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05/02/2025 | FRANCE | N°24PA01257

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 05 février 2025, 24PA01257


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'Union sportive Concarneau a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 6 octobre 2022 par laquelle la commission supérieure d'appel de la Fédération française de football (FFF) a confirmé la décision du 7 septembre 2022 de la commission fédérale des règlements et contentieux de la FFF lui infligeant la sanction de match perdu, assortie d'une perte d'un point au classement du championnat de National 1 de la saison 2022-2023, ainsi que la suspension

d'un match ferme à l'encontre de M. A... B..., à compter du 12 septembre 2022.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Union sportive Concarneau a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 6 octobre 2022 par laquelle la commission supérieure d'appel de la Fédération française de football (FFF) a confirmé la décision du 7 septembre 2022 de la commission fédérale des règlements et contentieux de la FFF lui infligeant la sanction de match perdu, assortie d'une perte d'un point au classement du championnat de National 1 de la saison 2022-2023, ainsi que la suspension d'un match ferme à l'encontre de M. A... B..., à compter du 12 septembre 2022.

Par jugement n° 2301101/6-3 du 18 janvier 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 6 octobre 2022 de la commission supérieure d'appel de la FFF et a mis à la charge de la FFF la somme de 1 500 euros à verser à l'Union sportive Concarneau en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire ampliatif et un mémoire enregistrés les 15 mars, 30 avril et 4 octobre 2024, la Fédération française de football, représentée par la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 janvier 2024 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande de l'Union sportive Concarneau ;

3°) de mettre à la charge de l'Union sportive Concarneau la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que le moyen d'annulation retenu par les premiers juges n'avait pas été soulevé par l'Union sportive Concarneau ;

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors qu'il est insuffisamment motivé, les premiers juges n'ayant pas précisé, d'une part, en quoi la commission supérieure d'appel n'avait pas fait une juste appréciation des circonstances particulières de l'espèce et, d'autre part, quelles étaient les circonstances qui justifiaient, en l'espèce, de déroger à l'application des dispositions de l'article 226 des Règlements généraux ;

- les premiers juges ont mal interprété l'article 226 des règlements généraux de la FFF et ont entaché leur jugement d'erreur de droit ;

- la décision du 6 octobre 2022 de la commission supérieure d'appel de la FFF n'est pas disproportionnée ;

- les autres moyens soulevés en première instance par l'Union sportive Avranches Mont-Saint-Michel ne sont pas fondés, ainsi qu'elle l'a démontré dans ses écritures de première instance auxquelles elle renvoie.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 septembre 2024, l'Union sportive Concarneau, représentée par la société d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la Fédération française de football lui verse une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la Fédération française de football ne sont pas fondés et c'est à bon droit que le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 6 octobre 2022 en retenant le moyen, qu'elle avait soulevé, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ;

- en tout état de cause, ainsi qu'elle l'a déjà fait valoir en première instance, la décision attaquée méconnaît l'article 226 des règlements généraux de la saison 2021/2022 ; elle est illégale en raison de l'illégalité de cet article 226 qui méconnaît l'objectif à valeur constitutionnel d'intelligibilité et de clarté de la loi ; elle méconnaît le principe " non bis in idem " ; elle est entachée d'une rupture d'égalité ; elle est disproportionnée ; elle traduit une violation du principe d'impartialité et d'indépendance de l'instance supérieure d'appel ; la sanction d'un point de pénalité qui lui a été infligée, qui présente un caractère automatique au regard des règlements fédéraux, méconnaît le principe d'individualisation des peines et est manifestement disproportionnée au regard des faits en litige ;

- l'article 226 des règlements généraux de la FFF, tel qu'interprété par celle-ci, méconnaît, outre l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme déjà mentionné, le principe de légalité des peines et le principe de nécessité des peines découlant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- le code du sport ;

- les règlements généraux de la Fédération française de football de la saison 2021-2022 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Poupot pour la FFF.

Une note en délibéré, enregistrée le 3 février 2025, a été produite par la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, pour la FFF.

Considérant ce qui suit :

1. Lors de la saison 2021-2022 du championnat de National 2, la commission régionale de discipline de la ligue de football de Nouvelle-Aquitaine a prononcé à l'encontre du joueur A... B..., qui évoluait alors au sein de l'équipe de réserve du Football club (FC) Chamois Niortais, une suspension d'un match ferme pour récidive d'avertissements, prenant effet à compter du 16 mai 2022. Le joueur n'a pas disputé la rencontre du 21 mai 2022 opposant l'équipe réserve du FC Chamois Niortais au Club de Tartas - Saint-Yaguen. Le 5 août 2022, il a été transféré à l'Union sportive Concarneau. Le 12 août 2022, lors de la première journée de championnat de National 1, l'équipe première de l'Union sportive Concarneau qui comprenait notamment M. B... a fait match nul face à l'Union sportive Orléans Loiret. Le 14 août 2022, celui-ci a formé une demande d'évocation auprès de la commission fédérale des règlements et contentieux de la Fédération français de football (FFF), en mettant en cause la participation à la rencontre de M. B..., compte tenu de la suspension prononcée à son encontre par la commission fédérale de discipline de la FFF le 12 mai 2022. Par décision du 7 septembre 2022, la commission fédérale des règlements et contentieux de la FFF, après avoir relevé que si M. B... avait bien purgé un match de suspension le 21 mai 2022 avec l'équipe réserve du FC Chamois Niortais dans le cadre de la dernière journée de championnat de national 3, il n'avait en revanche " purgé " aucun match de suspension en équipe première, que ce soit avec son club d'origine ou avec l'Union sportive Concarneau, a considéré que le joueur était " en état de suspension " le jour du match. Elle a en conséquence infligé à l'Union sportive Concarneau la pénalité d'un match perdu entraînant, en vertu de l'article 10 du règlement du championnat de Nationale 1, une perte d'un point au classement du championnat de National 1 de la saison 2022-2023. Elle a également infligé à M. B... la sanction ferme d'un match de suspension, à compter du 12 septembre 2022.

2. Le club Union sportive Concarneau a interjeté appel de cette décision auprès de la commission supérieure d'appel de la FFF, laquelle l'a confirmée le 6 octobre 2022. Le club a alors saisi, par courriel du 18 octobre 2022 le comité national olympique et sportif français (CNOSF) aux fins de mise en œuvre de la procédure préalable de conciliation prévue aux articles L. 141-4 et R. 141-5 et suivants du code du sport. Le 20 décembre 2022, le conciliateur désigné a proposé à la FFF de rapporter sa décision, ce que le comité exécutif de la FFF a expressément refusé le 3 janvier 2023. Par jugement n° 2301101/6-3 du 18 janvier 2024, dont la FFF relève appel, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 6 octobre 2022 de la commission supérieure d'appel de la FFF et a mis à la charge de la FFF la somme de 1 500 euros à verser à l'Union sportive Concarneau en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la régularité du jugement :

3. D'une part, il ressort des pièces des dossiers de première instance que, contrairement à ce que soutient la FFF, l'Union sportive Concarneau a bien soulevé le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont est entachée la décision attaquée au regard des dispositions de l'article 226 des règlements généraux de la saison 2021/2022, en faisant valoir à ce titre que l'équipe de Concarneau ne tirait aucun bénéfice sportif de la situation, puisque le joueur recruté évoluait auparavant à un niveau inférieur au championnat de National 1 et qu'en outre, il apparaissait inéquitable de faire peser sur le nouveau club la charge d'agissements fautifs commis lors d'un précédent championnat dans une autre équipe et auprès de laquelle le joueur avait déjà purgé le match de suspension qui lui avait été infligé la saison précédente. Par suite, le moyen selon lequel le jugement serait entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges auraient soulevé d'office ce moyen ne peut qu'être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

5. Il ressort en particulier du point 6 du jugement attaqué que les premiers juges ont énoncé de façon suffisamment complète et précise les motifs pour lesquels ils ont considéré que la commission supérieure d'appel n'avait pas fait une juste appréciation des circonstances particulières de l'espèce en appliquant comme elle l'avait fait les dispositions de l'article 226 des règlements généraux de la saison 2021/2022. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

6. Aux termes de l'article 4 .1.2 de l'annexe 2 des règlements généraux de la FFF, portant, règlement disciplinaire : " Peuvent être prononcées à l'égard d'un assujetti personne physique, les sanctions disciplinaires suivantes : (...) / la suspension : elle entraîne l'impossibilité pour la personne physique de jouir des droits que lui confèrent sa ou ses licences, à savoir notamment de participer au fonctionnement des instances sportives du football et à leurs activités. / La personne physique suspendue ne peut donc pas : / être inscrite sur la feuille de match ; / prendre part à un match officiel, à quelque titre que ce soit ; / prendre place sur le banc de touche ; / pénétrer sur l'aire de jeu avant, pendant et après le déroulement de la rencontre officielle ; / être présent dans le vestiaire des officiels ; / effectuer tout acte au nom et pour le compte du club ou le représenter, devant les instances ; / siéger au sein de ces dernières. (...) / Les modalités de purge d'une suspension sont définies à l'article 226 des Règlements Généraux de la F.F.F. ". Il ressort des écritures des parties que la suspension peut porter sur un nombre de matchs (" suspension en matchs " ou sur une période donnée " suspension en temps ").

7. Aux termes de l'article 226 des règlements généraux de la FFF : " Modalités pour purger une suspension. / 1. Le joueur exclu par l'arbitre ne peut pas purger sa suspension avec une autre équipe de son club le jour-même ou le lendemain de son exclusion. A compter du surlendemain de l'exclusion, la suspension d'un joueur doit être purgée lors des rencontres officielles effectivement jouées par l'équipe au sein de laquelle il reprend la compétition, même s'il ne pouvait y participer réglementairement (...). / Le joueur ne peut être inscrit sur une feuille de match avec une autre équipe de son club tant qu'il n'a pas purgé sa suspension au regard du calendrier de cette dernière. Pour les joueurs dont le club dispute un championnat national, sanctionnés à la suite d'incidents (exclusion, récidive d'avertissements entraînant une suspension ferme, incidents de natures diverses...) survenus à l'occasion d'une rencontre officielle de compétition nationale, le ou les matchs à prendre en compte sont ceux de compétition officielle nationale disputés par l'équipe au sein de laquelle le joueur reprend la compétition si cette dernière dispute un championnat national. / Les sanctions complémentaires prononcées doivent être purgées dans les mêmes conditions. En cas de changement de club, la suspension du joueur est purgée dans les équipes du nouveau club, selon les modalités précisées au présent alinéa. Les matchs pris en compte dans ce cas sont les matchs officiels disputés par les équipes de son nouveau club depuis la date d'effet de sa sanction et ce, même s'il n'était pas encore qualifié dans ce club. (...) / En tout état de cause, en cas de difficulté dans la purge de la sanction, le club intéressé peut toujours demander l'application de l'alinéa 3 ci-après. / 2. L'expression "effectivement jouée" s'entend d'une rencontre ayant eu son aboutissement normal, prolongation éventuelle comprise. (...) / 3. En cas de difficulté à purger les peines prévues aux alinéas qui précèdent dans les conditions ci-dessus définies et dont est seul juge l'organisme qui a prononcé la suspension, il appartient au club intéressé de demander à ce dernier de définir les modalités selon lesquelles ladite suspension sera effectuée. / 4. La perte, par pénalité, d'une rencontre disputée par l'équipe de son club avec laquelle un joueur suspendu devait purger sa sanction, libère ce joueur de la suspension d'un match vis-à-vis de cette équipe. / Ce joueur encourt néanmoins une nouvelle sanction pour avoir évolué en état de suspension. (...) ".

8. Ainsi que précisé dans la circulaire du 11 juin 2008 relative à la modification du mécanisme de purge des suspensions votée lors de l'assemblée fédérale du 31 mai 2008 : " Un joueur sanctionné peut reprendre la compétition avec n'importe quelle équipe de son club (équipe première, équipes inférieures, équipes d'une autre catégorie d'âge dans laquelle il est autorisé à participer), sous réserve d'avoir purgé sa sanction au cours des matchs officiels de cette dernière et ce quelle que soit l'équipe dans laquelle il a été sanctionné. /Toutefois, la purge par un joueur dans l'une des équipes de son club et le fait qu'il ait repris la compétition avec cette équipe, ne le dispensent pas, s'il veut jouer avec une autre équipe, de devoir purger également au cours des matchs officiels de cette dernière. / Un joueur suspendu doit donc, avant de reprendre la compétition avec chaque équipe dans laquelle il est susceptible d'évoluer, vérifier que cette équipe a bien joué le nombre de matchs officiels équivalent au nombre de matchs de suspension qui lui a été infligé. "

9. Par ailleurs, aux termes de l'article 171 des mêmes règlements : " 1. En cas d'infraction à l'une des dispositions prévues aux règlements fédéraux et relatives à la qualification et/ou à la participation des joueurs, et indépendamment des éventuelles pénalités prévues au Titre 4, le club fautif a match perdu par pénalité si : / - soit des réserves ont été formulées conformément aux dispositions des articles 142 ou 145 et elles ont été régulièrement confirmées ; / - soit une réclamation a été formulée dans les conditions fixées par les dispositions de l'article187.1 / ;- soit la Commission compétente s'est saisie de l'infraction, dans les conditions fixées par les dispositions de l'article 187.2.2. / Le club adverse ne bénéficie toutefois des points correspondant au gain du match que dans les cas suivants : / - s'il avait formulé des réserves conformément aux dispositions des articles 142 ou 145 et qu'il les avait régulièrement confirmées ; / - s'il s'agit d'une des infractions qui permettent l'évocation par la Commission compétente, dans les conditions fixées par les dispositions de l'article 187.2. / Les buts marqués au cours de la rencontre par l'équipe du club fautif sont annulés (...) ". Aux termes de l'article 187 de ces règlements : " (...) 2. - Évocation / Même en cas de réserves ou de réclamation, l'évocation par la Commission compétente est toujours possible et prévaut, avant l'homologation d'un match, en cas : / - de participation d'un joueur non inscrit sur la feuille de match ; / - d'inscription sur la feuille de match, en tant que joueur, d'un licencié suspendu, d'un joueur non licencié au sein du club, ou d'un joueur non licencié (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier que par une décision du 12 mai 2022, prenant effet à compter du 16 mai 2022, la Commission fédérale de discipline a infligé à M. A... B..., qui évoluait, pour la saison sportive 2021-2022 au sein de l'équipe réserve du FC Chamois Niortais en championnat National 3, une sanction de suspension d'un match ferme. En conséquence, le 21 mai 2022, il n'a pas été inscrit sur la feuille du match opposant l'équipe réserve du FC Chamois Niortais au club de Tartas Saint-Yaguen. Dans ces conditions, la sanction de suspension a eu pour M. B... tous les effets mentionnés par les dispositions, citées au point 6, de l'article 4.1.2 de l'annexe 2 des règlements généraux de la FFF. Pour justifier la position retenue par la commission supérieure d'appel de la FFF, selon laquelle à la date du 12 août 2022, jour du match disputé dans le cadre de la première journée de la saison 2022-2023 du championnat National 1 entre l'équipe première de l'US Concarneau, club dans lequel M. B... avait été transféré pendant l'été, et l'US Orléans, l'intéressé devait cependant être regardé comme étant toujours en " état de suspension " dès lors que la sanction n'avait pas été " purgée " au regard du calendrier de sa nouvelle équipe, la FFF se prévaut de la règle, qui ressort clairement de la circulaire du 11 juin 2008 relative à la modification du mécanisme de purge des suspensions votée lors de l'assemblée fédérale du 31 mai 2008, mentionnée au point 8, selon laquelle, après avoir été sanctionné, un joueur ne peut jouer dans une équipe, quelle qu'elle soit, qu'après que la suspension a été " purgée " au regard du calendrier de cette équipe, et ce alors même qu'elle l'aurait déjà été au regard d'une autre équipe, en particulier celle dans laquelle il joue normalement. Il est constant que dans la plupart des cas, l'application de cette règle, dont l'objet est de s'assurer de l'effectivité de la sanction (en évitant notamment que le club dans lequel le joueur est licencié ne le fasse jouer occasionnellement dans une autre équipe le temps que la suspension soit " purgée " dans l'équipe dans laquelle il joue normalement) sans faire obstacle aux éventuels changements non-occasionnels d'équipe ou aux transferts, ne pose en général pas de difficultés, en raison notamment du fait que sont comptabilisés, pour vérifier si la sanction est " purgée " au regard du calendrier de la nouvelle équipe, tous les matchs joués par celle-ci après la date de prise d'effet de la sanction, alors même que le joueur n'a pas encore été transféré - ce qui permet, en quelque sorte, une " purge " concomitante dans l'ancienne et dans la nouvelle équipe - . Mais elle ne saurait avoir pour conséquence d'imposer à un joueur qui, comme M. B... en l'espèce, n'a pas pu, en raison de la sanction de suspension dont il faisait l'objet, participer au match joué le 21 mai 2022 par l'équipe réserve dans laquelle il évoluait au FC Chamois Niortais, mais dont l'équipe qu'il a rejoint ensuite après son transfert n'a joué aucun match entre la date de prise d'effet de la sanction et le jour où il a été inscrit sur la feuille de match, d'être suspendu pour encore un match, transformant ainsi, de fait, la sanction d'un match de suspension en une sanction de deux matchs de suspension, en méconnaissance du principe de la proportionnalité des peines qui découle du principe de nécessité des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, principe qui a été mis en œuvre par l'autorité de sanction qui a décidé d'infliger à M. B... un seul match de suspension. Plus largement, le quantum d'une sanction ne saurait dépendre des conditions dans lesquelles elle est concrètement appliquée, tels que, notamment, le moment où elle prend effet, le ou les équipes et clubs dans lesquels le joueur évolue ou est appelé à évoluer la saison suivante, ou encore le calendrier des matchs, qui peut varier d'une année sur l'autre, en méconnaissance du principe d'égalité devant la règle répressive.

11. Par suite, M. B... ne pouvait pas légalement être considéré comme étant encore suspendu lors de la rencontre du 12 août 2022 opposant l'US Concarneau et l'US Orléans, et la commission supérieure d'appel de la FFF ne pouvait pas, comme elle l'a fait par sa décision du 6 octobre 2022, infliger au club la perte par pénalité d'un match entraînant le retrait d'un point au classement et au joueur la sanction d'un match de suspension.

12. Il résulte de ce qui précède que la FFF n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 6 octobre 2022 de la commission supérieure d'appel de la FFF. Ses conclusions tendant l'annulation de ce jugement ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Union sportive Concarneau, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la FFF au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la FFF une somme de 2 000 euros à verser à l'Union sportive Concarneau sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la Fédération française de football est rejetée.

Article 2 : La Fédération française de football versera à l'US sportive Concarneau la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération française de football et à l'Union Sportive Concarneau.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Jayer, première conseillère,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 février 2025.

La rapporteure,

A. Collet La présidente,

C. Vrignon-Villalba

Le greffier,

P. Tisserand

La République mande et ordonne à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA01257


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01257
Date de la décision : 05/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SCP MATUCHANSKY- POUPOT - VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-05;24pa01257 ?
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