La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2025 | FRANCE | N°23NT02899

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 04 février 2025, 23NT02899


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.



Par un jugement n°1905274 du 14 avril 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour avant Cassation :



Par une requête et de

s mémoires enregistrés les 4 juin 2021, 17 janvier, 7 février et 8 mars 2022 M. et Mme A..., représentés par Me Duraffourd, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.

Par un jugement n°1905274 du 14 avril 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour avant Cassation :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 4 juin 2021, 17 janvier, 7 février et 8 mars 2022 M. et Mme A..., représentés par Me Duraffourd, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- compte tenu de la mise en œuvre par le service de la procédure d'abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, ils n'ont pas été en mesure d'apporter utilement une réponse à la proposition de rectification du 20 octobre 2016 ;

- l'apport des titres de la SARL Avalou Douar qu'ils détenaient à la société Catts est intervenu le 30 septembre 2012 et, à cette date, le régime alors applicable leur

permettait de bénéficier de l'exonération de la plus-value dont ils se sont prévalus ;

- la SARL Avalou Douar n'a pas été dissoute et il n'existe donc aucune

annulation de titres devant mettre fin au report d'imposition prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôts ;

- la société Catts a réinvesti les disponibilités retirées de la vente du fonds de commerce de la société Avalou Douar dans une activité économique et il ne pouvait donc être mis fin au report d'imposition ;

- en vertu de l'article 8 de la directive 2009/133 CE du 19 octobre 2009, aucun impôt ne peut leur être réclamé ;

- les dispositions de l'article 200 A du code général des impôts ne sont pas conformes à la Constitution ;

- elle est fondée à se prévaloir de l'instruction référencée BOI-RPPM-PVBM1-30-10-60 n° 340 du 4 mars 2016.

Par mémoires distincts, enregistrés les 19 juillet et 2 septembre 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Duraffourd, ont demandé à la cour de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions combinées des articles 150-0 B ter et 200 A du code général des impôts.

Par une ordonnance n° 21NT01518 QPC du 14 septembre 2021, le président de la 1ère chambre de la cour n'a pas transmis au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions combinées des articles 150-0 B ter et 200 A du code général des impôts.

Par des mémoires en défense enregistrés les 19 novembre 2021, 2 et 22 février 2022 et un mémoire enregistré le 16 mars 2022, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer partiel et au rejet du surplus de la requête.

Il fait valoir qu'un dégrèvement de 76 840 euros a été prononcé le 9 septembre 2021 et que pour le surplus, les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Par un arrêt n° 21NT01518 du 23 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Nantes, statuant sur appel de M. et Mme A..., a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un dégrèvement intervenu en cours d'instance et la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013.

Par une décision n° 471235 du 29 septembre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi formé par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, a annulé les articles 2 à 4 de cet arrêt et renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la cour pour y être jugée.

Procédure devant la cour après cassation :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 septembre, 30 octobre et 23 novembre 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Duraffourd, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le régime applicable était non le report d'imposition de la plus-value mais le sursis d'imposition de celle-ci prévu par les dispositions de l'article 150 OB du code général des impôts ;

- l'apport des titres de la SARL Avalou Douar qu'ils détenaient à la société Catts est intervenu le 30 septembre 2012 et, à cette date, le régime alors applicable leur permettait de bénéficier de l'exonération de la plus-value dont ils se sont prévalus ; la SARL Avalou Douar n'a pas été dissoute ; il n'existe donc aucune annulation des titres devant mettre fin au report d'imposition prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôt ;

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article 8 de la directive 2009/133 CE du 19 octobre 2009 ;

- ils se prévalent, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations de l'instruction référencée BOI-RPPM-PVBM1-30-10-60 du 4 mars 2016.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 novembre, 9 novembre et 15 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009 concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents, ainsi qu'au transfert du siège statutaire d'une SE ou d'une SCE d'un État membre à un autre ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a assujetti M. et Mme A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 à raison de l'imposition d'une plus-value d'apport de titres d'un montant de 492 500 euros dont le report d'imposition, en application des dispositions de l'article 150-0 B ter du code général des impôts, avait pris fin au cours de cette année. Par un jugement du 14 avril 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires. Saisi d'un pourvoi formé par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, le Conseil d'Etat, par une décision du 29 septembre 2023, a annulé les articles 2 à 4 de l'arrêt du 23 décembre 2022 par lequel la cour a annulé le jugement du tribunal administratif et accordé à M. et Mme A... la décharge des impositions en litige. Il a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la cour pour y être jugée.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. M. et Mme A... reprennent en appel, sans apporter d'éléments nouveaux en fait ou en droit, leur moyen invoqué en première instance et tiré de ce que compte tenu de la mise en œuvre par le service de la procédure d'abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, ils n'ont pas été en mesure d'apporter utilement une réponse à la proposition de rectification du 20 octobre 2016. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen.

Sur le bien-fondé des imposition supplémentaires :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

3. M. et Mme A... détenaient chacun la moitié du capital social de la SARL Avalou Douar. Par un contrat d'apport, dont la condition suspensive s'est réalisée le 28 novembre 2012, ils ont apporté ces parts sociales à la SARL Catts, qu'ils avaient constituée le 1er janvier 2012 et ont reçu en échange des parts de la société Catts, cette opération ayant généré une plus-value de 492 500 euros placée en sursis d'imposition en application de l'article 150-0 B du code général des impôts. La société Avalou Douar a ensuite, en avril 2013, cédé son fonds de commerce et la dissolution de la société a été décidée par une assemblée générale du 1er août 2013. La clôture des opérations a été constatée par une assemblée générale du 26 décembre 2013. Estimant que les conditions du report d'imposition de la plus-value n'étaient pas respectées, l'administration l'a soumise à l'impôt sur le revenu, au titre de l'année 2013.

4. D'une part, aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts : " I.-1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que des articles 150 UB et 150 UC, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement, par personne interposée ou par l'intermédiaire d'une fiducie, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu.(...). Aux termes de l'article 150-0 B du même code dans sa version applicable au litige, qui prévoit cependant un sursis à cette imposition : " Sous réserve des dispositions de l'article 150-0 B ter, les dispositions de l'article 150-0 A ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable, de conversion, de division, ou de regroupement, réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés. Ces dispositions s'appliquent aux opérations d'échange ou d'apport de titres mentionnées au premier alinéa réalisées en France, dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, ainsi qu'aux opérations, autres que les opérations d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, pour lesquelles le dépositaire des titres échangés est établi en France, dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. Les échanges avec soulte demeurent soumis aux dispositions de l'article 150-0 A lorsque le montant de la soulte reçue par le contribuable excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus. ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 150-0 B ter du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 : " I. - L'imposition de la plus-value réalisée, directement ou par personne interposée, dans le cadre d'un apport de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres ou de droits s'y rapportant tels que définis à l'article 150-0 A à une société soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent est reportée si les conditions prévues au III du présent article sont remplies. Le contribuable mentionne le montant de la plus-value dans la déclaration prévue à l'article 170 (...) Il est mis fin au report d'imposition à l'occasion : 1° De la cession à titre onéreux, du rachat, du remboursement ou de l'annulation des titres reçus en rémunération de l'apport ; 2° De la cession à titre onéreux, du rachat, du remboursement ou de l'annulation des titres apportés, si cet événement intervient dans un délai, décompté de date à date, de trois ans à compter de l'apport des titres. Toutefois, il n'est pas mis fin au report d'imposition lorsque la société bénéficiaire de l'apport cède les titres dans un délai de trois ans à compter de la date de l'apport et prend l'engagement d'investir le produit de leur cession, dans un délai de deux ans à compter de la date de la cession et à hauteur d'au moins 50 % du montant de ce produit, dans le financement d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion d'un patrimoine mobilier ou immobilier, dans l'acquisition d'une fraction du capital d'une société exerçant une telle activité, sous la même exception, et qui a pour effet de lui en conférer le contrôle au sens du 2° du III du présent article, ou dans la souscription en numéraire au capital initial ou à l'augmentation de capital d'une ou plusieurs sociétés répondant aux conditions prévues au b du 3° du II de l'article 150-0 D bis. Le non-respect de la condition de réinvestissement met fin au report d'imposition au titre de l'année au cours de laquelle le délai de deux ans expire ; 3° De la cession à titre onéreux, du rachat, du remboursement ou de l'annulation des parts ou droits dans les sociétés ou groupements interposés ; 4° Ou, si cet événement est antérieur, lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal hors de France dans les conditions prévues à l'article 167 bis. La fin du report. ".

6. En premier lieu, la date à laquelle la cession de droits sociaux d'une société générant une plus-value imposable doit être regardée comme réalisée est celle à laquelle s'opère entre les parties, indépendamment des modalités de paiement, le transfert de propriété. Ce transfert de propriété a lieu, sauf dispositions contractuelles contraires, à la date de la vente, c'est-à-dire à la date où un accord intervient sur la chose et le prix.

7. Il résulte de l'instruction que le contrat de cession des parts de la SARL Avalou Douar du 30 septembre 2012 stipule, à son article 3 intitulé " condition suspensive " : " Les apports qui précèdent ainsi que les modalités de leur rémunération ne deviendront définitives qu'au jour de l'enregistrement et la modification de l'extrait Kbis produit par le RCS de St Malo. / A défaut de ces vérifications et approbations dans un délai de 3 mois à compter de ce jour, le présent contrat sera considéré comme nul et non avenu sans indemnité de part ni d'autre. ". Il est constant que l'enregistrement et la modification de l'extrait Kbis au registre du commerce et des sociétés de Saint-Malo sont intervenus le 28 novembre 2012. Dès lors, malgré l'accord des parties sur la chose et le prix intervenu le 30 septembre 2012, la vente n'est devenue définitive que le 28 novembre 2012 et le transfert de propriété ne pouvait donc pas intervenir à une date antérieure. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'article 3 du contrat de cession doit s'analyser, comme d'ailleurs ce dernier le précise lui-même, comme une condition suspensive et non comme une condition purement potestative. Par conséquent, l'administration fiscale a pu à bon droit remettre en cause le régime du sursis d'imposition prévu à l'article 150-0 B du code général des impôts, qui n'était applicable qu'aux apports réalisés avant le 13 novembre 2012, et estimer que la cession litigieuse était régie par les dispositions de l'article 150-0 B ter du même code des impôts, qui prévoit un report d'imposition.

8. En deuxième lieu, l'article 150-0 B ter du code général des impôts prévoit, sous certaines conditions, un mécanisme de report d'imposition de plein droit des plus-values réalisées lors d'opérations d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, contrôlée par l'apporteur. Ces dispositions ont pour seul effet de permettre, par dérogation à la règle selon laquelle le fait générateur de l'imposition d'une plus-value est constitué au cours de l'année de sa réalisation, de constater et de calculer la plus-value d'échange l'année de sa réalisation et de l'imposer au titre de l'année au cours de laquelle intervient l'événement qui met fin au report d'imposition, qui peut notamment être l'annulation des titres apportés.

9. Les contribuables ayant apporté à une société holding, de façon devenue définitive, des titres d'une autre société dans des conditions qui rendent ces époux éligibles à la mise en report d'imposition de la plus-value d'apport de ces titres, lorsque l'assemblée générale de cette dernière société prononce ultérieurement sa dissolution, celle-ci entraîne l'annulation de ses titres et ainsi la fin du report de l'imposition. L'administration fiscale doit donc assujettir la plus-value d'apport de titres à raison de la fin de ce report.

10. Il résulte de l'instruction que M. et Mme A... ont apporté à la société holding Catts, de façon devenue définitive le 28 novembre 2012, des titres de la société à responsabilité limitée (SARL) Avalou Douar, dans des conditions rendant ces époux éligibles à la mise en report d'imposition de la plus-value d'apport de ces titres compte tenu de cette date. L'assemblée générale de cette société a, le 1er aout 2013, prononcé sa dissolution, entraînant l'annulation de ses titres et ainsi la fin du report de l'imposition. Ainsi, la dissolution et la liquidation, qui ont emporté l'annulation de l'apport des titres de la SARL Avalou Douar en 2013, constituent le fait générateur de l'impôt. L'intervention le 4 juin 2021, postérieurement à l'année au cours de laquelle est survenu l'évènement qui a mis fin au report d'imposition, d'un jugement du tribunal de commerce de Nîmes prononçant la nullité de la dissolution, n'était pas de nature à remettre rétroactivement en cause l'imposition contestée. C'est donc à bon droit que l'administration a assujetti la plus-value d'apport de titres à raison de la fin de ce report.

11. En troisième lieu, pour déterminer la valeur de la société Avalou Douar au moment de sa dissolution, les requérants calculent la différence entre la valeur du fonds de commerce cédé et la valeur nette comptable des éléments cédés, soit une somme de 33 608 euros. Toutefois, un tel montant ne correspond pas à la valeur de la société Avalou Douar. Il résulte de l'instruction que la société Catts a réinvesti une somme de 10 000 euros dans le capital de la société Trézhéol 22 et la même somme dans celui de la société Trézhéaol 35, soit au total environ 10% du produit de la cession des titres, qui est de 178 739 euros dès lors que pour sa détermination il y a de retenir comme valeur du produit de cession le boni de liquidation de la société Avalou Douar. En outre, il n'est pas établi que la société Catts aurait réalisé des avances importantes en compte courant d'associé, qui auraient servi à financer des charges opérationnelles de ces deux sociétés, ces sommes ayant pu éventuellement être prises en compte pour le calcul du seuil de 50%, tel qu'il est prévu par les dispositions de l'article 150-0 B ter du code général des impôts. Ainsi, la condition tenant au seuil de 50 % de 178 739 euros n'est pas remplie.

12. En quatrième lieu, l'article 1er de la directive 2009/133/CE du Conseil du

19 octobre 2009 " concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents, ainsi qu'au transfert du siège statutaire d'une SE ou d'une SCE d'un État membre à un autre " précise que " Chaque État membre applique la présente directive aux opérations suivantes : a) opérations de fusion, de scission, de scission partielle, d'apport d'actifs et d'échange d'actions qui concernent des sociétés de deux ou plusieurs États membres ; b) transfert du siège statutaire, d'un État membre à un autre, d'une société européenne (...) ".

13. Il résulte de l'instruction que l'apport litigieux de parts s'est opéré entre sociétés françaises. M. et Mme A... ne peuvent donc pas utilement soutenir que les dispositions de l'article 150-0 B ter du code général des impôts sont incompatibles avec les dispositions de l'article 8 de la directive 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009, dès lors que les opérations d'échange de titres ayant donné lieu aux reports d'imposition en litige ne relèvent pas du droit de l'Union, dans la mesure où elles concernent des sociétés établies en France, et n'entrent pas ainsi dans le champ matériel de cette directive.

14. Enfin, si M. et Mme A... soutiennent que les dispositions de l'article 200 A du code général des impôts ne sont pas conformes à la Constitution, en dehors de la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité instituée à l'article 61-1 de la Constitution, il n'appartient pas au juge administratif de porter une appréciation sur la constitutionnalité de la loi. Ce moyen n'est, par suite, faute d'avoir été présenté par un mémoire distinct comme l'exigent les dispositions du premier alinéa de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, pas recevable et ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

15. M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations de l'instruction référencée BOI-RPPM-PVBM1-30-10-60 du 4 mars 2016, qui est postérieure à l'année d'imposition en litige.

16. Il résulte de ce qui précède que, dans la mesure du renvoi de l'affaire, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Vieville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2025.

Le rapporteur

J.E. GEFFRAYLe président

G. QUILLÉVÉRÉLa greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT02899


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02899
Date de la décision : 04/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CABINET DURAFFOURD GONDOUIN PALOMARES BARICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-04;23nt02899 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award