Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 10 février 2021 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.
Par un jugement n° 2106902-6 du 4 avril 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2023 et le 25 octobre 2024, M. B..., représenté par Me Walther, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 février 2021 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un certificat de résidence algérien dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail sans délai, ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1001.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé quant à la disponibilité de son traitement en Algérie ;
- l'arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- il est entaché d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée par l'avis du collège de médecins de l'OFII ;
- il méconnaît l'article 6-7 de l'accord franco-algérien en l'absence de possibilité de prise en charge effective de son état de santé en Algérie ;
- il méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale par voie d'exception en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour sur laquelle elle se fonde ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie d'exception en conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement sur laquelle elle se fonde.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense.
L'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a produit un mémoire en observations enregistré le 27 septembre 2024.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris du 7 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bruston a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant algérien, né le 20 novembre 1995, est entré en France le 18 août 2018, sous couvert d'un visa D mention " étudiant ". Il s'est vu délivrer deux certificats de résidence algérien en qualité d'étudiant, valables du 29 novembre 2018 au 28 novembre 2020. Le 20 octobre 2020, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Il relève appel du jugement du 4 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 février 2021 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".
3. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu de manière suffisamment précise à l'ensemble des moyens invoqués devant eux, en particulier le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
4. En premier lieu, M. B... reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation et d'examen de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 à 4 de leur jugement.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont applicables aux ressortissants algériens sollicitant un titre de séjour sur le fondement des stipulations précitées : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
6. D'une part, contrairement à ce que soutient M. B..., il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police se serait estimé, à tort, lié par l'avis du 24 décembre 2020 du collège de médecins de l'OFII pour refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'une erreur de droit pour ce motif doit être écarté.
7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. B... la délivrance d'un certificat de résidence algérien en qualité d'étranger malade, le préfet du Val-de-Marne s'est notamment fondé sur l'avis susmentionné du collège de médecins de l'OFII du 24 décembre 2020 qui indiquait que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait toutefois bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie et, qu'à la date de cet avis, il pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des certificats médicaux produits en première instance, que M. B... souffre d'une maladie génétique rare, la dyskinésie ciliaire, entrainant une insuffisance respiratoire chronique, une colonisation bronchite à Klebsiella pneumoniae entraînant tous les deux mois une infection broncho-pulmonaire, avec un besoin antibiotique oral et intraveineux fréquent, une otite séromuqueuse avec hypoacousie et une pansinusite ainsi que d'une azoospermie. Toutefois, si M. B... soutient qu'il ne pourra bénéficier effectivement d'un traitement adapté à son état de santé en Algérie, les certificats médicaux qu'il produit, en particulier le certificat du
docteur A... du 17 juin 2021, ne permettent pas, compte tenu de leur rédaction en des termes généraux et imprécis sur ce point, d'établir que M. B... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement médicamenteux et d'un suivi médical appropriés à son état de santé, en Algérie, alors qu'il ressort par ailleurs des pièces produites par l'OFII que l'Algérie dispose d'infrastructures permettant la mise en place de la kinésithérapie respiratoire nécessaire au traitement de la pathologie du requérant et que les médicaments qui lui sont prescrits, à savoir un traitement antibiotique en cas de poussée infectieuse et des bronchodilatateurs inhalés, y sont distribués, ce qui ressort de la nomenclature nationale des produits pharmaceutiques à usage de la médecine humaine publiée par le ministère algérien de l'industrie pharmaceutique, sans qu'il soit nécessaire de se référer au fiches MédCOI non produites à l'instance. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence en raison de son état de santé, le préfet du Val-de-Marne aurait méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. M. B... soutient qu'il résidait en France depuis près de cinq années à la date de la décision contestée, qu'il a été mis en possession de deux certificats de résidence algérien en qualité d'étudiant, valables du 29 novembre 2018 au 28 novembre 2020, que, parallèlement à ses études en licence d'économie et gestion, il a travaillé en qualité de chauffeur livreur sous couvert d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel de juin 2019 à avril 2020 et qu'il bénéficie en outre d'une prise en charge médicale régulière et spécialisée depuis 2020. Toutefois, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui est entré régulièrement en France en 2018, séjournait en France depuis un peu moins de trois ans à la date de la décision préfectorale, sous couvert d'un titre de séjour mention " étudiant " ne lui donnant pas vocation à séjourner durablement en France, qu'il est célibataire, sans charge de famille en France, qu'il est hébergé par un compatriote et a travaillé sous couvert de contrats à temps partiel pour financer ses études. En outre, il n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales en Algérie où il a séjourné jusqu'à l'âge de 23 ans. Dans ces conditions, le préfet du Val-de-Marne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
10. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. B... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
11. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 7 et 9, le moyen tiré de ce que le préfet du Val-de-Marne, en obligeant M. B... à quitter le territoire français, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle, doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
12. Les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. B... dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté du 4 avril 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 10 février 2021. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tenant aux frais liés à l'instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera délivrée au préfet du Val-de-Marne et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Doumergue, présidente,
Mme Bruston, présidente assesseure,
M. Mantz, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 janvier 2025.
La rapporteure,
S. BRUSTON
La présidente,
M. DOUMERGUE Le greffier,
E. FERNANDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°23PA01867 2