Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et l'a informé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.
Par un jugement n° 2302304 du 1er décembre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 et 24 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Bulajic, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, d'une part, de mettre fin à son signalement dans le système d'information Schengen, d'autre part, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que la composition de la commission du titre de séjour, réunie le 3 novembre 2022, était irrégulière et que l'avis rendu par la commission ne lui a pas été communiqué avant l'édiction de la décision en litige ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par un courrier du 11 janvier 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis a été invité à produire, dans le délai d'un mois, l'arrêté de désignation des membres de la commission du titre de séjour de la sous-préfecture du Raincy ;
Par une pièce enregistrée le 11 janvier 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis a communiqué l'arrêté portant composition de la commission du titre de séjour de l'arrondissement du Raincy.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vrignon-Villalba ;
- et les observations de Me Miralles, substituant Me Bulajic, avocate de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant pakistanais né le 1er avril 1989 et entré irrégulièrement en France le 7 mai 2012 selon ses déclarations, a sollicité le 7 janvier 2013 son admission au séjour au titre de l'asile. Par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 8 novembre 2013, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 avril 2014, sa demande d'asile a été rejetée. M. A... ayant sollicité le réexamen de sa demande de protection internationale, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a, par une décision du 14 avril 2014, rejeté sa demande. Par un arrêté du 3 août 2015 du préfet de la Seine-Saint-Denis, M. A... a fait l'objet d'un refus de séjour au titre de l'asile, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le 11 février 2022, M. A... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un avis du 3 novembre 2022, la commission du titre de séjour de l'arrondissement du Raincy a émis un avis défavorable à sa demande. Par un arrêté du 24 janvier 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et l'a informé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Par un jugement n° 2302304 du 1er décembre 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article R. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Devant la commission du titre de séjour, l'étranger fait valoir les motifs qu'il invoque à l'appui de sa demande d'octroi ou de renouvellement d'un titre de séjour. Un procès-verbal enregistrant ses explications est transmis au préfet avec l'avis motivé de la commission. L'avis de la commission est également communiqué à l'intéressé. ". Il résulte de ces dispositions que l'avis motivé de la commission doit être transmis à l'étranger et au préfet avant que ce dernier ne statue sur la demande dont il est saisi. Une telle communication constitue une garantie instituée au profit de l'étranger qui doit connaître le sens et les motifs de l'avis de la commission et être ainsi mis à même de faire valoir tout élément pertinent qu'appellerait l'avis de la commission du titre de séjour avant que le préfet ne prenne sa décision.
3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. Il ressort des pièces du dossier que, préalablement à l'édiction de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, la commission du titre de séjour prévue par les dispositions précitées a été saisie dans le cadre de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. A... et que celle-ci a émis, le 3 novembre 2022, un avis défavorable à sa régularisation. S'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis a joint l'avis de la commission du titre de séjour à son arrêté du 24 janvier 2023 et que le pli recommandé contenant cet arrêté a été notifié à M. A... le 30 janvier 2023, toutefois, cette communication, dès lors qu'elle est postérieure à l'édiction de la décision de refus de titre de séjour, ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, l'intéressé est fondé à soutenir que le défaut de communication de l'avis de la commission du titre de séjour préalablement à l'édiction de la décision de refus de titre de séjour a été de nature à le priver effectivement d'une garantie dès lors qu'il n'a pas été en mesure de produire devant les services préfectoraux l'ensemble des éléments susceptibles de justifier sa demande de titre de séjour, compte tenu du sens de l'avis et de ses motifs. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, lesquelles sont dépourvues de base légale.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 janvier 2023.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
6. Le présent arrêt, par lequel la cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'implique pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, qui constitue le motif le mieux à même de régler le litige, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions du requérant tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour doivent être rejetées. Il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis ou au préfet territorialement compétent de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte. Il y a également lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de faire procéder, entre temps, à l'effacement du signalement de M. A... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 200 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2302304 du 1er décembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 24 janvier 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis ou au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et de procéder, dans cette attente, à l'effacement du signalement de M. A... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Copie sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bobigny.
Délibéré après l'audience du 30 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Menasseyre, présidente de chambre
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2024.
La rapporteure,
C. Vrignon-VillalbaLa présidente,
A. Menasseyre
Le greffier,
P. Tisserand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°24PA00013