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14/01/2025 | FRANCE | N°24PA00210

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 14 janvier 2025, 24PA00210


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Securitas Aviation Transport Security a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise dont le président a, par ordonnance du 18 janvier 2021, transféré le dossier au tribunal administratif de Montreuil, d'annuler la décision du 21 décembre 2020 par laquelle l'inspecteur du travail par intérim de l'unité territoriale du Val d'Oise a accordé à la société Seris Security l'autorisation de procéder au transfert légal du contrat

de travail de M. D... A....



Par jugement n°s 2100774 et 2100776 du 8 novembre 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Securitas Aviation Transport Security a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise dont le président a, par ordonnance du 18 janvier 2021, transféré le dossier au tribunal administratif de Montreuil, d'annuler la décision du 21 décembre 2020 par laquelle l'inspecteur du travail par intérim de l'unité territoriale du Val d'Oise a accordé à la société Seris Security l'autorisation de procéder au transfert légal du contrat de travail de M. D... A....

Par jugement n°s 2100774 et 2100776 du 8 novembre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 janvier et 11 octobre 2024 et 26 novembre 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la société Securitas Aviation Transport Security, représenté par Me Benrais, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n°s 2100774 et 2100776 du 8 novembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler la décision du 21 décembre 2020 par laquelle l'inspecteur du travail par intérim de l'unité territoriale du Val d'Oise a accordé à la société Seris Security l'autorisation de procéder au transfert légal du contrat de travail de M. D... A... ;

3°) d'annuler la décision AM n°107-2020 du 10 novembre 2020 rejetant la demande d'autorisation de transfert conventionnel du contrat de travail de M. D... A... ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation faute d'expliquer les raisons pour lesquelles le tribunal a jugé, d'une part, que l'établissement dont dépendait le salarié devait s'entendre comme celui l'établissement de Roissy-en-France disposant d'un comité économique et social, d'autre part, faute de préciser quels étaient les éléments corporels et incorporels dont la transmission permettait, selon le tribunal la poursuite d'une activité économique propre et enfin faute de préciser en quoi le site transféré, qu'il a regardé comme constituant une entité autonome disposait d'une autonomie de gestion, budgétaire et comptable ;

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'il a d'une part considéré que l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de transfert conventionnel devait examiner si les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail étaient applicables alors que d'autre part, il a retenu que la procédure administrative d'autorisation de transfert a pour seule fin de s'assurer que le salarié protégé n'a pas fait l'objet d'une mesure discriminatoire ;

- la décision attaquée est entachée d'incompétence territoriale dès lors que les dispositions de l'article L. 2421-3 du code du travail, qui déterminent la compétence territoriale en cas de licenciement, ne peuvent trouver à s'appliquer aux transferts de salariés ;

- la décision attaquée est entachée d'incompétence matérielle dès lors, d'une part, qu'en l'absence de transfert d'une entité économique autonome, l'article L. 1224-1 du code de travail ne trouvait pas à s'appliquer et que, d'autre part, il n'appartenait pas à l'inspecteur du travail mais au seul juge judiciaire de vérifier que les conditions d'application de ces dispositions étaient satisfaites ;

- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'enquête qui n'a pas recueilli les observations de l'entreprise entrante n'a pas été conduite contradictoirement en méconnaissance des dispositions de l'article R. 2421-17 du code du travail ;

- les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne trouvaient pas à s'appliquer en l'absence de transfert d'éléments corporels ou incorporels et d'autonomie de l'entité économique transférée.

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 avril et 31 octobre 2024, la société Seris Security, représentée par Me Duval, demande à la cour de rejeter la requête de la société Securitas Aviation Transport Security et de mettre à la charge de la société Securitas Aviation Transport Security la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Securitas Aviation Transport Security ne sont pas fondés.

La requête a été transmise à la ministre du travail et de l'emploi qui n'a pas produit de mémoire en défense.

La requête a été transmise à M. D... A... qui n'a pas produit d'observations.

Par un courrier du 28 février 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision AM n°107-2020 du 10 novembre 2020 de rejet de demande d'autorisation de transfert conventionnel de contrat de travail de M. D... A..., présentées pour la première fois en appel.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- les observations de Me Benrais pour la société Securitas Aviation Transport Security,

- et les observations de Me Duval pour la société Seris Security.

Considérant ce qui suit :

1. La société Seris Security exécutait une mission de sécurité et de sûreté sur les sites CARGO et direction générale industrielle (DGI) de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle dans le cadre d'un contrat conclu avec la société Air France depuis 1er juin 2015. A la suite de l'appel d'offres lancé par la société Air France, la société Securitas Aviation Transport Security a été retenue à compter du 1er octobre 2020 pour reprendre l'ensemble des prestations de sûreté et de sécurité précédemment exécutées par la société Seris Security. Par courrier du 27 novembre 2020 reçu le 3 décembre suivant, la société Seris Security a alors demandé à l'inspection du travail l'autorisation de procéder au transfert légal à la société Securitas Aviation Transport Security, du contrat de travail de M. A..., agent d'exploitation de sûreté exerçant le mandat de membre élu de la délégation du personnel au comité social et économique Ile-de-France de l'unité sociale et économique Seris ESI. Par décision du 21 décembre 2020, cette autorisation lui a été accordée par l'inspecteur du travail par intérim de la 1ère section de l'unité de contrôle n°2 de l'unité départementale du Val d'Oise. Par jugement n°s 2100774 et 2100776 du 8 novembre 2023, dont la société Securitas Aviation Transport Security relève appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. En se bornant à indiquer au point 20 du jugement attaqué qu'il ressortait des pièces du dossier que l'essentiel des moyens d'exploitation (dont les locaux et les matériels significatifs) nécessaires à la poursuite de l'activité et propres à celle-ci, fournis et mis à disposition par le donneur d'ordres, avaient été transmis à l'identique au cessionnaire, les premiers juges n'ont pas suffisamment explicité, eu égard à l'argumentation circonstanciée dont ils étaient saisis sur ce point, les motifs les ayant conduits à retenir qu'une entité économique autonome avait été transférée. Par suite, la société Securitas Aviation Transport Security est fondée à soutenir que pour ce motif, le jugement du 8 novembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil est entaché d'irrégularité et qu'il doit être annulé.

4. Il s'ensuit qu'il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande de la société Securitas Aviation Transport Security tendant à l'annulation de la décision du 21 décembre 2020 de l'inspectrice du travail.

Sur la légalité de la décision AM n°107-2020 du 10 novembre 2020 :

5. Les conclusions présentées par la société Securitas Aviation Transport Security tendant à l'annulation de la décision AM n°107-2020 du 10 novembre 2020 rejetant la demande d'autorisation de transfert conventionnel de contrat de travail de M. A... n'ont pas été soumises aux premiers juges. Elles ont ainsi le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite irrecevables.

Sur la légalité de la décision du 21 décembre 2020 d'autorisation de procéder au transfert légal du contrat de travail de M. A... :

En ce qui concerne la légalité externe :

S'agissant de la compétence de l'inspectrice du travail :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ". Aux termes de l'article L. 2414-1 du même code : " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu'il est investi de l'un des mandats suivants : (...) / 2° Membre élu et ancien membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique ou candidat à ces fonctions ; (...) ". Ces dispositions trouvent à s'appliquer, y compris lorsque l'exécution d'un marché de prestation de services par un nouveau titulaire s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome constituée d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre et dont l'identité est maintenue, et dont l'activité est poursuivie par le nouvel employeur. En application de ces dispositions, le transfert du contrat de travail d'un salarié protégé ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsqu'elle est saisie d'une demande d'autorisation du transfert du contrat de travail d'un salarié protégé présentée en application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative, en premier lieu, de vérifier que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont applicables au transfert partiel d'entreprise ou d'établissement en cause, ce qui suppose qu'il concerne une entité économique autonome. Lorsque les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont applicables, l'autorité administrative doit, en second lieu, contrôler que le salarié protégé susceptible d'être transféré ne fait pas l'objet à cette occasion d'une mesure discriminatoire.

7. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 2421-3 du code du travail : " (...) La demande d'autorisation de licenciement est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel le salarié est employé. Si la demande d'autorisation de licenciement repose sur un motif personnel, l'établissement s'entend comme le lieu de travail principal du salarié. Si la demande d'autorisation de licenciement repose sur un motif économique, l'établissement s'entend comme celui doté d'un comité social et économique disposant des attributions prévues à la section 3, du chapitre II, du titre I, du livre III. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'inspecteur du travail compétent pour se prononcer sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé est celui dans le ressort duquel se trouve l'établissement disposant d'une autonomie de gestion suffisante où le salarié est affecté ou rattaché. A défaut, l'inspecteur du travail compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise qui emploie le salarié protégé, même lorsque cette entreprise appartient à un groupe.

8. D'autre part, l'article R. 8122-3 de ce code dispose que : " Sans préjudice des dispositions de l'article R. 8121-15, les inspecteurs et les contrôleurs du travail exercent leur mission : 1° Soit dans une unité de contrôle départementale ou infra-départementale ; (...) . Aux termes de l'article R. 8122-4 du même code : " Les unités de contrôle de niveau infra-départemental, départemental ou interdépartemental, rattachées à une unité départementale, et les unités de contrôle interrégionales, rattachées à une direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, sont composées de sections, dans lesquelles un inspecteur ou un contrôleur du travail exerce ses compétences. (...) ". Aux termes de l'article R. 8122-6 de ce code : " Dans les limites de sa circonscription territoriale, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi décide de la localisation et de la délimitation des unités de contrôle et, dans chaque unité de contrôle, du nombre, de la localisation et de la délimitation, et le cas échéant du champ d'intervention sectoriel ou thématique, des sections d'inspection. / Il nomme les responsables des unités de contrôle et affecte les agents de contrôle de l'inspection du travail dans les sections d'inspection ".

9. Contrairement à ce que soutient la société Securitas Aviation Transport Security, les dispositions précitées de l'article L. 2421-3 du code du travail qui sont relatives aux demandes d'autorisation de licenciement sont également applicables aux demandes d'autorisations de transfert des contrats de travail d'un salarié protégé.

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... était employé par la société Seris Security sur le site CARGO d'Air France à Roissy-Charles-de-Gaulle et était administrativement rattaché à l'établissement de cette société situé 69, rue de la Belle Etoile à Roissy-en- France, établissement qui dispose d'un comité social et économique à la même adresse comme le montrent les pièces produites par la société Seris Security en défense entraînant ainsi la compétence de l'unité départementale du Val d'Oise pour statuer sur la demande d'autorisation de transfert de la salariée contrairement à ce que soutient la société requérante. De plus, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que cet établissement ne se trouve pas dans l'emprise de l'aérodrome, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que par l'arrêté du 18 juin 2019 a été créé une unité de contrôle interdépartementale rattachée à l'unité départementale de la Seine-Saint-Denis Seine pour la zone aéroportuaire. Par ailleurs, par décision n° 2020-07 du 15 juillet 2020 relative à l'organisation de l'inspection du travail dans le département du Val d'Oise, prise par le responsable de l'unité départementale du Val d'Oise, Mme C... B..., inspectrice du travail signataire de la décision contestée, affectée sur la section 3-5 de l'unité de contrôle n°2 a été chargée de l'intérim s'agissant de la section 2-12 de cette unité. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence territoriale de la signataire de cette décision doit être écarté.

11. En troisième lieu, et ainsi qu'il a été exposé au point 6, l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation du transfert du contrat de travail d'un salarié protégé présentée sur le fondement de l'article L. 1224-1 du code du travail doit vérifier que ces dispositions sont applicables à la demande qui lui était soumise. Il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision du 21 décembre 2020 serait, dans cette mesure, entachée d'incompétence matérielle ne peut qu'être écarté.

S'agissant de la régularité de la procédure suivie :

12. Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 2421-17 du code du travail : " La demande d'autorisation de transfert prévue à l'article L. 2421-9 est adressée à l'inspecteur du travail (...). / Les dispositions des articles R. 2421-11 et R. 2421-12 s'appliquent ". Selon ces dispositions, l'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire avant de rendre sa décision qui est notifiée à l'employeur, au salarié et, le cas échéant, à l'organisation syndicale intéressée s'il s'agit d'un représentant syndical.

13. Il résulte de ces dispositions que cette procédure administrative, qui est instituée aux seules fins de s'assurer que le salarié protégé dont le transfert est demandé ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire, ne concerne que l'employeur qui demande l'autorisation et le salarié intéressé. Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Securitas Aviation Transport Security, s'il était loisible à l'inspectrice du travail de recueillir, au cours de son enquête, les observations de l'entreprise destinée à devenir l'employeur de la salariée protégée en cas d'autorisation du transfert, aucune disposition réglementaire ni aucun principe ne lui imposait de recueillir de telles observations avant de rendre sa décision. Il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête contradictoire doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

14. En cas de transfert partiel d'entreprise, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de transfert sur le fondement de l'article L. 2414-1 du code du travail, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier que sont remplies les conditions prévues à l'article L. 1224-1 du code du travail. Cette dernière disposition, interprétée à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, ne s'applique qu'en cas de transfert par un employeur à un autre employeur d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise par le nouvel employeur. Constitue une entité économique autonome, un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif économique propre. Le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un autre exploitant.

15. Tout d'abord, il est constant que l'activité de prestation de sûreté et de sécurité sur le site DGI de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, confiée à la société Seris Security dans le cadre de l'exécution du marché conclu avec la société Air France, est identique à celle réalisée par la société Securitas Aviation Transport Security au titre du nouveau marché conclu avec la société Air France, de sorte que l'activité économique doit être regardée comme ayant conservé son identité et son objectif propre quant à la réalisation de cette mission au jour du transfert. Les circonstances que, postérieurement à ce transfert, la société Securitas Aviation Transport Security ait élaboré de nouvelles procédures de sécurité, ait organisé des formations destinées aux salariés concernés par ces nouvelles procédures et ait mis en place des moyens supplémentaires en matériels et en personnel sont sans incidence sur cette appréciation. Par ailleurs, l'augmentation du périmètre du site DGI par l'adjonction du site CMH représentant une trentaine de salariés supplémentaires est également sans incidence sur l'appréciation de l'identité de la mission de prestation de sûreté et de sécurité antérieurement confiée à la société Seris Security sur le site DGI et qui s'est poursuivie à l'identique à compter du 1er octobre 2020. Est également sas incidence la circonstance que les lots correspondant au découpage du marché lancé par la société Air France ont été de nouveau redécoupés à l'occasion d'un appel d'offres dont la procédure, initiée en octobre 2024, aboutira à de nouveaux transferts en octobre 2025.

16. Ensuite, il ressort des pièces du dossier que cette activité était effectuée par une équipe placée sous la responsabilité d'un chef de site, d'un chef de site adjoint et d'un chef d'équipe encadrant des agents de sûreté, de sécurité ou d'accueil exclusivement affectés sur le site concerné suivant un planning spécifique permettant d'assurer des prestations 24 heures sur 24 et disposant d'une habilitation et d'une autorisation nécessaires pour travailler en zone aéroportuaire et ayant été spécifiquement formés pour réaliser les missions requises pour ce marché. Même s'ils n'avaient pas le statut de cadre, les agents de maîtrise chargés de l'encadrement organisaient et contrôlaient le travail des agents placés sous leur responsabilité. Alors que le marché des sites Air France CARGO et DGI était l'unique marché détenu par la société Seris Security dans le domaine de la sûreté aéroportuaire, la circonstance que ces personnels pouvaient être affectés sur n'importe quel autre marché du groupe Seris est sans incidence sur l'appréciation de leur affectation antérieure au transfert, affectation qui était exclusivement dédiée à la mission de prestation de sûreté et de sécurité antérieurement confiée à la société Seris Security sur le site DGI transféré désormais à la société Securitas Aviation Transport Security. Par ailleurs, si la société appelante fait valoir que ces personnels affectés sur le site DGI par la société Seris Security faisaient partie d'une structure n'ayant aucune autonomie comptable et budgétaire, il ressort néanmoins des pièces du dossier que le marché Air France CARGO et DGI était opéré par une agence spécifiquement dédiée créée par Seris Security et disposant de ses comptes d'exploitation.

17. Enfin, il ressort des pièces du dossier que les moyens d'exploitation nécessaires à la poursuite de l'activité qui étaient fournis et mis à disposition par la société Air France, à savoir notamment les dispositifs d'inspection-filtrage des personnes et des bagages, la vidéosurveillance et les logiciels et les locaux comme les vestiaires ou le réfectoire ont fait l'objet d'un transfert de mise à disposition au profit du nouvel exploitant pour exécuter sa mission. Il n'est pas sérieusement contesté que l'essentiel des fournitures et matériels utilisés par le prestataire, à l'exception des équipements nécessitant d'être renouvelés, a été racheté par la société Securitas Aviation Transport Security à la société Seris Security pour un montant de plus de 14 000 euros, notamment les tenues de travail et les équipements radio, et que les équipements devant être renouvelés ont été remplacés à l'identique par la société. Le maintien de l'identité de l'entité économique transférée s'appréciant à la date du transfert, la formation spécifique ultérieure du personnel ou la mise en place de procédures spécifiques postérieures au transfert ne peuvent avoir d'incidence sur ce point. La société Securitas Transport Aviation Security ne saurait, dès lors, utilement faire valoir qu'elle a, depuis qu'elle est en charge de ce marché, procédé à l'installation de lignes fixes, d'un réseau internet, à l'acquisition de téléphones portables et de tablettes, de nouveaux vêtements de travail, de sièges de bureau, de gants, de lampes torches, de miroirs d'inspection, de loupes et de portes badge. La reprise par la société Securitas Aviation Transport Security d'éléments corporels et incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité en cause s'avère, ainsi, caractérisée.

18. Au vu de l'ensemble de ces éléments, l'activité de la société Seris Security transférée à la société Securitas Aviation Transport Security constituait un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels permettant l'exercice d'une activité économique poursuivant un objectif propre avec maintien de l'identité de l'entité transférée avec reprise de l'activité de cette entité par le repreneur, au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail. Une entité économique autonome a, ainsi, été transférée à la société Securitas Aviation Transport Security. Le moyen selon lequel les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne trouvaient pas à s'appliquer en l'absence d'une entité économique autonome transférée n'est, ainsi, pas fondé.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la société Securitas Aviation Transport Security n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 21 décembre 2020 par laquelle l'inspecteur du travail a accordé à la société Seris Security l'autorisation de procéder au transfert légal du contrat de travail de M. A....

Sur les frais liés au litige :

20. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions de la société Securitas Aviation Transport Security au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Securitas Aviation Transport Security une somme de 1 000 euros à verser à la société Seris Security sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°s 2100774 et 2100776 du 8 novembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Securitas Aviation Transport Security en première instance et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : La société Securitas Aviation Transport Security versera à la société Seris Security une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Securitas Transport Aviation Security, à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, à la société Seris Security et à M. D... A....

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Menasseyre, présidente,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2025.

La rapporteure,

A. ColletLa présidente,

A. Menasseyre

La greffière

N. Couty

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA00210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA00210
Date de la décision : 14/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : DUVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-14;24pa00210 ?
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