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17/01/2025 | FRANCE | N°24PA03799

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 17 janvier 2025, 24PA03799


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2024 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.



Par un jugement n° 2401747 du 19 juillet 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.


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Procédure devant la Cour :



Par une requête et des pièces qui n'ont pas été communiquées, enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2024 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 2401747 du 19 juillet 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces qui n'ont pas été communiquées, enregistrés les 23 août 2024 et 23 octobre 2024, M. B..., représenté par Me Place, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 19 juillet 2024 ;

2°) d'annuler les décisions du 11 janvier 2024 du préfet de la Seine-Saint-Denis portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'administration ait de nouveau statué sur son cas, dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les juges de première instance ont omis de se prononcer sur l'ensemble des conclusions et des moyens soulevés à l'appui de sa requête ;

- le jugement contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant du refus de titre de séjour :

- la décision est entachée d'un vice de procédure en raison, d'une part, de la composition irrégulière de la commission du titre de séjour qui a rendu un avis sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour le 18 juillet 2023 et, d'autre part, du défaut de notification de cet avis préalablement à l'édiction de l'arrêté qui lui est opposé ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, en l'absence d'examen particulier de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée au titre de son activité salariée comme au titre de la vie privée et familiale ;

- en rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en se fondant sur le seul avis défavorable rendu sur sa demande par la plateforme interrégionale de la main d'œuvre étrangère qui n'était au demeurant pas obligatoire, le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de droit ;

- en s'appropriant l'avis rendu par la plateforme interrégionale de la main d'œuvre étrangère et en retenant que son employeur potentiel n'avait pas répondu à une demande de complément d'information, le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché sa décision d'une erreur de fait ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de justice administrative ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale, par voie d'exception, en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour sur laquelle elle se fonde ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- et les observations de Me Chinouf, substituant Me Place, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 11 janvier 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. B..., ressortissant égyptien né le 11 novembre 1984 et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par la présente requête, M. B... relève régulièrement appel du jugement du tribunal administratif de Montreuil tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 432 14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Devant la commission du titre de séjour, l'étranger fait valoir les motifs qu'il invoque à l'appui de sa demande d'octroi ou de renouvellement d'un titre de séjour. Un procès-verbal enregistrant ses explications est transmis au préfet avec l'avis motivé de la commission. L'avis de la commission est également communiqué à l'intéressé ". Il résulte de ces dispositions que l'avis motivé de la commission doit être transmis à l'étranger et au préfet avant que ce dernier ne statue sur la demande dont il est saisi. Une telle communication constitue une garantie instituée au profit de l'étranger qui doit connaître le sens et les motifs de l'avis de la commission et être ainsi mis à même de faire valoir tout élément pertinent qu'appellerait l'avis de la commission du titre de séjour avant que le préfet ne prenne sa décision.

3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.

4. Il ressort des pièces du dossier que la commission du titre de séjour prévue par les dispositions précitées a été saisie dans le cadre de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. B..., en raison de la durée de sa résidence habituelle en France. Ce dernier s'est présenté avec son conseil devant la commission qui a émis, le 18 juillet 2023, un avis défavorable à sa demande de régularisation. S'il ressort des visas de l'arrêté attaqué qu'une copie de cet avis a été jointe à la notification de cet arrêté, aucune pièce du dossier ne permet d'établir que le préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observation en défense, aurait porté cet avis à la connaissance de l'intéressé antérieurement à l'édiction de la décision de refus de titre de séjour qui lui a été opposée. Dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir que le défaut de communication de l'avis de la commission du titre de séjour préalablement à l'édiction de la décision de refus de titre de séjour ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 432 14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a été de nature à le priver effectivement d'une garantie dès lors qu'il n'a pas été en mesure de produire devant les services préfectoraux l'ensemble des éléments susceptibles de justifier sa demande de titre de séjour, compte tenu du sens et des motifs de cet avis. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine Saint Denis du 11 janvier 2024.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation énoncé ci-dessus, le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., implique seulement d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis ou au préfet territorialement compétent de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 200 euros à verser à M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2401747 du 19 juillet 2024 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 11 janvier 2024 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis ou au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. B... sur le fondement de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Lemaire, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 janvier 2025.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

S. CARRERE La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA03799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA03799
Date de la décision : 17/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : PLACE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-17;24pa03799 ?
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