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18/10/2022 | FRANCE | N°21PA04030

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 18 octobre 2022, 21PA04030


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 mai 2021 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités espagnoles responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2110679/8 du 15 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Stinat, demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirem

ent au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler le jugement n° 2110679/8 du 15 juin 2021 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 mai 2021 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités espagnoles responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2110679/8 du 15 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Stinat, demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler le jugement n° 2110679/8 du 15 juin 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

3°) d'annuler l'arrêté du 10 mai 2021 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités espagnoles responsables de l'examen de sa demande d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- il méconnaît les articles 16 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 mars 2022, le préfet de police conclut à l'absence de non-lieu à statuer et au rejet de la requête de M. C....

Il soutient que :

- le délai de six mois prévu par les dispositions de l'article 29 de ce règlement a recommencé à courir intégralement, à la date de la notification du jugement au préfet de police, soit le 15 juin 2021, et est porté à dix-huit mois, M. C... étant en situation de fuite au sens des dispositions de l'article 29/ 2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- les moyens de légalité externe fondés sur une cause nouvelle en appel sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 29 juillet 2021.

Par un courrier du 22 mars 2022, les parties ont été informées par la Cour que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office tiré du défaut d'objet de la requête en raison de l'expiration du délai de transfert en cause au terme du délai de six mois suivant la notification du jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme A... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant haïtien né le 15 septembre 1997, relève appel du jugement n° 2110679/8 du 15 juin 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2021 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités espagnoles responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Sur les conclusions tendant à l'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Par une décision du 29 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a admis M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. En conséquence, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les conclusions tendant à l'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, si M. C... soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il méconnaît les articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du

26 juin 2013. Toutefois, ces moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie sont des moyens de légalité externe fondés sur une cause nouvelle en appel et sont, par suite, irrecevables comme le soutient à bon droit le préfet de police en défense et doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. C... n'était présent sur le territoire français que depuis trois mois à la date de la décision en litige. S'il se prévaut de la présence de son père en France sans produire aucune pièce à l'appui de ses allégations permettant d'en apprécier le bien-fondé, il n'établit pas entretenir avec celui-ci des liens d'une intensité telle que la décision en litige porterait une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du

26 juin 2013 : " (...) En vue d'appliquer les critères visés aux articles 8, 10 et 16, les États membres prennent en considération tout élément de preuve disponible attestant la présence sur le territoire d'un État membre de membres de la famille (...) du demandeur, à condition que lesdits éléments de preuve soient produits avant qu'un autre État membre n'accepte la requête aux fins de prise ou de reprise en charge de la personne concernée (...) ". Aux termes de l'article 16 du même règlement : " 1. Lorsque, du fait (...) d'une maladie grave, d'un handicap grave(...), le demandeur est dépendant de l'assistance de son père ou de sa mère (...) résidant légalement dans un des États membres (...), les États membres laissent généralement ensemble ou rapprochent le demandeur et (..) ce père ou cette mère (...), à condition que les liens familiaux aient existé dans le pays d'origine, que le père ou la mère (...) soit capable de prendre soin de la personne à charge et que les personnes concernées en aient exprimé le souhait par écrit. / 2. Lorsque (...) le père ou la mère visé au paragraphe 1 réside légalement dans un État membre autre que celui où se trouve le demandeur, l'État membre responsable est celui dans lequel (...) le père ou la mère réside légalement, à moins que l'état de santé du demandeur ne l'empêche pendant un temps assez long de se rendre dans cet État membre. Dans un tel cas, l'État membre responsable est celui dans lequel le demandeur se trouve (...) ".

7. Si M. C... fait état de la présence de son père en France en situation régulière, d'une part, il n'établit pas qu'il serait dépendant de ce dernier au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article 16 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, d'autre part, il n'est ni justifié ni même allégué par le requérant qu'il aurait, comme le prévoient les dispositions de cet article, demandé par écrit à bénéficier de ces dispositions. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article par la décision de transfert en litige doit être écarté.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du

26 juin 2013 : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) ".

9. Pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 5, la situation familiale de

M. C... ne suffit pas à établir qu'en ne mettant pas en œuvre la procédure dérogatoire prévue par les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013, le préfet de police aurait méconnu cet article.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2021 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et

37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de M. C... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président de chambre,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022.

La rapporteure,

A. A... Le président,

R. LE GOFF

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA04030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04030
Date de la décision : 18/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : STINAT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-10-18;21pa04030 ?
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