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16/04/2025 | FRANCE | N°24PA04196

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 16 avril 2025, 24PA04196


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui a transmis sa requête au tribunal administratif de Paris, d'annuler les arrêtés du 17 août 2024 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de deux ans.



Par un jugement n° 2423666 du 9 septembre 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a

rejeté ses demandes.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui a transmis sa requête au tribunal administratif de Paris, d'annuler les arrêtés du 17 août 2024 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2423666 du 9 septembre 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 octobre 2024 et le 13 février 2025, M. A..., représenté par Me Boamah, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de police du 17 août 2024 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de procéder à l'effacement de son signalement dans le système d'information Schengen ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre des frais de première instance, une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est insuffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement :

- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'un défaut de motivation et d'examen ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 12 de la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003, dès lors que sa carte de résident de longue durée-UE délivrée par les autorités italiennes le protégeait contre une mesure d'éloignement et qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-1, 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le champ d'application duquel il n'entre pas, compte tenu de son entrée régulière en France muni d'un titre de séjour italien et de sa demande de titre de séjour formulée en 2021 auprès du préfet de l'Indre ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 6 de la directive 2008/115/CE, dès lors que le préfet aurait dû le remettre aux autorités italiennes, et non l'obliger à quitter le territoire ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant refus de délai de départ volontaire méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public ;

- elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit, en ce qu'il a formulé une demande de titre de séjour ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire méconnaît les dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La clôture de l'instruction a été fixée au 29 janvier 2025 par une ordonnance du 13 janvier 2025.

Le préfet de police a produit un mémoire en défense le 13 mars 2025 qui n'a pas été communiqué.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la substitution, en tant que fondement légal de la décision attaquée, du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au 1° de l'article L. 611-1 du même code.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 et modifiée par le règlement (UE) n° 610/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ;

- la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bories,

- et les observations de Me Boamah, représentant M. A..., présent.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant indien né le 3 juillet 1989, est entré en France en 2021 selon ses déclarations. Par deux arrêtés du 17 août 2024, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de deux ans. M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler ces arrêtés. Il fait appel du jugement du 9 septembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier que le tribunal, qui n'est pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu, avec une motivation suffisante et qui n'est pas stéréotypée, à l'ensemble des moyens soulevés par le requérant. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai :

3. En premier lieu, d'une part, l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui le fondent et est ainsi suffisamment motivé. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen circonstancié de la situation de M. A... avant de prendre l'arrêté contesté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 12 de la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003 : " 1. Les États membres ne peuvent prendre une décision d'éloignement à l'encontre d'un résident de longue durée que lorsqu'il représente une menace réelle et suffisamment grave pour l'ordre public ou la sécurité publique. / 2. La décision visée au paragraphe 1 ne peut être justifiée par des raisons économiques. / 3. Avant de prendre une décision d'éloignement à l'encontre d'un résident de longue durée, les États membres prennent en compte les éléments suivants : / a) la durée de la résidence sur leur territoire ; / b) l'âge de la personne concernée ; / c) les conséquences pour elle et pour les membres de sa famille ; / d) les liens avec le pays de résidence ou l'absence de liens avec le pays d'origine. / 4. Lorsqu'une décision d'éloignement a été arrêtée, le résident de longue durée peut exercer un recours juridictionnel dans l'État membre concerné... ".

5. Il est constant que M. A... est titulaire d'une carte de résident de longue durée-UE, délivrée par les autorités italiennes le 3 février 2017 pour une durée illimitée. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé a été interpellé, le 16 août 2024, pour des faits de violences conjugales commis la veille, faits qu'il ne conteste pas sérieusement en se bornant à soutenir qu'il n'a pas fait l'objet d'une condamnation pénale et qu'il a subi des violences réciproques de la part de sa compagne. Compte tenu de la gravité et du caractère récent des faits qui lui sont reprochés, qui constituent une menace pour l'ordre public, il n'est pas fondé à soutenir qu'il était protégé contre l'éloignement par les dispositions citées au point 4.

6. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré ; (...) "

7. D'autre part, aux termes de l'article 21 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 : " 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des Parties contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres Parties contractantes, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de la Partie contractante concernée (...) ".

8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré sur le territoire français en dernier lieu le 26 janvier 2024, muni d'un titre de séjour de longue durée délivré par les autorités italiennes. Dans ces conditions, il doit être regardé comme justifiant de la régularité de son entrée sur le territoire français. Par suite, la décision du préfet de police ne pouvait être prise sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point.

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France, en dernier lieu, plus de trois mois avant la décision attaquée, et que ses démarches de régularisation effectuées auprès des services de la préfecture de l'Indre, qui ne peuvent être regardées comme une demande de renouvellement de titre de séjour, n'ont pas donné lieu à la délivrance d'un titre ou même d'un récépissé. Par suite, il entrait dans le cas prévu par les dispositions du 2° de l'article L. 611-1 qui, ainsi que les parties en ont été informées, peuvent être substituées à celles du 1° de l'article L. 611-1 dès lors que cette substitution de base légale ne prive l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

11. En quatrième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation (...) à la décision portant obligation de quitter le territoire français prévue à l'article L. 611-1 (...), l'étranger peut être remis, en application des conventions internationales ou du droit de l'Union européenne, aux autorités compétentes d'un autre État, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas prévus aux articles L. 621-2 à L. 621-7. / (...) ". Aux termes de l'article L. 621-2 du même code : " Peut faire l'objet d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne (...) l'étranger qui, admis à entrer ou à séjourner sur le territoire de cet Etat, a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 311-1, L. 311-2 et L. 411-1 (...) ". Il ressort de ces dispositions que le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et que le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre. Il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 621-1 et suivants, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 621-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 611-1. Toutefois, si l'étranger demande à être éloigné vers l'Etat membre de l'Union européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, ou s'il est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d'une "carte bleue européenne" délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat.

12. D'autre part, aux termes de l'article 1er de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : " La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu'au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l'homme ". L'article 2 de ladite directive prévoit que : " 1. La présente directive s'applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre. / (...) 3. La présente directive ne s'applique pas aux personnes jouissant du droit communautaire à la libre circulation, telles que définies à l'article 2, point 5), du code frontières Schengen. " L'article 3 de la même directive dispose que : " Aux fins de la présente directive, on entend par : [...] 2) "séjour irrégulier" : la présence sur le territoire d'un État membre d'un ressortissant d'un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions d'entrée énoncées à l'article 5 du code frontières Schengen, ou d'autres conditions d'entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre ; / 3) "retour" : le fait, pour le ressortissant d'un pays tiers, de rentrer - que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé - dans : / - son pays d'origine, ou / - un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou / - un autre pays tiers dans lequel le ressortissant concerné d'un pays tiers décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis ; / 4) "décision de retour" : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour ; [...] ". L'article 5 de ladite directive énonce que : " Lorsqu'ils mettent en œuvre la présente directive, les États membres (...) respectent le principe de non-refoulement ". Enfin, l'article 6 de la directive dispose que : " 1. Les États membres prennent une décision de retour à l'encontre de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5. / 2. Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre et titulaires d'un titre de séjour valable ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. En cas de non-respect de cette obligation par le ressortissant concerné d'un pays tiers ou lorsque le départ immédiat du ressortissant d'un pays tiers est requis pour des motifs relevant de l'ordre public ou de la sécurité nationale, le paragraphe 1 s'applique ".

13. Il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 24 février 2021 n° C-673/19, que tout ressortissant d'un pays tiers qui est présent sur le territoire d'un État membre, sans remplir les conditions d'entrée, de séjour ou de résidence dans celui-ci se trouve, de ce seul fait, en séjour irrégulier même si, comme en l'occurrence, ce ressortissant dispose d'un titre de séjour, en cours de validité, dans un autre État membre au motif que ce dernier lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire. En conséquence, l'Etat membre sur le territoire duquel ce ressortissant séjourne irrégulièrement est, en principe, tenu d'adopter une décision de retour lui enjoignant de quitter le territoire de l'Union, même s'il y a lieu de permettre à ce ressortissant, qui séjourne de manière irrégulière sur le territoire d'un État membre tout en disposant d'un droit de séjour dans un autre État membre, de se rendre dans ce dernier plutôt que d'adopter, d'emblée, à son égard une décision de retour, à moins que l'ordre public ou la sécurité nationale ne l'exigent. Toutefois, ce ressortissant ne peut être renvoyé dans son pays d'origine sous peine de méconnaître le principe de non-refoulement, qui est garanti à l'article 18 et à l'article 19, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Si ce ressortissant ne peut davantage être renvoyé vers un pays de transit ou vers un pays tiers dans lequel il aurait décidé de retourner volontairement et qui l'accepterait sur son territoire, et ainsi ne peut faire l'objet d'une décision de retour, la directive " retour " n'empêche pas l'Etat membre de procéder au transfert forcé de ce ressortissant vers un autre État membre dans lequel ledit ressortissant dispose du statut de réfugié.

14. En l'espèce, M. A... soutient qu'il avait vocation à être remis aux autorités italiennes en application des dispositions précitées des articles L. 621-1 et L. 621-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il bénéficie en Italie d'un droit au séjour illimité. Toutefois, d'une part, il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et sans que s'y opposent les dispositions des articles 1er à 6 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008, qu'une telle remise ne constitue qu'une faculté. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier, et en particulier des procès-verbaux d'interpellation de l'intéressé, qu'il aurait demandé à l'autorité préfectorale à être réadmis en priorité en Italie. Le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 621-1 et L. 621-2 dudit code doit ainsi être écarté.

15. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :/ 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) "

16. Compte tenu des faits énoncés au point 5, le préfet de police pouvait, au seul motif de la menace pour l'ordre public représenté par l'intéressé, refuser de lui accorder un délai de départ volontaire. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'erreur de fait, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire :

17. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

18. D'une part, ainsi qu'il a été dit, le comportement de M. A..., qui a été interpelé pour des violences conjugales, constitue une menace pour l'ordre public. D'autre part, si l'intéressé fait état d'une intégration professionnelle stable sur le territoire national, celle-ci n'est établie qu'à compter de l'année 2023 et ne peut ainsi être considérée comme ancienne. Dans ces conditions, M. A..., célibataire et sans enfant, n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaît les dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite les moyens doivent être écartés.

19. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Vidal, présidente de chambre,

Mme Bories, présidente assesseure,

M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, 16 avril 2025.

Le rapporteur,

C. BORIESLa présidente,

S. VIDAL

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24PA04196 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA04196
Date de la décision : 16/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Colombe BORIES
Rapporteur public ?: M. PERROY
Avocat(s) : BOAMAH

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-16;24pa04196 ?
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