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16/04/2025 | FRANCE | N°24PA00877

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 16 avril 2025, 24PA00877


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 30 juin 2021 par laquelle le préfet de police l'a admis à faire valoir ses droits à la retraite en cours de maintien en activité, à compter du 22 novembre 2021.



Par un jugement n° 2118287 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, un nouveau mémoire

et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 février 2024, 23 décembre 2024 et 9 janvier 2025, ce dernier mémoire n'étant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 30 juin 2021 par laquelle le préfet de police l'a admis à faire valoir ses droits à la retraite en cours de maintien en activité, à compter du 22 novembre 2021.

Par un jugement n° 2118287 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 février 2024, 23 décembre 2024 et 9 janvier 2025, ce dernier mémoire n'étant pas communiqué,

M. A..., représenté par Me Debrenne, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 22 décembre 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 30 juin 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de le réintégrer dans ses fonctions à compter du

22 novembre 2021 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision a été arrêtée avant même la tenue du comité médical du 1er juin 2021 ;

- le comité médical s'est prononcé sans qu'il ait été examiné par le médecin agréé, alors que la convocation initiale avait été annulée et non reprogrammée ;

- il aurait dû faire l'objet d'un examen de reprise à l'issue de son congé de maladie ordinaire ;

- son aptitude a été inexactement appréciée, dès lors que contrairement à l'avis émis par le comité médical le 1er juin 2021, il était apte à reprendre ses fonctions le 12 septembre 2021, avant l'expiration de ses droits à congé maladie, peu important que la date de sa consolidation ait été fixée au 14 avril 2022 ;

- le préfet de police a entaché sa décision d'une erreur de droit, dès lors que le comité médical ne pouvait être consulté qu'au sujet d'une prolongation de son congé de maladie, en

application des articles 7 et 27 du décret du 14 mars 1986, et non de son inaptitude ;

- le préfet de police a méconnu l'article R. 4626-29 du code du travail, dès lors qu'aucun examen de reprise n'a été réalisé à l'issue de ses arrêts de travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2025, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré par le requérant de la consultation obligatoire du comité médical sur le fondement des articles 7 et 27 du décret du 14 mars 1986 est inopérant ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 6 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 janvier 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bories,

- les conclusions de M. Perroy, rapporteur public,

- et les observations de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., brigadier de police né le 14 mai 1963, affecté à la préfecture de police, a été autorisé à se maintenir en activité, à compter du 15 juillet 2020 et au plus tard jusqu'à son soixante-septième anniversaire, par un arrêté du 5 juin 2020. Par un arrêté du 30 juin 2021, le préfet de police l'a admis à faire valoir ses droits à la retraite, à compter du 22 novembre 2021, en raison de son inaptitude physique. M. A... relève appel du jugement du 22 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. L'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, désormais codifié à l'article L. 556-7 du code général de la fonction publique, prévoit que le maintien en activité jusqu'à l'âge de soixante-sept ans des fonctionnaires appartenant à un corps ou à un cadre d'emplois dont la limite d'âge est inférieure est subordonné à leur aptitude physique. Aux termes de l'article 5 du décret du 30 décembre 2009 pris pour l'application de ces dispositions, dans sa rédaction applicable à la décision attaquée : " I. - Si le fonctionnaire devient physiquement inapte à ses fonctions au cours de la période de prolongation, celle-ci prend fin. / L'employeur public peut, à tout moment de la période de prolongation d'activité et notamment préalablement à tout changement de poste, demander au fonctionnaire de présenter, dans un délai d'un mois, le certificat médical prévu à l'article 4 du présent décret. Lorsqu'une visite médicale périodique est prévue, l'avis médical émis à cette occasion peut remplacer le certificat médical. / Le fonctionnaire et l'employeur public peuvent contester les conclusions du certificat médical ou de l'avis qui en tient lieu. La contestation est portée devant le comité médical mentionné au II de l'article 4 du présent décret. / Lorsque l'employeur public saisit le comité médical, il en informe le demandeur. / Si, au vu du certificat, ou, le cas échéant, de l'avis du comité médical, l'employeur public décide de mettre fin à la prolongation d'activité, il notifie sa décision à l'intéressé au plus tard trois mois avant sa date d'effet. (...) ". Aux termes de l'article 6 de ce décret, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'admission du fonctionnaire à la retraite par limite d'âge est prononcée sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite : (...) 2° Lorsqu'il est mis fin à la prolongation d'activité sur décision de l'employeur public ou à la demande de l'agent dans les conditions prévues à l'article 5 du présent décret ; / 3° Lorsque le fonctionnaire, au cours de la période de prolongation d'activité, est reconnu inapte à reprendre son service, après avis du conseil médical, à l'expiration de ses droits à congé de maladie ; (...) ". Le second alinéa de l'article 3 du même décret précise que : " Les fonctionnaires admis à prolonger leur activité dans les conditions prévues au présent décret ne peuvent pas, à l'expiration de leurs droits à congé de maladie, être placés en congé de longue maladie, en congé de longue durée ou accomplir un service à temps partiel pour raison thérapeutique. Si leur état de santé correspond aux conditions médicales de ces situations, leur admission à la retraite est prononcée conformément aux dispositions de l'article 6 du présent décret ". Enfin, aux termes de l'article 27 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de prolongation d'activité, d'une part, l'employeur public peut, à tout moment, inviter le fonctionnaire à présenter un certificat médical délivré par un médecin agréé appréciant, au regard du poste occupé, son aptitude physique, puis, s'il conteste les conclusions du certificat médical ou de l'avis médical qui en tient lieu, saisir le comité médical, en informant le fonctionnaire, avant de décider de mettre fin à la prolongation d'activité au vu de ce certificat ou, le cas échéant, de l'avis du comité médical, et de prononcer son admission à la retraite par limite d'âge. D'autre part, si le fonctionnaire est reconnu inapte à reprendre son service, après avis du conseil médical, à l'expiration de ses droits à congé de maladie, l'employeur public doit prononcer son admission à la retraite par limite d'âge.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été placé en congé de maladie à compter du 23 novembre 2020. Le préfet de police l'a convoqué à un examen médical par un médecin agréé, prévu le 17 mai 2021. Toutefois, M. A... ayant fait valoir l'impossibilité dans laquelle il se trouvait de se déplacer, à la suite d'une intervention chirurgicale subie le 13 avril 2021, le rendez-vous a été annulé le 7 mai, sans être reprogrammé. Par courrier du 17 mai 2021, le requérant a été informé que le comité médical compétent se réunirait le 1er juin suivant pour émettre un avis sur sa position administrative, dès lors que son congé maladie ordinaire excédait six mois. Réuni à cette date, le comité médical a émis un avis d'inaptitude à la fonction policière active de manière absolue et définitive, au vu duquel le préfet de police, par arrêté du 30 juin 2021, a admis M. A... à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 22 novembre 2021, date d'épuisement de ses droits à congé de maladie.

5. A la date du 1er juin 2021 à laquelle le comité médical a rendu son avis, M. A... pouvait encore prétendre, s'il en remplissait les conditions, à près de six mois de congé de maladie ordinaire. Dans ces conditions, si le comité médical pouvait être saisi pour avis d'une demande de prolongation de son congé de maladie dans la limite de la durée restant à courir, sur le fondement de l'article 27 du décret du 14 mars 1986, ou s'il pouvait être saisi d'une contestation des conclusions d'un certificat médical ou d'un avis en tenant lieu, relatif à son aptitude physique, sur le fondement de l'article 5 du décret du 30 décembre 2009, il ne pouvait, en revanche, se prononcer sur son inaptitude à reprendre son service à l'expiration de ses droits à congé de maladie, en vertu du 3° de l'article 6 du même décret. Or il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le préfet de police, après avoir demandé à M. A... de se présenter à une visite médicale, y a renoncé et a saisi le comité médical pour qu'il se prononce sur son inaptitude définitive en l'absence de toute contestation d'un avis médical préalablement émis par un médecin agréé. Au surplus, le courrier qu'il a adressé à M. A... le 17 mai 2021, pour l'informer de la réunion du comité médical du 1er juin 2021, lui indiquait que cette saisine résultait de la prolongation de son congé de maladie ordinaire au-delà de six mois et ne mentionnait pas que le comité serait invité à se prononcer sur son inaptitude en vue de son admission à la retraite. Ainsi, M. A... est fondé à soutenir que l'arrêté du 30 juin 2021 est entaché d'un vice de procédure, qui l'a privé d'une garantie tenant à l'émission d'un avis médical éclairé sur son aptitude physique, et que le préfet de police a méconnu les dispositions citées ci-dessus du décret du 30 décembre 2009.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 30 juin 2021.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt n'implique pas nécessairement, eu égard à ses motifs, que M. A... soit réintégré dans ses fonctions mais seulement que sa situation soit réexaminée au regard de son aptitude physique. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais de l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 22 décembre 2023 et la décision du préfet de police du 30 juin 2021 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Fombeur, présidente de la cour,

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- Mme Bories, présidente assesseure.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 avril 2025.

La rapporteure,

C. BORIES

La présidente,

P. FOMBEUR

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24PA00877 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA00877
Date de la décision : 16/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. FOMBEUR
Rapporteur ?: Mme Colombe BORIES
Rapporteur public ?: M. PERROY
Avocat(s) : DEBRENNE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-16;24pa00877 ?
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