Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2021 du préfet de Maine-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination
Par un jugement n° 2113912 du 17 novembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2023, et un mémoire, enregistré le 28 novembre 2023, non communiqué, M. A..., représenté par Me Perrot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2021 du préfet de Maine-et-Loire ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée, s'est fondée sur un avis du collège de médecins de l'OFII pris aux termes d'une procédure irrégulière, n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle, a été prise par une autorité qui s'est estimée à tort en situation de compétence liée, méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et emporte des conséquences disproportionnées sur le respect de sa vie privée en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant fixation du pays de destination méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et méconnaît les stipulations de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. C... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
_- le rapport de M. Quillévéré ;
- et les observations de Me Perrot, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant rwandais, né le 20 mai 1971, est entré en France le 21 mars 2016 selon ses déclarations. Après avoir échoué à obtenir la reconnaissance de la qualité de réfugié, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé le 30 juillet 2019. A ce titre, il a été autorisé à séjourner en France du 20 décembre 2019 au 16 novembre 2021. Par un arrêté du 10 novembre 2021, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 17 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté son recours contre ces décisions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, il convient, par adoption de motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de ce que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a été rendu aux termes d'une procédure irrégulière, moyen que le requérant reprend en appel sans apporter d'élément nouveau.
3. En deuxième lieu, la décision contestée vise les textes dont elle fait application, notamment l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle mentionne des éléments de la biographie de l'intéressé et se fonde sur le fait que le défaut de prise en charge médicale de l'état de santé de M. A... ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Le préfet de Maine-et-Loire a ainsi suffisamment motivé sa décision tant en droit qu'en fait. En outre, il ne ressort pas de cette motivation que le préfet se serait estimé lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
4. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la motivation de la décision que le préfet de Maine-et-Loire a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A....
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. / La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) "
6. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardé comme apportant des éléments de faits susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
7. Dans son avis du 14 septembre 2021, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre de séquelles neuro-orthopédiques au membre inférieur gauche issues d'un traumatisme de guerre, consistant en un déficit moteur et neurologique. Pour contester le motif pris de ce que le défaut de soins ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, M. A... produit une attestation médicale en date du 13 décembre 2022 postérieure à l'arrêté contesté, qui se borne à indiquer sans précisions que le défaut de soins pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, cette attestation du 13 décembre 2022, insuffisamment circonstanciée, pas davantage que l'attestation médicale du 9 décembre 2021 et les autres pièces médicales produites qui décrivent un état de santé de M. A... préexistant à l'arrêté contesté et désormais consolidé, ne permettent de remettre en cause l'avis de l'OFII selon lequel le défaut de soins ne devrait pas entraîner pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité, Par ailleurs, s'il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu prescrire un traitement médicamenteux composé d'Irbésartan et de Paracétamol et qu'il suit un parcours de rééducation, il n'établit pas ne pouvoir en bénéficier dans son pays d'origine. Enfin, la circonstance que le requérant a bénéficié au cours des années précédentes d'avis favorables du collège des médecins de l'OFII et notamment l'avis rendu par le 5 novembre 2020 qui avait estimé la durée des soins à six mois ne saurait lui conférer un droit acquis au renouvellement de son titre de séjour. Dès lors, en refusant de renouveler le titre de séjour sollicité par M. A... le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.
9. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
10. M. A..., entré en France le 21 mars 2016 selon ses déclarations, ne fait pas état de liens stables, intenses et anciens en France. Il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie. Son engagement associatif, pour louable qu'il soit, ne peut suffire à attester de son intégration dans la société française. En outre, la circonstance que M. A... pourrait ne pas bénéficier d'une prise en charge médicale en cas de renvoi au Rwanda, pays dont il a la nationalité est inopérant au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté. Par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 8, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en obligeant M. A... à quitter le territoire français.
12. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux rappelés au point 10, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté. Par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de M. A....
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
13. M. A... fait valoir qu'en cas de retour dans son pays d'origine, il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants, découlant notamment de l'impossibilité pour lui de bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé au Rwanda. Compte tenu de ce qui a été dit au point 8, il ne peut se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'union européenne et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2024
Le président-rapporteur
G. QUILLÉVÉRÉ
Le président-assesseur
J.E. GEFFRAYLa greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23NT001382
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