a écarté le grief tiré de ce que l'agent aurait refusé d'exécuter certaines tâches au motif qu'il n'était pas suffisamment établi d'une part et Mme A... ne conteste plus avoir vendu des vêtements sur son lieu de travail et pendant ses heures de service d'autre part.
7. Par ailleurs, il ressort des attestations annexées au rapport d'enquête hiérarchique établi le 18 décembre 2018 ainsi que des témoignages devant le conseil de discipline que Mme A... a présenté, à plusieurs reprises, des dossiers tendant à l'attribution de " bons seniors " non signés par les usagers du CCAS aux membres de la commission de secours.
8. Enfin, il est établi par plusieurs témoignages que Mme A... a eu un comportement agressif et irrespectueux envers sa hiérarchie, ses collègues de travail et les membres du CCAS notamment en refusant de leur adresser la parole, en leur tournant le dos lorsqu'ils s'adressaient à elle, en s'introduisant dans des réunions sans y être invitée ou encore en écoutant des conversations dissimulée derrière des portes.
9. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que la matérialité des faits reprochés à Mme A... est établie par des éléments suffisamment probants. La matérialité de ces faits n'est pas remise en cause par la circonstance que cette attitude agressive n'aurait pas donné lieu à des observations ou que Mme A... a un comportement professionnel et dévoué selon les administrés.
En ce qui concerne la sanction :
10. Eu égard à la gravité des faits reprochés, aux fonctions d'assistance de Mme A... auprès de populations défavorisée et aux conséquences qu'ils ont eu pour le fonctionnement du service ainsi que pour l'image du CCAS, la commune de Hayange n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, infligé une sanction disproportionnée en décidant de prendre à l'encontre de l'intéressée la sanction du troisième groupe de l'exclusion temporaire de fonctions de trois mois assortie d'un sursis de deux mois.
En ce qui concerne le détournement de pouvoir :
11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la sanction prise à l'encontre de Mme A... l'aurait été en raison de son appartenance syndicale. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Hayange qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A... la somme que demande cette commune de Hayange à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Hayange présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Hayange.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Durup de Baleine, président de chambre,
- M. Barlerin, premier conseiller,
- Mme Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 novembre 2024.
La rapporteure,
Signé : N. PetonLe président,
Signé : A. Durup de Baleine
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
N° 21NC01383 2