Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision implicite par laquelle la présidente de l'université Paris 8 a rejeté sa demande du 14 octobre 2019 tendant à la requalification de son contrat, à la régularisation de sa situation administrative et financière avec effet rétroactif et à l'indemnisation de ses préjudices résultant de la rupture qu'il estime abusive de son contrat.
Par un jugement n°1914360 du 11 mars 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 mai 2022, et un mémoire ampliatif, enregistré le 13 juin 2022, M. A..., représenté par le cabinet Rousseau et Tapie, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 mars 2022 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler la décision implicite mentionnée ci-dessus ;
3°) d'enjoindre à l'université Paris 8 de requalifier son lien contractuel en contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2000 ou du 1er septembre 2005 ou enfin du 1er septembre 2011, de régulariser sa situation administrative et financière et de lui verser rétroactivement les sommes correspondant à son traitement revalorisé et les primes dues ;
4°) de condamner l'université Paris 8 à lui verser une somme de 3 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence et du préjudice d'anxiété et une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, sommes majorées des intérêts au taux légal, avec capitalisation des intérêts échus en application de l'article 1154 du code civil ;
5°) de mettre à la charge de l'université Paris 8 la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été convoqué à l'audience ;
- ses contrats à durée déterminée successifs conclus pendant 25 ans ont fait naître un contrat à durée indéterminée en vertu des dispositions de l'article L.951-2 du code de l'éducation :
- il a droit à l'indemnisation des préjudices résultant, d'une part, du maintien dans une situation précaire pendant 25 ans, d'autre part, du licenciement abusif dont il a fait l'objet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2022, l'université Paris 8, représentée par Me Moreau, conclut au rejet de la requête et demande, en outre qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M A... au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... sont infondés.
Par une ordonnance du 30 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 juin 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;
- le décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- les observations de Me Moreau, avocat de l'université Paris 8.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été employé par l'université Paris 8 entre 1994 et 2019, par des contrats de vacations successifs, en qualité de chargé d'enseignement vacataire au sein de l'UFR arts, philosophie, esthétique. Alors que son contrat de vacation pour l'année universitaire 2019-2020 n'a pas été renouvelé, par un courrier du 14 octobre 2019, il a demandé la requalification de son lien contractuel en contrat à durée indéterminée, la régularisation de sa situation financière en résultant, ainsi que l'indemnisation de son préjudice moral à hauteur de 10 000 euros et des troubles dans les conditions d'existence pour un montant de 3 000 euros. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par l'université sur sa demande. M. A... a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis. Par un jugement du 11 mars 2022, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'il indique, un avis d'audience a bien été adressé à M. A..., le 20 janvier 2022, par le tribunal administratif de Montreuil. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit donc être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 952-1 du code de l'éducation, relatif aux différentes catégories de personnel enseignant des universités : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 951-2, le personnel enseignant comprend des enseignants-chercheurs appartenant à l'enseignement supérieur, d'autres enseignants ayant également la qualité de fonctionnaires, des enseignants associés ou invités et des chargés d'enseignement. / (...). / Les chargés d'enseignement apportent aux étudiants la contribution de leur expérience ; ils exercent une activité professionnelle principale en dehors de leur activité d'enseignement. Ils sont nommés pour une durée limitée par le président de l'université, sur proposition de l'unité intéressée, ou le directeur de l'établissement (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d'emploi de vacataires pour l'enseignement supérieur : "Les chargés d'enseignement vacataires sont des personnalités choisies en raison de leur compétence dans les domaines scientifique, culturel ou professionnel, qui exercent, en dehors de leur activité de chargé d'enseignement, une activité professionnelle principale consistant : / - soit en la direction d'une entreprise ; / - soit en une activité salariée d'au moins neuf cents heures de travail par an ; / - soit en une activité non salariée à condition d'être assujetties à la taxe professionnelle ou de justifier qu'elles ont retiré de l'exercice de leur profession des moyens d'existence réguliers depuis au moins trois ans ". Le recrutement par les universités d'agents non titulaires pour exercer des fonctions d'enseignement est régi par les dispositions particulières de l'article L. 952-1 du code de l'éducation et par le décret du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d'emploi de vacataires pour l'enseignement supérieur, pris pour son application. Il résulte de ces dispositions, qui n'ont pas été abrogées par la loi du 26 juillet 2005, que les contrats passés par les universités en vue de recruter des chargés d'enseignement sont conclus pour une durée déterminée, le cas échéant renouvelable.
4. En l'espèce, il résulte de l'instruction que M. A..., qui exerce à titre principal une activité d'artiste-plasticien, a été recruté par l'université Paris 8 par des contrats de vacation successifs visant notamment le décret du 29 octobre 1987 précité, pour un nombre limité d'heures par année académique, en qualité de chargé d'enseignement. Si M. A... soutient avoir été irrégulièrement recruté par des contrats successifs pour pourvoir à un besoin permanent de l'université, il résulte des dispositions particulières précitées que les contrats passés par les établissements publics d'enseignement supérieur relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur en vue de recruter des chargés d'enseignement sont conclus pour une durée déterminée, le cas échéant, renouvelable. Par conséquent, les contrats successifs par lesquels M. A... a été engagé par l'université Paris 8 en qualité de chargé d'enseignement, au sens de l'article L. 952-1 du code de l'éducation, ne peuvent être regardés comme des contrats à durée déterminée ouvrant droit à la transformation en contrat à durée indéterminée en application des dispositions de l'article 6 bis de la loi susvisée du 11 janvier 1984.
5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite rejetant la demande de M. A... tendant à la requalification de ses contrats en contrat à durée indéterminée doivent être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
6. Il résulte des points précédents qu'en recrutant M. A... en qualité de chargé d'enseignement vacataire, l'université Paris 8 n'a pas commis d'illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité. Par suite, les conclusions indemnitaires doivent également être rejetées.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées, ainsi que celles tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
8. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par l'université Paris 8.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'université Paris 8 au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'université Paris 8.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023 à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 octobre 2023.
Le rapporteur,
D. PAGES
La présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
Z. SAADAOUI
La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA02187