Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2023 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination pour son éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 2312121 du 20 mars 2024, le Tribunal administratif de Melun rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 17 avril 2024 M. A..., représenté par Me Blandeau, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2312121 du 20 mars 2024 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 5 novembre 2023 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en fait ;
- elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision de refus de délai de départ volontaire est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît le droit de toute personne de pouvoir assister à son procès pénal, tel que garanti par l'article 8, paragraphe 2 de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 interprété par Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 15 septembre 2022, et faisant partie du droit à un procès équitable protégé par les articles 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux et l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 22 octobre 1964 à Kinshasa, déclare être entré en France en 2004. A la suite de son interpellation pour conduite d'un véhicule sans permis, par un arrêté en date du 5 novembre 2023 le préfet de Seine-et-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé à son égard une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu la décision, qui mentionne que M. A... se déclare marié père de trois enfants à charge sans toutefois justifier subvenir à leur entretien et leur éducation, comporte les considérations de fait qui en constituent le fondement, quand bien même certains des éléments de fait revendiqués par M. A... n'y sont pas mentionnés. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen doit être écarté.
3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
4. Si M. A... soutient qu'il réside en France depuis 2004, par les pièces qu'il produit, il ne justifie pas d'une résidence habituelle en France avant l'année 2013. Par ailleurs, s'il ressort des pièces produites en appel qu'il a épousé en 2021 une compatriote titulaire d'une carte de résident expirant en 2029, et qu'il est le père de deux enfants majeurs, dont le lieu de résidence n'est pas déterminé, ainsi que d'une enfant mineure issue d'une précédente union, toutefois il n'établit pas plus en appel qu'en première instance qu'il participerait à l'éducation et l'entretien de cet enfant par la seule production de documents relatifs à l'envoi d'argent liquide, d'ailleurs seulement depuis juin 2023, à une personne dont il n'est nullement établi qu'elle serait la mère de son enfant mineure. Il n'est par suite pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'est pas plus fondé à soutenir qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la décision de refus de délai de départ volontaire :
5. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. "
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé, à l'appui des conclusions dirigées contre la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, à exciper de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
7. En deuxième lieu la décision, qui mentionne les textes dont elle fait application et les éléments propres à la situation de M. A..., notamment une précédente décision d'éloignement du 31 juillet 2019 et la menace pour l'ordre public que représente sa présence en France, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
8. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui ne conteste pas s'être soustrait à une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 31 juillet 2019, n'est pas fondé à soutenir que le refus de lui accorder un délai de départ volontaire serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, quand bien même son interpellation pour conduite sans permis ne suffirait pas à caractériser une menace pour l'ordre public.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
9. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". L'article L. 612-10 du même code précise que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé, à l'appui des conclusions dirigées contre la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français, à exciper de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
11. En deuxième lieu la décision, pour fixer à un an la durée de l'interdiction prononcée à l'encontre de M. A..., mentionne les textes dont elle fait application ainsi que la durée, les conditions du séjour en France de l'intéressé, son absence de liens familiaux en France ainsi que la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet et la menace que représente pour l'ordre public sa présence en France. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
12. Enfin, si M. A... soutient que la décision contestée méconnaît le droit de toute personne de pouvoir assister à son procès pénal, tel qu'il est garanti par l'article 8, paragraphe 2 de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 interprété par Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 15 septembre 2022, et faisant partie du droit à un procès équitable protégé par les articles 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux et l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en se prévalant de ce qu'il serait empêché de se présenter à une audience pénale ayant pour motif sa conduite sans permis, aucune pièce du dossier ne permet de tenir pour établi qu'une procédure pénale était diligentée à son encontre à la date de la décision attaquée. Le moyen ne peut donc, dans ces circonstances, qu'être écarté.
13. Il résulte dès lors de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 10 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Laforêt, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.
La rapporteure,
P. HAMONLe président,
B. AUVRAY
La greffière,
L. CHANALa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA01776