Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 octobre 2017 et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises mis à sa charge au titre des années 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2015 pour un montant de 34 527 euros.
Par un jugement n° 1905330/3 du 13 février 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 avril et 6 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Belkhodja, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1905330/3 du 13 février 2023 du tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et le remboursement sollicité devant ce tribunal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'il n'a pas bénéficié d'un délai suffisant entre l'information de la date d'intervention et cette dernière, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;
- un montant de 44 197 euros de taxe sur la valeur ajoutée doit être admis en déduction sur la période du 1er août au 31 décembre 2015 ;
- soumis au régime réel simplifié, il ne pouvait faire ses déclarations CA 3 et il s'est trompé de formulaire en utilisant celui qui était destiné au paiement des acomptes en décembre 2015 ;
- le refus opposé par l'administration tiré de la tardiveté de la demande de déduction méconnaît les principes de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée et de proportionnalité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 5 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 6 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2006/112/CEE du 28 novembre 2006 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Segretain,
- et les conclusions de M. Perroy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui exerce des activités dans le domaine des pompes funèbres, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle lui ont été notifiés des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 octobre 2017 et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des années 2015 et 2016. Par un jugement du 13 février 2023, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à la décharge de ces impositions ainsi qu'au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 34 527 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.
Sur les conclusions à fin de décharge :
2. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification.(...) L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. " Il résulte de ces dispositions que la première intervention de l'administration sur place aux fins de vérification de la comptabilité du contribuable ne peut avoir lieu qu'après que ce dernier a été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de notification, dans un délai raisonnable qui ne peut être inférieur à deux jours ouvrés, de l'engagement du contrôle, cette garantie étant de nature à permettre au contribuable d'être présent ou représenté lors des interventions sur place du vérificateur. Toutefois, lorsqu'un contribuable a été régulièrement informé de l'engagement d'une procédure de vérification par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification, dans les conditions prévues à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales citées ci-dessus, aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit à l'administration, lorsqu'elle décide de reporter, de sa propre initiative ou à la demande du contribuable, la date qui avait été initialement prévue pour la première intervention sur place du vérificateur, d'envoyer ou de remettre un avis de vérification rectificatif au contribuable. L'administration est en revanche tenue d'informer le contribuable en temps utile, par tous moyens, de la date à laquelle est reporté le début des opérations de vérification.
3. Il résulte de l'instruction que M. B... a été régulièrement avisé le 19 décembre 2017, date à laquelle il a reçu l'avis de vérification du 15 décembre 2017, de ce que l'administration allait procéder à une vérification de sa comptabilité le 12 janvier 2018, lui permettant dès le 19 décembre 2017 de s'organiser pour y être assisté d'un conseil. M. B... n'ayant pas été présent dans les locaux de l'entreprise le jour prévu pour la première intervention, l'administration a informé l'intéressé par un courrier du 15 janvier 2018, reçu le 17 janvier, de ce que la vérification débuterait le 18 janvier 2018. Alors que M. B... ne soutient ni n'établit que son conseil, qu'il avait en tout état de cause la possibilité de contacter le 17 janvier, n'aurait pas été disponible pour l'assister le lendemain, il n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne l'aurait pas informé en temps utile et aurait ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.
Sur les conclusions à fin de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée :
4. En premier lieu, aux termes du I de l'article 271 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. (...) / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance ". Aux termes du 1 de son article 287 : " Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. " Aux termes de l'article 208 de l'annexe 2 au code général des impôts : " I. Le montant de la taxe déductible doit être mentionné sur les déclarations déposées pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, à condition qu'elle fasse l'objet d'une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission. II. - Lorsque, sur une déclaration, le montant de la taxe déductible excède le montant de la taxe due, l'excédent de taxe dont l'imputation ne peut être faite est reporté, jusqu'à épuisement, sur les déclarations suivantes. Toutefois, cet excédent peut faire l'objet de remboursements dans les conditions fixées par les articles 242-0 A à 242-0 K. " Aux termes de son article 242 sexies : " Les entreprises placées sous le régime simplifié souscrivent chaque année, au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai la déclaration mentionnée au 3 de l'article 287 du code général des impôts suivant le modèle prescrit par l'administration.(...) " Il résulte de ces dispositions que le délai imparti pour réparer une omission de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée déductible court à compter de la date d'exigibilité de la taxe chez le redevable et expire le 31 décembre de la deuxième année suivant la date à laquelle la déclaration devait être effectuée. Lorsqu'un assujetti a omis de reporter le montant de la taxe déductible qu'il a déclaré dans les délais prévus, le délai de régularisation de son omission, à peine de péremption du droit à déduction, expire le 31 décembre de la deuxième année suivant la date limite à laquelle il devait déclarer ce premier report.
5. Il résulte de l'instruction que M. B... n'a pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée déductible au titre de la période du mois d'août à décembre 2015 avant le terme du délai prévu à l'article 208 de l'annexe 2 au code général des impôts. Par conséquent, à supposer même que l'activité de M. B... ait été soumise à un régime simplifié de taxe sur la valeur ajoutée à raison d'une erreur imputable à l'administration, son droit à déduction était périmé, la circonstance qu'il ait transmis à l'administration une déclaration d'acompte le 17 décembre 2015, en lieu et place de cette déclaration annuelle, ne pouvant le faire regarder comme ayant sollicité le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée afférent à la période en cause. Par suite, l'administration était fondée à refuser de déduire la somme de 44 197 euros de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er août au 31 décembre 2015 à défaut pour lui de l'avoir déclarée avant le 31 décembre 2017.
6. En deuxième lieu, le délai de prescription prévu par l'article 208 de l'annexe 2 au code général des impôts n'est pas contraire aux dispositions de la sixième directive n° 2006/112/CEE du 28 novembre 2006, qui n'interdisent pas que soient prévues en droit national des forclusions au droit à déduction, et était suffisant pour permettre au redevable de solliciter la déduction de taxe sur la valeur ajoutée en cause. L'administration pouvait donc opposer ce délai à la demande de déduction de la taxe valeur ajoutée présentée par M. B... sans méconnaitre les principes de neutralité et de proportionnalité.
7. Enfin, si le requérant demande également que lui soit remboursée une somme de 34 527 euros, correspondant à un crédit de taxe sur la valeur ajoutée constaté au titre de l'année 2015, l'existence d'un tel crédit n'est, en tout état de cause, pas établie
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Les conclusions présentées par le requérant sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Segretain, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 octobre 2024.
Le rapporteur,
A. SEGRETAINLa présidente,
S. VIDAL
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA01615 2