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03/06/2025 | FRANCE | N°23NC03504

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 5ème chambre, 03 juin 2025, 23NC03504


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... née B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 17 février 2022 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2200731 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

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Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2023, Mme A..., représentée par Me Bertin, demande à la co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... née B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 17 février 2022 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2200731 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2023, Mme A..., représentée par Me Bertin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 juin 2022 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'enjoindre au préfet du Doubs, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résident algérien portant la mention " vie privée et familiale " et, dans l'attente de lui délivrer un récépissé d'une demande en ce sens avec autorisation de travailler dans le délai de 8 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou subsidiairement, un certificat de résident algérien mention " visiteur " et, dans l'attente de lui délivrer un récépissé d'une demande en ce sens avec autorisation de travailler ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de 8 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen au regard de sa demande de certificat de résidence " visiteur ", présentée subsidiairement à sa demande en tant qu'étranger malade ;

- le rapport de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFII) étant incomplet et erroné par rapport à ses multiples pathologies et traitements, la décision de refus de séjour est entachée d'un vice de procédure ;

- la décision de refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2024, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête au motif que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Barlerin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., née en Algérie en 1956, de nationalité algérienne, est entrée en France en 2016, sous couvert d'un visa C à entrées multiples valable du 15 janvier 2016 au 14 janvier 2021. Le 2 novembre 2016, elle a présenté une demande de titre de séjour. Par un arrêté du 19 avril 2017, sa demande a été rejetée et une mesure d'éloignement du territoire français prise à son encontre a été exécutée volontairement. Déclarant être de nouveau entrée sur le territoire français le 20 février 2020, Mme A... a présenté le 15 juillet 2021, à titre principal, une demande de certificat de résidence d'algérien en tant qu'étranger malade, et, à titre subsidiaire, une demande de certificat de résident portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ou, à défaut, en tant que visiteur. Mme A... relève appel du jugement du 30 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 17 février 2022 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Il ressort de la demande de titre de séjour de Mme A..., datée du 6 juillet 2021, adressée par son conseil à la préfecture du Doubs et réceptionnée le 15 juillet 2021, que l'intéressée sollicitait la délivrance d'un certificat de résidence algérien, à titre principal, sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 à raison de son état de santé et, à titre subsidiaire, sur le fondement du 5) de l'article 6 et du a) de l'article 7 de ce même accord.

3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". Aux termes de l'article 7 du même accord : " Les dispositions du présent article et celles de l'article 7 bis fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l'article 6 nouveau, ainsi qu'à ceux qui s'établissent en France après la signature du premier avenant à l'accord / a) Les ressortissants algériens qui justifient de moyens d'existence suffisants et qui prennent l'engagement de n'exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation, reçoivent après le contrôle médical d'usage un certificat valable un an renouvelable et portant la mention " visiteur ".

4. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'admission au séjour de Mme C... A... était clairement fondée sur les stipulations du 5) et du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que sur le a) de l'article 7 dudit accord. Il résulte des termes mêmes de l'arrêté attaqué que cette demande a été examinée par le préfet du Doubs sur le fondement des stipulations du 5) et du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, et qu'il a entendu rejeter cette demande au regard de ces deux fondements. En revanche, il ne ressort pas des termes de cette décision que le préfet aurait examiné la demande de Mme A... au regard des stipulations de l'article 7 a) de cet accord et, contrairement à ce qu'il soutient en défense, il ne saurait être regardé comme ayant, d'une part, examiné la demande au regard du a) de l'article 7 et, d'autre part, l'avoir rejetée par une décision implicite de rejet, distincte de la décision du 17 février 2022. Il en résulte qu'en omettant d'examiner la demande de certificat de résidence sur le fondement de l'article 7 a) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le préfet du Doubs a méconnu l'étendue de la compétence qui lui appartenait et qui lui imposait d'examiner la demande de titre de séjour au regard de l'ensemble des fondements dont elle faisait état. Par suite, le refus de titre de séjour édicté à l'encontre de Mme C... A... doit être annulé pour ce motif, de même que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

5. Il résulte de ce qui précède, que la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions d'injonction sous astreinte :

6. Le présent arrêt, par lequel la cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C... A..., n'implique cependant pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce que lui soit délivré un certificat de résidence doivent être rejetées. Il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet du Doubs de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressée dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, sur le fondement de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2200731 du tribunal administratif de Besançon du 30 juin 2022 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 17 février 2022 par lequel le préfet du Doubs a refusé de délivrer à Mme A... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi est annulé.

Article 3 : Il est fait injonction au préfet du Doubs de procéder à un nouvel examen de la situation de Mme C... A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à Me Bertin la somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... née B..., à Me Bertin et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

Délibéré après l'audience du 13 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Durup de Baleine, président,

- M. Barlerin, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2025.

Le rapporteur,

Signé A. Barlerin Le président,

Signé A. Durup de Baleine

Le greffier,

Signé A. Betti

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Betti

2

N° 23NC03504


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC03504
Date de la décision : 03/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DURUP DE BALEINE
Rapporteur ?: M. Axel BARLERIN
Rapporteur public ?: Mme BOURGUET
Avocat(s) : BERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-03;23nc03504 ?
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