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14/01/2025 | FRANCE | N°23NT03877

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 14 janvier 2025, 23NT03877


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Téhéran (Iran) refusant de délivrer à l'enfant B... A... un visa de long séjour au titre de la réunification familiale.



Par un jugement n° 2216574 du 27 octobre 2023, le tribunal admi

nistratif de Nantes a rejeté la demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Téhéran (Iran) refusant de délivrer à l'enfant B... A... un visa de long séjour au titre de la réunification familiale.

Par un jugement n° 2216574 du 27 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 décembre 2023 et 19 avril 2024, M. A..., agissant en son nom propre et au nom de la jeune B... A..., représenté par Me Anglade, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 octobre 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer le visa sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, subsidiairement, de réexaminer la demande de visa dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il n'a pas été procédé à un examen sérieux de la demande de visa ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; le lien particulier unissant M. A... à sa nièce doit être regardé comme établi dans la situation particulière de l'Afghanistan ;

- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2024, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant afghan né le 1er janvier 1988, s'est vu reconnaitre la qualité de réfugié par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 4 décembre 2019. Une demande de visa d'entrée et de long séjour au titre de la réunification familiale a ensuite été présentée pour l'enfant B... A..., ressortissante afghane. Par une décision implicite, à laquelle s'est substituée une décision explicite du 4 janvier 2023, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours préalable formé par M. A... contre la décision de l'autorité consulaire française à Téhéran (Iran) du 3 août 2022 rejetant le visa sollicité. Par un jugement du 27 octobre 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de cette décision du 4 janvier 2023.

2. La décision du 4 janvier 2023 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est fondée sur le fait que la qualité de nièce de M. A... n'ouvre pas droit au bénéfice d'un visa au titre de la réunification familiale et, qu'au surplus, il existe des incohérences dans les déclarations de M. A... relatives à cette enfant.

3. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de la demandeuse de visa.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ", et, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

5. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; / 2° Par son concubin, âgé d'au moins dix-huit ans, avec lequel il avait, avant la date d'introduction de sa demande d'asile, une vie commune suffisamment stable et continue ; / 3° Par les enfants non mariés du couple, n'ayant pas dépassé leur dix-neuvième anniversaire. / (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. A... est entrée régulièrement en France en 2022 au bénéfice de la réunification familiale avec les deux enfants du couple. La jeune B... A... est désormais présentée par M. A... comme étant sa nièce née le 30 novembre 2019, orpheline de mère peu après sa naissance. Elle lui aurait été confiée en conséquence, ainsi qu'à sa conjointe, par son père qui ne souhaitait plus la prendre en charge. Cependant, d'une part, les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la réunification familiale n'ouvrent pas droit à un visa à ce titre lorsqu'un réunifiant souhaite faire venir une nièce. D'autre part, alors qu'il n'est pas soutenu que ledit enfant aurait été adopté par M. A..., celui-ci se borne à se prévaloir d'une attestation du père de l'enfant, affirmant qu'il a délégué son autorité sur cette dernière à M. A... et de celle d'un chef de village afghan, confirmant le décès de la mère de l'enfant et le fait qu'elle a été confiée à M. A.... Toutefois ces seules attestations, qui ne présentent aucune garantie d'authenticité, n'établissent pas davantage un droit à ce visa sur le même fondement.

7. Par ailleurs, s'il est soutenu que M. et Mme A... ont pris en charge cette enfant peu après sa naissance en 2019, M. A... a quitté l'Afghanistan dès 2015 et aucun élément n'établit la prise en charge effective de l'enfant par Mme A... à compter de 2019. Plus largement, le requérant n'apporte pas de précisions utiles sur les conditions d'existence de cette enfant et son lieu de résidence, M. A... se prévalant désormais d'une résidence de l'enfant en Iran, alors qu'il a également fluctué dans ses déclarations sur la filiation de cette dernière. Il a ainsi présenté initialement cette enfant comme sa fille, y compris en produisant un document d'identité afghan falsifié. Enfin la circonstance que M. A... a rencontré la jeune B... lors d'un voyage au Pakistan, puis en Iran en septembre 2022, n'établit pas cette prise en charge. Dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale des intéressés eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise. De même il n'est pas établi que l'intérêt supérieur de l'enfant n'aurait pas été pris en compte. Par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doivent être écartés.

8. En dernier lieu, les conditions de vie et de prise en charge de la jeune B... A... ne sont pas établies par les pièces au dossier, alors qu'il n'est pas contesté que son père est établi en Afghanistan et que l'abandon de son enfant n'est pas démontré. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2025.

Le rapporteur,

C. RIVAS

Le président,

S. DEGOMMIER

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03877


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03877
Date de la décision : 14/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : ANGLADE & PAFUNDI A.A.R.P.I

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-14;23nt03877 ?
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