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24/12/2024 | FRANCE | N°24NT01344

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 24 décembre 2024, 24NT01344


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 mai 2023 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.



Par un jugement n° 2307752 du 29 décembre 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procéd

ure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 3 mai 2024, M. B..., représenté par Me Prelaud, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 mai 2023 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2307752 du 29 décembre 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 mai 2024, M. B..., représenté par Me Prelaud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 décembre 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 mai 2023 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour et de travail dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal a dénaturé les pièces du dossier ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle ;

- son droit d'être entendu n'a pas été respecté ;

- elle est entachée d'une erreur de fait, en ce qu'elle énonce qu'il est célibataire ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, en l'absence de saisine du collège des médecins de l'Office français pour l'immigration et l'intégration ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 33 de la convention de Genève relative au statut des réfugiés ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2024, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat,

- et les observations de Me Prelaud, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant nigérian né le 23 janvier 1989, entré en France selon ses dires le 15 mai 2021, a été définitivement débouté du droit d'asile par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 9 novembre 2022. Sa demande de réexamen a été rejetée par une décision du directeur général de l'office français de protection des réfugiés et du droit d'asile notifiée le 5 janvier 2023. Par un arrêté du 10 mai 2023, le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. M. B... relève appel du jugement du 29 décembre 2023 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux par l'effet dévolutif de l'appel, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait dénaturé les pièces du dossier est inopérant et ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, l'obligation de quitter le territoire français vise les dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles elle se fonde et rappelle les éléments de la situation personnelle et du parcours de M. B... qui font qu'il relève des hypothèses, visées par ces dispositions, dans lesquelles l'autorité préfectorale peut légalement décider de prendre une mesure d'obligation de quitter le territoire français. La mesure d'éloignement en litige comporte ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... avant de prendre la décision contestée.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L.611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

6. M. B... soutient que la décision contestée a été prise en méconnaissance des dispositions précitées du 9° de l'article L.611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet de la Loire-Atlantique aurait dû saisir pour avis le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement. Cependant, le certificat médical établi le 24 janvier 2023 par un praticien hospitalier du CHU d'Angers faisant état de ce que le requérant est traité pour des cauchemars n'est pas de nature à établir que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions rappelées ci-dessus du 9° de l'article L.611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 10 mai 2023 à laquelle a été adopté l'arrêté contesté, M. B..., qui est entré en France selon ses dires le 15 mai 2021, n'y était entré que récemment. L'intéressé n'établit pas la réalité et l'ancienneté d'une relation sentimentale nouée sur le territoire, ni être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans. Il ne justifie pas d'une intégration particulière en France. Dans ces conditions, en obligeant M. B... à quitter le territoire français, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....

8. En cinquième lieu, il convient d'écarter par adoption des motifs retenus par le premier juge les moyens tirés de ce que son droit d'être entendu n'a pas été respecté et de ce que la décision contestée est entachée d'une erreur de fait et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 33 de la convention de Genève relative au statut des réfugiés, moyens que M. B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

9. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination mentionne la nationalité de M. B..., vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et précise qu'il ne justifie pas être exposé personnellement à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision comporte ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, un énoncé suffisant des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement.

10. En deuxième lieu, la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, doit être écarté le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

12. M. B... n'apporte à la cour aucun élément nouveau sur les risques actuels encourus en cas de retour au Nigéria, liés notamment à son homosexualité, alors au demeurant qu'ainsi qu'il a été indiqué, sa demande d'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 décembre 2024.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

G. QUILLÉVÉRÉ La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°24NT01344 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NT01344
Date de la décision : 24/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : PRELAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-24;24nt01344 ?
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