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01/10/2024 | FRANCE | N°23NT02162

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 01 octobre 2024, 23NT02162


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 20 juillet 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 24 mars 2022 de l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour.



Par un jugement n° 2210703 du 26 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a

annulé cette décision et a enjoint au ministre de l'intérieur de faire délivrer le visa de court séjo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 20 juillet 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 24 mars 2022 de l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour.

Par un jugement n° 2210703 du 26 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision et a enjoint au ministre de l'intérieur de faire délivrer le visa de court séjour sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification de son jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2023, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 26 mai 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... B... devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que le motif tiré du risque de détournement de l'objet du visa n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Odin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le moyen soulevé par le ministre de l'intérieur n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le règlement (CE) n° 810/2009 du 13 juillet 2009 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire des visas ;

- le règlement (UE) n° 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dubost a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 29 décembre 1966, a déposé une demande de visa de court séjour en qualité de visiteur auprès de l'autorité consulaire française à Alger (Algérie), laquelle a rejeté cette demande par une décision du 24 mars 2022. Le recours formé contre ce refus consulaire devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été rejeté par une décision du 20 juillet 2022. M. B... a alors demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cette décision. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement de ce tribunal du 26 mai 2023 annulant la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France et lui enjoignant de délivrer le visa de court séjour sollicité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, pour rejeter le recours formé à l'encontre de la décision des autorités consulaires françaises à Alger, sur les circonstances que d'une part, M. B... ne justifie pas de ressources personnelles suffisantes et que l'attestation d'accueil a été validée en méconnaissance des dispositions de l'article R. 313-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'autre part, de l'existence d'un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires.

3. Aux termes de l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles modifié : " Sans préjudice des stipulations du titre Ier du protocole annexé au présent Accord et de l'échange de lettres modifié du 31 août 1983, les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa délivré par les autorités françaises. (...) ". Aux termes de l'article 21 du règlement (CE) du 13 juillet 2009 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire des visas : " 1. Lors de l'examen d'une demande de visa uniforme, (...) une attention particulière est accordée à l'évaluation du risque d'immigration illégale (...) que présenterait le demandeur ainsi qu'à sa volonté de quitter le territoire des États membres avant la date d'expiration du visa demandé. (...) ". Aux termes de l'article 32 du même règlement : " 1. (...) le visa est refusé : (...) / b) s'il existe des doutes raisonnables sur (...) la fiabilité des déclarations effectuées par le demandeur ou sur sa volonté de quitter le territoire des États membres avant l'expiration du visa demandé. (...) ".

4. L'administration peut, indépendamment d'autres motifs de rejet tels que la menace pour l'ordre public, refuser la délivrance d'un visa, qu'il soit de court ou de long séjour, en cas de risque avéré de détournement de son objet, lorsqu'elle établit que le motif indiqué dans la demande ne correspond manifestement pas à la finalité réelle du séjour de l'étranger en France. Elle peut à ce titre opposer un refus à une demande de visa de court séjour en se fondant sur l'existence d'un risque avéré de détournement du visa à des fins migratoires.

5. D'une part, si le ministre fait valoir que M. B... s'est déjà vu refuser à cinq reprises la délivrance de visas de court séjour, une telle circonstance ne suffit pas à établir le risque de détournement de l'objet du visa allégué. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. B..., né le 29 décembre 1966, est retraité et perçoit une pension d'un montant mensuel de 29 360 dinars algériens. Il dispose par ailleurs de comptes bancaires créditeurs en septembre 2021 de 3 300 euros et de 136 561 dinars algériens soit environ 944 euros. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. B... est marié et il n'est pas contesté que la mère, les deux frères et la sœur de M. B... résident en Algérie. Dans ces conditions, la commission de recours a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer le visa sollicité en raison de l'existence d'un risque de détournement de l'objet du visa.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 20 juillet 2022 de la commission de recours contre les refus de visas d'entrée en France sur le recours dirigé contre la décision des autorités consulaires de France en Algérie du 24 mars 2022 et lui a enjoint de délivrer le visa de court séjour sollicité.

Sur les frais liés au litige :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur et des outre-mer est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2024.

La rapporteure,

A.-M. DUBOST

Le président,

S. DEGOMMIERLa présidente,

C. BUFFET

La greffière,

S. PIERODÉ

La greffière,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT02162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02162
Date de la décision : 01/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Anne-Maude DUBOST
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : MORDANT FILIOR SERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-01;23nt02162 ?
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