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30/01/2025 | FRANCE | N°23NC03295

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 30 janvier 2025, 23NC03295


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 février 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement no 2303221 du 29 août 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



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Par une requête, enregistrée le 8 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 février 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement no 2303221 du 29 août 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour :

1°) avant dire-droit, d'appeler l'OFII à la cause et de lui enjoindre de produire les éléments sur lesquels l'office s'est fondé pour considérer qu'il pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Albanie, à défaut d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de produire ces éléments ;

2°) d'annuler le jugement du 29 août 2023 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2023 ;

4°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans les mêmes conditions ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- la décision en litige est entachée de défaut de motivation et de défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision en litige est entachée de défaut de motivation ;

- elle est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il doit lui être délivré de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision en litige est entachée de défaut de motivation ;

- elle est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2024, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Brodier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant albanais né en 2000, est entré sur le territoire français le 16 janvier 2017 selon ses déclarations, accompagné de ses parents afin de solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée par l'OFPRA le 24 mai 2018 et par la CNDA le 19 octobre 2018. Le 6 février 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales. Par un arrêté du 7 février 2023, la préfète du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 29 août 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. Il ressort de la décision en litige, par laquelle la préfète du Bas-Rhin a refusé de délivrer à M. B... le titre de séjour prévu par les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'elle vise sa demande présentée le 6 février 2022 ainsi que l'avis du collège des médecins de l'OFII émis le 19 juillet 2022, dont elle s'approprie les termes avant d'indiquer qu'après un examen approfondi de la situation, aucun élément du dossier ni aucune circonstance particulière ne justifie de s'écarter de cet avis. Le requérant, qui n'établit pas qu'il aurait porté les informations relatives à son état de santé à l'attention de la préfecture, n'est pas fondé à soutenir que la décision ne tient pas compte de son état de santé. Il ressort également de la décision en litige qu'elle fait état des éléments connus relativement à sa situation personnelle et à celle de ses parents. La circonstance que ses parents n'auraient jamais reçu les mesures d'éloignement prononcées à leur encontre le 26 novembre 2019 est sans incidence sur la motivation de l'arrêté en litige. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation doit être écarté.

4. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour serait entachée de défaut d'examen de sa situation personnelle.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ".

6. Il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration mentionné à l'article R. 425-11, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

7. Par ailleurs, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 425-9, doit émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016, au vu notamment du rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

8. Enfin, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

9. Il ressort de l'avis du collège des médecins de l'OFII du 19 juillet 2022 que, si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut toutefois, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Compte tenu du sens de cet avis, il appartient à l'intéressé de produire des éléments pour remettre en cause cette présomption et, le cas échéant, à la préfète de les contester, la conviction du juge se déterminant au vu de ces échanges contradictoires. Il ressort des certificats médicaux qu'il produit que M. B... est atteint d'autisme avec retard mental, pour lequel il bénéficie d'un suivi psychiatrique au centre médico-psychologique de Bischheim depuis juillet 2017, ainsi que d'un traitement par somnifère, neuroleptique et sédatif. Il souffre également d'une épilepsie et bénéficie à ce titre d'un traitement par antiépileptique. Il présente par ailleurs un handicap physique, se déplaçant en fauteuil roulant accompagné de ses parents dont l'assistance est nécessaire pour les gestes de la vie quotidienne. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un suivi psychiatrique en Albanie équivalent à celui qu'il reçoit en France, au demeurant avec assistance d'un interprète. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier qu'il ne pourrait pas avoir accès aux traitements dont il a besoin, notamment pour son épilepsie. Les rapports ou articles de presse dont le requérant se prévaut, relatifs à l'insuffisance de la couverture maladie, au manque de médicaments et à la corruption du système de santé, ont une portée trop générale pour combattre l'avis du collège des médecins de l'OFII. Par suite, et sans qu'il soit besoin de solliciter la production de l'entier dossier du rapport médical de la part de l'OFII, le requérant ayant lui-même produit le rapport médical du 11 mai 2022, ou d'enjoindre au préfet ou à l'OFII de produire les documents établissant qu'il pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Albanie, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. M. B... résidait, à la date de la décision en litige, depuis six ans en France, accompagné de ses parents auprès desquels il demeure compte tenu de son handicap. Il bénéficie sur le territoire d'une prise en charge de ce handicap et s'est vu accorder l'aide humaine dans le cadre de la prestation de compensation du handicap à compter du 1er décembre 2020. Toutefois, en dehors de ses parents, qui se maintiennent en situation irrégulière, M. B... n'a pas d'attaches en France ni de perspective d'intégration sociale ou professionnelle, compte tenu notamment de la barrière de la langue. Si la prise en charge qui lui est assurée est plus intéressante que celle dont il pourrait bénéficier dans son pays d'origine, cette circonstance ne suffit pas, toutefois, à le faire regarder comme ayant ancré en France l'essentiel de sa vie privée et familiale. Sa sœur jumelle réside d'ailleurs toujours en Albanie et ses parents se maintiennent irrégulièrement sur le territoire français. Dans les circonstances de l'espèce, le refus de lui délivrer un titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

12. En dernier lieu, pour le même motif que celui énoncé au point précédent, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.

14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) ; 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...) ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ".

15. Il ressort de ce qui a été dit précédemment que le refus de titre de séjour est suffisamment motivé. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, qui a été prise sur le fondement du 3° de l'article L. 611-1 du code précité, serait entachée de défaut de motivation.

16. En troisième lieu, il ressort de la décision en litige que la préfète du Bas-Rhin a procédé à l'examen de la situation de M. B... avant de prononcer à son encontre une mesure d'éloignement.

17. En quatrième lieu, lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français.

18. Compte tenu de ce qui a été dit au point 9 du présent arrêt, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir, pour faire obstacle à la mesure d'éloignement prononcée à son encontre, de ce qu'il devrait se voir délivrer de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

19. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

20. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9 du présent arrêt, M. B... n'est pas plus fondé à soutenir que la décision en litige méconnaît les dispositions précitées.

21. En sixième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 11 du présent arrêt.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

22. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.

23. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision en litige, qui rappelle que la demande d'asile de M. B... a été rejetée et indique qu'il ne produit à l'appui de sa demande aucun élément nouveau permettant d'établir qu'il serait exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, qu'elle comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté, de même que le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation.

24. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

25. M. B... se prévaut de la prise en charge médicale dont il a besoin et du caractère particulièrement restreint de l'accès aux soins en Albanie. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant serait, comme il le soutient, exposé en cas de retour dans son pays d'origine à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé ni à une réduction significative de son espérance de vie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doit être écarté.

26. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision fixant l'Albanie comme pays de destination, pays dans lequel il a vécu jusqu'à ses 17 ans, où sa sœur réside et dans lequel il a vocation à poursuivre sa vie, accompagné de ses parents, méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La décision en litige n'est pas plus entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

27. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2023. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Chebbale et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Martinez, président,

- Mme Stenger, première conseillère,

- Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.

La rapporteure,

Signé : H. BrodierLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

No 23NC03295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC03295
Date de la décision : 30/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme MOSSER
Avocat(s) : CHEBBALE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-30;23nc03295 ?
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