Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 28 septembre 2022 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de certificat de résidence et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours. Par un jugement n° 2226888 du 22 mai 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité. Procédure devant la Cour : Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif et des pièces enregistrés les 20 octobre 2023, 18 décembre 2023, 29 juillet 2024 et 8 août 2024, M. B..., représenté par Me Rochiccioli, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2226888 du 22 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2022 du préfet de police rejetant sa demande de renouvellement de certificat de résidence et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; 2°) d'annuler cet arrêté ; 3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de police d'annuler l'obligation de quitter le territoire français et de procéder au réexamen de sa situation administrative, dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de le munir immédiatement d'une autorisation provisoire de séjour ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : Sur la décision de refus de renouvellement de certificat de résidence : - elle est entachée d'un vice de procédure, tiré du fait qu'il n'est pas établi que l'avis a bien été rendu de manière collégiale ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Sur la décision d'obligation de quitter le territoire : - elle est illégale, par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour ; - elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Par un mémoire en défense enregistré le 27 mai 2024 le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Par une décision du 4 septembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a accordé à M. B... l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a décidé de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Boizot, - et les observations de Me Saint Fare Garnot, substituant Me Rochiccioli, pour M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., de nationalité algérienne né le 16 novembre 1974, est entré en France le 19 novembre 2018 selon ses déclarations. Par un arrêté du 28 septembre 2022, le préfet de police a refusé de lui renouveler son certificat de résidence et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par un jugement n° 2226888 du 22 mai 2023 dont il interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité. 2. Aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) ". 3. Le préfet de police, pour refuser à M. B... la délivrance d'un titre de séjour, s'est notamment fondé sur l'avis du 14 septembre 2022 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui précisait que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans ce pays. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment du certificat médical établi le 21 juin 2022 par un psychiatre exerçant au sein du centre médico-psychologique Crimée à Paris dans le cadre du renouvellement de titre de séjour de l'intéressé, que M. B..., arrivé en France en novembre 2018, souffre d'une schizophrénie qui a nécessité plusieurs hospitalisations sans son consentement notamment du 26 octobre au 7 novembre 2019 puis du 11 février au 21 mars 2021 suite à une recrudescence de délires mystiques de mécanisme interprétatif et hallucinatoire se traduisant par un comportement inadaptée à l'extérieur avec des mises en danger notamment sur la voie publique, comme le précise l'ordonnance de mesure d'hospitalisation complète du tribunal de grande instance de Paris en date du 19 février 2021. 4. En outre, il ressort des différentes ordonnances médicales communiquées dans le cadre de la présente instance que M. B... bénéficie d'un traitement par Trevicta 175 mg, d'Hydroxyzine 25 mg et de Fluoxetine Alt 20 mg. Il soutient que son traitement est composé d'un médicament indisponible dans son pays d'origine, le Trevicta, et produit à l'appui de ses dires deux attestations de pharmaciens algériens en date des 10 octobre 2022 et 30 mai 2023 qui confirment ses dires. La circonstance que ces attestations soient postérieures à la décision attaquée est sans influence car elles viennent attester d'une situation de fait antérieure à elle. Par ailleurs, si le préfet soutient dans ses écritures en défense que la substance active du Trevicta est identique à celle du Xeplion qui est commercialisé en Algérie selon le référentiel algérien du Médicament, le requérant produit une attestation d'un pharmacien algérien établie le 30 mai 2023 indiquant que le médicament Xeplion 75 mg suspension injectable ne figure pas sur la nomenclature officielle du médicament. Cette affirmation est corroborée par la liste de l'observatoire algérien de veille des médicaments disponibles en pharmacie. De plus, le certificat médical en date du 18 juillet 2023 établi par un psychiatre du centre médical psychologique de Crimée, qui révèle une situation antérieure, précise que tout changement de traitement de fond risquerait de déstabiliser et d'aggraver la pathologie psychiatrique du requérant et que toute rupture de suivi ou de traitement aurait des conséquences néfastes sur sa santé et aggraverait le pronostic. Par ces éléments, M. B... établit que les seuls médicaments efficaces pour contenir sa maladie sont ceux prescrits par le thérapeute qui le suit et que l'un d'eux, le Trevicta, qui doit être pris par cures d'un mois tous les trois mois, n'est pas effectivement disponible en Algérie. En outre, le certificat médical en date du 18 juillet 2023 précité précise que M. B..., qui est suivi depuis 2019 dans ce centre bénéfice actuellement d'une stabilité psychique, en partie grâce au soutien qu'il trouve auprès de ses frères et sœurs qui vivent en France. Il est précisé que tout changement par rapport à son environnement actuel risquerait de le fragiliser et d'accroître sa pathologie. Or, il ressort des pièces du dossier qu'en cas de retour dans son pays d'origine, M. B... se trouverait isolé car si sa mère l'a accompagné lorsqu'il résidait en Algérie, elle réside désormais en France comme tous les frères et sœurs de M. B..., en situation régulière en France, l'une de ses sœurs assurant son hébergement. 5. Dans les conditions particulières de l'espèce, compte tenu, d'une part, de la situation de M. B..., dont la gravité des troubles psychiatriques, établis par les pièces du dossier, sont de nature à l'empêcher de pourvoir seul à ses intérêts, et, d'autre part, de l'absence alléguée et non contestée de toute attache personnelle ou familiale au Algérie, la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. B... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 6. Aux termes des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ". 7. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police délivre à M. B... un titre de séjour. Par suite, il y a lieu d'enjoindre audit préfet de délivrer un certificat de résidence algérien dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 8. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Rochiccioli, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat, au profit de cette dernière, la somme de 1 200 euros sur ce fondement. D E C I D E :Article 1er : Le jugement n° 2226888 du 22 mai 2023 du tribunal administratif de Paris est annulé.Article 2 : L'arrêté du 28 septembre 2022 par lequel le préfet de police a rejeté la demande de renouvellement de certificat de résidence de M. B... et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours est annulé.Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à Me Rochiccioli, avocat de M. B..., en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.Copie en sera adressée au préfet de police.Délibéré après l'audience 13 du septembre 2024 à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Soyez, président assesseur,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 27 septembre 2024. La rapporteure,S. BOIZOTLe président,S. CARRERE La greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 23PA04401 2