Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de police a décidé qu'il serait transféré aux autorités chypriotes.
Par un jugement n° 2102047/8 du 3 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 janvier 2021 et a enjoint au préfet de police de délivrer à M. C... une attestation de demande d'asile en procédure normale dans un délai de dix jours à compter de la date de notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 mars 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2102047/8 du 3 mars 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- le motif d'annulation retenu par le premier juge tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 est infondé dès lors que l'ensemble des pièces présentées au tribunal permettent d'établir, eu égard notamment au rapprochement des dates de consultation du fichier Eurodac et de la saisine de la Direction générale des étrangers en France que les autorités chypriotes ont été saisies d'une demande de reprise en charge de
M. C... le 15 décembre 2020 et qu'elles ont implicitement accepté leur responsabilité ;
- les autres moyens soulevés par M. C... en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2021, M. C..., représenté par
Me D..., demande à la Cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête du préfet de police ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté en date du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de police a décidé qu'il serait transféré aux autorités chypriotes ;
3°) d'enjoindre au préfet de police d'enregistrer sa demande d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me D..., conseil de M. C..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- à titre principal, les moyens soulevés par le préfet de police ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dès lors que le résumé de l'entretien individuel ne mentionne pas le nom et la qualité de l'agent ayant mené l'entretien et qu'il n'est pas signé par cet agent ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles 3 du règlement (UE) n° 604/2013, 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par une ordonnance du 15 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 juin 2021 à 12 h.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 18 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme F... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant bangladais, a présenté le 13 novembre 2020 une demande de protection internationale au guichet unique des demandeurs d'asile de Paris. Par un arrêté du
25 janvier 2021, le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités chypriotes. Le préfet de police relève appel du jugement du 3 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. C..., cet arrêté.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :
2. D'une part, aux termes de l'article 23 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Lorsqu'un Etat membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre Etat membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre Etat membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (" hit "), en vertu de l'article 9 paragraphe 5, du règlement (UE) n° 603/2013. ". Aux termes de l'article 25 du même règlement : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 : " Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre Etats membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement (...). / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national visé à l'article 19 est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse. ". Enfin, aux termes de l'article 19 du même règlement : " 1. Chaque État membre dispose d'un unique point d'accès national identifié. / 2. Les points d'accès nationaux sont responsables du traitement des données entrantes et de la transmission des données sortantes. / 3. Les points d'accès nationaux sont responsables de l'émission d'un accusé de réception pour toute transmission entrante ".
4. Il résulte des dispositions précitées du règlement n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 que la production de l'accusé de réception émis, dans le cadre du réseau " Dublinet ", par le point d'accès national de l'Etat requis lorsqu'il reçoit une demande présentée par les autorités françaises établit l'existence et la date de cette demande et permet, en conséquence, de déterminer le point de départ du délai de deux mois au terme duquel la demande de reprise en charge est tenue pour implicitement acceptée. Pour autant, la production de cet accusé de réception ne constitue pas le seul moyen d'établir que les conditions mises à la reprise en charge du demandeur étaient effectivement remplies. Il appartient au juge administratif, lorsque l'accusé de réception n'est pas produit, de se prononcer au vu de l'ensemble des éléments qui ont été versés au débat contradictoire devant lui, par exemple du rapprochement des dates de consultation du fichier " Eurodac " et de saisine du point d'accès national français ou des éléments figurant dans une confirmation explicite par l'Etat requis de son acceptation implicite de reprise en charge.
5. Il ressort d'un courriel du 10 février 2021 de la direction générale des étrangers en France que ce service n'a pas été en mesure de transmettre au préfet de police la réponse automatique d'accusé de réception du point d'accès chypriote établissant l'envoi et la réception par les autorités chypriotes de la demande de reprise en charge de M. C... qui lui a été adressée par le préfet de police le 15 décembre 2020 du fait du " système défectueux concernant les AR " des autorités chypriotes. Cependant, dans ce même courriel, la direction générale des étrangers en France confirme auprès du préfet de police avoir envoyé sa demande du 15 décembre 2020 aux autorités chypriotes ce qui est par ailleurs attesté par l'accusé d'envoi de cette demande versé au dossier. Le préfet de police verse également au dossier le constat d'accord implicite des autorités chypriotes pour l'examen de la demande d'asile de M. C... mentionnant le 15 décembre 2020 comme date d'envoi de la demande de reprise en charge de l'intéressé et qui a été adressé à la direction générale des étrangers en France le 19 janvier 2021 afin qu'il soit envoyé aux autorités chypriotes par le système DubliNet. Eu égard à ces éléments et à la date de consultation du fichier " Eurodac " le 13 novembre 2020, le préfet de police doit être regardé comme établissant suffisamment qu'il a saisi les autorités chypriotes de la demande de reprise en charge de M. C... le 15 décembre 2020, soit dans le délai de deux mois prévu par les dispositions de l'article 23 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et qu'il leur a adressé le constat d'accord implicite pour l'examen de la demande de M. C.... La circonstance que l'arrêté en litige ne mentionne pas la date de présentation de sa demande de protection internationale est sans incidence sur cette appréciation. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier ainsi que des écritures de M. C... qu'il a présenté sa demande le 13 novembre 2020. Il s'ensuit que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé son arrêté du 25 janvier 2021 au motif qu'il a méconnu les dispositions des articles 23 et 25 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
6. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal :
7. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-01102 du 28 décembre 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris du même jour, le préfet de police a donné à Mme E... A..., attachée principale d'administration de l'Etat au sein du 12ème bureau de la direction de la police générale de la préfecture de police et signataire de l'arrêté contesté, délégation à effet de signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte contesté. Le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige aurait été signé par une autorité incompétente doit, par suite, être écarté.
8. En deuxième lieu, M. C... soutient que l'arrêté en litige serait insuffisamment motivé dès lors que le préfet de police n'a pas joint à cet arrêté l'accord du 30 décembre 2020 des autorités chypriotes aux fins de reprise en charge de sa demande. Toutefois, le préfet de police n'est tenu par aucune disposition du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ni par toutes autres dispositions de joindre à sa décision de transfert l'accord de l'Etat requis pour la prise ou la reprise en charge d'un demandeur d'asile. Par suite, ce moyen doit être écarté.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Droit à l'information / 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. (...) ".
10. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées et telle qu'elle figure à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003, constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
11. Il ressort des pièces du dossier que M. C... s'est vu remettre contre signature, le
13 novembre 2020, la brochure intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " (brochure A), la brochure intitulée " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " (brochure B), conformes à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 qui a modifié sur ce point l'article 16 bis du règlement (CE) n° 1560/2003, le guide du demandeur d'asile et la brochure Eurodac. Ces documents sont rédigés en bengali, langue que l'intéressé a déclaré comprendre. L'intéressé a accusé réception de la remise de l'ensemble de ces documents. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police ne lui aurait pas remis les documents susmentionnés en méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013.
12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) . / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ".
13. La conduite de l'entretien par une personne qualifiée en vertu du droit national constitue, pour le demandeur d'asile, une garantie. Il ressort du compte-rendu de l'entretien individuel du 13 novembre 2020 que M. C... a signé, qu'il a été reçu à la préfecture de police, le même jour, par un agent du 12ème bureau de la direction de la police générale en charge de l'asile à la préfecture de police. L'entretien a donc été mené par une personne qualifiée au sens de l'article 5 du règlement n° 604/2013du 26 juin 2013 et il ressort du résumé de cet entretien que l'intéressé, qui n'a fait état d'aucune difficulté dans la compréhension de la procédure mise en œuvre à son encontre et qui était assisté d'un interprète en bengali, a pu faire valoir à cette occasion toutes observations utiles. L'intéressé ne fait état devant la Cour d'aucun élément laissant supposer que cet entretien ne se serait pas déroulé dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013. Il ressort du bordereau des documents remis à M. C... par le préfet de police que le résumé de l'entretien individuel lui a été communiqué en temps utile. L'intéressé n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette communication. En tout état de cause, M. C... a eu communication de ce document au plus tard le 15 février 2021, date de la communication du mémoire du préfet de police par le tribunal. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.
14. En cinquième lieu, aux termes de l'article 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) no 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. (...) ".
15. Il ressort des pièces du dossier que la consultation du fichier " Eurodac " à partir du relevé décadactylaire de M. C... établi le 13 novembre 2020 par les services de la préfecture de police a révélé que les empreintes de l'intéressé ont également été relevées par les autorités chypriotes le 7 mai 2018. M. C... soutient qu'il est présent sur le territoire français depuis plus de douze mois et que les autorités françaises sont responsables de l'examen de sa demande d'asile. Toutefois, alors qu'il lui appartient de justifier de la date de son entrée sur le territoire français,
M. C... ne verse au dossier aucun élément au soutien de ces allégations. Dans ces conditions,
M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait pas faire l'objet d'une décision de transfert vers Chypre.
16. En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne du 26 juin 2013 : " (...) 2. (...)/ Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable ".
17. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / (...). / 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (...) / 3. Tout État membre conserve le droit d'envoyer un demandeur vers un pays tiers sûr, sous réserve des règles et garanties fixées dans la directive 2013/32/UE ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
18. M. C... soutient qu'en raison notamment de l'afflux de migrants, les demandeurs d'asile ne sont pas traités par les autorités chypriotes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et qu'un transfert vers Chypre l'exposerait à un retour dans son pays d'origine où il risque de subir des traitements inhumains et dégradants. Toutefois, l'arrêté contesté a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé à Chypre et non au Bangladesh. Par ailleurs, Chypre est membre de l'Union Européenne et partie, tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. De ce fait, le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet État membre est présumé conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à celles de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. C..., qui ne produit aucune pièce, n'établit pas qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques à Chypre dans la procédure d'asile ou que sa demande d'asile ne serait pas traitée dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Ainsi, les moyens tirés de la méconnaissance du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté. Pour les mêmes motifs, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police, en prononçant son transfert aux autorités chypriotes, aurait méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Enfin, M. C..., qui ne justifie pas de circonstances humanitaires, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement n° 604/2013.
19. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 janvier 2021 décidant le transfert aux autorités chypriotes de M. C... et lui a enjoint de délivrer à M. C... une attestation de demandeur d'asile en procédure normale. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. C..., de même que celles qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du
10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2102047/8 du 3 mars 2021 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- Mme B..., première conseillère,
- Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2021.
La rapporteure,
V. F... La présidente,
H. VINOT
La greffière,
C. POVSE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA01575