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01/10/2024 | FRANCE | N°23NT00370

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 01 octobre 2024, 23NT00370


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Sous le n° 2002405, M. et Mme D... et E... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 6 février 2020 par laquelle le conseil d'agglomération de Saint-Brieuc Armor Agglomération (Côtes-d'Armor) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Tréveneuc.



Sous le n° 2002406, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cette même délibération.



Par

un jugement nos 2002405, 2002406 du 9 décembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Sous le n° 2002405, M. et Mme D... et E... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 6 février 2020 par laquelle le conseil d'agglomération de Saint-Brieuc Armor Agglomération (Côtes-d'Armor) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Tréveneuc.

Sous le n° 2002406, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cette même délibération.

Par un jugement nos 2002405, 2002406 du 9 décembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 février 2023, 13 novembre 2023 et le 23 mai 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. et Mme D... et E... B... et Mme C... A..., représentés par Me Collet, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 décembre 2022 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler la délibération du 6 février 2020 de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération et, subsidiairement, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées A 1176, A 1177 et A 1040 en zone naturelle ;

3°) d'enjoindre au président de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération de saisir, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, le conseil d'agglomération de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor agglomération afin de retirer la délibération du 6 février 2020 en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées A 1176, A 1177 et A 1040 en zone naturelle ;

4°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les modalités de concertation prévues aux articles L. 103-2 et L. 103-4 du code de l'urbanisme ont été méconnues ; la première réunion publique est intervenue après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) ; le comité technique n'a été composé que de membres de la municipalité et doit être regardé comme inexistant ; la concertation annoncée avec les personnes qualifiées ou détentrices d'une expertise a été insuffisante ; ces circonstances ont été de nature à avoir des conséquences sur le sens de la délibération ou à priver les intéressés d'une garantie ;

- le classement en zone N d'une partie des parcelles cadastrées A 1776 et 1777 est entaché d'erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme et de l'orientation n° 1 du PADD eu égard à leur localisation, à leur artificialisation, à l'absence d'intérêt écologique ;

- le classement en zone N de la parcelle cadastrée A 1040 est entaché d'erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme eu égard à sa localisation au sein d'un espace urbanisé, à l'absence d'intérêt écologique et à son artificialisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2023, la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération, représentée par Me Le Derf-Daniel, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. et Mme B... et G... Mme A... une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... et Mme A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 13 avril 2023, la commune de Tréveneuc, représentée par Me Le Derf-Daniel, conclut à ce qu'il soit fait droit aux demandes de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme B... et G... Mme A... une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... et G... Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rivas,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- les observations de Me Leduc, substituant Me Collet, représentant M. et Mme B... et Mme A..., et F..., substituant Me Le Derf-Daniel, représentant la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération et la commune de Tréveneuc.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 21 avril 2016, le conseil municipal de Tréveneuc (Côtes-d'Armor) a prescrit la révision générale de son plan local d'urbanisme. La compétence " plan local d'urbanisme " ayant été transférée par délibération du 27 mars 2017 à la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération, celle-ci a poursuivi la procédure de révision initiée par la commune de Tréveneuc. Par une délibération du 25 avril 2019 le conseil d'agglomération a arrêté le projet de plan local d'urbanisme puis, par une délibération du 6 février 2020, il a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Tréveneuc. M. et Mme B..., propriétaires d'un tènement foncier cadastré section A nos 1776 et 1777, et Mme A..., propriétaire d'une parcelle cadastrée section A n° 1040, ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 6 février 2020. Par un jugement du 9 décembre 2022, dont ils relèvent appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Par un mémoire en intervention volontaire, la commune de Tréveneuc demande qu'il soit fait droit aux conclusions de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération.

Sur l'intervention de la commune de Tréveneuc :

2. Est recevable à former une intervention devant le juge du fond toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige.

3. La commune de Tréveneuc a intérêt à la confirmation du jugement attaqué rejetant la demande de M. et Mme B... et G... Mme A... tendant à l'annulation de la délibération du 6 février 2020 de la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération approuvant le plan local d'urbanisme applicable dans cette commune. Son intervention en défense doit donc être admise.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : / 1° L'élaboration ou la révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme ; (...). ". Aux termes de l'article L. 103-4 du même code : " Les modalités de la concertation permettent, pendant une durée suffisante et selon des moyens adaptés au regard de l'importance et des caractéristiques du projet, au public d'accéder aux informations relatives au projet et aux avis requis par les dispositions législatives ou réglementaires applicables et de formuler des observations et propositions qui sont enregistrées et conservées par l'autorité compétente. ".

5. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que par délibération du 21 avril 2016, le conseil municipal de Tréveneuc a fixé les modalités de la concertation prévue par les dispositions précitées, pour la révision de son plan local d'urbanisme. Il y est notamment prévu " la tenue d'au moins deux réunions publiques, aux moments de l'élaboration du PADD et avant l'arrêt du projet, qui permettront aux administrés de s'exprimer sur les orientations choisies par la municipalité. " et " la création d'un comité technique composé d'élus, de personnes qualifiées (représentants de la profession agricole, commerçants etc.) ou détentrices d'une expertise pertinente pour éclairer la municipalité (associations etc.). ".

6. D'autre part, au titre de cette concertation, une première réunion publique s'est tenue le 9 juillet 2018, soit après l'adoption par le conseil municipal de Tréveneuc le 3 mai 2018, puis par le conseil d'agglomération de Saint-Brieuc Armor Agglomération le 5 juillet 2018, des orientations du projet de plan d'aménagement et de développement durable (PADD). Il ne résulte pas de la délibération du 21 avril 2016 fixant les modalités de la concertation et prévoyant la tenue de réunions publiques " aux moments de l'élaboration du PADD " que cette première réunion de concertation aurait dû intervenir avant la délibération du 3 mai 2018 par laquelle le conseil municipal de Tréveneuc a débattu sur le projet de PADD. Du reste, il ressort du rapport du commissaire-enquêteur ayant conduit l'enquête publique requise qu'à cette occasion il a été débattu de ce projet lors d'une première réunion le 9 juillet 2016 puis d'une seconde réunion, le 12 avril 2019. Ces deux réunions ont donné lieu à des échanges avec le public et elles se sont tenues avant la délibération du 25 avril 2019 arrêtant le projet de plan local d'urbanisme. Par ailleurs, le comité technique prévu par la délibération du 21 avril 2016 a été constitué et composé d'élus locaux et d'un agent municipal détenteur d'une expertise en urbanisme. Si ce comité ne comprenait pas de personnes qualifiées tels que des représentants de la profession agricole ou de commerçants, ce qui n'avait pas été imparti mais envisagé par la délibération du 21 avril 2016, il résulte du rapport du commissaire enquêteur que, notamment, des réunions avec des agriculteurs sont intervenues en phase de concertation. Enfin il n'est pas contesté qu'un directeur d'un centre de vacances local et la présidente d'une association ont été à tout le moins invités à participer à cette concertation. Dans ces conditions M. et Mme B... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que la concertation ayant précédé l'adoption du plan local d'urbanisme de Tréveneuc serait intervenue en méconnaissance des articles L. 103-2 et L. 103-4 du code de l'urbanisme.

7. Aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1°) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / (...). ".

8. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage et à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 151-24 précité, un secteur qu'ils entendent soustraire pour l'avenir à l'urbanisation, sous réserve que l'appréciation à laquelle ils se livrent ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et ne soit pas entachée d'erreur manifeste.

9. Il ressort des pièces du dossier, dont le rapport de présentation du plan local d'urbanisme, que ses auteurs ont entendu classer en zone " N générale " les parties du territoire affectées à la protection des sites, des milieux naturels et des paysages au sens de l'article précité et qu'à ce titre, ils y ont notamment inclus la trame verte et bleue cartographiée dans ce même document. Or il résulte de cette carte que les parcelles, ou parties de parcelles en débat des requérants sont clairement comprises dans cette trame verte et supportent des " corridors verts " identifiés par ce document. Par ailleurs, il ressort également des pièces au dossier que ces mêmes parcelles, ou parties de parcelle, présentent des superficies conséquentes, environ 1 300 m² pour celle G... A... et environ 1 650 m² pour celles de M. et Mme B..., qu'elles ne sont pas bâties et présentent un caractère naturel et sont partiellement boisées pour ces dernières. Si elles sont en limite immédiate de parcelles, ou de parties de parcelle pour celles de M. et Mme B..., classées en zone U et supportant des maisons d'habitation, elles s'ouvrent sur une vaste zone naturelle classée en N, prolongée par une zone naturelle regroupant des espaces remarquables terrestres dite NLt. En conséquence, le classement décidé de ces parcelles en zone N ne peut être regardé comme contrevenant à l'orientation n° 1 du plan d'aménagement et de développement urbain du plan local d'urbanisme, laquelle encourage la densification des secteurs déjà urbanisés.

10. Par ailleurs, la circonstance que les parcelles, ou fractions de parcelles, en discussion seraient desservies par les réseaux, accessibles par la voirie existante, que le commissaire enquêteur s'est interrogé sur la pertinence de leur classement en zone N ou que des parcelles voisines ont été classées en zone U sont sans incidence sur la légalité de la délibération contestée en tant qu'elle concerne les terrains en litige. Enfin la circonstance alléguée que les parcelles, ou fractions de parcelles en débat, pourraient être classées en zone U, comme certaines des parcelles mitoyennes, est sans incidence sur l'appréciation à porter sur le classement contesté.

11. En conséquence des deux points précédents, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de l'erreur de droit dans le classement des parcelles, ou fractions de parcelles, de M. et Mme B... et G... Mme A... en zone N doivent être écartés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Sur les frais d'instance :

13. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme B... et Mme A.... En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor Agglomération.

14. D'autre part, l'auteur d'une intervention n'étant pas partie à l'instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la partie perdante la somme que la commune de Tréveneuc, intervenante en défense, demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de la commune de Tréveneuc est admise.

Article 2 : La requête de M. et Mme B... et G... Mme A... est rejetée.

Article 3 : M. et Mme B... et Mme A... verseront ensemble à la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor agglomération la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Tréveneuc au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et E... B..., à Mme C... A..., à la communauté d'agglomération Saint-Brieuc Armor agglomération et à la commune de Tréveneuc.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2024.

Le rapporteur,

C. RIVAS

Le président,

S. DEGOMMIER

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00370
Date de la décision : 01/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SCP ARES GARNIER DOHOLLOU SOUET ARION ARDISSON GREARD COLLET LEDERF-DANIEL LEBLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-01;23nt00370 ?
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