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22/10/2024 | FRANCE | N°23NT02573

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 22 octobre 2024, 23NT02573


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société anonyme (SA) Eau du Ponant a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des droits supplémentaires de cotisation foncière des entreprises qui lui ont été assignés dans les rôles de la commune de Plougastel Daoulas (Finistère) au titre des années 2013 à 2016 à raison des établissements qu'elle exploite sur le territoire de cette commune à Breleis et Trappic Coat, ainsi que des intérêts de retard dont ces droits ont été assortis et

de condamner l'Etat au versement des intérêts moratoires.



Par un jugement n° 200373...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Eau du Ponant a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des droits supplémentaires de cotisation foncière des entreprises qui lui ont été assignés dans les rôles de la commune de Plougastel Daoulas (Finistère) au titre des années 2013 à 2016 à raison des établissements qu'elle exploite sur le territoire de cette commune à Breleis et Trappic Coat, ainsi que des intérêts de retard dont ces droits ont été assortis et de condamner l'Etat au versement des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 2003736 du 28 juin 2023 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 août 2023 et 14 mai 2024, la SA Eau du Ponant, représentée par Me Palos, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des droits de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

3°) d'ordonner le versement des intérêts moratoires en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les deux immobilisations intitulées " poste de relevage ", présentes sur les sites de Kerziou et Tinduf, et inscrites comptablement pour un montant de 2 814 273,64 euros doivent être exclues de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises dès lors qu'il s'agit en réalité de deux unités d'assainissement collectif comprenant un petit local technique de type blockhaus et trois bassins de lagunage et qu'elles sont spécifiquement adaptées à l'activité industrielle d'épuration ; il en est de même pour les stations de relevage d'un montant de 18 570,98 euros ;

- elle entend se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 160 de l'instruction administrative référencée BOI-IF-TFB-10-10-10 et du paragraphe 160 de l'instruction administrative référencée BOI-IF-TFB-10-50-30.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 février et 28 juin 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SA Eau du Ponant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

- et les observations de Me Laillé, substituant Me Palos, représentant la SA Eau du Ponant.

Considérant ce qui suit :

1. La SA Eau du Ponant, dont le siège social est situé à Brest et qui exploite des établissements à Brest et Plougastel Daoulas, a conclu un contrat avec Brest Métropole Océane en vue de la gestion complète du service public de l'assainissement collectif. Elle a fait l'objet en 2015 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 20 décembre 2010 au 31 décembre 2013. À la suite de ce contrôle, l'administration fiscale, constatant l'absence de souscription par la société de la déclaration initiale de la cotisation foncière des entreprises au titre des années 2013 à 2016, a déterminé les bases imposables et les a portées à la connaissance de la société le 5 octobre 2015. Il en est résulté des rehaussements de cotisations foncières des entreprises au titre des années 2013 à 2016 et 2018. La société a présenté des observations le 4 novembre 2015 auxquelles l'administration a répondu le 18 novembre 2016. Après la mise en recouvrement des cotisations supplémentaires de la cotisation foncière des entreprises, la société a formé une réclamation le 31 décembre 2019. Cette réclamation a été rejetée par l'administration fiscale le 22 juin 2020. Par un jugement n° 2003736 du 28 juin 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la requête tendant à la décharge des droits supplémentaires de cotisation foncière des entreprises qui ont été assignés à la SA Eau du Ponant dans les rôles de la commune de Plougastel Daoulas (Finistère) au titre des années 2013 à 2016 à raison des établissements qu'elle exploite sur le territoire de cette commune à Breleis et Trappic Coat, ainsi que des intérêts de retard dont ces droits ont été assortis. La SA Eau du Ponant relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. D'une part, l'article 1380 du code général des impôts dispose que : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". Selon l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; / 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication ; / (...) / 4° Les sols des bâtiments de toute nature et les terrains formant une dépendance indispensable et immédiate de ces constructions à l'exception des terrains occupés par les serres affectées à une exploitation agricole ; / 5° à l'exception de ceux mentionnés au dernier alinéa de l'article 1393, les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel, tels que chantiers, lieux de dépôt de marchandises et autres emplacements de même nature, soit que le propriétaire les occupe, soit qu'il les fasse occuper par d'autres à titre gratuit ou onéreux ; / 6° Les terrains sur lesquels sont édifiées des installations exonérées en application du 11° de l'article 1382 (...) ". Selon l'article 1382 du même code: " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ". Aux termes du premier alinéa de l'article 1495 de ce code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Aux termes du II de l'article 324 B de l'annexe III au même code : " Pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ".

3. Pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.

4. D'autre part, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (...) ".

5. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu du 11° de l'article 1382 du code général des impôts ne sont pas compris dans les bases de la cotisation foncière des entreprises.

6. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.

7. En premier lieu, la SA Eau du Ponant soutient que les immobilisations inscrites à l'actif de son bilan sous l'intitulé " poste de relevage " sur les sites de Kerziou et de Tinduf pour un montant de 2 814 274 euros constituent des biens d'équipement spécialisés au motif qu'elles correspondent à des unités d'assainissement collectif spécifiquement adaptés à l'activité industrielle d'épuration. Elle produit à l'appui de ses affirmations des plans de recollement schématisant l'emplacement des immobilisations ainsi que des constats d'huissier faisant état, photographies à l'appui, de la présence sur le site de Tinduf d'une fosse toutes eaux, d'une fosse pouzzolane, d'un abri en bois contenant un tableau électrique, d'un regard de détente répartiteur de la fosse, d'un poste de refoulement et de deux lits d'épandage et pour le site de Kerziou d'un blockhaus contenant le tableau électrique et les mêmes installations techniques que celles précédemment rappelées. Si ces documents permettent d'établir que certains dispositifs seraient de nature mobilière, notamment les fosses pouzzolane et les lits d'épandage, la société ne produit en tout état de cause aucune pièce permettant de justifier le montant des immobilisations à exclure de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises.

8. En second lieu, la SA Eau du Ponant fait valoir que les stations de relevage ont un rôle épuratoire et doivent à ce titre bénéficier de l'exonération de la cotisation foncière des entreprises prévue par les dispositions du 11° de l'article 1382 du code général des impôts. Toutefois, la somme de 18 570 euros, dont la déduction est demandée, n'est pas assortie de factures et de pièces justificatives permettant d'apprécier leurs caractéristiques. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ces immobilisations doivent être exclues de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

9. La société requérante n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les paragraphes 160 des instructions référencées BOI-IF-TFB-10-10-10 et BOI-IF-TFB-10-50-30 qui ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.

Sur les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires :

10. En l'absence de litige né et actuel avec le comptable chargé du recouvrement, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires en application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sont irrecevables.

11. Il résulte de ce qui précède que la SA Eau du Ponant n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés à l'instance doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1 : La requête de la SA Eau du Ponant est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Eau du Ponant et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

J.-E. GEFFRAY La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT02573


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02573
Date de la décision : 22/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SELARL CORNET VINCENT SEGUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-22;23nt02573 ?
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