Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2024 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination pour son éloignement et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2401541 du 4 avril 2024, la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 2 mai 2024 et le 3 mai 2024 M. A... B..., représenté par Me Berdugo, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2401541 du 4 avril 2024 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 31 janvier 2024 du préfet de l'Essonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation administrative dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit comme en fait et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
-elle méconnaît les articles 3-1 et 16 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;
- elle méconnaît l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne ses conséquences sur sa vie privée et familiale ;
- sa présence en France ne représente pas une menace à l'ordre public ;
- la décision de refus de délai de départ volontaire est insuffisamment motivée en droit comme en fait et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne le risque de fuite ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée en droit comme en fait et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par ordonnance du 8 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 juillet 2024 à 12h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience, au cours de laquelle a été entendu le rapport de Mme Hamon.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant camerounais né en 1991, a fait l'objet, à la suite de son interpellation sur commission rogatoire le 29 janvier 2024, d'un arrêté du 31 janvier 2024 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement et lui a interdit de retouner sur le territoire français pendant une durée de trois ans. M. A... B... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens tirés de ce que la décision est insuffisamment motivée en fait comme en droit et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle, sans apporter d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ces moyens par le premier juge. Par suite, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.
3. En deuxième lieu, le requérant n'établit pas plus en appel qu'en première instance, par les pièces qu'il produit y compris l'attestation peu circonstanciée d'un dirigeant de club sportif et le relevé de présence dans une salle de sport à raison de quatorze fois au cours de l'année 2023, produits pour la première fois en cause d'appel, qu'il mènerait une vie familiale avec ses deux enfants de nationalité française, nés en 2009 et 2023, et leur mère, dans la commune de Mérignac où ceux-ci résident, alors qu'il a toujours renseigné ses déclarations de revenus sans mentionner d'enfant à charge, avec une domiciliation chez sa tante en région parisienne, qu'il ne produit aucun élément, hormis quelques photographies, de nature à établir qu'il participerait à l'entretien et l'éducation de ses deux enfants et qu'il a fait l'objet, entre 2009 et 2021, de sept signalements par les services de police pour des faits délictueux tous commis en région parisienne, où il a été détenu à plusieurs reprises. Dans ces conditions, et quand bien même il résiderait en France depuis l'âge de neuf ans, M. A... B..., qui est par ailleurs sans emploi ni ressources depuis son entrée en France, n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse porterait une atteinte excessive à sa vie privée et familiale protégée par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'est pas plus fondé à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
4. Dès lors que le requérant n'établit nullement qu'il entretiendrait de quelconques liens avec ses deux enfants, de nationalité française, il n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porterait atteinte à l'intérêt supérieur de ceux-ci, ou qu'elle serait constitutive d'une immixtion arbitraire ou illégale dans leur vie privée et familiale et, par suite, méconnaîtrait les articles 3-1 et 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 613-1, inséré au chapitre III intitulé " Procédure administrative ", du titre Ier du livre VI du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle est édictée après vérification du droit au séjour, en tenant notamment compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués. "
6. Ces dispositions sont issues en dernier lieu, dans leur rédaction applicable au litige, de l'article 37 de la loi du 26 janvier 2024 susvisée pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration. Il ressort des travaux parlementaires ayant précédé son adoption que le législateur a notamment entendu codifier le principe selon lequel un étranger devant se voir attribuer de plein droit un titre de séjour ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il a ainsi entendu imposer au préfet, avant l'édiction d'une obligation de quitter le territoire français, de vérifier plus largement le droit au séjour de l'étranger au regard des informations en sa possession résultant en particulier de l'audition de l'intéressé, compte tenu notamment de la durée de sa présence sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un droit au séjour, une telle vérification constituant ainsi une garantie pour l'étranger.
7. Il ressort des termes de la décision attaquée, qui mentionne la durée de présence en France de M. A... B..., les conditions de son séjour, la nationalité de ses enfants, ses liens personnels et familiaux ainsi que son insertion sociale et professionnelle, et conclut que l'intéressé " n'entre dans aucune des catégories de plein droit " et " ne peut se prévaloir d'aucune circonstance humanitaire particulière ", que le préfet de l'Essonne, avant de prendre la décision attaquée, a vérifié, compte tenu des informations en sa possession et, notamment, des éléments recueillis lors de l'audition du requérant le 29 janvier 2024, si M. A... B... pouvait prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ou, à défaut, si la durée de sa présence en France et la nature et l'ancienneté des liens qu'il y entretient ou encore des circonstances humanitaires justifient qu'il se voie délivrer un tel titre. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Ensuite, si le requérant reprend en appel le moyen tiré de ce qu'il ne pouvait légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement dès lors qu'il remplit les conditions pour la délivrance, de plein droit, d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français en application de l'article L. 427-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'apporte pas d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ce moyen par le premier juge. Dès lors, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.
Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire :
9. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". L'article L. 612-3 du même code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;(...). "
10. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens tirés de ce que la décision est insuffisamment motivée en fait comme en droit et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle, sans apporter d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ces moyens par le premier juge. Par suite, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.
11. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... B... a fait l'objet, le 10 décembre 2013, d'une décision d'obligation de quitter le territoire français à laquelle il n'a pas déféré, et que par ailleurs il a fait l'objet de deux condamnations à des peines de prison, l'une avec sursis et la suivante ferme avec révocation du sursis, ainsi que de sept signalements des services de police pour des faits, notamment, de trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs et se trouvait, à la date de la décision attaquée, en détention préventive. Par suite, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir qu'il ne constituait pas une menace pour l'ordre public et ne présentait pas de risque de fuite ni que, par suite, la décision de refus de délai de départ volontaire serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la légalité de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
12. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". L'article L. 612-10 du même code précise que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. "
13. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens tirés de ce que la décision est insuffisamment motivée en fait comme en droit et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle, sans apporter d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ces moyens par le premier juge. Par suite il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.
14. En deuxième lieu, pas plus en appel qu'en première instance M. A... B..., qui ne fait valoir aucune circonstance humanitaire, dont la présence sur le territoire français représente une menace pour l'ordre public et qui a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement, n'établit que la décision prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
15. Enfin, pour les mêmes motifs qu'exposé au point 2, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision aurait porté une atteinte excessive à sa vie privée et familiale protégée par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. AUVRAY
La greffière,
L. CHANALa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA01980