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20/11/2024 | FRANCE | N°24PA01410

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 20 novembre 2024, 24PA01410


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2024 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination vers lequel il sera éloigné ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le préfet a pris à son encontre une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois.

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Par un jugement n° 2401830/8 du 7 février 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé l'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2024 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination vers lequel il sera éloigné ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le préfet a pris à son encontre une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2401830/8 du 7 février 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 23 janvier 2024, en tant que le préfet de police a refusé à M. A... l'octroi d'un délai de départ volontaire et l'arrêté du même jour par lequel le préfet de police a pris à son encontre une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de

trente-six mois et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2024, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 2401830/8 du 7 février 2024 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter dans toutes ses prétentions la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public et il existe un risque que M. A... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire au sens de l'article

L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de départ volontaire étant légal, l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois l'est aussi ;

- les autres moyens soulevés au soutien de la demande de M. A... doivent être écartés.

La requête a été communiquée à M. A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 3 juillet 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 25 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Segretain a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est un ressortissant pakistanais, né le 1er mars 1996. Par deux arrêtés du 23 janvier 2024, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. Le préfet de police relève appel du jugement du 7 février 2024 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé les décisions par lesquelles le préfet de police a refusé à M. A... un délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre l'interdiction de retourner sur le territoire français pendant une durée de trente-six mois.

Sur le moyen retenu par le tribunal administratif de Paris :

2. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. "

3. Il ressort des pièces du dossier, notamment du jugement correctionnel produit pour la première fois en appel, que M. A... a été condamné le 26 décembre 2017 par le tribunal de grande instance de Bobigny à une peine de 6 mois d'emprisonnement ferme pour des faits d'agression sexuelle sur mineur de plus de 15 ans commis le 22 décembre précédent, au regard de leur gravité, des circonstances de leur commission et des éléments de personnalité soumis à l'appréciation du juge pénal et a été inscrit au fichier judiciaire national des auteurs d'infractions sexuelles. Par suite, le comportement de M. A... doit être regardé comme constitutif d'une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, le préfet de police a pu à bon droit lui refuser un délai de départ volontaire sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et il est dès lors fondé à se plaindre de ce que le tribunal a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions.

4. Il appartient toutefois à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... à l'encontre de la décision de refus de départ volontaire et de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les autres moyens soulevés en première instance par M. A... :

5. En premier lieu, dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas été déclarée illégale par le tribunal dans le jugement attaqué, devenu définitif sur ce point, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité qui affecte la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, au regard des motifs retenus au point 3, la décision portant refus de départ volontaire n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. En troisième lieu, pour le motif retenu au point 5, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale en raison de l'illégalité qui affecte la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

8. En quatrième lieu, il ressort de l'arrêté en litige que, pour justifier l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 36 mois, le préfet de police a retenu que M. A... avait fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire, qu'il représentait une menace pour l'ordre public, au regard notamment des faits d'agression sur mineur commis en décembre 2017, qu'il alléguait être entré en France en 2017 et que, célibataire et sans enfant, il ne pouvait se prévaloir de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France. Par suite la décision est suffisamment motivée.

9. Enfin, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. "

10. Si le requérant fait valoir qu'il réside en France depuis 2017 et dispose d'un emploi stable comme ouvrier du bâtiment depuis 2019, il n'invoque ainsi, en tout état de cause, aucune circonstance humanitaire de nature à justifier que le préfet de police n'édicte pas d'interdiction de retour. Au regard de ces seuls éléments invoqués, et de la circonstance que M. A... est célibataire, sans enfant, et que son comportement constitue une menace pour l'ordre public, la décision portant interdiction de retour pour une durée de trente-six mois n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du 23 janvier 2024 par lesquelles le préfet de police a refusé à M. A... un délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre l'interdiction de retourner sur le territoire français pendant une durée de trente-six mois. Par suite, il est fondé à demander l'annulation de l'article 1er du jugement du 7 février 2024 du tribunal administratif de Paris et le rejet des conclusions de la demande présentée par M. A... devant ce tribunal à l'encontre des décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 7 février 2024 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet de de police.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- M. Segretain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2024.

Le rapporteur,

A. SEGRETAINLa présidente,

S. VIDAL

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 24PA01410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01410
Date de la décision : 20/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: M. PERROY

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-20;24pa01410 ?
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