Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 11 août 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné.
Par un jugement n° 2310921/7 du 11 mars 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 avril 2024, M. A..., représenté par Me Vitel, demande à la Cour :
1°) d'ordonner avant dire-droit que lui soit communiqué son dossier administratif sur le fondement des articles L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration et L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
2°) d'annuler le jugement n° 2310921/7 du 11 mars 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;
3°) d'annuler l'arrêté litigieux ;
4°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un certificat de résidence " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, " salarié ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
- la décision en litige est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que la nécessité de demeurer auprès de ses proches n'est pas un critère d'application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'usage du pouvoir discrétionnaire de régularisation du préfet et méconnaît l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 25 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 16 octobre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 31 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Segretain,
- et les observations de Me De Grazia, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né le 4 janvier 1978, est entré en France le 15 novembre 2008 selon ses déclarations. Par un arrêté du 11 août 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné. M. A... relève appel du jugement du 11 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision en litige, qui vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'accord franco-algérien applicables à la demande de M. A..., décrit la situation administrative, familiale et professionnelle de l'intéressé. La décision contestée comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de l'arrêté attaqué, qu'il n'a pas été procédé à un examen particulier de la situation de M. A.... En particulier, si le requérant fait valoir que le préfet n'a pas examiné sa demande de certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien, il ne justifie pas avoir formulé une telle demande en se bornant à produire un courrier ayant cet objet, daté du 30 mai 2022, portant la mention typographiée d'une remise en mains propres le 7 juin 2022, qu'il n'établit pas avoir transmis aux services préfectoraux. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen doit être écarté, sans qu'il y ait lieu d'ordonner la communication du dossier administratif de l'intéressé.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. "
5. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, cet article est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale. S'agissant des ressortissants algériens, les conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait préalablement dû saisir, en application du second alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour, ne peut qu'être écarté.
6. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point précédent, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Dès lors, les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Ainsi, il lui appartient, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
7. En l'espèce, si M. A... se prévaut d'une présence habituelle en France depuis 2008, et verse, pour en justifier, des pièces à compter de l'année 2010, il ressort en tout état de cause du dossier qu'il est célibataire, sans charge de famille, et se borne à invoquer la présence régulière de sa sœur et de son époux de nationalité française. En outre, il ne justifie d'aucune insertion professionnelle, et se prévaut seulement d'une promesse d'embauche en qualité de peintre. Dans ces conditions, le préfet a pu refuser d'user de son pouvoir discrétionnaire pour régulariser la situation de M. A... sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation.
8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
9. D'une part, en relevant que M. A... ne démontrait pas la nécessité de rester auprès de sa sœur, le préfet s'est livré à un examen de la situation familiale de l'intéressé en France sans ajouter de critère d'application des stipulations précitées. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en s'y référant doit être écarté. D'autre part, eu égard à la vie privée et familiale de M. A..., telle qu'elle a été analysée au point 7, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien doivent être écartés.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
10. En premier lieu, il ressort de ce qui précède que le requérant ne soutient pas utilement que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par exception d'illégalité de la décision lui refusant un certificat de résidence.
11. En second lieu, eu égard la situation de M. A..., telle qu'elle a été analysée au point 7, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 août 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Par voie de conséquence, les conclusions à fins d'injonction et d'astreinte et les conclusions présentées par le requérant sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Segretain, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2024.
Le rapporteur,
A. SEGRETAINLa présidente,
S. VIDAL
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 24PA01643