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29/07/2024 | FRANCE | N°23PA02588

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 29 juillet 2024, 23PA02588


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris :

- d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2021 par lequel le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, l'a mis en demeure, dans le délai de trois mois, de faire cesser la mise à disposition aux fins d'habitation d'un local situé 9, rue Soufflot, à Paris (5e arrondissement), et d'assurer le relogement de l'occupant ;

- d'annuler les décisions, rappelées par un courrier du 23 novembr

e 2021 du directeur de la direction départementale de Paris de l'Agence régionale de santé d'Île-de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris :

- d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2021 par lequel le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, l'a mis en demeure, dans le délai de trois mois, de faire cesser la mise à disposition aux fins d'habitation d'un local situé 9, rue Soufflot, à Paris (5e arrondissement), et d'assurer le relogement de l'occupant ;

- d'annuler les décisions, rappelées par un courrier du 23 novembre 2021 du directeur de la direction départementale de Paris de l'Agence régionale de santé d'Île-de-France, lui interdisant d'engager une procédure d'expulsion judiciaire à l'encontre de l'occupant dudit local, et mettant à sa charge une indemnité d'un montant égal à trois mois de son nouveau loyer à l'égard de cet occupant, ainsi qu'une indemnité d'un montant égal à un an du loyer prévisionnel à l'égard de la personne morale publique ou privée qui aura procédé au relogement de l'occupant.

Par une ordonnance n° 2124954/6-2 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 juin 2023, M. A..., représenté par Me Tamba, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du tribunal administratif de Paris du 14 avril 2023 ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité ; sa demande de première instance étant recevable, elle ne pouvait être rejetée par application des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;

- ses conclusions de première instance dirigées contre les sommes mises à sa charge ne constituent pas des conclusions nouvelles, et n'ont donc pas eu pour effet de transformer sa demande initiale, à fin d'annulation, en un recours en plein contentieux ;

- son mémoire complémentaire dirigé contre des décisions visant au versement d'indemnités ne se sont pas entièrement substituées à ses premières conclusions à fin d'annulation.

La requête a été communiquée à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation,

- le code de la santé publique,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... sont propriétaires d'un local situé au 9, rue Soufflot, à Paris (5e arrondissement). Après le constat de l'insalubrité de ce local, le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris les a mis en demeure, par un arrêté du 12 juillet 2021, de faire cesser la

mise à disposition aux fins d'habitation de ce local, et d'assurer le relogement de l'occupant, dans le délai de trois mois. M. A... a formé un recours gracieux contre cet arrêté par un courrier du 10 septembre 2021, qui a été rejeté par un courrier du 24 septembre 2021. Par ailleurs, par un courrier du 23 novembre 2021, le directeur de la direction départementale de Paris de l'Agence régionale de santé d'Île-de-France a indiqué à M. A... qu'il prenait acte de sa défaillance quant à son obligation de relogement, que ce relogement serait pris en charge par substitution par la collectivité publique, et lui a rappelé qu'il ne pouvait engager une procédure d'expulsion judiciaire à l'encontre de l'occupant dudit local ; il lui a enfin indiqué qu'il restait redevable d'une indemnité d'un montant égal à trois mois de son nouveau loyer à l'égard de cet occupant, ainsi que d'une indemnité d'un montant égal à un an du loyer prévisionnel à l'égard de la personne morale publique ou privée qui aura procédé au relogement de l'occupant. M. A... relève appel de l'ordonnance du 14 avril 2023 par laquelle le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à être déchargé du paiement desdites indemnités.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation : " La police mentionnée à l'article L. 511-1 a pour objet de protéger la sécurité et la santé des personnes en remédiant aux situations suivantes : / (...) / 4° L'insalubrité, telle qu'elle est définie aux articles L. 1331-22 et L. 1331-23 du code de la santé publique. ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " L'autorité compétente pour exercer les pouvoirs de police est : (...) / 2° Le représentant de l'Etat dans le département dans le cas mentionné au 4° du même article. ". Aux termes de l'article L. 511-11 de ce code : " L'autorité compétente prescrit, par l'adoption d'un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité, la réalisation, dans le délai qu'elle fixe, de celles des mesures suivantes nécessitées par les circonstances : / (...) / 3° La cessation de la mise à disposition du local ou de l'installation à des fins d'habitation ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 511-18 dudit code : " (...) lorsqu'est prescrite la cessation de la mise à disposition à des fins d'habitation des locaux mentionnés à l'article L. 1331-23 du code de la santé publique, le propriétaire, (...) est tenu d'assurer le relogement des occupants (...) ". Aux termes de l'article L. 521-1 du même code : " (...) Le propriétaire ou l'exploitant est tenu d'assurer le relogement ou l'hébergement des occupants ou de contribuer au coût correspondant dans les conditions prévues à l'article L. 521-3-1. (...) ". Aux termes de l'article L. 521-3-1 de ce code : " (...) II.- Lorsqu'un immeuble fait l'objet d'une interdiction définitive d'habiter ou lorsqu'est prescrite la cessation de la mise à disposition à des fins d'habitation des locaux mentionnés à l'article L. 1331-23 du code de la santé publique, ainsi qu'en cas d'évacuation à caractère définitif, le propriétaire ou l'exploitant est tenu d'assurer le relogement des occupants. Cette obligation est satisfaite par la présentation à l'occupant de l'offre d'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités. Le propriétaire ou l'exploitant est tenu de verser à l'occupant évincé une indemnité d'un montant égal à trois mois de son nouveau loyer et destinée à couvrir ses frais de réinstallation. / En cas de défaillance du propriétaire ou de l'exploitant, le relogement des occupants est assuré dans les conditions prévues à l'article L. 521-3-2. / Le propriétaire est tenu au respect de ces obligations si le bail est résilié par le locataire en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 1724 du code civil ou s'il expire entre la date de la notification des arrêtés portant interdiction définitive d'habiter et la date d'effet de cette interdiction. ". Enfin, aux termes de l'article L. 521-3-2 du même code : " (...) IV.- Lorsqu'une personne publique, un organisme d'habitations à loyer

modéré, une société d'économie mixte ou un organisme à but non lucratif a assuré le relogement, le propriétaire ou l'exploitant lui verse une indemnité représentative des frais engagés pour le relogement, égale à un an du loyer prévisionnel. (...) VI.- La créance résultant de la substitution de la collectivité publique aux propriétaires ou exploitants qui ne se conforment pas aux obligations d'hébergement et de relogement qui leur sont faites par le présent article est recouvrée soit comme en matière de contributions directes par la personne publique créancière, soit par l'émission par le maire ou, le cas échéant, le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le préfet d'un titre exécutoire au profit de l'organisme ayant assuré l'hébergement ou le relogement. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... a d'abord, dans sa demande enregistrée le 23 novembre 2021 devant le tribunal administratif de Paris, demandé à ce dernier l'annulation de l'arrêté préfectoral du 12 juillet 2021 en tant qu'il le mettait en demeure de reloger l'occupant du local dont il est propriétaire. Il a ensuite, par un mémoire complémentaire enregistré le 8 décembre 2021, complété sa demande en contestant le contenu du courrier du 23 novembre 2021 du directeur de la direction départementale de Paris de l'Agence régionale de santé d'Île-de-France, lui indiquant notamment qu'il ne pouvait engager une procédure d'expulsion judiciaire à l'encontre de l'occupant dudit local, et qu'il restait redevable d'une indemnité d'un montant égal à trois mois de son nouveau loyer à l'égard de cet occupant, ainsi que d'une indemnité d'un montant égal à un an du loyer prévisionnel à l'égard de la personne morale publique ou privée qui aura procédé au relogement de l'occupant. Si M. A... devait bien être regardé comme s'étant désisté, dans son mémoire de première instance enregistré le 2 juin 2022, de ses conclusions initiales à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 12 juillet 2021, dès lors qu'il y indique que l'occupant du local a quitté celui-ci, relogé par la préfecture, et que " par conséquent l'obligation de reloger est devenue sans objet ", il a néanmoins précisé qu'il maintenait sa contestation des obligations financières pesant sur lui en application des dispositions citées au point 3 du code de la construction et de l'habitation. Or, M. A... a produit le courrier précité du 23 novembre 2021, et il appartenait au tribunal, avant de rejeter comme irrecevable sa demande à fin de décharge du paiement des indemnités qu'il mentionne, et alors que cette dernière demande présentait un lien suffisant avec les conclusions initiales à fin d'annulation, de solliciter la production du ou des titres exécutoires en exigeant le paiement. Par suite, c'est à tort que le tribunal a estimé que sa demande était manifestement irrecevable et l'a rejetée par ordonnance en application des dispositions de l'article R. 522-1 du code de justice administrative.

5. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Paris a entaché l'ordonnance attaquée d'irrégularité en rejetant sa demande comme irrecevable. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Paris et de rejeter la demande de l'appelant présentée au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2124954/6-2 du 14 avril 2023 du tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juillet 2024.

La rapporteure,

G. C...Le président,

I. LUBEN

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23PA02588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02588
Date de la décision : 29/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : TAMBA MBUMBA SALAMBONGO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-29;23pa02588 ?
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