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03/03/2023 | FRANCE | N°22NT02378

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 03 mars 2023, 22NT02378


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 2103308 du 14 avril 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 22 juillet, 13 oct

obre et 24 novembre 2022 M. C..., représenté par Me Nève de Mevergnies, demande à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 2103308 du 14 avril 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 22 juillet, 13 octobre et 24 novembre 2022 M. C..., représenté par Me Nève de Mevergnies, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le même délai, et d'assortir l'une ou l'autre de ces injonctions d'une astreinte d'un montant de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Nève de Mevergnies de la somme de 1 800 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit, d'erreur de fait et de dénaturation des pièces du dossier ;

- le tribunal a omis de répondre au moyen soulevé à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour tiré de ce qu'il remplit les conditions posées par la circulaire du 28 novembre 2012.

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2022 le préfet de la

Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant guinéen né le 23 novembre 1992, est entré en France le 21 novembre 2016. La demande d'asile qu'il a présentée a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 juillet 2017, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 18 décembre 2017. A la suite de ce rejet, une obligation de quitter le territoire français a été prononcée à son encontre le 27 avril 2018. Le recours tendant à l'annulation de cette mesure d'éloignement a été rejeté par un jugement

n° 1804686 du 3 septembre 2018 du tribunal administratif de Nantes et l'appel contre ce jugement a été rejeté par une ordonnance n° 19NT00019 du président de la cour administrative d'appel de Nantes du 24 mai 2019. M. C..., qui s'est maintenu sur le territoire français, a été interpellé sur la voie publique le 14 mars 2020. Il a fait l'objet, le même jour, d'une mesure d'assignation à résidence en vue d'assurer l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français opposée le 27 avril 2018. Cette mesure a été annulée par un jugement n° 2003147 du 25 mars 2020 du même tribunal. Au cours du mois de juin suivant, M. C... a présenté une demande tendant à la délivrance d'une carte de séjour temporaire en invoquant le bénéfice des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicables. Par un arrêté du 1er février 2021, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination. L'intéressé relève appel du jugement du 14 avril 2022 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, si M. C... soutient que le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit, d'erreur de fait et de dénaturation des pièces du dossier, de tels moyens relèvent du bien-fondé du jugement et sont, par suite, sans incidence sur sa régularité.

3. En second lieu, M. C... soutient que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant refus de séjour tiré de ce qu'il remplit les conditions posées par la circulaire du 28 novembre 2012. Toutefois, il ressort des écritures de ses écritures en première instance qu'il n'a pas entendu soulever ce moyen, en tout état de cause inopérant. Il suit de là que le moyen susanalysé manque en fait et doit être écarté.

Sur la légalité de décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de ce que la décision contestée n'est pas suffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, que M. C... réitère en appel sans apporter d'éléments nouveaux.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...). En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

6. Afin de justifier de motifs exceptionnels, M. C... fait valoir l'ancienneté de sa présence en France, son insertion sur le marché du travail ainsi que sa relation de concubinage depuis avril 2019 avec une compatriote qui a obtenu le statut de réfugié le 27 septembre 2022. Toutefois, l'intéressé ne justifie que d'une activité salariée à temps partiel comme agent de propreté entre mai 2018 et février 2021, au demeurant exercée sans autorisation de travail et insuffisante à justifier d'une insertion professionnelle suffisante de l'intéressé. S'il se prévaut d'une promesse d'embauche de la société qui l'a employé, cette circonstance ne saurait par elle-même constituer un motif exceptionnel au sens des dispositions précitées. Il ressort également des pièces du dossier que M. C... s'est soustrait à l'exécution d'une précédente obligation de quitter le territoire édicté à son encontre le 27 avril 2018 et qu'il se maintient, depuis lors, en situation irrégulière en France. Le requérant ne justifie par ailleurs d'aucune communauté de vie avec une compatriote à la date de la décision contestée et ne peut utilement se prévaloir de leur engagement dans un processus de procréation médicalement assistée qui n'a été initié que postérieurement à la décision contestée. Enfin, le requérant n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans. Il s'ensuit que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant qu'il ne justifiait pas de motifs exceptionnels justifiant sa régularisation sur le fondement de ces dispositions.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et repris à l'article L.423-23 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) : 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...). ".

8. Compte tenu de ce qui a été indiqué au point 6, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et des dispositions précitées ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. En premier lieu, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'étant pas annulée, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.

10. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, les moyens tirés de ce que la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle du requérant doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination mentionne la nationalité de M. C..., vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et précise qu'il ne justifie pas être exposé personnellement à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision comporte ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, un énoncé suffisant des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement.

12. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de l'arrêté contesté que le préfet de la Loire-Atlantique a procédé à un examen de la situation personnelle du requérant avant de fixer le pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'un tel examen doit être écarté.

13. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de ce que la décision contestée a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que M. C... réitère en appel sans apporter d'éléments nouveaux.

14. En quatrième lieu, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.

15. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 1er février 2021 du préfet de la Loire-Atlantique. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 9 février 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 mars 2023.

Le rapporteur

A. B...La présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02378
Date de la décision : 03/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : NEVE DE MEVERGNIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-03-03;22nt02378 ?
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