Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 12 juillet 2019 par laquelle le président de la communauté de communes de La Houve et du pays Boulageois a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de la révocation, d'enjoindre au président de la communauté de communes de La Houve et du pays Boulageois de le réintégrer dans ses fonctions, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2106207 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 juillet et 27 août 2022, M. B..., représenté par Me Boussoum, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 avril 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2019 ;
3°) d'enjoindre au président de la communauté de communes de La Houve et du pays Boulageois de prononcer sa réintégration sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement ;
- durant sa période de suspension, il ne s'est rendu sur son lieu de travail que pour récupérer ses affaires personnelles ;
- ses agissements ne peuvent être remis en cause dès lors que le climat conflictuel existait avant sa prise de fonctions et que les agents ont refusé de se soumettre aux mesures prises par l'administration pour le rétablissement d'un climat de travail serein ;
- la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle se fonde sur des faits qui ne sont pas établis ;
- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que la sanction de révocation est disproportionnée au regard des faits qui lui sont reprochés.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 juillet 2022, la communauté de communes de La Houve et du pays Boulageois conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de Mme Bourguet-Chassagnon, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjoint technique territorial, exerçait les fonctions de chef de cuisine à la cuisine centrale de Boulay, relevant de la communauté de communes de la Houve et du pays Boulageois depuis 2015. Il a été suspendu de ses fonctions par une décision du 25 avril 2019 puis, par un arrêté du 12 juillet 2019, le président de la communauté de communes a prononcé sa révocation à compter du 1er août 2019. M. B... a formé un recours devant le conseil de discipline de recours qui a émis un avis favorable à la sanction de révocation le 1er juillet 2021. Il relève appel du jugement du 28 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2019.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Strasbourg, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments qui lui étaient soumis, a visé de façon exhaustive et s'est prononcé par des motifs circonstanciés sur l'ensemble des moyens soulevés par le requérant en précisant notamment en son point 9 les raisons pour lesquelles il ne retenait pas les attestations produites par M. B.... Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version alors en vigueur : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Et aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...). Quatrième groupe : (...) la révocation ".
4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
5. L'arrêté du 12 juillet 2019 précise que le président de la communauté de communes de La Houve et du pays Boulageois a décidé de révoquer M. B... à compter du 1er août 2019 au motif que celui-ci n'a pas respecté la décision portant suspension de fonctions de quatre mois prononcée par arrêté du 25 avril 2019, qu'il a proféré des menaces à l'encontre de ses collègues et a adopté un comportement inapproprié avec sa hiérarchie et en cuisine en faisant état de considérations d'ordre privé et de réflexions vexatoires et humiliantes conduisant à des disputes, des cris, des larmes et du stress et aboutissant à une tension extrême et permanente au sein de la cuisine.
6. Il ressort des pièces du dossier que les faits reprochés à l'agent sont constatés dans l'avis du conseil de discipline, dans l'avis du conseil de discipline de recours et dans le rapport de saisine du conseil de discipline, lesquels s'appuient sur des témoignages précis et concordants d'autres agents ayant travaillé avec le requérant. A cet égard, la communauté de communes produit en défense des témoignages des agents affectés à la cuisine intercommunale sous l'autorité de M. B... dont il ressort que ce dernier a fait preuve de propos agressifs, violents et irrespectueux de façon répétée. Le comportement de M. B... a engendré un état de stress au travail qui a eu pour conséquence de nombreux arrêts de maladie, des démissions et des difficultés à recruter du personnel, perturbant en conséquence le fonctionnement normal du service. Par ailleurs, M. B... avait déjà été informé de la violence de ses méthodes de management dès lors que son comportement avait déjà donné lieu à une première procédure disciplinaire en 2016 qui avait conduit la communauté de communes à prendre attache auprès d'un cabinet de consultants extérieurs après que le conseil de discipline avait constaté dans son avis du 6 juin 2017 l'existence d'une carence grave sur le plan managérial. Si M. B... allègue que le climat de tensions préexistait au sein du service avant sa prise de fonctions en 2015 et que son prédécesseur s'est également heurté à des problèmes relationnels et à une résistance à l'autorité des agents, ces faits sont anciens et antérieurs à la première procédure disciplinaire engagée en 2016. Par ailleurs, à la suite de ces premières difficultés, l'équipe de la cuisine intercommunale a en grande partie été renouvelée et M. B... ne saurait donc soutenir que les agents ne veulent pas changer de comportement. Le requérant se prévaut de plusieurs attestations qui ne peuvent suffire à remettre en cause les faits qui lui sont reprochés dès lors que les écrits de Mme D... sont contradictoires, deux attestations ont été établies en 2016 et n'ont pas de rapport avec les faits en litige et enfin le dernier témoignage a été établi par une personne ayant travaillé durant seulement cinq mois en 2017. Enfin, si M. B... soutient s'être rendu à deux reprises sur son lieu de travail pendant la période de suspension de fonctions afin de rechercher des effets personnels, il ne l'établit pas. Au demeurant, à supposer que cette circonstance soit avérée, l'ensemble des autres faits reprochés à M. B... sont établis et suffisent à caractériser des manquements professionnels.
7. En conséquence, eu égard à la gravité des faits reprochés, à leur caractère répété et aux conséquences qu'ils ont eu sur le fonctionnement du service, le président de la communauté de communes de la Houve et du pays Boulageois n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, infligé une sanction disproportionnée en décidant de prononcer la révocation de l'agent.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais d'instance :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes de la Houve et du pays Boulageois qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B... la somme 1 000 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes de la Houve et du pays Boulageois et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la communauté de communes de la Houve et du pays Boulageois une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté de communes de la Houve et du pays Boulageois.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Antoine Durup de Baleine, président de chambre,
- M. Axel Barlerin, premier conseiller,
- Mme Nolwenn Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 janvier 2025.
La rapporteure,
Signé : N. C...Le président,
Signé : A. Durup de Baleine
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
N° 22NC01744 2