Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 1er septembre 2022 par lequel la préfète du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2209635 du 22 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 1er septembre 2022, a enjoint à la préfète du Val-de-Marne ou au préfet territorialement compétent de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Sadoun, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2209635 du 22 juin 2023 du tribunal administratif de Melun, seulement en tant qu'il a enjoint à la préfète du Val-de-Marne ou au préfet territorialement compétent de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale ", valable deux ans, dans le délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que l'article 2 du jugement attaqué est entaché d'irrégularité, dès lors que l'annulation de l'arrêté litigieux, sur le fondement de l'article L. 433-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, impliquait nécessairement la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle et non la délivrance d'une carte de séjour temporaire.
La requête a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin,
- et les observations de Me Menaa substituant Me Sadoun, pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant turc, né le 27 juillet 1990, conjoint d'une ressortissante française, est entré en France en 2018 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 19 janvier 2018 au 18 janvier 2019, puis s'est vu délivrer, du 19 janvier 2019 au 18 janvier 2020, une carte de séjour temporaire et une carte de séjour pluriannuelle du 19 janvier 2020 au 18 janvier 2022. Par un arrêté du 1er septembre 2022, la préfète du Val-de-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 22 juin 2023 en tant seulement qu'il a enjoint à la préfète du Val-de-Marne ou au préfet territorialement compétent de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et non une carte de séjour pluriannuelle.
Sur la régularité de l'article 2 du jugement :
2. Le dernier alinéa de l'article L. 433-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger bénéficie, à sa demande, du renouvellement de cette carte de séjour pluriannuelle s'il continue de remplir les conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire dont il été précédemment titulaire. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
3. En annulant l'arrêté du 1er septembre 2022 au motif d'une méconnaissance de l'article L. 433-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal administratif de Melun a rendu une décision qui impliquait nécessairement que la préfète du Val-de-Marne délivre à M. B... une carte de séjour pluriannuelle. Par suite, en prononçant une injonction tendant à la délivrance d'une carte de séjour temporaire, les premiers juges ont irrégulièrement exercé les pouvoirs qu'ils tiennent des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative.
4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Melun du 22 juin 2023.
5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Melun par M. B... en vue du prononcé d'une injonction de délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle de deux ans portant la mention " vie privée et familiale ".
6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté du 1er septembre 2022 de la préfète du Val-de-Marne, rappelé au point 4 du jugement litigieux, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement de circonstances de droit et de fait, que cette dernière délivre à M. B... une carte de séjour pluriannuelle portant la mention vie privée et familiale, valable deux ans, dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
Sur les frais d'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement au requérant d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 2209635 du 22 juin 2023 du tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : Il est enjoint à la préfète du Val-de-Marne de délivrer à M. B... une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale " valable deux ans, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., au ministre de l'intérieur et des Outre-mer et à la préfète du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 février 2024.
La rapporteure,
I. JASMIN-SVERDLINLe président,
J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03165 2