Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Car Marketing System a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2016.
Par un jugement n° 2115481/4-2 du 13 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 14 novembre 2023, 20 mars 2024 et 11 mai 2024, la société Car Marketing System, représentée par Me Tabi, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2115481/4-2 du 13 novembre 2023 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure est irrégulière dès lors qu'il n'a pas été fait droit à sa demande, envoyée le 14 juin 2017, de rencontrer le supérieur hiérarchique du vérificateur compte tenu des difficultés rencontrées au cours des opérations de contrôle ;
- l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, faute de lui avoir communiqué les documents qu'elle a obtenus de tiers.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 janvier et 16 avril 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens présentés par la société requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 29 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 14 mai 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- les conclusions de M. Perroy, rapporteur public,
- et les observations de Me Tabi, représentant la société Car Marketing System.
Une note en délibéré a été présentée pour la société Car Marketing System le 10 février 2025.
Considérant ce qui suit :
1. La société Car Marketing System, qui exerce une activité de location avec option d'achat et de vente de véhicules haut de gamme de seconde main, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2016. L'administration lui a notifié, par proposition de rectification du 7 juillet 2017, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des rehaussements d'impôt sur les sociétés au titre des années vérifiées. Par la présente requête, la société Car Marketing System relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à sa charge.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. (...) Les dispositions contenues dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 47 sont opposables à l'administration ". Cette charte précise qu'en cas de difficultés, le contribuable peut s'adresser à l'inspecteur divisionnaire ou principal et ensuite à l'interlocuteur désigné par le directeur et qu'il peut le(s) contacter pendant la vérification. Cette garantie substantielle est ouverte au contribuable vérifié, avant l'envoi de la proposition de rectification, pour ce qui a trait aux difficultés affectant le déroulement des opérations de contrôle.
3. La société requérante fait valoir qu'elle a, par un courrier du 14 juin 2017, sollicité un rendez-vous avec son supérieur hiérarchique et qu'il n'a pas été donné suite à cette demande. Il résulte de l'instruction que par ce courrier, la société requérante se bornait à faire valoir qu'elle rencontrait des difficultés durant la vérification de comptabilité. En l'absence de toute indication, même sommaire, sur la nature de ces difficultés, cette formulation ne permettait pas au supérieur hiérarchique d'apprécier si les difficultés alléguées affectaient effectivement le déroulement des opérations de contrôle et relevaient ainsi de la garantie prévue par la charte. Dans ces conditions, l'administration n'était en tout état de cause pas tenue de faire droit à la demande d'entretien sollicitée par ce courrier. Par suite, le moyen tiré de ce que la société Car Marketing System a été privée de la garantie substantielle procédant de l'entrevue avec l'inspecteur principal doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée.
6. La circonstance que l'administration n'aurait pas donné suite à la demande de communication de documents émanant de tiers, demande qui est un des objets du courrier du 14 juin 2017 mentionné au point 3. et adressé au service en cours de contrôle, est sans incidence sur les obligations résultant des dispositions de l'article L. 76 B précité du livre des procédures fiscales, qui imposent à l'administration, avant la mise en recouvrement des impositions, d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des documents sur lesquels elle s'est fondée pour établir les impositions objet d'une proposition de rectification et de lui communiquer, à sa demande, lesdits documents, dès lors que la demande en cause a été présentée antérieurement à toute proposition de rectification. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui a contrairement à ce qui est soutenu régulièrement répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre de procédures fiscales, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Car Marketing System est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Car Marketing System et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction nationale d'enquêtes fiscales.
Délibéré après l'audience du 5 février 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- M. Segretain, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 février 2025.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLa présidente,
S. VIDAL
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA04687 2